Période pierres meulières


    Je me souviens qu'enfant j'imaginais le fait d'habiter une de ses belles villas de pierres meulières comme on en voit tant dans la grande banlieue de Paris comme un summum d'accomplissement. 
Je n'ai jamais su pourquoi aucun autre type de maisons cossues n'obtenait grâce à mes yeux. Quant aux demeures encore plus grandes, manoirs et autres petits châteaux, c'était comme si d'entrée de jeu mon cerveau les considéraient inabordable. 

Je ne peux pas non plus dire que je rêvais d'en posséder une un jour, je crois que je me disais simplement quelque chose comme, les gens qui vivent dans ces grandes maisons en pierres meulières la vie leur a réussi.

Mon objectif dans la vie étant à l'époque de survivre au prochain rhume, je n'éprouvais ni ambition ni envie. Et quand à 13 ans j'ai eu une vocation de chercheuse en physique nucléaire et quantique (1), tout rêve terre-à-terre était mis de côté : je vivrais là où la recherche me conduirait. J'imaginais d'impersonnels campus universitaires et que je m'en foutrais (2).

Parfois enfants, et une fois adolescente, j'ai été invité à des anniversaires dans des maisons en pierres meulières. J'en avais un peu déduit que maison en pierres meulières signifiait père absent (de trop travailler, et parfois loin, tout le temps). 
Et qu'au fond ce que je trouvais beau c'était surtout les hauts grands arbres dans les jardins qui le plus souvent "allaient avec".

Voilà que ces souvenirs me sont revenus en mémoire lorsque le mois dernier j'ai participé à un heureux dimanche sportif collectif avec l'une de ces maisons pour camp de base et que quelques jours plus tard, j'ai été amenée à venir déposer des livres trop longtemps plus tôt empruntés, chez quelqu'un qui habitait une telle maison. À présent, me retrouver dans de telles maisons semble aller assez de soi, et les habitants n'y trouver rien d'extraordinaire.
Je suis sans doute une transfuge de classe accomplie qui trouve désormais tout naturel de les fréquenter (sourire amusé).

(mais mon sens de la propriété, lui, n'a pas suivi ; peut-on fondamentalement changer ?)

 

(1) laquelle n'a pas survécu à l'épreuve des classes prépa, je n'avais pas assez de cerveau ni assez de santé.

(2) Des dizaines d'années plus tard, quand j'ai vu les logements dans le film Proxima j'ai eu l'impression de retrouver ce que j'imaginais que ça serait.


La mémoire des habits

 

    La pandémie et plus particulièrement l'enchaînement premier confinement (en Normandie pour nous) suivi derechef d'un nouveau job nouveau métier à apprendre sur le tas et fissa, en mode gros temps plein dans des conditions bizarres (les confinements suivants, et le Covid_19 qui faisait des ravages dans nos rangs), ont marqué un tournant dans le fonctionnement de ma mémoire. Comme s'il fallait effacer des rubriques anciennes pour faire de la place aux nouvelles données à ingurgiter, toute une partie du pan "mémoire des vêtements" semble avoir disparue. Ou du moins, je n'y ai plus accès.

Or j'étais jusqu'à présent une faible acheteuse d'habit, plutôt prompte à les user jusqu'à la corde. Et puis j'ai eu une période de travail dans le XVIème arrondissement de Paris lors de laquelle j'ai garni la garde-robe familiale de dépôts effectués par les très fortunés.
J'aime aussi en acheter lors de voyages : c'est un souvenir utile à (rap)porter et relativement léger. Sans parler des longues années durant lesquelles je souffrais du froid, intensément, et finissais toujours par acheter d'urgence quelques pulls.
Et de la partie contrainte de ma garde-robe : pour les différents emplois que j'ai occupés il me fallait des tenues différentes et pas trop portées.

