2023 - jour 3 : Krešimir !

Arras film festival

lundi 6 novembre

À nouveau un bon petit early morning run pour commencer la journée, et cette fois-ci seule ce qui m'a permis d'improviser le circuit pour faire la durée souhaitée de mon petit programme d'entraînement. Il faisait dans les 8°c, la thermique était de rigueur même si pour les jambes le short long à double épaisseur suffit encore.

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C'était un moment doux et calme, malgré la circulation entrevue aux grands axes, de personnes qui partaient visiblement travailler.

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Il y avait quatre films à notre programme pour la journée : un vieux Tchèque qui dans mon souvenir (1)était drôle, un film croate que j'avais pris car lui aussi était censé être une comédie, l'idée étant de prendre courage en vue d'un quasi documentaire sur la population réfugiée dans le métro en Ukraine pendant les bombardements russes en 2022 (2). Et pour finir sur une note optimiste, dont de la part du réalisateur et de sa bande de comédiens je ne doutais pas, "Et la fête continue !" le nouveau film de Robert Guédiguian. 

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Trains étroitement surveillés
Jiri Menzel (Ostre sledovane vlaky, Tchécoslovaquie, 1966, 1h33)
avec Vaclav Neckar, Jitka Bendova, Vladimir Valenta, Josef Somr, Nada Urbankova
époque : pendant la 2ème guerre mondiale

J'avais le souvenir d'un film drôle, mais en fait s'il n'est pas dépourvu d'humour et de quelques scènes pétantes de poésie, dont un manteau récupéré comme si de rien n'était sur un porte-manteau après un bombardement, c'est surtout un drame avec toute son inéluctabilité. C'est émouvant et touchant. 
Et triste.
Et d'un très beau noir et blanc.
Et donc c'est l'histoire du jeune Milos, apprenti chef de gare et qui tente de devenir un homme accompli, mais bon c'est pas si simple. Et puis c'est la guerre.

 

Seventh heaven (Sedmo nebo)
Jasna Nanut 2023, Croatie, 1h28
Interprétation : Kresimir Mikic, Iva Jerkovic, Iva Mihalic, Niksa Butijer, Dejan Acimovic, Petar Ciritovic
Scénario : Jasna Nanut, Hrvoje Osvadic

Sur le thème rebattu de l'homme d'âge mur et que le corps commence à lâcher, qui trompe sa femme et mère de ses enfants avec une jeune personne qu'il fréquente de par son travail, Jasna Nanut fabrique une comédie sensible où l'on s'amuse autant qu'on est émues. Je n'avais pas prêté attention au fait que Krešimir Mikić était de la partie. Sa présence permet de rendre touchant le personnage qui sans lui serait simplement un mec lamentable de plus. 
Il a dans ce rôle un petit côté Nanni-Morrettesque, la séduction en plus (oui, je l'avoue, j'ai un faible ; il me rappelle sans doute quelqu'un). En apprenant qu'il était au générique, j'ai eu le sentiment de faire de belles retrouvailles avec un bien-aimé. Comment vas-tu depuis tout ce temps ?
Le rythme du film est bon, et la subtilité de sa fin une bonne surprise.
Pas un chef d'œuvre, pas inoubliable mais de vrais bons moments.

 

Photophobia
Ivan Ostrochovsky, Pavol Pekarcik
2023, Slovaquie, République tchèque, Ukraine , 1h11
Interprétation : Nikita Tyshchenko, Viktoriia Mats, Yana Yevdokymova, Yevhenii Borshch
Scénario : Marek Lescak, Ivan Ostrochovsky, Pavol Pekarcik
Documentaire scénarisé 
Habitants de Kharkiv réfugiés dans le métro au lendemain de l'attaque de l'Ukraine par la Russie en février 2022, ils vont y rester pour certains une dizaine de mois. On suit plus particulièrement deux enfants qui semblent amis, Nikita et Viki qui ont une douzaine d'années, assez grand pour comprendre les dangers, pas encore pour s'émanciper. On voit l'organisation de survie qui a été mise en place, la vie quotidienne (bien des gens quittaient cet abri chaque jour pour aller bosser). Il y a des moments doux, de bons moments entre les personnes et aussi d'autres temps de grande dureté. Et l'enfermement.
L'un des réalisateurs, présent, a expliqué lors du Q & A leur travail pendant de longs mois, d'abord pour aider puis filmer des bribes, puis filmer quelques moments (entre autre les jeux des enfants, leurs explorations sur les lignes inexploitées) plus scénarisés. Par exemples ils leur posaient une question et filmaient leurs réponses et réactions.
Film à la fois beau et fort, et qui permet de mieux percevoir ce qui se joue en Ukraine.

 

Et la fête continue !
Robert Guédiguian, 2023, France, 1h45
Interprétation : Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Lola Naymark, Robinson Stévenin, Gérard Meylan, Grégoire Leprince-Ringuet, Alice Da Luz, Pauline Caupenne
Scénario : Robert Guédiguian, Serge Valletti
Ariane Ascaride en politicienne qui travaille à l'hôpital comme infirmière, mère courage inlassable, grâce à elle on y croit à fond, alors que l'incorrigible optimisme de Robert Guédiguian sans elle ne passerait pas, ou peu.
Il y a des scènes de liens humains beaux et forts dont on donnerait n'importe quoi pour qu'elles soient de la vraie vie.
Globalement ce film est bon pour le moral, ou en tout cas s'efforce d'y être.
Et bien sûr il y a toute la bande habituelle autour du réalisateur, et c'est une équipe qui fonctionne à merveille.
Il est beaucoup question des immeubles effondrés à Marseille, si c'est un sujet sensible pour vous, autant le savoir à l'avance. 

(écrit les 08.11.23 et 09.11.23, tard)

 

 

(1) J'avais dû le voir il y avait longtemps, à la télé dans une diffusion de type "ciné-club".
(2) Non qu'ils aient hélas cessés depuis mais disons que le film a été tourné en 2022.


2023 - jour 2 : Un film japonais marquant, une comédie tchèque presque prémonitoire et un bon run le matin

Arras film festival

dimanche 5 novembre 

 

    Un bon petit early sunday morning run pour commencer, et ça faisait du bien, d'autant plus que si les sols étaient humides (sans doute venait-il de pleuvoir) il y avait un joli soleil par moment et une température plutôt clémente, de l'ordre de 10 à 12°c.

C'était un petit bonheur, tout juste assombri par le fait que le chantier dont est censé faire partie l'appartement que nous avons réservé est pour l'instant une zone d'Urbex laissée à l'abandon. Ça n'augure rien de bon.

