Ce matin, tranquille enfin
C'est ce billet de Virgile qui a réveillé chez moi de vieux souvenirs. Je crois que j'étais en première quand j'ai croisé ma première HP. Je n'avais aucune idée des parcours infixes et postfixes, en revanche sur ma calculette de base que j'avais, me gênait de devoir employer des parenthèses ou procéder par étapes si je ne voulais pas avoir de mauvaises surprises quant aux ordres de priorité des opérations (l'exemple que fournit Virgile avec 14 et 20 est typique), alors cette machine qui travaillait comme ça marchait dans mon petit cerveau, d'une façon qui ne me demandait pas à réfléchir parce que c'était l'ordre dans lequel si j'avais été la machine j'aurais aimé qu'on me cause, forcément j'ai eu une sorte de coup de foudre technique.
Hélas, elles étaient chères les HP. Alors j'ai dû me contenter d'une Casio, beaucoup plus abordable, pour la suite de ma scolarité - et encore, après le bac car les machines venaient à peine d'y être autorisées et je crois que seuls des modèles tout simples étaient homologués (programmer c'était tricher) (0) -, toute en longueur avec petite programmation en basic sur des touches peu compatibles avec une grosse main (1). Je me souviens encore de ma fierté pour des mini-programmes les plus élémentaires, la longue patience pour les saisir (un écran d'une seule ligne), la fascination que c'était de se faire obéir par une machine.
Comme pour tant de choses dans ma vie, j'ai fini par réaliser mon rêve de notation polonaise inversée ... mais vers mes débuts d'ingénieurs, alors que travaillant sur terminaux via lesquels on programmait en fortran, je n'avais plus besoin de calculatrice que pour de très ponctuelles vérifications ou chez moi pour faire mes comptes (surtout des soustractions), alors avoir une sorte de jaguar de la calculette n'était plus de grande utilité.
Plus tard elle est tombée en panne, et le service après-vente de la fnac, en ces temps reculés aux petits soins avec la clientèle, et qui n'avait pas pu la réparer ou l'avait égarée, m'avait fourni un modèle tout neuf, au plus récent de ce qui se faisait.
C'était à l'heure où les ordinateurs personnels commençaient à équiper non seulement chaque bureau au travail mais chaque logis même très moyennement fortuné, je faisais mes comptes sous excel, voire même un temps "money" (2) et la calculatrice de mes rêves si elle sert encore parfois est pour le père de mes enfants lorsqu'il rapporte du travail à la maison.
Et à la librairie, sauf pour la TVA (3), je pratique le calcul mental (4). La Polonaise inversée aura donc eu ceci de commun avec le grand poète belge qu'elle est arrivée un peu tard dans ma vie. Ô cruels empêchements du peu d'argent et de la géographie !
(0) C'était surtout concernant les logarithmes et la trigonométrie que l'emploi des calculatrices électroniques aidait, et pour nous affranchir du papier (tiens, tiens). Mais on était bien loin de celles qui dessinent une courbe à partir d'une équation.
(1) Hé oui, des fois, c'est cool d'être une fille.
(2) À ma décharge je bossais dans une banque et certains de mes collègues boursicotaient. J'ai assez vite pigé qu'avec mon budget familial étriqué et le peu d'opérations financières que j'effectuais, ce logiciel était surdimensionné.
(3) Vivement qu'elle soit remise à 5,5 % . Dégrouille François !
(4) avec support papier !
PS : Pour les curieux, Julien Guadet, l'auteur des tables logarithmiques en trois volets qu'on utilisait alors dans certains établissemnts était un ancien résistant
PS' : Tiens, pendant que j'y suis, saviez-vous qu'Enzo Staiola, le gosse irrésistible, de "Ladri di biciclette" de Vittorio De Sica devint plus tard prof de maths ?
[c'était ma rubrique, au matin des jours fériés j'adore apprendre des choses inutiles]
Ce billet n'est pas sponsorisé par HP, c'est un salut d'amateur à l'innovation technique que ces calculatrices ont en leur temps représenté.