Lunettes

 

    Au réveil ce matin, j'avais perdu mes lunettes de vue. J'étais pourtant persuadée de les avoir déposées à mon chevet à l'instant où j'avais cessé de lire ou regarder une video alors que le sommeil gagnait.

J'ai mis un moment à les retrouver, il faut dire que l'Homme ne m'avait pas aidée qui avait prétendu que je ne les avais pas sur moi en venant me coucher. 

Elles étaient en fait tombées dans un interstice entre l'une des piles de livres qui enserrent mon côté du lit et ma table de chevet. Sans doute à la suite de mon geste endormi pour saisir mon téléfonino dont le réveil était malencontreusement resté enclenché. 

Le gag étant que l'interstice faisait tout juste la taille des lunettes. J'eusse voulu le faire volontairement que je n'y serais pas arrivée.

L'autre gag c'est que les lunettes à peine retrouvées, c'est leur étui qui a pris la poudre d'escampette, comme pour manifester son mécontentement.

PS : Étui retrouvé facilement ce matin : grand classique de la #VieFamiliale : quelqu'un avait posé quelque chose par dessus. 


D'un inconvénient inattendu d'avoir les cheveux frisés

 

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Nous venions de terminer le dîner et l'homme de la maison m'a proposé une brève balade tant qu'il faisait jour et que le couvre-feu n'était pas tombé. 

Je lisais ou j'écrivais, bref, j'avais mes lunettes de vue sur le nez, je les ai vivement retirées afin de filer sans plus tarder. Zou !

J'ai replié les lunettes dans leur boîtier qui est de ceux rigides où elles s'enfilent sur un côté. 

À un moment donné de la balade, environ 800 m de la maison près d'une haie non loin d'un arbre où beaucoup d'oiseaux à ce moment-là chantaient, j'ai eu l'impression qu'un branchage m'était tombé sur la tête, j'ai entendu un léger bruit d'une chute, me suis demandée d'où venait ce que j'avais reçu, curieux, l'arbre en vu est assez loin quand même. 

Et puis nous nous sommes bien promenés. De retour à la maison vers 22h35, peu avant l'extinction des feux, à 23h. 

Je veux reprendre là où j'en étais, tire les lunettes de leur étui, les mets sur mon nez et me fait mal derrière l'oreille droite. Je les enlève aussitôt : il manquait tout l'arrondi de la branche, la partie non métallique et c'était le bout pointu à présent à découvert qui m'avait écorchée. 

J'ai cherché dans l'étui : rien. 

Il ne m'a pas fallu longtemps pour piger que le bout de branche avait dû resté coincé dans mes cheveux jusqu'à s'en détacher probablement là où j'avais cru recevoir un branchage.

J'ai pris une lampe de poche, scruté pas à pas le trottoir à cette hauteur là ... et retrouvé la pièce manquante.

De retour à la maison cinq minutes exactement avant l'extinction des feux. 

Les lunettes sont défectueuses à n'en point douter. Il n'empêche que c'est une mésaventure de cheveux frisés de les avoir suffisamment forts pour détacher un morceau de branche dans le geste de les ôter. Et que le bout restant se soit promené ensuite près d'un kilomètre avec moi avant que de choir. 

En attendant, j'ai remis la pièce en place et pour l'instant elle tient. 

 


Se prendre en compte

 

    Il aura donc fallu un vol stupéfiant (1) et qu'on me demande si j'avais des factures pour que je prenne conscience d'à quel point soucieuse de ne pas dépenser de l'argent que je n'avais pas, ni de surconsommer, aimant aussi trouver une utilité aux objets qui m'échoient, je me traitais un peu mal et qu'il était grand temps que je pense à moi. 