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Courir moins d'une heure nous a laissé le temps de prendre un bon petit-déjeuner et tout notre temps (ainsi Le Joueur de Pétanque a pu se livrer à son passe-temps favori après la pétanque : aller faire des courses) avant le premier film pour nous de la journée

 

 

"A man" Japon, 2022, 2h11 (CMM 0/6 ; une scène d'accident du travail et deux scènes sanglantes)
Kei Ishikawa
années dans le film : 2005 jusqu'à récentes
Une femme qui tient une papeterie et a un fils survivant d'un premier mariage que la mort de son frère par maladie avait brisé, rencontre un homme timide et renfermé mais qui dessine fort bien à ses heures perdues. Ils vivent heureux quelques temps. Seulement un an après la mort accidentelle de celui-ci, elle apprend que l'identité sous laquelle elle connaissait son mari n'était pas la bonne. Un jeune avocat auquel elle fait appel tente de mener l'enquête.

Ce film est un régal, on voisine le polar, mais on reste à la hauteur des gens. On y apprend que le Japon possède les même extrémistes que la France, soit dit en passant.

"Hotel Pula", 2023, Croatie, 1h33
Andrej Korovljev
Lors de la guerre d'éclatement de l'ex-Yougoslavie, des réfugiés bosniaques se sont retrouvés hébergés dans des hôtels de la côte Adriatique. L'un d'entre eux y est depuis trois ans et qui végète dans une amnésie protectrice, lorsqu'une jeune femme du coin déboule dans sa vie par le fruits de croisements successifs. Très subtil, très bien interprété, beaucoup plus fin que ce à quoi on pouvait s'attendre au lu du synopsis.
Fun fact, entre temps l'Hôtel Pula est redevenu un 3 *** de la côte croate.
Le film est inspiré d'un roman du même nom

Ensuite nous avons pu repasser au logis manger et dormir un peu. Ça n'était pas un luxe.

"Monsieur vous êtes veuve",Tchécoslovaquie, 1971, 1h37
Vaclav Vorlicek (Pane Vy Jste Vdova)
Comédie Tchèque complètement déjantée qui traite de la transidentité avant même que le concept n'existât. C'est bourré de rebondissements et les acteurs s'en donnent à cœur joie, puisqu'ils doivent par moment incarner quelqu'un d'autre qui serait arrivé dans le corps d'une encore autre personne, mais ressemblerait à celle-ci. Science fiction (du moins encore un peu pour l'instant) farfelue et rythmée.

"Bosnian pot", 2023, Croatie, Autriche, Bosnie-Herzégovine , 1h43
Pavo Marinkovic
Un écrivain et auteur de pièces de théâtre qui avait eu son heure de gloire à Sarajevo avant la guerre, a refait sa vie en Autriche, mais risque d'être expulsé bientôt car la guerre qui faisait de lui un réfugié a pris fin et que par ailleurs et puisqu'il a pratiquement cessé d'écrire, il ne peut plus prouver son statut d'artiste. Un théâtre en difficulté va peut-être lui sauver la mise en produisant l'une de ses pièces.
Film attachant mais le rythme trop lent nous en détache. L'acteur principal a fini par m'agacer, du moins son personnage.
Loin d'être un navet c'est typiquement le film auquel il manque "un petit quelque chose" pour être vraiment réussi.
L'accent forcé en allemand du personnage principal, caricatural, m'a prodigieusement agacée ; le gars répète plusieurs fois qu'il est là depuis 12 ans, il avait donc eu le temps d'apprendre. D'autant plus que ses compatriotes auxquels il a affaire, parlent l'allemand avec accent et certaines expressions particulières mais de façon beaucoup plus plausible et limitée. 

 


2023 - jour 1 : Un arc-en-ciel d'accueil

Arras film festival

samedi 4 novembre 

 

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Un trajet sans encombres même si une nouvelle tempête (Domingo) passait plus ou moins par là, ce qui nous aura valu sur l'autoroute des passages de grand soleil sur ciel noir, puis une fameuse drache, mais l'ensemble des conducteurs a su se montrer prudent. Nous sommes arrivés dans la ville par le côté du chantier du programme de ce qui est censé être notre futur pied-à-terre, mais c'était à l'arrêt. Ce qui a un peu douché notre enthousiasme.
D'autant plus que Le Joueur de Pétanque, au prétexte de se garer le plus près possible de notre location d'hébergement, tenait absolument à enfiler un sens interdit et se garer sur la place, tout autant interdite. J'ai dû hausser la voix pour qu'il entende raison. Parfois les hommes de 60 ans ont des bouffées comportementales d'adolescents de 15, c'est fascinant.

En attendant l'heure de pouvoir occuper la chambre, nous avons fait une brève collation dans le salon de thé sur la Grand Place. De façon amusante, nous avions la même, numéro 5, que l'an passé.

Celui qui m'accompagne est parti garer la voiture plus loin et effectuer quelques courses tandis que je préparais les billets afin que nous n'ayons plus que nos téléfonini à présenter avec le QR code de la séance concernée.

Le temps ensuite de regarder une vidéo de la NTV sur un semi-marathon et c'était déjà l'heure de filer vers notre premier film de ce festival-là.

"Backwards" Pologne, 2022 (CMM 2/6 ; deux ou trois scènes de vomi)
Jacek Luzinski
années dans le film : 1991 jusqu'à 20 ans après.


Une jeune femme attend un enfant d'un amoureux qui semble ne pas l'être tellement. Sa sœur avec laquelle elle vit depuis la mort de leurs parents la pousse à mener sa grossesse à terme. Seulement le petit finalement né se révèlera pas tout à faire conforme au modèle général.

Le film devient alors le parcours du combattant de la mère pour tenter de faire suivre à son fils, brillant sur certains plans comme savent l'être les héros handicapés dans les films, une scolarité classique.

À deux réserves près (le revirement bienveillant de l'un des personnages et l'absence de vieillissement de l'héroïne et de son anciens amoureux), ce film est formidable, qui nous fait comprendre bien des enjeux si nous avons eu la chance de n'y être pas confrontées personnellement.
Le réalisateur, présent en fin de séance, a indiqué avoir tenu à filmer avec des enfants qui présentaient le même trouble que le personnage, ce qui fait qu'on est vraiment dedans.
Les actrices et acteurs, globalement, sont extraordinaires. La jeune mère-malgré-elle d'un petit pas-comme-tout-le-monde est particulièrement bien incarnée.

Quelques scènes m'ont bouleversée, pas forcément les plus spectaculaires.

