Glanages du 1er janvier 2025


    Mon emploi, intense et essentiellement en ligne au téléphone, induit un rapport particulier avec l'actualité. Il peut se passer des blocs d'heures entiers et pour peu que nous déjeunions entre collègues le midi, une journée entière, sans que je ne sache rien de la marche du monde. 
Si certains jours on le retrouve à peu près dans l'état dans lequel on l'avait laissé en quittant le logis après le petit-déjeuner, d'autres fois il s'est passé toutes sortes de choses. Rarement réjouissantes, il faut bien l'avouer.

Souvent, avant de tomber de sommeil, je m'efforce de rattraper le coup. J'aime bien la chaîne Hugo Décrypte pour ça.
Parfois il y a des pans entiers d'événements qui m'échappent.

Ça a été le cas en fin d'année concernant la Syrie. Vague souvenir d'avoir lu un soir brumeux de fatigue que quelque part au fin fond d'une région des rebelles islamistes avaient pris une ville sous leur coupe. Et l'impression que soudain juste après, retour du boulot, et plus d'Assad ni de son régime dictatorial sanglant (En fait 10 jours s'étaient écoulés). 
Les scènes de liesse étaient belles à voir.
Restait pour moi une perplexité : pourquoi alors que pendant tant d'années ce régime ultra-violent avait tenu face à la guerre civile, soudain en 10 jours c'était plié. Il me semblait que l'abandon du soutien par la Russie de Poutine ne suffisait pas à expliquer.

Et puis ce matin je suis tombé sur cet article par Marc Gozlan dans Le Monde et qui s'il ne permet pas de tout expliquer, lève un coin du voile. Je me souviens avoir lu un jour, il y a longtemps de ça, d'autres articles évoquant cette drogue et les ravages sur les soldats. Seulement, comme souvent, j'ignorais que ce fût à ce point-là. 

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Des nouvelles du dérèglement climatique : 

via Extrême Météo au gré de prévisions pour la semaine prochaine

"Sauf changements encore possibles mais de plus en plus à la marge certainement, nous n'aurons pas une semaine prochaine hivernale faut bien le reconnaître. Les scénarios doux et plutôt humides sont en train de gagner la partie comme dans 95% des cas en saison hivernale depuis plus de 10 ans. Une telle disparition quasi complète des advections froides d'altitude sur l'Europe de l'ouest notamment, ne peut pas s'expliquer seulement que par le hasard depuis plus de 10 ans. Les changements de circulation atmosphérique à l'oeuvre, affectent notablement la représentativité des différents régimes de temps en hiver. La NAO- est d'ailleurs de moins en moins froide en hiver alors qu'auparavant elle était réputée amener froid et humidité. Nous avons aussi une disparition des configurations d'anticyclones scandinaves en hiver ou alors mal placés pour drainer du froid jusqu'en Europe de l'ouest.

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Je continue à me désabonner sur ex-Twitter de comptes que je peux suivre ailleurs, l'idée étant de quitter la plateforme si une fois que je n'aurais plus de fils essentiels à y suivre, son boss est toujours le même (1).
Au gré de mes vérifications et de mes Suivre ailleurs et Désabonner là, je m'aperçois que bien des personnes dont les publications étaient intéressantes se sont tout simplement tues (ou sont sur d'autres plateformes encore, que Bluesky ou Mastodon).
Je constate qu'un ami mort accidentellement, y a toujours son compte et qu'on pourrait croire qu'il est dans ce cas, d'autant plus que ses dernières publications sont vives et alertes.
D'une certaine façon, l'illusion est jolie : comme d'autres il aurait décidé de ne plus cautionner l'archi-milliardaire en ne publiant plus là où il est devenu patron. D'une autre c'est glaçant : ses écrits sont encore sur un lieu numérique dont il n'avait pas idée (et pour cause) de ce qu'il allait devenir. Et puis ça reste extrêmement triste, le fait qu'il ne soit définitivement plus de ce monde, celui dans lequel on mange, on dort, on vit. Pensées pour ses proches.
 

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J'ai sur mon téléfonino, un phénomène voisin : parmi mes contacts, perdurent quelques défunts qui y figuraient de leur vivant via leur compte Google +.
La plateforme a fermé. Les contacts se sont figés dans une sorte d'imputrescibilité. 
Je me doute bien qu'en effectuant quelques recherches, je trouverais le moyen de les supprimer. Seulement dans l'immédiat, la disparition du socle d'où pouvaient provenir facilement modifications et suppressions, a en quelque sort lyophilisé leur présence.

