Parfois le marketing conduit à des trucs pas mal (si on a les bons amis)

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Tout aura commencé par un touite de @Celinextenso

ou plutôt un touite à elle en réponse à un touite du CM d'Interflora qui semblait proposer d'envoyer des fleurs à qui des twittos ou twittas que nous connaissions le méritait. 

Il se trouve que l'une de nos camarades @kinkybambou est en bagarre contre un cancer, qui ces jours derniers s'est révélé être du genre starteupeur au trop rapide développement. Alors on a suivi Céline, le hashtag #DesFleursPourXanax (Xanax La Guerrière, désormais La Fougère étant l'un des pseudos de notre amie sur le réseau), et les fleurs ont bien été livrées.

Nous ne sommes pas dupes, c'est pour la chaîne de fleuristes une belle opération de com à pas cher. Il n'empêche que le résultat est doux, et qu'il a permis une médiatisation locale qui pourrait se révéler utile à un moment ou à un autre, ne serait-ce que parce que le monde étant ce qu'il est on est parfois mieux traité·e·s si nos interlocuteurs savent que l'on dispose d'une petite notoriété. 

On peut donc se dire que c'est du marketing intelligent (et que Céline Extenso est quelqu'un de formidable, mais ça, on le savait).

PS : À propos de twittas formidables, je dois un somptueux fou-rire de ce soir à Norden Gail  

 

 


Ces douleurs inconnues et qui le resteront


    Elle avait dû sortir du RER en même temps que moi, mais marchait plus vite d'où qu'elle me dépassait tout en parlant ou plutôt pleurant au téléphone. Une jeune femme. Et qui répétait, "Ma grand-mère elle est morte, ma grand-mère elle est morte" comme pour s'en convaincre, rompre une profonde incrédulité ou pour en convaincre son interlocuteur qui peut-être ne prenait pas l'affaire avec la gravité qu'elle réclamait. Elle était agitée, revenait sur ses pas, repartait, répétait cette phrase. 
Au moment où je me demandais s'il convenait de faire quelque chose, le feu est passé vert piéton, l'interlocuteur a peut-être eu une parole sensée, la boucle s'est achevée, j'ai entendu ce début de phrase "Tu comprends ...", elle a repris son chemin d'un bon pas. Le moment de malaise, de choc semblait passé.

Je me suis alors demandé s'il avait fallu lui venir en aide, ce que j'aurais bien pu dire, ignorante de l'effet que perdre une grand-mère fait. 

Ma grand-mère maternelle  était morte dix-neuf ans avant que je naisse, des suites indirectes du débarquement. Conditions de vie difficiles, maisons cassées, mal chauffées et un nouveau-né d'après le terrible été 1944, lequel avait succombé à l'automne d'une infection qu'on ne savait soigner (pas d'antibiotiques par exemple) et la encore jeune accouchée avait suivi de peu (pneumonie ou pleurésie). C'est curieux comme elle me manque, je crois que nous avons de solides points communs, l'amour des livres, une bonne aptitude à tenir boutique, une force profonde quasi indestructible (tout est dans le quasi, et la vulnérabilité quand vient la maladie, la mort d'un tout proche, une rupture subie), ce truc qui fait que tant qu'on ne tombe pas on tient. En attendant, je n'ai jamais ressenti la peine de sa mort, le mal était fait.

Ma grand-mère paternelle, la Nona, est morte alors que j'avais cinq ans. Nous ne nous étions vues qu'une fois par an en été chaque été. Nous séjournions brièvement chez mes grands-parents lorsque nous passions à Torino. J'ai quelques souvenirs et celui qu'elle m'impressionnait - elle était très massive, avait mis au monde tant d'enfants -, qu'elle essayait de me parler, mais je ne comprenait guère, je la revois cuisinant la pastachuta (orthographe ?), je la revois régner dans sa cuisine petite pièce encombrée mais qui sentait toujours bon - toujours quelque chose en préparation -, je me souviens de l'imposante machine à coudre à pédale, et qu'elle avait consenti à me montrer un peu comment fonctionnait le pédalier. Elle essayait d'être gentille avec moi et moi je n'éprouvais qu'une sorte de peur. Elle portait une blouse, comme toutes les femmes modestes et qui du matin au soir cuisinaient pour leur famille ou tenait leur intérieur. Ses jambes étaient gonflées et douloureuse, elle avait du mal à marcher.