Jusqu'à cette particulière année 2020, je pouvais dire pour chaque pièce d'habits à quelle période en quelle année à quel endroit à quelle occasion je l'avais acquise, j'avais cette mémoire, précise. 
Depuis, lorsque je m'habille comme souvent en Tombé de la pile, je récupère un vêtement et me demande, Tiens, d'où il sort celui-là ? Est-il à moi ? Est-ce un de l'époux posé par erreur de mon côté ? Un trop-petit du fiston (1) ? Un qui était chez mes parents (2) ?
Étrange conséquence que le Covid aura eu pour moi quand d'autres y laissent plutôt le goût et l'odorat.

Et puis ce matin c'est un polo qui a dégouliné du tas jusque dans mes mains et je me suis instantanément souvenue de la boutique de surplus de golf, coincée entre périph et pont de chemins de fer, que j'étais allée voir par curiosité un jour (à force de l'entrevoir lors de trajets) et où j'avais fait quelques emplettes. Elle a disparu, désormais et le petit bâtiment semblait promis à la démolition.
Peut-être que mon amnésie des habits est en train de passer ?

 

(1) Je m'habille volontiers en trop-petits du fiston qui les a laissés là lorsqu'il est parti s'installer en colocation et sont, comme souvent les vêtements d'hommes, pratiques, confortables, avec de grandes poches parfaites et de qualité.
(2) Comme j'étais seule pour faire le tri de leurs vêtements, je n'ai jeté que ceux dont les tissus étaient dégradés et gardé le reste, d'autant plus qu'il y avait aussi entreposés dans la maison, plus grande que nos logis respectifs, des "on le met plus, mais peut-être qu'un jour si donc on ne veut pas le jeter" que pour nous ils stockaient. Ce qui fait un paquet de frusques ou tenues jolies dont on ne sait plus trop quoi fut à qui. 


25 minutes de retard, reconductibles

 

    Je ne pouvais guère faire grève, bossant pour une PME ça n'aurait pas eu de sens et pénalisé que mon employeur et moi pour le non perçu correspondant au jour de grève.

Mais j'y serais bien allée, manifester, moi qui me demande à 59 ans comment je vais faire pour tenir bon jusqu'à 65 (qui est mon âge de départ si je souhaite partir sans décote). Pour autant, comme je ne pouvais pas, je ne m'étais pas renseignée sur le parcours. 

J'aurais dû.

J'ai mis un temps fou à faire (à Vélib) mon trajet aller. D'une part car il n'était pas évident d'en trouver un fiable ils étaient tous en vadrouille, d'autre part car j'empruntais le bd Raspail lequel était en plein préparatifs avec des stands et des camions, on aurait cru un grand marché qui se préparait. Et nous nous sommes retrouvés quasiment face à un impressionnant 15 tonnes affrété par la CFDT, wow !

Au passage cette photo qui est une splendide apparence trompeuse (j'ai dû capter le seul instant de calme, entre deux feux rouges) ; preuve s'il en est qu'une photo ne prouve rien. 20230307_093542

Alors 25 minutes de retard.

En repartant, je me doutais que j'avais intérêt à faire comme un crochet, ça n'étaient pas les itinéraires qui manquaient et puis peut-être aussi éviter l'Élysées. Ce que j'ai fait. J'espérais quand même pouvoir pour partie participer à mon entraînement de C.A.P. 

Sauf que je suis arrivée à 19:25 bien tassées, ayant choisi de rouler prudemment et de faire parfois le super-piéton (1), face à une circulation bizarre (certaines rues bien vides et puis d'autres où ça partait dans tous les sens notamment avec des bus déroutés qui se suivaient en file indienne).
Bon, j'ai eu le plaisir de saluer les copains.