 

"Good bye Julia" Soudan, 2022 (CMM 0/6 ; deux ou trois scènes de violence (émeutes, guerre civile))
Mohamed Kordofani
années dans le film 2005, 2010

La rencontre entre deux femmes que tout oppose (classes sociales et religions dans un pays au bord de la scission), comme suite à des circonstances dramatiques et dont les conséquences traversent les années.
Difficile d'en dire davantage sans gâcher le film pour qui ne l'aurait pas vu.
Les femmes parviennent presque à sauver la paix, les hommes ne pensent qu'à utiliser des armes. Le film est tout sauf caricatural et simplistes, tous les personnages ont leur profondeur, leurs moments de beauté, leurs moments de piètre voire meurtrier, comportement.
Donne envie d'en apprendre davantage sur le Soudan et son histoire récente.
Magnifique et dans la période actuelle de guerres partout particulièrement bienvenu. 

 

Discuté ensuite avec les camarades de ciné-club D. et H. et un autre qui passait avec sa ou l'une de ses petites-filles (adolescente et ravie). Le Joueur de Pétanque a eu soudain une bouffé de rabat-joie-tisme alors que nous nous félicitions de la qualité des films vus dans la journée, comme quoi ça faisait trop pour lui et qu'il saturait et puis quel intérêt, et qu'il y avait une part de voyeurisme. C'est le même qui les années passées se rajoutait des séances parce que j'avais volontairement prévu des respirations, afin de caler repos et entraînements. Bizarre. Je crois que le film polonais dans lequel les hommes sont dépeints comme ils sont trop souvent (1), fuyant dès qu'il y a quelque chose de lourd à assumer qui nécessite de mettre sa propre vie entre parenthèse afin de faire face, a touché une corde sensible et que c'est à ça qu'il réagissait. On peut toujours rêver. 

(1) Je connais personnellement d'émouvants contre-exemples, notamment pour faire face à des maladies graves du conjoint, l'âge venant. Seulement ils sont loin de représenter la tendance majoritaire, surtout lorsque ce sont les enfants qui ne sont pas conformes.
 

 


2022 jour 5 : La journée des films lents

Arras film festival

mercredi 9 novembre 

Nous avions un film prévu à 09:30 et j'aime beaucoup entamer la journée comme ça, par un film qui, s'il nous réussi, donnera une belle couleur, d'emblée au reste des heures.

 

"Metronom" d'Alexandru Blec, Roumanie, 2022 (1h42) (CMM = 0 ; la violence est psychologique, essentiellement)
avec Mara Bugarin, Serban Lazarovici, Vlad Ivanov, Mihai Calin, Andreea Bibiri, Alina Brezunteanu, Mara Vicol
09:30 S5

En Roumanie en 1972 pendant une finale de la coupe Davis, des lycéens se retrouvent chez l'une de leur camarade de classe et écrivent une lettre à l'animateur de l'émission de radio Metronom 72 sur Radio Free Europe qu'ils écoutent clandestinement. Ana s'y rend dans l'espoir de revoir Corbin son amoureux, avant que celui-ci ne quitte avec sa mère la Roumanie pour rejoindre à l'étranger leur père et mari. Seulement elle avait d'abord annoncé à celui-ci qu'elle ne viendrait pas.

On pourrait ainsi résumer l'histoire : si vous dites à quelqu'un que vous aimez que vous ne vous rendrez pas quelque part, ne changez pas d'avis. Surtout en dictature.

Film un brin excessivement lent, mais à part ça parfait : les acteurs, les ressorts narratifs, la façon dont c'est filmé, la bande son (géniale : toute la bonne musique des early seventies qui leur était interdite), le choix des plans. Des scènes de fêtes adolescentes sont de merveilleux plans séquences.

Évidemment, ayant failli avoir une cousine roumaine dans ces années-là, je ne pouvais qu'être profondément émue par le sujet. Ils essaient simplement d'avoir une jeunesse normale dans une société qui ne l'est pas.

Au sujet du film, son réalisateur (pour Cannes, où le film était dans la sélection Un certain regard)

 

Séance suivante à 14:00, nous avons eu le temps de rentrer déjeuner et même de cuire des patates et pour moi de piquer un somme.



"La Montagne" de Thomas Salvador, France, 2022 (1h55) (CMM = 0 ; attention toutefois pour les personnes sujettes au vertige)
avec Thomas Salvador, Louise Bourgoin, Martine Chevallier, Laurent Poitrenaux
14:00 C2 salle pleine - échanges à l'issue de la projection en compagnie du réalisateur et de l'actrice principale 

C'est l'histoire d'un gars qui, venu vers Chamonix pour une présentation commerciale de son boulot, décide de rester le week-end faire un tour en montagne, et ne parvient plus, ou du moins pas tout de suite, à redescendre.
Là-haut il fera la connaissance d'une jeune femme travaillant dans un restaurant de très haute altitude et parviendra à approcher la montagne au plus près, notamment grâce à d'étranges lueurs qui ressemblent à des blobs de laves mais qui ne brûleraient pas.
On retrouve les thèmes chers à Thomas Salvador : du quotidien très quotidien mêlé à un fantastique empreint de poésie ; l'ensemble serti dans une solide conscience écologique. Le film a été tournée en haute altitude, très peu d'effets spéciaux viennent du numériques et si les lueurs étaient censées représenter un danger c'est raté : on dirait de petits animaux affectueux sans queues ni têtes. L'histoire d'amour échappe à la niaiserie et le personnage féminin a une intervention courageuse et sportive et ça va de soi comme ça devrait toujours être le cas dans les films. Rien n'est en trop, pas de gras dans les scènes (en particulier, la vie d'avant est visualisée en trois séquences qui sont exactement ce qui est nécessaire pour comprendre mais rien de trop), les dialogues sont d'une justesse parfaite, sans un mot de trop. 
Je suis parfaitement la bonne cliente pour cet univers là.
Mais comme on était en début d'après-midi, et que le film prend tout son temps (c'est ce qui fait son charme, aussi), force est de constater que j'ai de loin en loin dormi. Les scènes d'exploration intérieure de la montagne (appelons ça comme ça) m'ont en revanche maintenue éveillée, portées qu'elles sont pas une très forte intensité d'échange et de beauté.

En cherchant en rentrant à en savoir un peu plus j'ai retrouvé la mention d'un court-métrage déjà un peu ancien ; et une des raisons qu'avait sans doute le réalisateur d'être particulièrement ému lorsqu'une spectatrice lors du Q & A a dit en substance J'étais fâchée avec la montagne qui nous a pris mon petit frère en 2005, mais à voir votre film, un peu moins.

un Q & A d'il y a cinq mois

 

À nouveAu retour à l'hébergement avant la projection suivante. J'ai dû faire un effort, soutenu par le fait que les réveils sont trop pénibles après ce type de petits sommes, pour ne pas aller à nouveau au lit.