Un jour mon père est triste, et mes parents m'annoncent qu'on ne la reverra plus jamais, elle est morte, disent-ils sans me baratiner. J'ai à peu près compris que les très vieilles personnes un jour disparaissent et qu'on ne les revoie plus mais la mort reste pour moi quelque chose d'insensé (au sens d'en être dépourvu). Je ne suis pas triste, mais je comprends la tristesse de mes parents, je me dis ça doit faire de la peine quand on est devenus grands de se dire qu'on ne reverra plus quelqu'un. 
Il me semble que mon état d'enfance me protège, je pleure un peu par mimétisme, avec sans doute une once de soulagement : je n'aurais plus peur de cette personne dont la compagnie pourtant affectueuse (ou peut-être à mes yeux trop) m'effrayait.

En tout état de cause ça n'est pas comme perdre une grand-mère avec laquelle on avait une relation affective forte et épanouie. Mon père ensuite s'absente quelques jours et puis revient, dûment lesté de quelques menus objets dont un broc à lait. Et une cafetière italienne si mes souvenirs sont bons.
Plus tard mes parents se disputeront. Et dans la dispute il y aura les mots "Brocs à lait" et "tout pour le curé" et "dernières volontés". 

Je ne comprends pas ce que cette expression signifie, mais je comprends que ça n'est pas le moment de demander, Ah ça, non. 

Au bout du compte me voilà vieille adulte bien incapable de savoir l'effet que fait la perte d'une grand-mère, surtout une grand-mère de belles histoires, de romans ou de cinéma qui passe du temps chaleureux avec ses petits-enfants et les console du monde des grands.

Plus tard je lis quelques touites d'une amie qui relativise les difficultés de sa vie actuelle avec un nouveau-né qui fut pressé de naître et qu'il convient de particulièrement accompagner dans ses débuts dans ce monde infecté, elle le fait en se référant à la douleur physique et morale d'une fausse-couche. 
Il se trouve que j'ai eu cette grande chance d'avoir eu des enfants exactement quand leur père et moi nous sommes dits Peut-être qu'on pourrait ? N'avoir jamais eu à me poser de question, ni aucune complication de grossesse, ni jamais de grossesse non désirée - vive la contraception ! -. Au vu des douleurs insoutenables d'un accouchement, j'imagine qu'une fausse-couche ne doit pas être de la rigolade en plus qu'on sait que c'est souffrir pour avoir la confirmation que c'est raté. 
Puisque je ne suis plus en âge d'être fertile, je sais que cette épreuve ne peut plus m'arriver. 

Voilà donc dans la même soirée la révélation que de certaines douleurs non seulement nous sommes ignorants, mais nous poursuivons notre existence avec la garantie, l'étrange garantie, qu'elles resteront pour nous dans cet état précis. Ce qui surprend d'autant plus que la vie est généralement avare de garanties (Never say never) 

 

PS : En revanche pour ce qui est de la peur de perdre l'être aimé, tombé gravement malade, je connais. Près de vingt ans plus tard nous sommes finalement toujours l'un et l'autre en vie. Puisse cette remarque redonner de l'espoir à un de mes amis. Ça arrive qu'on s'en sorte. 


Pour Marion Bartoli


    Le tennis n'est plus pour moi qu'un lointain souvenir - j'ai arrêté il y a vingt-sept ans pour cause de bébé en route puis de baby-sitting et de location de cours trop chers et ensuite la vie a été trop remplie - et de fait je ne suis même plus de matchs retransmis. Il n'en demeure pas moins que je suis encore apte à reconnaître des exploits et à en être admirative.  