J'ai ensuite trouvé je ne sais où (j'étais rincée, la journée très intense de boulot, le cumul des tickets en retard, les deux trajets avec un niveau de danger supérieur à d'habitude, où ça n'est déjà pas hautement cool), l'énergie de me rendre à la rencontre avec Gaëlle Nohant qu'organisait l'Attrape-Cœurs. Je ne comptais pas sur le métro, je n'avais plus envie de circuler à vélo en hyper-attention alors j'ai marché (2).
Et je suis arrivée alors que 25 minutes de la rencontre étaient déjà passées.

Le retour à Vélib sous la pluie (Enfin ! La pluie ! Quel bonheur (même si c'était potentiellement dangereux)) fut rapide et simple, ça aura fait au moins un trajet agréable. Et mes habits de vélo de pluie sont assez magiques (marque indiquée par des amies cyclistes aguerries). Seulement le temps de prendre ensuite une vraie douche et de répondre à quelques messages il est déjà minuit passés de 25 minutes. Soit 25 minutes de retard par rapport à l'horaire que je tente de ne pas dépasser (3).

Au fond ce retard régulier aura été ma façon de mener une journée d'action. Et de protester contre une réforme injuste qui ne tient pas compte des réalités de la vie quotidienne en général et de la vie quotidienne au travail en particulier. 



(1) descendre du vélo et marcher en le poussant.
(2) En réalité pris le tram (parce qu'il passait pile à ce moment-là) et marché.
(3) À mon âge le lendemain est trop dur si je ne respecte pas un minimum de sommeil.


Gros rhume petits exploits

 

    Me voilà depuis mercredi tombée enrhumée. Curieusement ça n'a pas commencé par le mal de gorge mais par le nez qui coulait comme une fontaine.
Je n'ai pas souvenir particulier d'avoir pris froid, en revanche il est vrai qu'entre un samedi travaillé en face d'un collègue qui venait d'être enrhumé et un dimanche joyeux en équipe, j'avais pris quelques risques.

Mercredi soir j'ai eu de la fièvre, une fois rentrée. Et à nouveau dans la nuit de jeudi à vendredi. 
Dans la journée je ne crois pas.
Aujourd'hui je me sentais simplement fatiguée et la gorge douloureuse, mais la tête presque normale, pas marmiteuse.

Je m'apprêtais à demander à mon boss ce matin (la veille télétravail, la question ne s'était pas posée et mercredi je ne me voyais pas dire en cours de journée de travail chargée, J'ai le nez qui coule, coucou je m'en vais) si je devais aller me faire tester mais comme j'étais masquée il a lui-même pris les devant en me disant Garde bien ton masque (ton bienveillant, je précise).

Je crois que sauf forte fièvres ou symptômes violents, plus personne dans ce pays ne se fait tester.
Pour ma part je me sens tellement typiquement dans les symptômes des gros rhumes qui me sont (hélas) familier que je ne crois pas que ça puisse être autre chose, à part peut-être une angine.
Donc voilà, à la française j'ai fait le bon petit soldat et j'ai bossé entre deux atchoums masqués et déglutissements pénibles.

Je pense m'en être bien sortie (1), mais le départ de la maison avait été particulièrement difficile et d'heure en heure il s'agissait ni plus ni moins que de tenir.

Quelques personnes m'ont aidées l'air de rien : 

1/ le boss qui alors que je demandais à m'absenter un lundi de mars pour un examen médical (de vérification comme on finit par en avoir un certain nombre à effectuer à partir d'un certain âge), dans l'idée d'y aller sur une pause déjeuner étendue, m'a accordée 1/2 journée de récup d'heures sup.
(c'est très gratifiant ça donne l'impression que tous les soirs où je reste plus tard pour terminer proprement, et ne pas laisser tomber les clients sont quand même pris en compte)

2/ le collègue qui sans hésiter a accepté d'échanger avec moi un samedi de permanence en avril afin que je puisse aller à l'AG d'une association dont je fais partie et qui aura lieu à Lille ; grande gratitude envers lui.