Pour l'instant je les laisse, après tout c'est une façon d'avoir pour eux une pensée. Il n'empêche, notre époque est étrange par certains aspects. 

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Une pensée en ce premier janvier pour les personnes pourvues d'un homonyme célèbre ou qui fait carrière en politique même en n'étant que localement connu. 
Comme ça m'arrive régulièrement, je tente de retrouver des adresses perdues lors du vol de mon sac fin 2017 et d'une reconstitution hasardeuse d'un back-up (en gros j'ai récupéré des infos mais sans corrélation, donc à part appeler tout le monde ...) et plusieurs des personnes que je fréquentais alors que j'étais libraire se trouvent avoir un prénom + nom qui si on effectue une recherche affichent des personnes dont le métier demande de beaucoup communiquer. Ce qui rend les (anciens) amis invisibles.
Coucou au passage à l'ami écrivain dont un réalisateur est l'homonyme (mais à présent ils sont tous deux visibles et je les imagine devoir échanger régulièrement des messages ou colis à l'un l'autre destinés).
Pensées au passage pour le voisin du dessous musicien qui n'est ni exactement dessous ni exactement voisin. 
Plusieurs fois dans ma vie je me suis dit Wow ! en entendant chanter quelqu'un, une fois lors d'un mini concert à une station de métro et à par ailleurs lors de fêtes des voisins, pour apprendre ensuite qu'il s'agissait de professionnels réputés. 
Je suis une incommensurable découvreuse de talents confirmés.

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Bienvenue et bon courage à la génération bêta. Les défis à relever sont immenses. 

Le Morrison Hotel de Morrisson Hotel a brûlé. C'était devenu un squat mais il y avait un projet pour le réhabiliter.

 

Last but not least : 

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(1) à tous les sens du terme 


Quarante ans (?!)

 

    Au gré de cette semi-grasse matinée de jour férié (1), je laisse YouTube et ses algos malins me proposer un peu de sujets musicaux, et après un documentaire sur l'histoire des Pink Floyd (comme si je n'en avais pas déjà vus une palanquée), voici un enregistrement d'un concert de Jean-Jacques Goldman au Zénith fin 1988. Or j'y suis allée, même si je n'ai pas souvenir de la date précise, je sais que j'ai assisté à l'un des concerts au Zénith de cette tournée.

Il y a une vingtaine d'années.

Euh, non 1988. 
Mon cerveau arithmétique a déjà fait le calcul mental, depuis en fait le début : 36 et instantanément, mais il a l'habitude : mon cerveau intime ne le croit pas. Alors il accroche le nombre sur une paroi dans un coin et n'insiste pas.
Mon cerveau intime sait qu'il doit se rendre à l'évidence mais avant de se rendre il pilote la carcasse pour compter sur les doigts.
Ben oui, on est près de 40, là.

Ces derniers temps ce scénario se répète au moins une fois par jour, pratiquement dès qu'un souvenir pointe son nez.
Je parviens bien à capter que j'ai 60 ans passés, je le sens à l'énergie qui diminue et au travail salarié banal qui devient jour après jour pour tenir un exploit. En revanche qu'une foule de choses que j'ai faites ou auxquelles j'ai assisté ou d'événements généraux dont je me souviens aient eu lieu non pas il y a 15 ou 20 ans mais 30 ou 40, je n'y parviens toujours pas.
Peut-être que cette perception vient du fait que j'ai passé tant de temps à bosser dans des postes sans grand intérêt pour lesquels je devais enfiler mentalement une blouse grise, le temps d'exécuter les taches qui m'étaient confiées.

Peut-être qu'il s'agit simplement d'un effet d'âge normal. 
Le saurais-je jamais ?
En attendant, je traverse mes journées actuelles avec à chaque fois un temps non négligeable de stupéfaction.

 

(1) Parce que bon quand même un petit 4 km de course à pied, E.F. + petites accél. 


