Rencontre avec Anne Savelli


     26169871_1758895064160773_924760030666867542_n
Ça sera demain soir, à partir de 19h30 à la librairie Charybde. On parlera de la rue Daguerre, d'écriture, d'Agnès Varda, mais aussi de danse, de ce que ça travaille en nous, les corps, la peau, peut-être un peu de Marilyn et sans aucun doute d'une mystérieuse Dita (et d'un non moins mystérieux Mystag).
Bien sûr, on boira un coup ou plusieurs (avec ou sans alcool).

Si avec tout ça, vous ne venez pas ! 


Grâce à Thierry, grâce à Arthur

 

20160731_211818

Plongée avec délices dans "La vie renouvelée d'Arthur Rimbaud" de Thierry Beinstingel, j'éprouve le besoin de vérifier quelque chose dans la correspondance de l'Ardennais voyageur, qui est, je le croyais un de mes livres de chevet, une folie que je me suis accordée il y a quelques années. 

    Hélas, il semble avoir migré vers d'autres quartiers. Les rigueurs de l'année 2015 comme auparavant celles de la deuxième partie de 2013 m'ont fait perdre le fil de ma mémoire. Où diable ai-je mis cet ouvrage que je supposais en permanence à portée de ma main ?

Je suis seule, ou du moins seule dans la chambre, là où demeurent les livres en cours ou les livres importants. La matinée a été sportive, 1h30 de course puis autant de marche, la maison de Théophile Gautier (dont j'aimerais reparler), un marché perdu dans une ville que je croyais ne pas aimer, mais qui s'est montrée presque accueillante au cœur de l'été, la sieste moins reposante que je ne m'y attendais ; je ferais donc mieux de rester étendue à lire le roman présent plutôt que de me remettre en chasse de documentation.

Seulement c'est plus fort que moi, je suis saisie par le besoin d'en avoir le cœur net. Et me voilà lancé dans un tri que je rêvais bref, et qui ne l'était pas : j'avais oublié l'effet induit par trois années trop âpres, trop mouvementées. Alors j'y passe quatre heures et sans avoir fini. Ranger rarement permet d'exhumer des pépites. Je m'aperçois que je dispose de bien plus d'ouvrages concernant l'ancien jeune poète si vite retraité que je ne le croyais - sans toutefois retrouver celui que je cherchais -. Je retrouve sans l'avoir cherché un livre qu'un autre ami m'a donné une puissante envie de (re)lire  20160731_211913

C'est drôle je n'y serais pas parvenue si je l'avais voulu. Retrouve aussi des ouvrages qui me seront utiles à préparer l'automne et les rencontres littéraires qu'enfin sur la colline nous allons proposer. Me garde d'ouvrir certaines correspondances, inutile d'attiser les chagrins mais remet avec bonheur la main sur une citation de Rilke que l'on m'avait offerte et qui aura contribué à changer ma vie. Et ça, ça ne me fait pas de peine, puisque non sans efforts et une part de chance, le cap d'un morceau de ce changement est bien franchi, pas tout à fait celui envisagé, mais c'est déjà beaucoup.

20160731_184154_2

Je retrouve certains de mes propres écrits, dont l'un sous forme reliée ce qui me laisse surprise : suffisamment de temps s'est écoulé pour que je puisse les lire avec le regard de quelqu'un d'extérieur. Je redécouvre aussi un présent perdu 20160731_213148, la rupture surprise subie étant intervenue avant la revoyure pour laquelle il était prévu.

Les ruptures subies en 2006 et 2013 ont encore une lourde influence sur ma vie, me le confirme lors d'une pause et entre tant d'autres choses, le message d'une amie récemment réapparue. Je la croyais en distance, trop atteinte en 2013 je lui avais en quelque sorte fait faux bond sur un projet qu'elle me proposait - je n'avais plus de forces, j'étais trop sujettes à des moments d'abattements - et ces expériences malheureuses m'avaient fait croire que qui se met en silence a ses raisons, que les humains sont très impermanents dans leurs tendres affections. J'avais tout faux pour l'amie en question, elle avait en fait traversé de graves ennuis de santé et consacré l au travail l'énergie qui lui restait. Fataliste, je m'étais accoutumée à l'absence. À présent je frémis à l'idée qu'elle eût pu être définitive. 