3/ la personne qui tient la jolie retoucherie près de mon travail et qui bosse à l'ancienne, avec soin et fait le petit complément de réparation qui va bien. Elle a ressuscité un de mes vieux blousons (dont je n'ai même plus le souvenir de la provenance, c'est dire si ça date) et ravaudé un truc en prime sans demander paiement. 
Que quelqu'un puisse encore travailler ainsi me réchauffe le cœur. C'est comme notre ancien cordonnier chinois.

Et globalement, peut-être par égard pour ma voix d'enrhumée, les clients ont été tous d'une grande patience et sympas.

Prise par une soudaine quoiqu'illusoire bouffée d'énergie j'ai choisi de rentrer à Vélib et en passant par l'ouest, comme j'aime à le faire en fin de semaine, histoire de transformer le vélotaf de retour en une balade.
Un Vélib électrique aiderait pour faire face à l'énergie entamée. Et ça l'a fait sauf ... qu'il n'avait pas de lumière avant et que je n'en ai pris conscience qu'en longeant l'un des lacs - étangs du bois de Boulogne dans le noir absolu.
Au moins j'en ai un temps oublié la gorge en feu.
J'ai pu en prendre un autre à une station près du bout du lac et terminer normalement, quoiqu'avec un itinéraire pour la partie Neuilly Levallois moyennement satisfaisant (rues à voitures).

J'ai pu trouver l'énergie en soirée de m'occuper du train, et des réservations pour le week-ends du 15 avril et des messages à chacun.
À présent c'est le week-end, enfin.

Puisse le rhume ne pas m'empêcher de courir à Charenton dimanche.

 

 

 

(1) Le risque étant que lundi je découvre d'avoir fait une succession de bourdes, parce que je croyais n'avoir pas de fièvre mais en fait si.


L'esprit de compétition

 

    De façon amusante, je me suis découvert depuis que j'ai commencé ma #VieDeTriathlète, l'esprit de compétition.

Jusque là je m'étais toujours peu souciée de défis et temps et records, et de vaincre encore moins.

D'une part, et jusqu'au bac parce que c'était "trop facile". Je me battais contre le fait d'être sans arrêt enrhumée l'hiver (une semaine malade dont 2 à 3 jours de forte fièvre, une semaine mieux mais sans énergie, une semaine normale, deux à trois jours de mal de gorge et retour à la première occurrence de cette parenthèse) et donc de devoir rattraper des cours sans arrêt. Avec aussi cette sensation de n'avoir pas le même cerveau tout le temps : un truc que j'avais tenté de travailler lors des jours malades et qui me semblait compliqué, une fois remontée à mon niveau normal me semblait élémentaire et je me demandais bien ce qui avait pu me bloquer.
Je sais ce que veulent dire les personnes atteintes de Covid long lorsqu'elles évoquent l'effet de brume dans leur cerveau. La fatigue et les rhumes et angines me l'ont fait éprouver souvent.

D'autre part, la thalassémie m'a souvent placée en retrait ; je ne joue pas à armes égales avec les autres pour tout ce qui relève du sport. Ponctuellement je peux défendre mes chances mais par moment je suis vidée de toute force.

En revanche la devise de Louis de Gruuthuse et de sa lignée, "Plus est en vous" Miniatuur_bombarde_small

m'a toujours convenu.
Et ce fort esprit de lutte pour faire toujours mieux, vis-à-vis de moi-même et compte-tenu de mes propres forces, ne m'a pas lâchée.

Avec les courses et autres triathlon, passées les premières années durant lesquelles "juste finir" était déjà un fort objectif, je me découvre une sorte de joie des défis, une excitation particulière, une façon de me concentrer sur des choses positives (plutôt que d'être sans arrêt en train de limiter les dégâts face aux aléas), et de choisir de participer à telle ou telle épreuve.
J'adore les week-ends où une compétition est prévue. J'adore me préparer avec application comme si j'étais une concurrente sérieuse, alors que je sais pertinemment qu'à moins d'être la seule dans ma catégorie d'âge je ne l'emporterai pas.