 

Ciné concert "Paris qui dort"de René Clair, France, 1923 (1h) précédé de quelques courts-métrages d'animation conçus dans le cadre d'une rencontre croisée interdisciplinaire d’artistes portugais et français.
conservatoire, 19:00

L'ensemble du ciné concert durait trop longtemps, ce qui empêchait les personnes qui avaient prévu des films à 21:30 de s'y rendre. Or parmi les courts métrages d'animation beaucoup étaient des travaux scolaires, entre ennuyeux et pénibles ; trois présentaient quelque chose de novateur, intelligible et qui apportaient quelque chose ; un jouait la carte d'être insupportable pour les spectateurs (et l'accompagnement sonore de celui-ci était au diapason). Bref, la première partie, je m'en serais volontiers passée sauf à ce qu'une sélection auparavant ait été effectuée.

Le film titre était en tout point remarquable ainsi que  l'accompagnement par Jacques Cambra et deux jeunes musiciens (ou trois ? en l'écrivant un doute me vient) était en tout points remarquable. Un Paris de confinement, presque. Et furtivement, la ville telle qu'elle était il y a un siècle, ce qui était impressionnant. J'aimerais bien qu'on rendre Paris à une locomotion équidée.  Chevaux et vélos, voilà qui me plairait.

Ce fut au point que lors d'un dîner chez Volfoni (il était trop tard pour voir un autre film mais pas pour aller dîner), nous nous sommes plongés dans des recherches sur les ascenseurs de la Tour Eiffel et sur le Paris des expositions universelles de 1889 et 1900 (et entre autres les bâtiments construits puis détruits puis d'autres reconstruits à cet effet).


2022 jour 4 : a good swim, and two movies

Arras Film Festival

mardi 8 novembre 

Je n'avais prévu aucun film en journée, mais d'aller nager, d'écrire et de me reposer.
Je suis parfaitement parvenue à remplir les points un et trois, j'ai vraiment fort bien dormi dans l'après-midi. Mais je n'ai pas écrit.
Le Joueur de Pétanque pour sa part est allé voir deux films d'actions, un sur des combats du Nil et l'autre avec Sean Connery.
La piscine était ouverte au public entre midi et deux, un peu de monde mais pas trop pour être gênée. J'ai nagé 1500 m lentement (500 br, 1000 cr en tentant de m'appliquer, et puis 100 de cool down avec un peu de dos en m'étirant).
Puis je suis rentrée à l'appartement, il faisait doux et je me sentais bien. Je suis passée par le chantier où ça travaillait (démolition de la partie du bâtiment industriel qui ne doit pas rester).
Un hasard de youtube m'a fait découvrir les speed cubers et entre deux sommeils, avant et après le retour de JF, j'ai regardé des videos fascinantes.  

 

"Klondike" de Maryna Er Gorbach, Ukraine, 2022 (1h40) (CMM = 0, mais certaines scènes d'une grande dureté, ainsi qu'un accouchement)
avec
Oxana Cherkashyna, Sergiy Shadrin, Oleg Scherbina, Oleg Shevchuk, Arthur Aramyan, Evgenij Efremov
19:00 S1

Juillet 1914 vers Donetsk un couple de fermiers dont la femme est à deux mois d'accoucher se prend la guerre sur la gueule, et aussi un avion. Le frère de la future mère passe tenter de la tirer de là, au sens littéral, lui est patriote Ukrainien tandis que le futur père a des accointances avec les séparatistes pro-russes, sans l'être plus que ça (il voudrait : la paix et qu'on la lui foute). Par moment il y a un peu d'humanité, par exemples lorsqu'ils véhiculent un couple de néerlandais venus se recueillir sur la carcasse de l'avion abattu, mais globalement c'est la barbarie de la guerre à son meilleur niveau. D'un instant à l'autre tout peut arriver, surtout le pire. La vie d'une femme compte fort peu, elle n'intéresse que pour ses capacités de procréation. Elle reste toutefois mieux traitée qu'une vache.
J'ai apprécié les plans larges qui permettent une vue globale sur ce qui survient, celle que précisément les protagonistes n'ont pas ; et ne sais toujours pas distinguer à tous les coups le Russe de l'Ukrainien.
La scène de l'accouchement m'a laissée dubitative, mais disons que peut-être qu'en de telles circonstances paroxistiques ça pourrait peut-être se passer comme ça.
En fait le point du film qui nous laisse un peu en dehors c'est de comprendre pourquoi au moins elle ne part pas. Car plusieurs fois ils en sont empêchés mais à d'autres moments ce sont eux qui renoncent, y compris après la disparition de leur vache. Ça m'a paru bizarre aussi, une ferme sans chien.
La guerre actuelle était déjà là, mais ça, on le savait.



"Les grandes ondes (à l'ouest)" de Lionel Baier, Suisse, 2013 (1h24) (CMM = 0, un peu de sexe mais gentillet)
avec
Valérie Donzelli, Michel Vuillermoz, Patrick Lapp, Francisco Belard, Jean-Stéphane Bron
21:30 S3
Comédie bien troussée, avec même un brin de comédie musicale, sur fond de vraie révolution qui s'était bien passé (en avril 1974 au Portugal), les actrices et acteurs donnent l'impression de s'amuser avec leur personnage, il y a un vieux de la vieille de la radio au passé glorieux mais à la mémoire chancelante, un jeune Portugais qui parle français comme dans les vieux Pagnol dont son enfance a été bercée, Pagnol qui meurt ces jours-là, un technicien radio qui connaît son boulot, une jeune animatrice et journaliste ambitieuse, un directeur de radio qui tente de ménager la chèvre et le choux et se prend dans les fils de son téléphone, car 1974, quand même.
Quand l'actualité est trop écrasante, c'est le type de film qui permet de prendre un bol d'air, et ça n'est pas rien.

Entre les deux films nous avions eu à peine le temps de rentrer avaler quelques plats du traiter italien voisin que JF avait eu la bonne idée d'aller chercher en fin d'après-midi. Après le film suisse, nous sommes allés boire une bière sous le chapiteau, je m'attendais presque à croiser Jean-Stéphane mais non. Le DJ, Francis, était excellent qui a démarré sur le meilleur des années 80 (Flashdance, Eurythmics, Fame, Abba ...) et nous avons dansé, même un peu à deux grâce à un jeune homme qui est allé chercher JF qui de ce fait n'a pas osé se faire prier.
Bref, grâce au festival, et au logis de proximité (c'est très cool de pouvoir rentrer en coup de vent entre deux films), encore une bonne journée.
Et je sens l'énergie qui commence à me revenir.
Pendant ce temps sur la Place des Héros un marché de Noël est en cours de construction.