Ce fut le cas il y a trois ans de cela, alors que Marion Bartoli remportait Wimbledon, et qu'en plus elle était moquée tout simplement d'être une femme normale, avec ses rondeurs naturelles. Ces jours-ci on parle à nouveau d'elle, sa taille mannequin que certains ont admirés, n'était que le signe d'un problème de santé (1). Pour avoir souffert d'une mononucléose dans ma prime jeunesse, je peux croire à la possibilité d'un virus ravageur. Et une fois de plus j'admire son cran face à l'adversité.
Nous ne vivons pas ou plus dans le même monde - comment pourrait-elle imaginer des fins de mois où l'on s'efforce de moins respirer de peur d'être facturés -, vingt ans d'âge nous séparent, et pourtant je ressens quelque chose de l'ordre de la compassion et de la solidarité. Peut-être aussi parce qu'un tel état me rappelle les deuils les plus graves ou les chagrins d'amour quand celui-là fut grand (2). J'ai des souvenirs de devoir fractionner mes repas, de fièvres nocturnes, de claquer des temps y compris par beau temps, d'avoir probablement une allure de camée en manque - alors que c'était quelqu'un qui manquait -.

Les sportifs de haut niveau font violence à leur corps, on leur impose plus ou moins pas mal de choses dangereuses aux effets long terme méconnus. Le tennis y ajoute des déplacements incessants, je ne crois pas qu'encaisser des décalages horaires à longueurs d'années soit bon pour la santé, même si la carcasse peut faire semblant de s'habituer.

Puissent des médecins trouver l'origine de son mal. Puisse-t-il être curable. Puisse-t-elle retrouver la santé.

(Et j'en veux encore plus aux imbéciles qui la moquaient).

 

(1) L'interview entière est .
(2) Ça rappelle aussi les conséquences d'une irradiation.


Monsieur Honoré - un film

J'irai le voir dès que je le pourrai. Honoré me manque. Je crois encore voir sa silhouette plusieurs fois par semaines. Moins depuis que je suis à Montmorency. Peut-être parce que sur la colline on croise moins de grands messieurs à crinière blanche. Sans doute aussi parce qu'être occupée par un travail à forte part concrète (livres à manipuler, clients à accueillir et parmi eux de fins lecteurs à conseiller), j'ai quelque chose d'un peu solide sur quoi m'appuyer. Au moins trois heures par jour et un week-end sur deux, le deuil et l'autre deuil (celui-là purement affectif) sont tenus à distance, plus les temps de transports qui certains jours très actifs et d'autres dans de très confortables trains, la beauté de l'environnement, la proximité de la forêt font infiniment de bien. J'avais besoin d'un calme actif, il m'est accordé.
J'entends cependant sa voix. Généralement elle me commente avec son humour des instants auxquels j'assiste. 
Comme si on était à l'Astrée que je lui racontais et qu'il me répondait.
C'est ce qui dans la débine me console, me dire, quand même, qu'est-ce qu'on a bien rigolé, toutes ses années. Et tant qu'il nous reste de la mémoire, ça, personne ne peut nous le retirer. Nos bons moments sont notre richesse.

Le livre de Catherine Meurisse, m'a bouleversée. "Toute l'année 2015 a été une quête de survie". Alors que je suis bien moins touchée, ma vie quotidienne n'a été en rien modifiée si on ne tient compte que de son aspect concret : il y a "seulement" un ami que je voyais régulièrement au sein d'un groupe chaleureux, que je ne vois plus, la survie, j'en suis encore là. Parce qu'en réalité c'est tellement plus que ça et, même si j'ai fait ce qu'il fallait en quittant un emploi où, sans doute aussi par conséquences, je suffoquais (1), c'est encore tellement chaque jour un effort pour ne pas céder à une tristesse qui sape l'énergie. Comme si les temps d'avant étaient ceux de l'insouciance - en réalité pas tant, j'avais déjà quelques chagrins aux semelles de plomb, des difficultés, comme tout un chacun, il y a des personnes malades alentours, 2014 n'avait pas été une année sympa sympa -, mais rétrospectivement, et plus encore après les attentats de novembre, c'est l'impression qu'on a. L'irruption de la violence générale et aveugle dans un monde qui s'en passait depuis un moment.