Le fait est que j'ai encore une marge de progression (pourvu que ça dure !) et que la moi de 12 ans, qui n'a jamais totalement disparu de ma perception des choses, est juste trop contente de pouvoir jouer à (tenter de) mieux faire.

Je m'apprête, si tout va bien, à passer 5 ou 6 heures à crapahuter en forêt dimanche, puis deux journées clouée au lit bobo les jambes et probablement un peu de fièvre (1). Sauf accident, j'en ressortirai en ayant augmenté d'un cran ma condition physique et l'esprit neuf, un moral renforcé (2).

Les perspectives pour ce samedi, footing d'activation et expédition pour aller chercher les dossards puis préparation de ma tenue, mon paquetage me réjouissent. C'est le joyeux esprit de la compétition, comme une bouffée d'enfance.

 

(1) J'ai presque toujours une poussée de fièvre au soir d'un effort particulièrement soutenu, et ça me dure 24h, sauf à la faire baisser par un médicament.

(2) Soit d'avoir réussi alors un sentiment de victoire, soit d'avoir fait moins bien qu'espéré et déjà sur le sentier des efforts requis pour améliorer l'ensemble avant le tour d'après. Et donc équipée d'une nouvelle motivation.


Faire au moins une chose


    Depuis quelque temps je tente de préserver une part de vie personnelle envers et contre tout. Le boulot tend à engloutir toutes mes heures actives, et j'ai décidé de m'en tenir à mes plans d'entraînements de course à pied. Une fois ces deux éléments casés, et l'indispensable (le temps pour les choses physiologiques, alimentation, sommeil, toilette ... et de soins (kiné) + un minimum vital de tâches ménagères) il ne me reste plus rien, plus d'énergie et peu de temps. J'en suis réduite à passer mes après-midi de week-end et mes fins de soirées au lit, à essayer de regarder encore un peu une vidéo (de sport ou de voyage ou un documentaire) ou bien lire enfin. Et en fait m'endormir vite.

Alors je commence peu à peu à ressortir un peu, accepter un restau, tenter un ciné (si une séance particulière se présente) et puis surtout j'ai décidé de faire au moins une chose chaque soir, une activité qui me fait plaisir ou un morceau de rangement (ça devient très très très critique et urgent), une tâche administrative, des réponses à des messages amis.

Ce soir c'était préparer des envois de cadeaux qui étaient restés coincés là - j'avais réussi à intercaler l'achat et puis : plus rien -. 
Ça réduit le sommeil mais c'est bon pour le moral. 

Ce qui l'est moins c'est d'avoir retrouvé à cette occasion d'autres cadeaux qui datent probablement du premier confinement, juste avant, ou juste avant que l'on reconfine et voilà que je n'en ai plus aucun souvenir et je sais bien un peu pourquoi. Ces périodes si particulières m'ont fait en mémoire un effet bizarre, rejetant les "avant" dans un lointain, avec les zones d'oublis assorties, alors qu'en fait seuls trois ans se sont écoulés (ou moins, pour le deuxième confinement). 

Si tout va bien, ça va bientôt être reparti pour une période d'archéologie familiale, tri, archivages et jetages. Et ça fera du bien.


Triathlète malgré tout

 

    Aujourd'hui malgré une grosse journée au boulot et une soirée amicalo-culturelle (oh comme ça fait du bien de retrouver un peu de vraie vie), j'ai pu pratiquer un petit peu des trois sports. Et sans terminer épuisée, en tout cas pas davantage qu'après une journée de travail sans rien de plus.

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You know what, I'm happy ! (Droopy like)


Un semi en demi-teintes

(domenica)

 

J'en avais fait un objectif majeur de ma saison 2022 /2023, je visais un sub 2h30 en me disant que si j'y parvenais je prendrais le risque de tenter le marathon de Bruxelles à l'automne prochain.