 

Le livre recherché est resté caché, mais l'heure a tourné. Il est temps de remettre de la cohérence dans certains tris puis de filer au lit. 

Je sais que ça comporte une part de lâcheté mais j'avoue que cette plongée dans les lectures et des souvenirs personnels, en me laissant oublier le son, la marche du monde, m'a offert une très bienvenue parenthèse. Comme tant d'autres personnes, depuis 2015 et de façon renouvelée depuis le 14 juillet et les nouvelles séries d'assassinats qui se sont succédées, j'éprouve le besoin de penser à d'autres choses que le fonctionnement funeste du monde et les hommes bien trop fiers de leurs accents guerriers. 

 

La citation de Rilke revenait à point nommé.

 

 

 

PS : Comme demain personne n'aura à se lever tôt, je me suis réellement sentie comme un premier jour de week-end (les miens sont pour quelques temps dimanche - lundi), ce qui m'a permis d'échapper au sunday evening five o'clock blues. Rare et précieux.

PS' : Bonheur de la redécouverte d'un texte de Thomas Gunzig, "Bon alors on y va" dans un recueil collectif offert par quelqu'un d'autre. Très beaux textes pour dire le lien affectif fort d'un père pour son enfant. 


Des larmes aux rires

Nobody told me there'd be days like these

 

Il part comme un voleur, puis revient et explique, mais trop tard : la déception a eu le temps de tacher son chemin. Mais au moins la vague de découragement induite par son attitude m'a quittée à l'instant même où je comprenais.

Mon téléphone ou plutôt mon opérateur me lâche juste au moment où je voulais passer un coup de fil qui pour une fois me faisait plaisir. Si on m'avait dit que je rencontrerais un homme qui me redonnerait l'envie d'utiliser ce mode de communication que j'ai quasiment abandonné (1).

Journée de librairie intense comme je les aime, celles pendant lesquelles j'ai à peine le temps de poser mes affaires et d'embarquer, non stop ou presque jusque 15h30 ou 16h le premier instant sans clients. Après, un creux, mais qui permet d'écluser de l'intendance. Parmi les clients quelques fins lecteurs avec lesquels parler est un plaisir.

L'amie qui m'envoie la photo de la devanture de la librairie où elle ne travaillera bientôt plus : passée au blanc de Meudon. C'est fini. Elle va fermer. Si réduite qu'elle soit sur mon petit téléphone, l'image me fait couler les larmes : c'était mon refuge de toutes les années "d'Usine", le lieu d'un ou deux rendez-vous secrets (2) et là où sans le savoir encore, simplement pour le plaisir de seconder mon amie Sylviane en jouant mon propre rôle - la cliente de passage qui avait déjà lu le livre qu'elle était en train de conseiller et à qui elle demandait opportunément son avis afin d'en décider une autre qui hésitait -, j'ai fait mes premières armes comme vendeuse de livres. Ma palette est limitée : franchise et passion, doublée d'une capacité à faire part des légers défauts qu'on peut éventuellement trouver. Dans un monde où la moindre lessive lave plus blanc que blanc, et où 100 % des gagnants ont tenté leur chance, quelqu'un qui dit la vérité mais avec un enthousiasme non feint a ses chances de vendre, et de vendre bien (3). J'y ai dépensé plus que je n'aurais dû, mais la lecture me sauvait et je ne saurais compter les jours que je ne suis parvenue à traverser que grâce à son secours - et aux conseils des libraires de Del Duca -. 