Je suis heureuse qu'il y ait un film. Il m'a semblé qu'Honoré, le travailleur inlassable et discret était à ce point oublié, ou plus vite que les autres, qu'il sera bon de lui rendre la place qu'il méritait. Comme Hélène Honoré y a participé, j'ai confiance. Peut-être qu'un peu ça nous apaisera.

(et une fois de plus merci à François Morel)

(1) En plus de boiter, ce qui était venu quelques mois après. Le corps m'ordonnait d'arrêter.


Pour le Vanuatu


Il se trouve qu'une grande amie est un peu de là-bas pour partie. C'est son pays de cœur et de travail.

Parfois on devient ami.e.s avec des personnes parce qu'on se complète, nos différences nous permettent de faire face à la marche dure du monde. D'autres fois, c'est par affinités profondes, des points communs très forts, des perceptions proches des choses, des chemins de réflexion, des modes de réactions.

Mardi, nous avions évoqué le cyclone dont on savait l'imminence. Et je me félicitais du retour préalable de l'amie qui ne partageait pas tout à fait mon point de vue : dans les moments difficiles et dangereux on peut préférer être auprès de personnes proches quels que soient les risques. Je suis bien placée pour le savoir. On peut aussi tant qu'on en ignore la puissance, qu'on n'en mesure pas exactement le danger, être tenté de se trouver là où ça se passe (1).

Elle a décidé d'ouvrir un blog afin de raconter aussi le Vanuatu qu'elle aime, et relayer ce qui pourra aider quand on en saura un peu plus. 

Sous le banyan

J'y pensais très fort, mais je n'osais pas le lui suggérer - peur de sembler intrusive dans un pire moment ; sorte de timidité que m'impose parfois le respect -. 

Pour l'instant on n'en sait guère davantage que ce que décrit cet article du Monde.

 

(1) Je n'oublie pas que si je n'avais pas été férocement malade (une sorte de violent mal de mer ; lien avec la pression atmosphérique ?) au matin du 26 décembre 1999 je serais sans doute sortie prendre des photos, inconsciente de la gravité du phénomène (à l'échelle Européenne, s'entend, à Paris les vents furent d'environ 170 km/h pour le cyclone Pam on parle de rafales qui ont atteint les 320 km/h ; que resterait-il de notre propre pays ?)

 


Kamel Daoud menacé


Accaparée par le travail, un brin de vie sociale persistant, et les activités pour tenter de tenir la forme, je n'ai pratiquement pas été devant l'ordinateur cette semaine. D'où que je découvre seulement ce soir, avec retard, la menace qui pèse sur Kamel Daoud (1), rien moins qu'une fatwa.

J'ai signé cette pétition de soutien dont on m'a dit qu'elle était partagée par son éditeur, j'ignore si ça peut réellement aider mais à part continuer plus que jamais à vendre en librairie son remarquable "Meursault, contre-enquête", je ne sais que faire.

 

(1) article du Courrier International  


La persistance de l'homophobie

 

L'histoire de ce garçon concentre beaucoup d'éléments que j'ai déjà entendus mais séparés chez certains amis. 

C'est quelque chose qui m'a profondément déçue et marquée ces dernières années : je croyais que si la fin du siècle dernier avait fait en quelque domaine des progrès c'était précisément en matière de tolérance, que désormais chacun à condition de n'être pas un danger pour l'autre, pouvait mener sa vie comme il l'entendait, qu'il était évident qu'il existait différents types d'orientations sexuelles. Et d'ailleurs aussi des personnes qui se ressentaient d'un sexe différent que celui de leur naissance et que les progrès de la médecine permettaient de remettre en cohérence avec leur ressenti profond. 