2022 jour 3 : une après-midi de sommeil

Arras Film Festival

lundi 7 novembre 

Le premier film n'était qu'à 11:30, j'en ai profité puisque le programme d'entraînement de cette semaine comportait pour commencer une séance d'endurance fondamentale de 30' d'aller courir dans la ville, vers le fort Vauban, un parc non loin dont je me souvenais, et puis la fontaine aux lions, là où j'avais reçu lors d'un premier mai un appel de FDK qui m'avait donné courage et espérance. Je ne parviens pas à me faire au fait qu'il soit mort. Que plus aucun échange ne sera jamais possible.
Pour autant, cette demi-heure de course à pied, sous le soleil, en croisant des scolaires qui font leur séance, avec l'éternel panel des élèves faisant du sport dans le cadre scolaire, des déjà sportifs aux qui-détestent-ça en passant par ceux qui s'efforcent d'être de bons petits soldats, mais qui sans entraînement régulier ne peuvent pas faire grand chose, me rend allègre, je me sens bien.
Une douleur aux tendons de la cheville droite me pousse à une escale dans une pharmacie, afin d'acheter du baume du tigre, je pense au passage du "Sac à main" sur l'achat du peigne dans une pharmacie à Arras, et ne sais plus si c'est de mon histoire qu'il était question ou de celle de Marie elle-même.
D'une certaine façon, qu'il s'agisse de F ou elle, j'ai l'impression qu'ils sont ici un peu aussi avec moi.
Il me reste ensuite tranquillement le temps de me préparer pour la séance.

 

"La passagère" d'Andrzej Munk, Pologne 1961-1963 (0h59)(CMM = 0)
avec Aleksandra Slaska, Anna Ciepielewska, Jan Kreczmar, Marek Walczewsk
11:30 S3

Il est dit dans le film lui même qu'Andrezej Munk est mort accidentellement avant d'avoir pu achever son œuvre. Ce qui semble avoir fait que les survivants ont décidé d'en faire un film comme La jetée, une voix off sur des passages de photos enchaînées et d'autres passages qui sont filmés. C'est encore plus fort comme ça que si les séquence "croisières" étaient achevées et parlées. Le noir et blanc est splendide et la netteté des visages stupéfiante. 
L'histoire est terrible, une femme, Liza, sur un navire de croisière qui la ramène son mari et elle en Europe dans les années 50 (je crois) croit reconnaître une détenue d'Auschwitz qu'elle avait contribué à sauver alors qu'elle était surveillante SS. Elle s'en ouvre à son mari un Américain (du sud, rencontré après guerre), lequel ignorait son passé. Les parties filmées sont le récit de la vie au camp. Les scènes sont d'un réalisme glaçant. Et d'autant plus poignantes qu'elles concernent les femmes, qu'on évoque moins : il y eut bien des films de prisonniers hommes glorieux mais les femmes sont assez délaissées des fictions sur ce thème. C'est si effarant qu'on ne comprend pas tout, ou que trop bien : ainsi le gars chargé de remplir les réceptacles pour les cristaux de gaz des pseudos douches d'en arrivant, les enfants marchant vers leur mort dès l'arrivée, le fait que le camp était si grand qu'il fallait y circuler, pour les responsables, à vélo ; la gestion énorme des objets dérobés aux populations spoliées (je n'y avais guère jusqu'ici songé, en dehors des cas d'œuvres d'art ou de meubles précieux dont les récupérations reviennent de loin en loin aux informations ; je n'avais jamais songé à la gestion des stocks de poussettes, par exemple).
L'ancienne responsable tente de se persuader qu'elle s'est montrée la plus humaine possible, que peut une personne dans une entreprise industrielle de destruction ? On voit à quel point au camp tout se paie, tout n'est que bref soulagement en échange de lourdes contreparties, certains éléments font penser au management moderne (à l'énorme différence que dans les entreprises actuelles on risque un licenciement et pas sa vie, ou rarement). Le film montre bien combien l'horreur et la mort peuvent débouler à chaque instant, y compris après des moments presque supportables - on soigne quand même un peu des gens, puis à peine après, on les tue pour une broutille, un soupçon -.
Une classe de lycéens assistait à la projection, je me suis demandée comment ils pouvaient percevoir une telle œuvre. Nous sommes d'une génération de 20 ans après (c'est rien, 20 ans), avons grandi entourés d'adultes qui "avaient connu", voire de survivants (silencieux, le plus souvent), cet indicible dès que l'on grandissait nous était familier, pas moins violent, mais nous savions. À des jeunes de maintenant, une telle atrocité du quotidien, un massacre si soigneusement industrialisé, peut-il être plausible ? Un tel film à sa reconstitution appliquée, peut-il sembler être autre chose qu'une violente dystopie de fiction ?

J'ai retenu le numéro de matricule de Marta : 13417
Fut-il celui d'une vraie détenue ? D'une détenue que qui faisait le film avait personnellement connue ?

 

Il m'aura fallu l'après-midi pour récupérer, malgré un moment passé à faire les courses dans un établissement produits frais et bio, déjà repéré l'an passé, et qui fut un moment de calme, de vie paisible.
Pour la sieste je me suis amusée à regarder ce que proposait la télé locale, un bouquet de chaîne Samsung TV dont je n'avais jamais entendu parler, et l'une d'elle qui proposait des grands classiques. Alors j'ai tenté de revoir M le Maudit et comme presque à chaque fois que j'ai tenté de voir ce film, me suis endormie (le film n'y est pour rien, c'est que mes tentatives ont toutes lieu dans des moments d'extrême fatigue). Peut-être qu'à force les pièces du puzzle se complèteront et que j'aurais une idée de l'œuvre.

Finalement il fut vite 19:00 et temps d'aller voir le film prévu suivant.

 

"La reconstitution" de Lucian Pintilie, Roumanie, 1968 1h38
avec George Mihaita, Vladimir Gaitan, George Constantin, Emil Botta (1h37)(CMM = 0)
19:00 S5

Dans une sorte d'improbable buvette près d'un stade de foot - dont on entend les clameurs tout au long du film sauf en sa dernière scène - et d'un barrage, est tournée sous l'égide d'un étrange procureur, à la fois soucieux de son pouvoir et de se tremper les pieds dans l'eau, une reconstitution d'une bagarre entre deux jeunes, lesquels étaient bourrés lors des faits, mais doivent en acceptant le tournage d'un film pour l'édification de la jeunesse (où seront mis en scène leurs méfaits afin de montrer comme c'est moche) racheter leur faute et leur liberté. 
Sauf que plein de petits trucs se passent mal, une jeune fille en maillot de bain traîne autour d'eux, sans s'habiller mieux sauf à l'extrême fin (si quelqu'un qui a vu le film sait nous expliquer pourquoi, à part pour le male gaze, nous sommes preneurs, sa persistance dans la tenue alors que tous les autres personnages sont pleinement vêtus, et qu'elle ne nage qu'au début, met un certain malaise), et que finalement la violence, trop bien re-mimée aura une conséquence funeste.