 

Je m'étais entraînée le plus sérieusement possible compte tenu de mes contraintes de gagne-pain et des aléas de la vie (un décès dans ma famille, avec rapide séjour en Italie ; une opération pour quelqu'un de la famille).

OK, j'avais mis 2h56 pour faire les 20 km de Paris à Turin mais j'étais en deuil et devais composer avec la traversée de la ville jusqu'à un parc qui se prêtait à la course dans interruptions.

Je souhaitais partir à l'avance, déposer calmement mon sac à la consigne, passer aux toilettes et faire un échauffement en bonne et due forme. Pour cause de réveil relativement tardif et peu d'entrain du partenaire (lui préfère en tous lieux, tous temps et toutes occasions arriver en dernière minute en se stressant en se hâtant (ou en faisant attendre les gens s'il s'agit de choses amicales)), ce ne fut pas le cas. Mais nous avons bien eu le temps de poser mon sac posément. Puis d'attendre dans notre sas > 1h50

J'ai plutôt bien démarré, ne me faisant dépasser par les meneurs et meneuses d'allures pour 2h15 qu'entre le 3ème et le 4ème km et parvenant à les garder non loin jusque vers 5 ou 6 km.
Aux ravitos j'ai pris le temps d'un gobelet d'eau et d'un ou deux quartiers d'orange. J'ai eu aussi une pause pipi et un peu plus, de 2'30'' d'arrêt. Il a plu par deux fois, une fois en mode petit crachin l'autre en belle averse mais j'étais parfaitement équipée (1).
Discuté par deux fois avec deux vieux messieurs, je veux dire messieurs de mon âge, l'un lors du croisement avec les champions (carrément une autre planète que nous autres les lents) et l'autre lors de la drache alors que nous "ramassions les morts" (mais lui à un rythme supérieur au mien, je n'ai pas tenté de le suivre).
Nickel sauf le manque patent d'énergie et le cardio qui indique clairement, n'accélère pas (2), à partir du 15 ème kilomètre j'y suis allée au mental. Le dos vaguement douloureux mais pas pire en courant qu'en ne courant pas, c'est ainsi depuis plus ou moins notre retour d'Arras, les jambes en bon état, zéro crampes, tout bien. J'aurais pu, en ralentissant, faire 5 km de plus sans tracas.

 

 

 

Après la ligne d'arrivée, j'ai craqué, car j'avais raté mon sub 2h30 de peu et que je n'en peux plus dans les différents domaines de la vie de me cogner sans fin contre mes limites d'énergie et d'oxygénation, alors que ma carcasse et mon cerveau sont costauds.
Le Joueur de Pétanque était là qui lui a fait un excellent 2h02 par rapport à lui-même, et qui tentait de me consoler mais une femme à l'air un peu espagnol (?) et qui m'a offert des raisins dans un gobelet a joué pour moi les anges de Wim et trouvé les mots justes. Je lui ai dit merci mais j'aimerai le lui redire.

Bu un bouillon fort bienvenu, récupéré le sac qui n'était pas le dernier du camion (on a les victoires que l'on peut) et puis nous sommes allés au gymnase Paul Bert, moi enfiler des vêtements sec, Jean-François se faire masser (il s'en est sorti tout ragaillardi). On nous a offert à nouveau de l'eau Veolia.

Retour en métro mais ça n'était pas la moindre épreuve. Jean-François qui était allé "en tenue" : deux épaisseurs de tee-shirt et un simple coupe vent, était transi et malgré mon rechange je commençais à avoir des fourmis dans les doigts.

Après-midi de récupération, collation légère après la douche, regardé des résumés de cyclo-cross (aaaah MVDP ! Et Tom Pidcock pliant une roue), un vieux Maigret (et le fou de Bergerac) avec un endormissement instantané de ma part vers les 2/3. 