Moi qui me sens si féminine que je n'éprouve pas le besoin d'en remontrer, ce qui me place souvent en discordance avec ce que la société attend des femmes, je peux parfaitement comprendre qu'on se sente mal dans son sexe apparent. Et comme j'ai grandi dans un milieu et à une époque qui évitait de se reconnaître homophobe en évitant de voir que l'homosexualité existât en dehors de "La cage aux folles", je m'étais fait ma propre opinion, que c'était très logique puisque je trouvais certains garçons si beaux et d'avoir envie de les embrasser, que certains garçons puissent voir les choses comme moi. Sauf que pour eux c'était techniquement pas de chance.
Je n'ai su que très tard qu'il existait aussi une homosexualité des femmes et je crois bien n'être jamais parvenue à m'ôter tout à fait de la tête qu'il pouvait s'agir d'autre chose que de se consoler des hommes absents ou défaillants.

Ce qui est clair c'est qu'en l'absence de toute éducation sur le sujet et d'une religion coercitive qui aurait à ma place décidé que c'était mal, j'ai grandi dans l'idée qu'aucune sexualité n'était supérieure à une autre, et qu'entre celles où l'on risquait de fabriquer trop de nouveaux humains sans le faire tout à fait exprès et celles qui rendaient la reproduction impossible (1), ça faisait une moyenne. 

Je n'avais pas idée d'à quel point pour tant de personnes des interprétations religieuses d'un autre âge étaient présentes pour condamner toute sexualité qui sortait du traditionnel "croissez et multipliez" dans ce cadre si peu humain d'un couple éternel un pour un pour toujours (2).

Ça a été une très grande claque que de comprendre que ça n'était pas, mais alors vraiment pas gagné. Et que chez d'autres le vide d'instruction(s) qui avait été le mien au lieu de se remplir ensuite de tolérance avait été garni par la haine de l'autre, et violemment. Sans doute par peur de trop lui ressembler.

Alors le témoignage de ce garçon qui a vu une famille affectueuse se muer soudain en ennemis sans qu'il y ait eu conflit mais seulement révélation que le garçon n'aimait pas là où on l'on souhaitait qu'il le fît m'a particulièrement touchée. Sans doute aussi parce que loin des cas les plus dramatiques, il s'en sort grâce à son bien-aimé (et la famille du moins la mère, accueillante, de celui-ci).

Si le cœur vous en dit, il y a une pétition qui circule ces jours-ci en faveur du Refuge.

 

(1) Je vous parle d'un temps d'avant le premier "bébé-éprouvette". Donc les bébés tu les fabriquais maison ou tu les adoptais.

(2) Je me dis que si les gens ont gobé un truc pareil c'est que la plupart des vies devait être très brèves et très rudes et donc qu'on mourait avant d'avoir eu le temps et la force de désirer ailleurs. Que peut-être aussi dans une certaine mesure ça protégeait les femmes d'hommes trop dominés par leurs pulsions. Peut-être.


L'Égypte oubliée (mais pas les militants de la liberté)

 

J'étais plutôt contente de ces révolutions méditerranéennes, ces dominants brutaux qui tombaient comme des dominos, cet espoir qu'elles portaient ; je supposais malgré ma naïveté que des partis islamistes financés par des pays riches profiteraient des troubles pour au moins tenter de confisquer une part du pouvoir. Comme toujours, le pire était sous-estimé.

Je ne saurais plus dire pourquoi l'Égypte m'a plus saisie que les autres : sans doute parce que très vite on s'est trouvés à plusieurs amis (je pense en particulier ce soir @Kozlika) à suivre plusieurs amis de là-bas ou au moins militants ensemble qui témoignaient généralement en anglais de ce qui se passait. Que j'échangeais aussi beaucoup à l'époque à ce sujet avec celui qui a disparu si brutalement de ma vie depuis. Comme il se refusait à aller sur twitter, je lui servais de décrypteuse ; comme nous sommes tout les deux d'une génération qui a connu la télé rare, et les informations de papier principalement, nous étions, je le confesse, fascinés par le côté : c'est comme si on y était. On est avec vous, allez !

Sauf qu'on n'y était pas. Bien au calme dans la vieille Europe, où même quand elle est rude et du moins pour l'instant (1), la vie reste relativement paisible des armes ; j'ai bien dit relativement. En exil professionnel dans un quartier très chic que je n'ai pas déjà tout oublié de mes zones d'avant. 