George Mihăiță est éblouissant dans le rôle d'un gentil petit délinquant un brin azimuthé façon Keith Moon et qui finira mal.

J'ai adoré le côté, On se demande sans arrêt où ils veulent en venir, chaque scène est un bijou en soi, les portraits sont somptueux. Des dialogues sont drôles. Le fait de faire rejouer aux délinquants mêmes leur délinquance. La fin tragique, alors même que les dirigeants sont déjà partis (sans se soucier que leurs acteurs d'un jour allaient bien, tournage terminé). Le match de foot et la foule en retour du stade à la fin.

Bref, à mes yeux une pépite.
Comme nous avons croisé un couple d'amis dans la salle puis en sortant, l'honnêteté m'oblige à préciser que mon enthousiasme n'est pas universel. Sans doute que pour beaucoup de personnes, le récit est trop à faux rythme et fort destructuré.

Je sais qu'un certain nombre de scènes reviendront me rendre visite, un paquet de mois encore après.

 

Retour maison juste après le film, à peine le temps d'échanger quelques mots avec nos amis du ciné-club croisés dans le hall du Mégarama.
Le joueur de pétanque s'est occupé de préparer un petit dîner (poisson déjà préparé, riz à cuire), tandis que j'écrivais ces chroniques, du moins je commençais.

 

 


2022 jour 2 : 3 films et une séance de course à pied

Arras Film Festival

dimanche 6 novembre 

 

Pour commencer 1h10 de courir sous la pluie, le long de la Scarpe avec un peu d'une sorte de visite de chantier (ou plutôt jeter un coup d'œil). Une partie de l'ancien chemin de halage est désormais bituminée, pour courir c'est moins bien. 
Nous croisons les sons d'une compétition de canoë kayak et une construction bien avancée d'un nouveau club nautique.
Le nombre d'oiseaux d'eau est impressionnant. 
Je cours avec mes nouvelles Saucony, qui m'apportent une réelle aisance, je crois que j'ai trouvé le modèle qui convenait à mes pieds. J'ai des envies de marathon.
Dans un an ?



"La famille Asada" de Ryôta Nakano, Japon 2020 (2h07) (CMM = 0)
14:00 S1

Film de facture classique, linéaire, belles images, belles reconstitutions.
Pour autant, pas un seul instant d'ennui, un profond coup de cœur. 
Dans une famille de la classe moyenne, le frère cadet se découvre très jeune une vocation de photographe. Comme il est né au sein d'une famille aimante, avec un père peu conformiste, qui veut avant tout le bonheur des siens, un peu tout le monde l'aide, lui qui a le don, le regard, les idées, mais pas l'ambition. Il se retrouve à monter tout une œuvre de photos de familles mettant en scène leurs rêves, leurs désirs, l'amour pour l'un des leurs (par exemple un enfant malade).
Alors que ça commence à marcher pour lui survient mars 2011 et le voilà à aider les sinistrés à tenter de retrouver leurs photos de famille.
On rit, on pleure, on s'attache.
Moi qui ai ce rapport à la photographie, qui suis celle qui ne figure pas beaucoup sur les photos car c'est moi qui les prends, j'ai pleuré longuement. Comme un soulagement d'être enfin comprise.
C'est un feel good movie très universel et pas niaiseux pour un sou.

Tsu, Tokyo, Nozu ... des années 1990 aux années 2020

"The banshees of Inisherin" de Martin McDonagh, Irlande / Royaume-Uni 2022 (1h49) (CMM = 0, mais quelques scènes gore), avec Colin Farrell, Brendan Gleeson, Kerry Condon, Barry Keoghan, Pat Shortt
17:00 C2 (avec un problème sur l'horaire, annoncé 16:30 sur certains documents, 17:00 sur d'autres)

Film de belles images bien léchées, sauf quelques scènes d'une rare violence soudaine(s) ; belles musiques.
Un vieux violoniste à ses heures rejette soudain de façon inexpliquée l'amitié d'un autre insulaire plus jeune et très gentil, lequel tout de douleur et d'incompréhension, fini par n'être plus gentil du tout. L'artiste musicien se met à jouer les Van Gogh (Vincent), la sœur du personnage joué par Colin Farrell (qui en fait des caisses pour jouer le gars légèrement limité) tente de sauver sa peau, et le jeune Bary Keoghan incarne un jeune un peu considéré comme l'idiot du village, avec le brio de Johnny Depp dans Gilbert Grappe.
J'en attendais peut-être de nouvelles idées pour tenter de comprendre les gens qui rompent sans raison apparentes une très grande amitié, en cela c'est décevant : celui qui quitte le fait pour récupérer du temps de cerveau disponible à ses créations musicale et parce qu'il n'en peut plus de l'ennui des conversations de son vieux pote.
Il y a bien sûr une allégorie sur la guerre civile irlandaise, mais on ne pige pas forcément tout. L'ambiance est celle d'un conte sombre. 
Très bon film, seulement de là à parler de chef d'œuvre comme certains, il y a à mes yeux plutôt loin. Mais c'est sans doute un point de vue féminin que l'escalade de la violence à laquelle on assiste intéresse moins que ne l'eût fait une analyse psychologique tout en finesse des motivations profondes de ces personnages.

Une île imaginaire proche de l'Irlande, 1923

 

Le film nous ayant malgré tout ouvert l'appétit et pour ma part donné une solide envie de déguster une Guinness, nous allons Au bureau, qui hélas n'en a pas, ni non plus du bon vieux Welsh, les traditions se perdent. Je tente un cholestérol suicide malgré tout, avec une sorte de croque-monsieur aux fromages renforcés par du Philadelphia - note pour une prochaine fois : oublie, ça n'est pas pour toi -. Ce qui est cool c'est d'être logés à deux pas (littéralement, ou plutôt huit) et de pouvoir remonter se reposer avant le film de fin de soirée.