Des assassins

 

    Des faits divers peuvent n'être que ça : des gens à qui il est arrivé du malheur et d'autres qui en ont infligé. En ce moment, il me semble qu'on en croise un certain nombre qui sont davantage que des drames isolés :

un homme jeune tue le PDG d'une entreprise d'assurance qui refusait fréquemment de prendre en charge les frais médicaux de malades qui finissaient morts ou surendettés,

un homme jeune tue cinq personnes puis va se rendre tranquillement : l'un était un ex-employeur avec lequel il avait eu un contentieux, et deux autres étaient d'ex-collègues dans une autre entreprise, mais on ignore s'il les connaissait réellement et deux n'avaient aucun lien avec aucun des autres mais semblent avoir été pris pour cible seulement parce qu'ils étaient là.

un homme issu d'un pays où l'Islam fait partie de la loi, et qui le reniait, a fait un carton en voiture sur des passants randoms d'un marché de Noël, semble-t-il parce qu'il reproche au pays où il vit lui-même depuis des années, d'accueillir trop de musulmans. Ses mobiles semblent confus mais sa détermination fut sans failles (hélas). Il a tué au nom d'une extrême droite qui le récuse.

J'ai l'impression d'un monde de plus en plus insensé où c'est de toutes façons la violence qui gagne. 
Le tout sur fond de rixes à Paris et en banlieue avec des animosités entre quartiers qui dégénèrent à coup d'armes blanches, entraînant la mort d'adolescents dont certains qui n'avaient sans doute rien à voir avec ces sortes de guerres de clans.


nb : Loin de moi l'idée de mettre les trois attaques sur le même plan, ils sont simplement survenus à quelques jours d'intervalle et ont en commun de nous laisser sidérés. Pour le premier par la vague de sympathie qui s'en est suivie. Pour le second par le fait que d'après ce qui a été publié dans la presse avec pignon sur rue, qu'il admet calmement avoir fait ce qu'il a fait mais sans savoir l'expliquer. Pour le troisième par le niveau de violence et la logique anéantie : il hait les islamistes et fait donc (?!?) le pire de ce qu'il peut leur arriver de faire.


Scènes de liesse


    J'ai beau être sans illusion sur la suite car ceux qui viennent de prendre le pouvoir promettent non des lendemains qui chantent, mais d'imposer leurs lois, même s'il est question pour l'instant de "dialogue avec les minorités", en attendant et en cette soirée voir en rentrant du travail des scènes de liesse dans différentes villes syriennes, des retrouvailles familiales, des personnes s'amusant dans un parking de bolides inouïs ou un palais, des jubilations en sortie de prison (1), ma foi, ça fait plaisir, en tout cas plaisir pour ce peuple. 
Je n'ai pas oublié la sidération glacée de quand nous avions appris que le dictateur avait ordonné de balancer du gaz toxique sur certains quartiers ou villages.  
Je n'ai pas oublié les adolescents de Deraa en 2011 et pas non plus totalement oublié que déjà le père du dictateur à présent destitué, avait montré un penchant pour la répression aveugle et sanglante en ordonnant le bombardement d'une ville où s'était implantés les Frères musulmans (ou autre groupe islamiste dissident) (2).
Je n'ai pas non plus oublié d'à quel point on s'était laissés berner par l'apparence de modernité qu'avait donnée dans les premiers temps le couple dictatorial; et je me souvenais même du parallèle abusif (3) effectué par certains médias entre Asma el-Assad et Lady Di. 
Je pense ce soir plus particulièrement à un couple de mes amis qui vécurent à Damas quelques temps pour des raisons professionnelles et les imagine émus (et peut-être partagés entre la liesse et le soulagement actuels et une solide inquiétude pour l'avenir général du pays).
Enfin je pense aux personnes qui viennent de retrouver un proche, parmi les prisonniers politiques soudain libérés et qui doivent se sentir coupées en deux entre la joie des retrouvailles et le chagrin absolu de prendre conscience que la personne qu'ils chérissaient n'est plus la même, brisée, et que ce moment qu'ils attendaient tant est au bout du compte celui de la confirmation d'une fin, comme un deuil.

 

(1) du moins pour celles et ceux qui ne sortent pas dans des états d'hébétude et d'amnésie manifestes, sans doute perdus à eux-mêmes après de mauvais traitements.
(2) Vérifications faites il s'agissait de Hama et c'était en 1982
Et il s'agissait des Frères musulmans.
(3) Perçu comme tel déjà à l'époque. 


