Depuis que j'ai retrouvé comme en 2012 un canal pour voir des retransmissions à la carte et sans commentaires ni réclames, je me régale de J.O.
Ça tombe bien, le travail à temps plein, finalement assez intense car il y a des clients au lieu de l'étiage qu'on me prévoyait, et pas mal de boulot déjà sur les commandes scolaires même si je n'interviens qu'en complément, suffit à pomper toute l'énergie que j'ai. Ce qui fait qu'en rentrant ou comme ce week-end je ne pourrais pas ou peu écrire.
Par ailleurs je sors de la lecture d'un roman très prenant, qui m'a touchée (1) et je peine à enchaîner sur autre chose qui forcément me semblerait décevant.
Alors je regarde le sport, me réjouis de voir de si beaux gestes, des instants de grâce (ah les Chinois et Chinoises en plongeon synchronisé), leur exultation pour ceux qui l'emportent. Ça fait du bien d'oublier un moment la pente fatale qui semble entraîner le monde, les violences et les horreurs.
J'avoue que je ne savoure pas sans arrière-pensées, les menaces sont pesantes et je suis assez âgée pour conserver des souvenirs d'enfance de 1972, alors étant donné le contexte actuel je me dis qu'il faut profiter de chaque jour passé sans drame ni tourment.
Ces retransmissions en sons réels permettent de jouer à rêver d'être sur place, dans le public mais bien placé ; de voir aux temps d'interstice des détails techniques ou touchants (oh le geste de la gymnaste chinoise qui a délicatement remis en place la queue de cheval de sa coéquipière que la médaille coinçait), de mieux comprendre (par soi-même) que lorsqu'on nous assène des explications.
Le public c'est le seul regret : il semble composé uniquement de supporters de l'un ou l'autre athlète ou équipe qui ont fait le déplacement. Les places ont dû être vendues à des prix prohibitifs. Le peuple n'y est pas. Ou alors un peu, à la marge, par exemple sur le bord des routes du cyclisme sur routes, quoi qu'assez clairsemé.
La peine de ceux qui perdent ne me laisse pas indifférente, je crois savoir ce que c'est que de se donner du mal pendant des années pour quelque chose ou quelqu'un et que soudain tout se résume à plus rien. Reste le parcours et d'avoir quand même atteint le niveau qui permettait de prétendre à ce qu'on croyait possible.
Et puis j'apprécie tout mieux que je ne l'aurais fait plus jeune et je sais bien pourquoi : au fil de la vie, j'ai à peu près tout essayé des sports qui me rendaient curieuse - bon allez, pas le saut à la perche, et des sports de combats seulement le karaté -. Mais j'ai pratiqué un peu d'équitation, j'ai aussi sauté (plongé, même pas, trop difficile pour moi de si haut) d'un tremplin élevé (2), essayé tous les sports de balles ou ballons. Bref, je regarde désormais comme quelqu'un qui sait quels miracles se cachent derrière l'apparence de facilité de ces athlètes de haut niveaux. Et puis ceux qui concourent ont désormais l'âge de mes enfants. Peut-être que ça rend à mes yeux leurs exploits encore plus émouvants que lorsqu'ils auraient pu être mes cousines ou mes frères aînés, puis mes copains de classe, plus tard d'éventuels frères ou sœurs plus jeunes et à un moment donné d'éventuels amis ou petits-cousins plus jeunes.
J'espère que des olympiades existeront encore dans un monde pas trop cassé lorsque les concourants seront en âge d'être mes petits-enfants et que je serai encore là pour admirer et pleurer de beauté devant certains gestes parfaits.
(1) "Vie prolongée d'Arthur Rimbaud" par Thierry Beinstingel
(2) du temps où la piscine municipale possédait une fosse et des plongeoirs