À présent, eux sont en plein dans la répression de la répression d'après, puisqu'au bout du compte le soulèvement aura mis au pouvoir un régime autoritaire qu'un coup d'état militaire aura dégagé. Que leurs vies sont en danger et que comme toujours ce sont des gens formidables qui sont les premiers visés. 

Alors ce soir j'ai été particulièrement triste de lire la lettre ouverte d'Alaa Abd El-Fattah qui il y a dix jours (dix jours !) a entamé une grève de la faim, seul degré de protestation qui reste à qui est déjà privé de liberté.

Capture d’écran 2014-08-28 à 21.07.13Je me sens totalement impuissante, à part relayer l'info tout en étant conscience qu'il est sans doute trop tard. Pour lui, ses proches et des camarades dont le sort nous est inconnu, mais pas indifférent. 

(et pendant ce temps, c'est la guerre partout, l'impression qu'on a lorsqu'on passe des journées de travail bien remplies (privilège !) loin de l'information et qu'on rentre fourbus et qu'au matin on entend quelques trucs d'un flash d'infos au radio réveil avant de se lever, se préparer, puis d'y retourner) (et les politiciens français, désormais tous de droite sauf certains de ceux qui ne sont plus aux commandes, se couvrent de ridicule dans leurs chamailles pichrocolines).

Des pensées et des rêves, pour Alaa, pour ses camarades. Au moins.

 

(1) Je sens venir une catastrophe électorale en France pour 2017, gros comme une maison. Et après, risque de chaos. La haine des autres est gage de guerre, pas d'amélioration économique. 

 


Inquiétude pour la Maison des Écrivains

Lu ceci ce matin via Philippe di Folco : 

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L'intégralité de l'article est ici. Je suis inquiète de la disparition d'activités qui m'ont beaucoup appris, offert des moments d'émotions aussi, permis de belles rencontres. J'étais une assidue des mercredi midi organisés par la MEL au Petit Palais. Garde un souvenir ébloui de certaines rencontres, dont celles qui s'appuyaient sur des documents de l'INA et le récent hommage à Daniele Del Giudice. Si je n'y venais plus depuis septembre 2013, à part pour les rencontres placées le samedi, c'était uniquement car mon emploi du temps était devenu incompatible et l'est plus encore depuis mars dernier.

Je trouvais bien et tout à fait légitime qu'il reste ainsi cette place pour des auteurs de qualité, des échanges qui ne soient pas que de la com promotionnelle (1), des invités pas nécessairement équipés d'une grosse notoriété mais d'une belle exigeance d'écriture. 

Hélas, l'air du temps exige des paillettes, de l'accès facile, de la poudre aux yeux et surtout pas que le peuple s'instruise ; des fois que ça lui prenne de réfléchir au lieu de consommer.

Même si depuis un moment je ne peux plus directement en profiter, je serais triste si les activités ouvertes au public de la Maison des Écrivains devaient cesser. Ce serait d'autant plus étrange que la ministre de la Culture actuelle, Aurélie Filippetti connaît de l'intérieur le métier et aussi ce que c'est que de devoir apprendre par ses propres moyens et combien est précieux tout ce qui est accessible. À tous. À chacun de ceux qui sont prêts à faire l'effort de quitter l'écran de leur télé. Ou de cesser un instant de jouer.

 

(1) Bien des auteurs viennent hors de toute actualité personnelle.


Adopte une artiste

 

Une de mes amies, photographe que la crise n'a pas épargnée, est à la recherche de micro-mécènes le temps que de nouveaux projets décemment rémunérés redémarrent. Sa formule est jolie, son travail mérite votre attention.
En attendant d'assainir ma propre situation que les mois de chômage et ceux qui précédaient ont rendue dépendante de solides amitiés et de pouvoir à mon tour être promue au rang de mécène, au nom de la ligue informelle des cadres repentis, je diffuse l'info en souhaitant qu'elle rencontre quelque part un peu d'écho :

 

adopteuneartiste.com

 

PS : Je tiens à dire que je dois moi-même beaucoup au mini-mécénat amical. Sans entraide point de salut.

 

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