Billet esquissé (entre la cathédrale Notre-Dame de Paris réouverte et fêtée, et l'actualité internationale)


    J'avais dans l'intention d'écrire un billet sur le très curieux (mais hélas pas surprenant) décalage entre la concentration de l'actualité en France sur l'inauguration de la cathédrale reconditionnée, avec plein de pontes et l'ensemble du pays devant sa télé à regarder ce qui pour la partie spectacle n'était qu'un enregistrement de la veille, soigneusement monté, et l'actualité brulante du jour qui est : la chute imminente du régime d'Assad en Syrie. Cinq ans de guerre civile, lors de la décennie précédente, n'en étaient pas venus à bout et là, en quelques semaines, à dégager. 

Je n'ai pas d'opinion éclairée sur le sujet ; dans la mesure où ceux que la presse qualifie de rebelles, sont des rebelles islamistes, je ne suis pas certaine qu'au bout du compte la population soit moins opprimée, les femmes en particulier. Mais je comprends que les enjeux sont importants, la régions étant stratégique et déjà une poudrière. Et je suis surprise - mais si j'étais bien informée, peut-être ne le serais-je pas - de la rapidité de l'effondrement.

Et là je tombe de sommeil, alors difficile de tenter d'en comprendre davantage.

Je suis contente que la cathédrale emblématique ait été reconstruite. Mais ne pourrait-on pas aussi, faire de gros efforts, financiers et de partages pour restaurer d'autres bâtiments ? Mettre les moyens pour pouvoir soigner les gens ? Les plus grands donateurs n'étaient-ils pas également les plus grands défiscalisateurs ?

 

Update du lendemain matin : Bon, les médias pignon sur rue se sont enfin réveillés et annoncent la chute du gouvernement de Bachar al-Assad (les alertes infos datant du petit matin), j'imagine que dans les rédactions des personnes de permanence piaffaient quand on leur demandait d'attendre la fin de l'Inauguration pour publier quoi que ce soit. 
Au passage j'apprends qu'il y avait depuis presque un mois un mandat d'arrêt international contre le dictateur, pour l'une précise de ses exactions. 


"Born to run" : Team Ingebrigtsen, une suite


    J'hésitais à en parler car elle est pour l'instant diffusée en exclusivité sur une plateforme issue du géant tueur de librairies, et que j'ai honte sur ce coup-là de m'être laissée allée à prendre l'abonnement qu'il fallait, mais la série "Born to run" qui en 6 épisode relate la préparation olympique et les J.O de Paris 2024 pour les trois des frères Ingbrigtsen qui pratiquent en professionnels la course à pied, est marquante, y compris je pense pour qui ne s'intéresse pas spécialement au sport de haut niveau.

Le point de vue est différent de celui des saisons de Team Ingebrigtsen qui avaient précédé : c'est celui des familles autant que des athlètes. De la vie qui va (ou pas) tout autour.
Les femmes ont leur mot à dire. Les garçons tentent tant bien que mal d'être des pères attentifs. Ils reconnaissent la part de boulot dans la gestion familiale qu'ils ne font pas. L'aîné est capable d'interrompre une importante session d'entraînement en altitude pour rejoindre sa petite famille auprès de laquelle sa présence était requise.
La série n'est pas hagiographique, ils foirent des trucs, ils ont de la mauvaise humeur parfois, ils se font enguirlander par leur femme quand ils agissent lourdement, tout champions qu'ils sont. 
Il y avait de plus un lourd conflit avec leur père qui fut aussi leur entraîneur, et a désormais des démêlés avec la justice pour violences familiales, et la série n'élude pas la question tout en restant d'une exemplaire discrétion. Le procès, je crois, n'a pas encore eu lieu.
Écouter Jakob Ingebrigtsen évoquer les enjeux de santé mentale après sa finale olympique de 1500 m ratée, et combien il a alors vacillé est extrêmement instructif - ce garçon étant la confiance en soi incarnée -.

Il y a beaucoup à comprendre de notre époque qui bouge, et de la vie, en les regardant tenter de toucher les sommets, s'y maintenir / revenir / y rester.
Le montage est excellent. 


Beaucoup d'émotions, une immense tristesse, et un regret

 

    Il aura fallu attendre quelques jours et qu'aussi les circonstances commencent à être exposées dans les médias et l'automobiliste tueur mis en examen et en détention provisoire, pour que la parole se libère ou que l'info arrive au grand public.