 

"Sick of myself" de Kristoffer Borgli, Norvège  2022 (1h35) (CMM = 0, mais beaucoup de sang)
avec Kristine Kujath Thorp, Eirik Sæther, Fanny Vaager, Fredrik Stenberg Ditlev-Simonsen, Sarah Francesca Brænne
21:30 S1

Une jeune femme, Signe, se rend volontairement malade en ingérant de fortes doses d'un médicament russe toxique, son but ultime étant d'attirer l'attention sur elle. Elle n'y parvient que trop bien et se retrouve au bord de la mort, mais effectivement pourvue d'un petit nuage de notoriété.
Humour nordique glacial, sur moi ça marche assez bien, mais je ne le conseillerais pas au monde entier. 
Anders Danielsen Lie tient un rôle médical qui lui sied, dans une scène de "rêves éveillés" que fait la jeune femme et qui émaillent le film (sans lui faire perdre de sa linéarité, ce n'est pas l'un de ces films où l'on est perdus).
Belle critique de la société du narcissisme dans laquelle nous évoluons. 
Jolies banderilles sur le monde de l'art contemporain.
Les dégâts de la pseudo maladie (sans doute inspirés des dégâts de la drogue dite "Crocodile" dont il fut question il y a quelques annéees) sont pénibles à voir, mais l'ensemble est fort bien troussé.

Oslo, années 2020

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2022 jour 1 : Pierre, Clovis et plus tard Mario

Arras Film Festival

samedi 5 novembre 2022

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C'est reparti pour un tour, mais avec un nouvel élan. Fini les chambres un peu étranges, mais non sans charmes, du vieux gite près de la gare, fini les contrôles de pass sanitaires, fini les billets de papier, nous montrons nos téléfonino et puis c'est tout.

Nous avons l'impression de retrouver un chez nous. 
Le logis que nous louons cette année a son entrée place des Héros, et c'est assez génial d'être au cœur de l'action. 
Il est bien équipé, neuf, confortable.

Premier repas pris en arrivant, dans une pizzeria bonne, 5 rue de la Housse et accueillante même aux arrivants tardifs.

Pour cette première journée, deux films.



"La couleur de l'incendie" de Clovis Cornillac, France, scénario de Pierre Lemaître d'après son propre roman (ce que j'admire).
18:00 C1 salle pleine avec Clovis Cornillac et Léa Drucker présents à la fin

Je suis mauvais public pour les reconstitutions historiques (1) et les numéros d'acteurs connus, autant dire que c'était pas gagné. C'est du très beau boulot, à n'en pas douter, et je ne me suis presque pas ennuyée, ce film a donc bien des chances d'avoir bien du succès. Et on peut pardonner aux acteurs d'en faire un peu trop tant on voit qu'ils jubilent (ainsi Poelvoorde imitant de Funès, allez).
Clovis Cornillac, interviewé par Rémi, nous explique que rencontrer Pierre Lemaître était beaucoup mieux que rencontrer Bruce Willis et nous le croyons volontiers.
Paris, Berlin
années 1930

 

"Nostalgia" de Mario Martone, Italie 2022 avec Pierfrancesco Favino dans le rôle titre.
21:30 S1

C'est Napoli en beauté, une balade lente mais non sans danger, et même s'il n'y a aucun suspens, cette chronique d'une mort annoncée nous emporte. L'acteur principal cabotine un micron trop, la scène des retrouvailles entre anciens amis d'enfance dont l'un a viré big mafieux est une scène méritant de devenir culte, les retrouvailles avec la très vieille mère sont émouvantes à souhait, le prêtre voyou est magnifique. Bref, ce festival commence bien. On retiendra des dialogues bien menés, ainsi celui qui ose dire au chef mafieux, - Je suis revenu à Naples, c'est ici chez moi. Je veux mourir ici. Et l'autre du tac au tac : - Pour ça, ça peut s'arranger. 
Napoli
années 2020


Arras Film Festival jour 9 : comment ça, dernier jour ?

 

    Ça passe vite, le festival, chaque année, mais ce cru 2019 a dépassé les bornes. Probablement parce que nous nous sommes immédiatement glissés dans notre routine de festivaliers, que tout était fluide, qu'il ne faisait pas un froid glacial, que nous n'avons pas perdu de temps - efficaces à faire nos courses, efficaces à intercaler la course à pied, et pour moi une séance de natation dans les interstices -. 

Donc un dimanche qui commençait sous le soleil, plutôt fisquet mais pas désagréable en course à pied (note à moi-même pour les entraînements : même équipement que le dimanche précédent : collant 2XU long tee-shirt 2XU à manches longues, par dessus un tee-shirt technique à manches courtes et une thermiques middle class du club (celle de chez Castelli), le bonnet-tour de cou du club en bonnet, un autre tour du cou en tour de cou, des mitaines de vélo, des chaussettes normales de course à pied (on est quand même au dessus de zéro) et c'était parfait pour une température entre 1°c et 3°c. 

Capture d’écran 2019-11-17 à 11.09.17

Après, il y avait pile le temps de rentrer, prendre une douche et le petit-déjeuner et filer à l'avant-dernier film de la compétition européenne, du moins pour nous dans notre ordre de projections.

Après le second film et tandis que JF retournera à la chambre, j'irai déguster une dernière gauffre de liège puis assister à la fin de la délibération publique du jury des critiques. The Father l'a emporté à l'unanimité absolue, c'était beau un tel ensemble.

La soirée de clôture sera fort longue car il y avait des surprises "spécial 20 ans" du festival et des paillettes balancées sur la scène qui colleront joliment à l'écran, malgré de beaux efforts de nettoyage avant la diffusion du film de clôture. Ça sera joli ces petits éclats brillants descendant peu à peu au fil de l'histoire. 

Nous terminerons le festival par un pot avec les deux autres couples présents du ciné club. Au Bureau, seul café ouvert le dimanche soir et accueillant, même tard. Il était plus de minuit lorsque nous sommes rentrés. D'où une rédaction décalée de ce billet (19/11/19 fin d'après-midi).

 

 

1/ Free Country
de Christian Alvart (Freies Land, Allemagne, 2019, 2h09)
avec Trystan Pütter, Felix Kramer, Nora von Waldstätten, Ludwig Simon, Leonard Kunz

En ex-Allemagne de l'est pas trop loin de Berlin, deux enquêteurs un de l'Ouest, qui est puni pour avoir mis en cause un corrompu au bras long, et un de l'est, qui aurait de toutes façons été là, sont mis sur une enquête concernant la disparition de deux jeunes filles, deux sœurs, qui comme toute la jeunesse du coin rêvaient de partir travailler à Berlin pour une vie meilleure.

Il vont assez vite apprendre que d'autres jeunes filles ont également disparu, mais sans qu'il y ait d'enquêtes parce qu'à part leurs ex-petits amis respectifs, tout le monde semble croire qu'elles avait quitté ce coin perdu pour la grande ville, volontairement.

C'est glauque à souhait, délicieusement tournée avec une façon de prendre son temps volontairement surannée. Ambiance follement Maigret, le port breton en moins (par exemple). 

