QOTF (Quote of the Festival)
17/11/2014
(à la mémoire d'un des sketchs du film argentin "Les nouveaux sauvages")
"Du poison périmé, ça fait plus d'effet ou moins d'effet ?"
(à la mémoire d'un des sketchs du film argentin "Les nouveaux sauvages")
"Du poison périmé, ça fait plus d'effet ou moins d'effet ?"
Au vu des projections auxquelles j'ai pu assister ce qui est incomplet puisque je suis pendant trois jours retournée à Paris travailler, ce fut un festival de haut niveau, un grand cru.
Un seul film nous a laissé dubitatifs - mais nous y sommes allés en dernière minute, parce que j'aimais l'un des acteurs, j'aurais dû me douter qu'à part sa présence il n'était pas pour moi (1) - , un autre, islandais, nous a semblé un peu bancal ; tous les autres étaient entre "très bons" et "grand régal". Et il y en a un qui à mes yeux est un chef d'œuvre : "La terre éphémère" de George Ovashvili. J'en suis sortie toute retournée. Les images m'en restent à l'esprit malgré toutes les autres vues depuis.
J'espère retourner le voir en salles, si possible avec mon fils (le voilà prévenu), qui traînera des pieds quand je lui dirais que c'est juste l'histoire d'un vieux grand-père qui avec l'aide de sa petite-fille fait pousser du maïs sur un lopin de terre destiné à être envahi par les eaux à l'automne, mais sera peut-être pris par la force du film comme nous l'avons tous été - sauf les âmes brutales ou manquant de maturité -.
(1) Je tiens à dire qu'il NE s'agit PAS de "Vincent n'a pas d'écaille" dont je connais aussi l'un des acteurs et qui pour sa part nous a réjoui.
Depuis que je sais que ce sont des symptômes communs pour un seul et même tracas (et qui n'est pas évolutif dangereusement) je ne m'en inquiète pas, mais ça ne change en rien les inconvénients subis.
* * *
Je ne supporte pas, au point que ça me met très facilement au bord du malaise, les éclats de lumières cadencés, ni les images qui se succèdent à un rythme trop soutenu.
Je ne peux donc voir la bande annonce "Arras film festival" de cette année, constituée qu'elle est d'images qui se succèdent de plus en plus vite.
Insoutenable.
J'ai par ailleurs déjà loupé deux ou trois scènes dans les films présentés : boîtes de nuit avec stroboscopes. Je suis obligée de demander à qui m'accompagnait ce qui s'est produit pendant ces séquences. Heureusement pour moi il ne s'agit la plupart du temps que d'un prétexte pour faire voir des filles à poil ou quasi, ce sont rarement des scènes cruciales. Mais de temps à autre il y a un film dont je me fais une tout autre idée de ce qu'il tente de nous narrer parce qu'il me manque un élément important survenu à ces moments. Quand il s'agit d'une langue que je comprends, je parviens même sans l'image à raccrocher les wagons. Mais quand il s'agit comme ce soir pour "White God" d'un film en hongrois, c'est plus délicat.
Joint au handicap du mal de mer des scènes caméras à l'épaule, ça me limite dans ce que j'apprécie. J'en reste navrée.
Je m'apprête en ce dimanche à préparer mon emploi du temps pour le festival d'Arras. Il sera tronqué pour moi cette année : je travaille pour une entreprise où il est malvenu dès mi-novembre de prendre des congés car novembre et décembre sont les mois les plus chargés et qui permettent de tenir bon une partie du reste plus calme de l'année.
Néanmoins grâce à mon temps partiel et la gentillesse d'une de mes collègues, j'y serai pour bonne partie, en manquant quelques jours. Les cheminots sont priés de ne pas faire grève sur la période, s'il vous plaît.
Je contemple donc la grille des programmes, le cœur battant.
Ce qui déjà fait du bien, la tête tourne moins (1).
Et me fait prendre conscience très nettement tout soudain (2) que les festivals de cinéma, idéalement deux dans l'année, La Rochelle en juillet et Arras en novembre ne sont pas pour moi des vacances, contrairement à ce que je croyais du temps où j'ai créé ce blog et travaillais encore comme ingénieure à l'"Usine", pas tout à fait des stages puisque ma vie étant ce qu'elle est je ne parviens toujours pas à dégager assez de temps pour faire de l'écriture (et plus tard (3) des films) une activité professionnalisée, mais bien et très exactement des cures.
Des cures pour ma bonne santé.
Physique : assise en salles je repose le corps, sciemment. Mentale : puisque l'ivresse m'est interdite, l'exultation des sens rarement autorisée (4), et que je me refuse (de toutes façons n'en ai pas les moyens) d'utiliser les drogues chimiques, que je ne fume pas (ce qui élimine un mode de changer d'air plutôt sympa), que je n'ai pas les moyens de voyager, qu'en professionalisant la lecture je lui ai amoindri ces capacités d'évasion, mon seul moyen d'échapper à moi-même, de me mettre quelque peu en "vacance", d'être ailleurs, de poser les armes plus longuement que lors d'une séance d'entraînement, c'est le cinéma. Mais pas n'importe comment : à haute dose. À trois films au moins par jour, plusieurs jours d'affilée, sans avoir tout à fait le temps de redescendre entre deux, sans avoir à se soucier de rien d'autre à part ne pas oublier de manger et dormir quand même assez. S'accorder d'être un temps aux abonnées absentes, voir d'infinis paysages. D'autres modes de vie.
Moyennant quoi je peux ensuite regagner ma vie et pendant quelques mois faire face aux problèmes qui s'y posent. Et ne pas utiliser de médicaments (autre que mes (vaines) tentatives de recherche de produit dopant) afin de résister aux blessures qu'infligent un monde coupant. Même en cette vieille Europe encore privilégiée (pour l'instant).
C'est sans doute un peu curieux pour une Gilda, de chercher dans le cinéma l'oubli nécessaire de soi. Mais l'efficacité est là.
(1) tendance à l'hypotension.
(2) Ce cher Georges (Devereux) dirait que j'ai eu un bon insight.
(3) Le plus tard quand on a déjà 50 ans étant fâcheusement rétréci.
(4) Non seulement il faut être (au moins) deux, mais que les deux soient en bonne forme et en aient forte envie. La probabilité de conjonction de ces trois éléments tend de jours en jours davantage vers zéro. Après que F. m'a quittée, le sommeil plus que jamais est devenu mon amant.