Connue comme vélotafeuse régulière et aguerrie, je me suis trouvée sous une vague de témoignages de sympathie et de soucis pour moi, notamment de la part de collègues sympas. Je l'avoue, je ne m'y attendais pas. Aux unes et aux autres j'explique alors mon peu de surprise face à l'acte fatal, les altercations si fréquentes, les progrès aussi depuis les débuts du retour des vélos dans Paris (2007, les premiers Vélibs et qu'ensuite tout le monde s'est mis à ressortir des caves les vieux biclous), mais la radicalisation de certains conducteurs de véhicules motorisés qui ressentent le partage nécessaire des rues et des routes comme une privation personnelle, une injure, une menace. Et se servent volontiers de leur engin comme d'une arme d'intimidation. Au risque de tuer (dont ils ne sont sans doute pas totalement conscients, beaucoup agissent pour faire peur, faire passer le goût d'utiliser le vélo et bim une petite poucette vers le caniveau, j'ose espérer qu'ils ne souhaitent pas tuer).
Je raconte les dangers perpétuels (les portières, les tourne-à-droite, les clignotants absents, les frôlages et autres queues de poissons, la feu-rougite aigüe de certains ...), les mises en danger par manque d'attention envers les plus vulnérables (piétons et cyclistes, et petits trottinettistes ...), et depuis au moins la fin des confinements les mises en danger volontaire.

Les non-cyclistes sont stupéfaits. Je m'aperçois que je n'avais jamais été loquace sur le sujet et que ça relevait du même processus qui faisait que pendant tant de décennies, l'ensemble des femmes a tu les agressions sexuelles et les pressions qu'elles subissaient, et le sexisme général ambiant : en se disant, à quoi bon, on ne les (les hommes agresseurs) changera pas, et c'est ma parole que l'on mettra en doute et je n'aurais rien d'irréfutable pour prouver ma bonne foi. On considérera que j'exagère. 
Il aura fallu un mort et des témoins et des caméras de surveillance pour que témoigner de notre quotidien de circulation devienne audible.

Quelque chose bouge peut-être enfin ?
Quelle tristesse qu'il faille un jeune homme mort pour en arriver là.

Je souhaitais me rendre aux différents rassemblements en son hommage mais j'ai travaillé tard mercredi soir et je serai au travail pour celui de demain samedi, à partir de 17:00 place de la République à Paris. Grand regret de ne pouvoir en être. Paix à l'âme du camarade cycliste. Pensées émues pour ses proches, pour la fille de l'assassin, et pour les témoins.

En attendant merci à toutes celles et ceux qui m'ont aujourd'hui exprimé leur inquiétude. Promis je ne touche jamais aux voitures, ni ne proteste, ni ne tente de faire respecter les priorités qui devraient l'être. En revanche, tant que j'aurais assez de santé, aucun chauffard ne me dissuadera d'effectuer mes trajets de la façon la plus respectueuse de l'environnement et des autres qui soit. Paris est une trop belle ville pour la laisser aux furieux. 

PS : Une fois de plus constaté qu'en France le fait d'avoir pris de l'alcool et des stupéfiants est spontanément perçu comme une excuse par la plupart des gens. Ainsi dans ce cas, ce qui atterre encore plus celles et ceux qui évoquent le drame est que le conducteur a été testé négatif aux deux, et que donc il aurait agi de sang froid. Mais à quel moment le fait d'être sous substances a-t-il perdu sa qualité de circonstances aggravantes, lorsque quelqu'un prend le volant ? Ce qui devrait nous venir à l'esprit n'est pas Il n'avait même pas l'excuse de l'ivresse, mais tout au contraire : Au moins on ne peut pas lui reprocher d'avoir bu.





Documentaire "Mères à perpétuité" de Sofia Fisher

    Si vous vous sentez assez solides en ce moment, foncez voir (disponible sur YouTube jusqu'en décembre, et sans doute sur le site d'Arte) :

Mères à perpétuité

documentaire de Sofia Fisher, au sujet des femmes qui commettent des infanticides. Il est passionnant et permet de comprendre comment, poussées à bout et si l'on a un point ou un autre de fragilité, on peut en venir à tuer pour protéger du danger. À tuer pour ne pas qu'un autre, violent et agressif, fasse pire.
Voici ce qu'en écrit Catherine Pacary dans Le Monde.