L'Homme s'est gentiment occupé du dîner, toujours sur l'élan du massage miraculeux et puis soirée tranquille.

Les amis du triathlon m'ont encouragée / consolée sur FB et ça n'est pas rien.
Une journée de récupération (du samedi 19 novembre, travaillé) m'attend en ce lundi et ÇA NE SERA PAS UN LUXE

 

(1) Il faisait environ 7°c  avec un vent d'environ 10 km/h SSE ; et j'avais :
un collant long 2XU avec un short léger Décathlon
un des dessous thermique à mailles de chez Verjari, le tee-shirt de la course, et le coupe vent sans manches imperméable de mon club de triathlon.
chaussures Saucony avec voute plantaire bien renforcées : perfect shoes.
ceinture pour glisser le téléphone, des gels (n'ont pas servi), les mouchoirs
petites mitaines Castelli

 

(2) pas d'emballement mais une sorte d'incontournable plafonnement. Et une connaissance de mes ressources qui fait que mon cerveau obtempère, car il sait que ne pas obéir à cette limite ressentie pourrait donner des résultats risqués.

 


Source principale de la fatigue (dans les périodes de bonne santé)


    Après plus de deux ans d'un gros temps plein dans un emploi stable, je m'aperçois beaucoup plus nettement que durant les périodes d'emplois variés en librairie avec de brefs interstices entre les contrats, que la source principale de ma fatigue réside dans le fait de n'être jamais libre de mon temps libre. 

Le boulot fait que celui-ci est limité ainsi que l'énergie dont je dispose pour mes heures personnelles.
Il fait aussi que ce n'est pas moi qui décide de quand je pourrai souffler.

Pour autant, ce qui est vraiment crevant, c'est aussi et surtout que les jours et heures restantes sont déjà en grande partie pré-occupées : choses à faire pour la maison (démarches administratives notamment), soins du corps, choses à faire qui surviennent et nous requièrent (par exemple l'an passé quand même, quatre décès dans mon entourage amical, en plus du chagrin ce sont des moments qui s'imposent), et, mais ceux-là ne me pèsent pas : entraînements sportifs.

Je viens de passer un week-end délicieux. Seulement il était au 3/4 rempli, même si par de bonnes choses, ou de légères corvées mais qui satisfont lorsqu'elles sont accomplies. De temps dont je pouvais me dire : tiens, à moi de choisir à quoi j'occupe les heures à venir, ne m'est resté que le dimanche après-midi, pour lequel la question ne s'est guère posée puisque j'ai dû dormir.

N'avoir aucun moment pour lequel on peut se dire : Tiens qu'est-ce que je pourrais bien faire à présent ?, est une source d'épuisement.

Ça ne m'arrive jamais vraiment, chaque fois que je pourrais me la poser, je suis trop fatiguée pour faire autre chose que m'endormir (en ayant esquissé un brin de lecture, ou tenté d'écouter un podcast, ou de regarder une retransmission sportive). Mes jours de congés sont intégralement engagés dans une activité ou une autre, j'en demande l'autorisation avec un but (stage de sport, festival de cinéma, quand ça ne sont pas des activités de type travaux ou démarches ...).

Ces contraintes sont d'autant plus fortes que toutes ou presque s'imposent avec un calendrier, faire telle ou telle chose est dont impératif à tel ou tel moment (1), impossible à reporter vers une période moins chargée.

Je mène hors emploi une vie intéressante, je ne me plains pas, seulement voilà, des semaines de 40h et parfois plus, avec les trajets assortis (même si traverser Paris comme Vélotaf est souvent un bonheur, pas seulement un danger), et une vie bien remplie par ailleurs, ne laissent plus aucun temps libre libre dont ont pourtant besoin et le corps et l'esprit.

 

(1) Y compris pour des micros-trucs. Typiquement je devais impérativement ce samedi aller à 10 km de chez moi chercher un colis.