Le film est un remake paraît-il point par point d'un film espagnol "La isla minima", lequel avait la touffeur en plus. Du coup les spectateurs de Free Country se divisent en deux : celleux qui l'ont vu et les autres. Je fais partie des seconds que le film a impressionné·e·s, mais les premières et les premiers quant à eux s'interrogent : pourquoi un remake si c'est à ce point pour y coller ? 

Et puis des goûts et des couleurs : j'ai particulièrement apprécié les longs plans calmes vus du ciel ; un des critiques dira lors de la délibération que c'était dramatique de voir à quel point l'usage des drones polluait le cinéma.

 

2/ Disco
de Jorunn Myklebust Syversen (Norvège, 2019, 1h34)
avec Josefina Frida, Kjærsti Odden Skjeldal, Nicolai Cleve Broch, Andrea Bræin Hovig

Une jeune femme incarnée par une actrice, Josefine Frida Pettersen, qui ressemble de façon frappante à Agnetha Åse Fältskog jeune, ce qui m'a je dois dire un peu perturbée, est à la fois championne de danse disco et égérie d'un mouvement chrétien qui dont les cérémonies sont des concerts pop ou rock. Le "Jésus revient" de "La vie n'est pas un long fleuve tranquille" est totalement out, sur ce coup-là. La danse Disco telle qu'elle est pratiquée dans ces compétitions est un peu étrange, de la pole dance sans la barre, avec une esthétique très sexualisée et paillettes. Du coup ça semble un peu curieux l'écart entre le côté hyper-religieux avec malgré les faux-airs délurés du rock en scène et cette vulgarité revendiquée avec une sexualisation des petites filles - on en entrevoit quelques-uns lors d'images de compétitions (1).

spoiler alert : ne pas continuer à lire après ça si vous comptez voir le film 

Mais bon, ils ont l'air content comme ça. Sauf que Mirjam, l'héroïne du film, commence à ne pas aller très bien, vomit souvent, fait des malaises en plein enchaînement de concours, écoute dans le secret des prédicateurs anglo-saxon, se met, puisque son entourage l'encourage à se recentrer sur sa foi, à fréquenter des personnes d'un groupe encore plus ultra-religieux que celui où officie le mari de sa mère (qui n'est pas son père mais semble l'avoir adoptée). Elle finit par aller avec ces derniers sur une sorte d'Utoya où elle est chargée d'encadrer des enfants à qui les organisateurs font subir de curieux traitements, comme une sorte de bizutage avec dieu en toile de fond. Mirjam elle-même lors d'une sorte de fausse alerte d'un goût douteux (puisque le massacre d'Utoya est dans toutes les mémoires), subit ce que j'ai pris pour une tentative de meurtre par noyade puis étranglement, avant de comprendre qu'il s'agissait d'une sorte de rite initiatique. 

Le film se termine avec tou·te·s ces enfants et jeunes personnes vêtu·e·s de couleurs claires et devisant paisiblement comme si on ne venait pas de leur faire crier un moment ou un jour plus tôt "Je suis prêt à mourir pour Jésus". Du coup ça laisse un sentiment de malaise, que la réalisatrice dissipe, elle a clairement voulu faire un film à charge, afin de dénoncer les dérives, mais elle ne sera pas là à chaque projection. 

J'ai un peu dormi, par mélange de fatigue personnelle et d'incompréhension sur ce que je voyais à l'écran, et cru avoir manqué des scènes qui apportaient les éléments nécessaires de compréhension. Seulement en se concertant à la sortie nous nous sommes rendus compte qu'on restait sans clefs. Par exemple on ignore si son état est provoqué par une grossesse, de l'anorexie ou une maladie. On comprend qu'elle est trop enfermée dans une communauté pour pouvoir remettre en cause ce qu'on lui inculque, mais on ne comprend pas vraiment ce qu'elle pense. Et la cohabitation entre ces compétitions hyper-sexualisées auxquelles elle prend part pour le plus grand enthousiasme de sa mère, de sa petite sœur et de sa communauté, et les préceptes religieux serrés qui semblent guider leur vie reste inexpliqué. 

Bref, ce film restera une énigme et trop de perplexité nous ont empêché de l'apprécier.

 

(1) Dont la réalisatrice nous a confié lors du Q & A d'après film qu'elles furent saisies lors de vraies compétitions. 

 

3/ Les vétos (film de clôture) de Julie Manoukian (France, 2019, 1h32)
avec Noémie Schmidt, Clovis Cornillac, Carole Franck, Michel Jonasz

J'admire les équipes du festival qui parviennent toujours à nous régaler d'un film de clôture qui parvient à être à l'intersection de critères quasiment disjoints : film grand public mais pas ennuyeux pour les cinéphiles avertis qui forment le gros des festivaliers, film ne posant pas trop de problème de langue, film un léger afin de se remettre des films durs qu'on a pu affronter, mais pas lourdingue, film avec quand même un peu de fond etc. 

Cette année ils sont encore parvenus à l'exploit de dégoter la perle rare. Ça n'est pas le chef d'œuvre du siècle seulement il est joyeusement féministe, montre des personnes qui réfléchissent et reviennent parfois sur leurs décisions ou paroles hâtives, dénonce une certaine situation sociale, tout en désamorçant les critiques qu'il y aurait eu à le faire frontal, par le rire, bref, c'est très bien. 

Le synopsis est simple : une jeune femme vient d'achever des études de vétérinaire, mais côté recherche, grippe aviaire et ce genre de chose. Seulement son vieil oncle, lui-même vétérinaire, mais de terrain et à la campagne, lequel fut à l'origine de sa vocation, entend bien partir en retraite. Alors il piège un peu tout le monde, et sa nièce (Alex) et son associé (Nico) et fait en sorte qu'elle se retrouve obligée de le remplacer au pied levé. Tout est très classique, très convenu, jusqu'à l'inévitable idylle naissante mais ça fonctionne à merveille. 

Les actrices et acteurs sont toutes et tous très bien, y compris la gamine pot-de-colle. Mention particulière pour Noémie Schmidt dont le rôle n'est pas évident - elle doit jouer les parisiennes mais pas trop, baroudeuse mais pas trop etc. - et Michel Jonasz que je n'avais pas spécialement recroisé depuis qu'il suçotait des glaces à l'eau et qui est très crédible en vieil oncle qui mène tout le monde en bateau mais est quand même là pour assumer quand ça se complique. Les dialogues pétillent bien. Je n'ai toutefois pas compris leur insistance à faire passer le Morvan pour un bout du monde perdu (OK, la désertification est à l'œuvre, mais la région n'est pas si perdue).

 

Ça ferait un super film de Noël à voir en famille. Sans doute pour ça que sa sortie n'est prévue, quelle bizarrerie, qu'au 1er janvier.