Nous l'avions manqué au Arras Film Festival, parce qu'il en faisait l'ouverture et qu'en raison de nos contraintes de boulot, nous ne pouvions arriver que le samedi matin.
Pour autant les camarades qui à quelques années de plus que nous sont déjà retraités depuis un bon moment et qui eux disposent de leur temps, l'avaient vu et aimé et nous avaient conjuré d'y aller voir dès que nous le pourrions. Grâce leur en soit rendue.
Ce fut enfin fait cet après-midi.
En fanfare d'Emmanuel Courcol
Malgré une partie de moi qui n'était pas tout à fait dupe, mais parce que j'ai trop roulé ma bosse de cinéphile et d'écriture (1), pas en raison du travail réalisé, j'ai été émue comme ça faisait longtemps que ça ne me l'avait pas fait.
Car une foule de choses sont d'une justesse inouïe, et non seulement le jeu des actrices et acteurs - toutes et tous formidables -, sur la foule de sujets abordés.
Entre autre la musique et les rapports entre les différents types de musique. On va quand même du rap au "classique moderne" dans la B.O.F.
Et le déterminisme de classe pour une fois montré sans trop de tartuferie, le plus talentueux des deux frères - puisqu'en gros c'est l'histoire de deux frères - étant celui qui a grandi dans une région en crise économique et un milieu modeste, n'ayant pu que rejoindre sa place de façon marginale (2), tandis que l'autre à force de travail rendu possible par le lieu et le milieu de sa famille adoptive a acquis une grande renommée.
Les deux sont dans la musique, et ça aussi, ça coïncide avec mon expérience de la vie, que des choses sont en nous au départ, même pas tant sous forme d'aptitudes que d'inclinaisons vers certaines activités (3).
Il y a aussi l'importance des liens familiaux, l'importance du travail qui permet de gagner sa vie, surtout quand il ne le permet plus.
Il y a aussi, effleurée, la magie de chanter en chorale - on peut avoir chacun une voix moyenne et donner un résultat d'ensemble formidable -. Et le fait qu'assez souvent, lorsque l'on agit guidés par la générosité, dans notre société telle qu'elle est on s'attire de gros ennuis.
Cinq noms figurent comme scénaristes et il se pourrait qu'un travail d'équipe ait conduit à cette justesse de dialogues, de ton, de situations.
Évidemment, le côté Nord de la France nous touche davantage que d'autres personnes. C'est un peu chez nous.
Ce billet est mal écrit, je pleure encore d'avoir été touchée, et somme toute, réconfortée.
Ne vous méprenez pas, il y a également bien des moments délicatement drôles.
Ce film est un bonheur.
(1) Ça fait entre autre que je repère des similitudes là où ça aiderait de s'en passer, et qu'aucun fusil de Tchekov ne passe inaperçu.
(2) Et ça, c'est tellement ce que j'ai pu constater au cours de ma vie : oui en prenant de la peine on finit par rejoindre ce pour quoi on était là, si tant est que, mais non, on ne peut s'y faire une place si l'on part de trop loin. On le peut en amateur. Au mieux.
(3) J'ai mis une cinquantaine d'années à me rendre compte que j'étais une sportive, hélas pourvu d'un corps pour le moins pas doté d'aptitudes en ce sens, voire même handicapé pour certaines activités. Seulement j'étais née à une époque où les filles ne faisaient pas de foot, voyons. Et j'étais une excellente élève donc considérée par mon petit monde comme une intellectuelle, comme si ça devait nécessairement s'opposer.
PS pour Jean-François : Si tu me lis, tu avais raison au sujet de la ressemblance avec Johnny.
PS' : Pas le temps ce soir d'écrire un second billet et c'est injuste, mais ne manquez pas "Vingt dieux" de Louise Courvoisier, sauf si l'odeur du fromage vous écœure. Il y a un vrai quelque chose dans ce film, une grâce, un truc qu'on n'avait pas vu passer depuis longtemps. Ici ce qu'en dit Pierre Lescure.