Je faisais durer depuis des mois mon petit Mac Book Air parce qu'il avait une valeur affective et par souci d'économie, mais de fait je me privais d'un fonctionnement normal, ça faisait longtemps que je n'avais pas sérieusement "développé" mes photos parce qu'il saturait. L'écran était devenu trop petit pour ma vue déclinante.
Je faisais durer depuis des mois mon sac à dos d'ordi. Je l'avais obtenu dans le cadre d'un programme de fidélité de ma banque à présent changé pour un système de cashback qui ne me sert pas, puisque j'achète peu ou par nécessité immédiate et donc sans choisir où. Il était troué en dessous, les fermetures éclair se rouvraient.  Il n'était plus tout à fait sûr. 
Des pochettes qu'il contenait, une seule correspondait à un achat - elle était si pratique et je la regrette -. Les autres étaient plus ou moins des petites trousses publicitaires. L'une imperméable venait de chez ma mère. Dommage, sa seconde vie n'aura pas duré. 
Le portefeuille était une réclame d'il y a des années. J'en avais pris l'usage en 2009 lorsque je m'étais fait voler un autre que j'avais et que j'aimais bien.
Le cordon du téléfonino qui m'a été volé correspondait à mon nouvel appareil qui est un "faux gratuit" de mon opérateur.

Bon, la souris de l'ordi. était aussi un achat mais depuis quelques temps elle avait un faux contact, par moments. 

Mon fils a pu me dépanner fort gentiment d'un ordi immédiatement. Il s'était facilement offert ce que je reportais pour moi. Certes, il gagne sa vie depuis qu'il est apprenti et participe volontiers aux frais de fonctionnement de la maisonnée, mais pourquoi est-ce que j'admettais de me priver d'un outil en pleine forme alors que nous sommes quatre dans ce même logis. 

Mes autres objets achetés et volés étaient des livres mais c'est aussi lié à mon métier. Pas des achats de fantaisie, même s'ils me font plaisir.

J'avais la même paire de lunettes depuis plus de 5 ans. Certes c'est parce que ma vue de loin n'a pas franchement baissé mais quand même. Dès que j'ai à nouveau une mutuelle, je prends rendez-vous chez l'ophtalmo, il me fallait le faire de toutes façons.

Nous allons devoir changer la serrure de la porte. Des années que par moments elle se bloque ou avec certaines de nos clefs. Mais l'homme de la maison freinait pour la changer.  

C'est effarant à quel point je suis formatée pour ne pas dépenser. Des années de manque d'aisance. Des années de vie avec quelqu'un qui n'a pas une relation normale avec l'argent. Les fins de mois difficiles ont fini par avoir raison de ma résistance à son trouble.
Cela dit, par souci écologique et de ne pas surconsommer, c'est moi et moi seule qui suis incapable de remplacer quelque chose qui fonctionne et fait bon usage par un autre modèle simplement parce qu'il est plus joli ou plus à jour des dernières spécificités. Mais il est temps que j'intègre qu'il ne faut pas traîner avec un matériel qui commence à être défaillant sous prétexte d'être raisonnable. On se complique la vie et on facilite le non-remboursement pour cause d'obsolescence par une assurance éventuelle en cas de problème.

Il est temps que j'apprenne à avoir envers moi un minimum de respect. À prendre en compte mes besoins, à ne pas toujours les reporter à des jours meilleurs qui ne viendront peut-être jamais.

En attendant le nouvel ordi, vif, rapide, lisible, agréable, me réjouit. J'en éprouve un regain d'appétit de travail, d'énergie.

 

(1) que je n'aie rien senti ne m'étonne pas : depuis le 7 janvier 2015 je ne ressens plus les présences à l'arrière, ni n'ai conscience de regards posés sur moi si je ne vois pas la personne qui me voit. En revanche que les personnes à ma table n'aient rien vu alors qu'elles étaient en face ou juste à côté de moi m'étonne. Je ne m'étais pas même absentée le temps d'aller aux toilettes. 


Grâce à Thierry, grâce à Arthur

 

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Plongée avec délices dans "La vie renouvelée d'Arthur Rimbaud" de Thierry Beinstingel, j'éprouve le besoin de vérifier quelque chose dans la correspondance de l'Ardennais voyageur, qui est, je le croyais un de mes livres de chevet, une folie que je me suis accordée il y a quelques années. 

    Hélas, il semble avoir migré vers d'autres quartiers. Les rigueurs de l'année 2015 comme auparavant celles de la deuxième partie de 2013 m'ont fait perdre le fil de ma mémoire. Où diable ai-je mis cet ouvrage que je supposais en permanence à portée de ma main ?