J'aime quand une œuvre, un travail, qu'il soit film, pièce de théâtre, livre, musique permet de comprendre ou d'approcher à la compréhension, de ce que l'on ne comprend pas.
Il se trouve que je suis née avec au fond de moi une force et une stabilité, qui n'a vacillé qu'en deux fois, face à des actes de revirement de personnes que j'aimais. Et jamais je n'aurais pas de mal à autrui au cœur même du vacillement, lorsque ce qu'on subit dépasse l'entendement. Je n'y ai aucun mérite, je crois que je le tiens des lignées de femmes fortes qui m'ont précédées, Ernestine et Berthe d'un côté et aussi côté italien une arrière-grand-mère ou arrière-grand-tante qui avait tenté de se soigner elle-même d'une maladie dangereuse, m'a-t-on rapporté. Ma grand-mère paternelle, était, j'ai l'impression, pas mal non plus, dans le genre qui ne se laisse pas abattre et qui quoi qu'il advienne, cuit pour tout le monde des spaghetti - l'équivalent italien du comforting tea britanique -.
Alors je comprends mal certaines pertes de repères de mes contemporaines (1).
Ce documentaire m'a éclairée.

Je me sens très reconnaissante envers les personnes, qui sont parfois les proches des personnes concernées, et qui ont accepté de témoigner.
Et je me dois de réfléchir aux missives envoyées par des femmes à des juges, en prévision d'un procès pour infanticide (il se trouve que c'était en Belgique). J'ignorais que l'on puisse faire ça, tenter d'apporter sa pierre à l'édifice, de s'adresser en direct aux autorités. Il y a peut-être un enseignement à en tirer.

 

(1) Les contemporains, je n'en parle même pas, je suis d'une génération grandie dans l'idée que la violence des hommes leur était constitutive et qu'il fallait apprendre à faire avec et s'en défendre lorsque nous devenions son objet. Que les guerres sont l'état normal, et l'exception la paix. Donc il n'y avait les concernant rien à comprendre, c'était comme ça.
Je suis heureuse de voir les nouvelles générations femmes et hommes intelligents, et aussi personnes non binaires, s'atteler à tenter de faire changer les choses, même si je crains qu'elles ne parviennent à avoir gain de cause qu'au moment où la planète sera épuisée et nous engloutira dans l'effondrement des ressources et du climat que l'humanité dans son ensemble aura provoqués. Resteront des bribes tribales de survivants et ça sera un retour à la case départ, la loi du plus fort, la violence pour l'appropriation du peu d'aliments et d'eau potable disponibles, car la survie des paisibles et des doux n'est concevable que dans un monde équilibré. Je vois l'avenir comme dans Enig Marcheur , quelque catastrophe nucléaire permettant éventuellement comme c'est le cas dans le roman, de devancer d'appel.

nb : note pour quand j'aurais du temps personnel (Mouarf se marre mon cerveau pensant), les interventions de Mathieu Lacambre étaient fort éclairantes. Aller lire ou écouter de plus près son travail, ce qui en est disponible auprès du grand public, pourrait être une bonne idée.


Aha je pratiquais le naked running sans le savoir


    Un immense bonheur des jours de congés, c'est de pouvoir s'intéresser à ce qui nous intéresse, ainsi je vaque à quelques occupations tout en écoutant tranquillement quelques podcasts dont DTC : 

La fréquence cardiaque en course à pied

J'y apprends au passage que je pratique peu ou prou le naked running, sauf pour les séances avec des allures, puisque la montre y est nécessaire. Je la porte d'ailleurs sur l'ensemble des séances, mais sur les séances en endurance fondamentale ne la consulte que pour savoir où j'en suis de la durée et adapter le parcours en fonction de ce paramètre. C'est seulement une fois rentrée que j'analyse. 

J'écoute le souffle et le corps, très rarement (pour les EF ultra courtes si c'est une semaine sans temps personnel dispo) un podcast de course à pied. J'écoute les bruits extérieur et observe l'environnement. C'est l'intérêt de la course à pied.
Tout monitorer, n'aide pas au progrès ; à moins d'être de très haut niveau et d'en être à la chasse aux dixièmes de secondes. Ce qui compte à mon niveau c'est la régularité.
Ce qui compte à mon âge, c'est de tenir le coup en attendant d'être enfin libérée, si la retraite ne disparaît pas complètement.