Contrecoup

(mercoledi)

    C'est aujourd'hui, ce qui ne m'étonne guère, j'ai souvent un temps de retard dans mes réactions car sur le moment mon côté vieille warrior prend le dessus, que je subis le contrecoup des événements du week-end, du plus petit (je me suis pris une intoxication alimentaire ou allergie féroce, me suis auto-boostée pour aller au plus vite mieux car je voulais à tout prix participer à mon épreuve de triathlon, et là je paie d'avoir forcé sur le mode, je vais très vite bien mieux), au plus violent (cette tempête, sa soudaineté, le fait qu'on l'a échappée belle, le fait que ça n'a pas été le cas pour tout le monde), en passant par la déception de n'avoir pu courir de triathlon (alors que compte tenu de divers paramètres, c'était le seul que j'avais prévu cette année, à mon grand regret).

Je m'efforce de croire que je trouverai un M pour septembre et qu'au boulot je bénéficierai d'une indulgence pour déposer quelques congés.
Je m'efforce de croire que mon accès, rare chez moi, d'indigestion n'est pas lié à la tempête (mais je commence à trouver les coïncidences troublantes, aurais-je un baromètre dans la rate ou le foie, de la même façon qu'il me semble avoir une boussole dans la tête ?).
Je m'efforce de croire que cette one second tempest (1) est réellement un phénomène rare, comme on n'en croise sous nos latitude qu'une seule fois dans sa vie. Je m'efforce aussi de croire que Le joueur de pétanque n'avait pas mesuré le danger lorsqu'il s'est réfugié à l'intérieur sans se soucier de si je suivais, et qu'il s'était probablement dit Bah, elle prend encore des photos. Parce que oui, mon premier réflexe a été de prendre une photo à la première rafale et une autre à la deuxième, et seulement ensuite de me hâter calmement, et en regardant bien autour de moi, vers le bâtiment.

Je ne peux m'empêcher de penser au malheureux kite-surfer, si jeune encore, et à ses proches. Car j'ai bien perçu la force du vent et que c'était si soudain qu'on n'avait le temps de rien faire, c'était imparable.
Je m'efforce de croire qu'il n'a pas eu le temps de se voir mourir.

Mais, même si j'ai assumé ma journée de boulot, ce soir j'ai une sorte de blues de fatigue, et une sensation de flou. Le fait que deux personnes que j'aime filent un mauvais coton et que plusieurs autres soient atteintes du Covid (même si de façon ne faisant pas craindre la nécessité d'une hospitalisation), parce que oui, c'est bel et bien reparti, n'arrange pas sauvagement les choses.

S'y ajoute la conscience que la guerre en Ukraine peut à tout moment se mettre soudain à nous concerner de près, et la quasi-certitude qu'on va sérieusement avoir froid, l'hiver prochain, car nos moyens de chauffage ne seront plus ceux qu'ils étaient. 

Ce week-end : sport et repos. 
Et ces jours-ci, (tenter de) me coucher tôt.
Ensuite, ça ira mieux. 

Il faudra aussi que je trouve l'énergie d'écrire un CR de non-triathlon.

 

(1) "Carole Cuquemel, présidente de la protection civile du Calvados s'attendait à recevoir autant de personnes face à l'ampleur et la soudaineté de l'événement : "Le temps a changé en une seconde. Vraiment en une seconde. Donc il y a des personnes pour qui ça a été et c'est encore compliqué car il y eu beaucoup de hurlements, d’objets devenus des projectiles. Il y a même eu des enfants qui ont volé. C'est une scène difficile à imaginer. Donc c'est l'une des raisons pour lesquelles certaines personnes ont pu venir et la deuxième raison c’est malheureusement la personne décédée à Villers-Sur-Mer dans un contexte très particulier. Beaucoup de gens ont été exposé en direct à ce décès. Donc psychologiquement tout cela remue pas mal."" extrait de cet article de France TV région qui met des mots sur ce que nous avons vécu.