Je suis seule, ou du moins seule dans la chambre, là où demeurent les livres en cours ou les livres importants. La matinée a été sportive, 1h30 de course puis autant de marche, la maison de Théophile Gautier (dont j'aimerais reparler), un marché perdu dans une ville que je croyais ne pas aimer, mais qui s'est montrée presque accueillante au cœur de l'été, la sieste moins reposante que je ne m'y attendais ; je ferais donc mieux de rester étendue à lire le roman présent plutôt que de me remettre en chasse de documentation.

Seulement c'est plus fort que moi, je suis saisie par le besoin d'en avoir le cœur net. Et me voilà lancé dans un tri que je rêvais bref, et qui ne l'était pas : j'avais oublié l'effet induit par trois années trop âpres, trop mouvementées. Alors j'y passe quatre heures et sans avoir fini. Ranger rarement permet d'exhumer des pépites. Je m'aperçois que je dispose de bien plus d'ouvrages concernant l'ancien jeune poète si vite retraité que je ne le croyais - sans toutefois retrouver celui que je cherchais -. Je retrouve sans l'avoir cherché un livre qu'un autre ami m'a donné une puissante envie de (re)lire  20160731_211913

C'est drôle je n'y serais pas parvenue si je l'avais voulu. Retrouve aussi des ouvrages qui me seront utiles à préparer l'automne et les rencontres littéraires qu'enfin sur la colline nous allons proposer. Me garde d'ouvrir certaines correspondances, inutile d'attiser les chagrins mais remet avec bonheur la main sur une citation de Rilke que l'on m'avait offerte et qui aura contribué à changer ma vie. Et ça, ça ne me fait pas de peine, puisque non sans efforts et une part de chance, le cap d'un morceau de ce changement est bien franchi, pas tout à fait celui envisagé, mais c'est déjà beaucoup.

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Je retrouve certains de mes propres écrits, dont l'un sous forme reliée ce qui me laisse surprise : suffisamment de temps s'est écoulé pour que je puisse les lire avec le regard de quelqu'un d'extérieur. Je redécouvre aussi un présent perdu 20160731_213148, la rupture surprise subie étant intervenue avant la revoyure pour laquelle il était prévu.

Les ruptures subies en 2006 et 2013 ont encore une lourde influence sur ma vie, me le confirme lors d'une pause et entre tant d'autres choses, le message d'une amie récemment réapparue. Je la croyais en distance, trop atteinte en 2013 je lui avais en quelque sorte fait faux bond sur un projet qu'elle me proposait - je n'avais plus de forces, j'étais trop sujettes à des moments d'abattements - et ces expériences malheureuses m'avaient fait croire que qui se met en silence a ses raisons, que les humains sont très impermanents dans leurs tendres affections. J'avais tout faux pour l'amie en question, elle avait en fait traversé de graves ennuis de santé et consacré l au travail l'énergie qui lui restait. Fataliste, je m'étais accoutumée à l'absence. À présent je frémis à l'idée qu'elle eût pu être définitive. 

 

Le livre recherché est resté caché, mais l'heure a tourné. Il est temps de remettre de la cohérence dans certains tris puis de filer au lit. 

Je sais que ça comporte une part de lâcheté mais j'avoue que cette plongée dans les lectures et des souvenirs personnels, en me laissant oublier le son, la marche du monde, m'a offert une très bienvenue parenthèse. Comme tant d'autres personnes, depuis 2015 et de façon renouvelée depuis le 14 juillet et les nouvelles séries d'assassinats qui se sont succédées, j'éprouve le besoin de penser à d'autres choses que le fonctionnement funeste du monde et les hommes bien trop fiers de leurs accents guerriers. 

 

La citation de Rilke revenait à point nommé.

 

 

 

PS : Comme demain personne n'aura à se lever tôt, je me suis réellement sentie comme un premier jour de week-end (les miens sont pour quelques temps dimanche - lundi), ce qui m'a permis d'échapper au sunday evening five o'clock blues. Rare et précieux.

PS' : Bonheur de la redécouverte d'un texte de Thomas Gunzig, "Bon alors on y va" dans un recueil collectif offert par quelqu'un d'autre. Très beaux textes pour dire le lien affectif fort d'un père pour son enfant.