Après, mon cas est particulier puisque la thalassémie me fait battre le cœur plus rapidement pour la même efficacité d'apport d'oxygène que pour une personne de pleine santé.
Il n'empêche, courir, c'est bien sans grand chose de plus que le strict nécessaire. Hop !


Ça me titille

 

    Ce n'est pas parce que face au principe de réalité (et une pandémie m'a hélas donné raison) j'ai mis ma vie entre parenthèses pour tenter encore un peu de la gagner avant de ne plus pouvoir le faire (la retraite finit quand même par s'approcher même si chaque pouvoir politique la recule d'un cran), que l'écriture m'a quittée.

Les idées continuent à pulluler. Parfois encore, j'ai des bouffées que je dois me contenter de jeter en vrac sur un carnet, un fichier. J'ai renoncé à en faire mon activité principale tant que la retraite n'y est pas : I'm not a hero et mon mari encore moins, donc il faut assurer le quotidien, je suis parvenue à prendre nos dispositions pour mettre notre fille à l'abri relatif (au moins quoi qu'il advienne, elle aura un toit). Contrairement à certaines de mes amies, et quelques copains, je ne suis pas capable de mener de front l'écriture et un emploi salarié à temps plein. J'ai testé. Testé le temps partiel aussi, mais les fins de mois étaient trop épiques.

L'abstinence relative forcée de ce qui aurait pu en d'autres circonstances de vie être ma principale activité, présente l'avantage de laisser les idées se décanter.

Deux axes se dessinent, deux sujets que j'aimerais aborder.

Probablement pour tenter d'y voir plus clair.

  • L'histoire des proches des coupables.
    Dans bien des cas, les proches des coupables de crimes, d'escroqueries fuligineuses, ou d'attentats tombent dans la sidération.
    Dans certain cas ils voient venir une dégradation, tentent en vain d'alerter, ne savent vers qui se tourner, et la catastrophe qu'ils craignaient a lieu.
    Mais dans un nombre non négligeable de cas, ils sont stupéfaits. N'ont rien vu venir chez la personne qu'ils côtoyaient quotidiennement et qu'ils aimaient. 
    Cela fait d'eux également des victimes. Des victimes avec un statut très particulier puisque peu de personnes ont pour elles de la compassion, voire les considèrent comme des coupables annexes.
  • La question des fans, de qui que ce soit.
    Comment une personne peut-elle en venir à accrocher sa vie à celle de quelqu'un d'autre ? Au point de passer des heures à attendre avec pour seul espoir de l'entrevoir. 
    C'est un total mystère pour moi, même si par trois fois j'ai ressenti une grande émotion lors d'échanges avec des personnes dont j'admirais le travail (artistique ou sportif). Cette question me traîne en tête plus particulièrement depuis les répétitions des concerts au stade de France en 1998 avec Johnny, et de rester perplexe devant ces personnes, généralement fort sympathiques quand on échangeait quelques mots, et qui passaient des journées à attendre devant les barrières, dans le simple espoir d'un échange si bref fût-il, avec leur idole. 
    Dans mon enfance, j'ai entrevu des images de la Beatlemania qui sévissait alors à plein tubes, et je crois que je suis perplexe depuis 55 ans.

Ça peut paraître bizarre de supposer qu'écrire, de suivre des personnages confrontés à ces configurations devrait pouvoir m'aider à piger, mais je sais que ça peut fonctionner.

Et je ne suis pas dupe : d'ici à ce que j'ai enfin le temps de m'y coller, j'ignore si j'aurais assez de santé ou si le monde dans sa marche, vers une très sombre situation pour la suite de l'humanité, n'en sera pas déjà arrivé au point où écrire de la fiction sera impossible et la survie seule occupation permanente exclusive (dans le meilleur des cas : celui de survivre).  


PS : C'est un article d'Emmanuelle Lequeux pour Le Monde qui est venu me gratouiller à nouveau sur le sujet. 
Et son corollaire, la question de l'amnésie globale transitoire qui est quelque chose qui m'est familier (mais dans un autre contexte : celui de catastrophes générales ou intimes)