Et qui sait si en faisant découvrir les livres de Philippe Besson, Sylviane ne m'aura pas par ricochet, sauvé la vie, puisqu'un jour que j'étais en grand danger il avait reconnu cette petite lectrice agaçante qui lui reprochait une trop gentille sœur de Rimbaud et lui trouvant sans doute l'air bizarre, pâle, verdâtre, égarée, a prononcé quelques mots phatiques mais attentifs qui lui ont permis de raccrocher les wagons avec la réalité qui l'avait rejetée. 

Et puis Échenoz aussi, dont j'avais ce jour-là littéralement en poche le si délicat "Jérôme Lindon" et qui me disait que, si, l'amitié peut exister, qu'elle n'est pas une illusion et que j'étais tombée sur une personne qui allait mal au point de représenter pour qui lui devenait proche un péril fuligineux, mais que ça ne remettait pas en cause que l'amitié était la plus belle chose que deux humains peuvent partager. Ce moment où tout tangait tout autour, j'étais par terre plus ou moins assise contre une cloison et cherchant un mouchoir, je touche le coin du livre, et je l'ouvre, parcours une phrase, il n'y a plus de sens, mais c'est Échenoz alors les mots dits à mi-voix forment une mélopée et à force d'être chantée elle parvient au cerveau, un sens est redonné, malgré mon deuil je suis secourue sinon déjà sauvée. Le livre glissé dans la poche à l'instant de quitter la maison et qui devenait une bouée alors que je me noyais.

Et tous ces midi, tous ces midi, tous ces midi où je n'aurais pas su trouver la force de remonter dans ces bureaux où j'étouffais, asphyxiée par des codes et des contraintes qui ne faisaient pas sens pour moi, pas su trouver la force sans passer ne serait-ce que 5 minutes faire provision de ma dose de lecture ou de conversation sur les livres.

J'ai la sensation d'avoir été la personne à laquelle on a passé le témoin afin qu'elle puisse continuer la course jusqu'au prochain relais.

Et puis après une fermeture du soir lente là où je travaille - cette malédiction incontournable qui veut que le soir où il ne faut pas trop que je m'attarde, les derniers clients, eux, décident de le faire, précisément dans la boutique, une soirée de bonheur dans une librairie amie, en compagnie d'un auteur qui sait raconter aussi à voix haute, noyer les larmes de fin dans celles de rire. 

Cette étrange journée et plutôt belle où les larmes auront été effacées à coup de rires, par deux fois. Ils ne suppriment pas la peine initiale, mais l'aident fort à passer. 

Comme le fait d'avoir le tapis de souri le plus beau du monde de l'année (mais c'est une autre histoire, peut-être l'objet d'un prochain billet).

 

[billet écrit en dormant, très décousu, probablement]

 

(1) J'appelle uniquement par nécessité et plus pour "se parler".

(2) Rien de torride mais avec une auteure de passage, une éditrice passionnée, d'autres fous de lectures

...

(3) Découvrir ces jours-ci combien cette sorte de don est fragile, je ne parviens plus à vendre l'ouvrage de qui m'a déçue profondément et prise pour une variable d'ajustage, le petit iota d'enthousiasme et d'élan impalpable m'a abandonnée - un peu comme un chef d'entreprise imprévoyant licencierait un salarié sans songer un seul instant à une solution plus honorable -, je ne sais plus en parler comme je le faisais, quelque chose se sent qui fait que la bascule de l'hésitation du client tombe désormais vers le non. Je ne saurais dire moi-même à quoi ça tient. Peut-être tout simplement au sourire que j'ai perdu.

À l'opposé le fait du prix donné à un autre, joint au bonheur de quelques mots, me décuple l'énergie efficace pour "La vérité sur l'affaire Harry Quebert" ; je parviens même à faire du prix offert à un autre un argument de vente.


La fièvre du dimanche soir

À l'instant ou peu s'en faut 

 

La narratrice ou plutôt le personnage principal de ce roman que je lis parce qu'on me l'a demandé (par deux voies différentes) est une jeune femme qui dans les pages que j'aborde ce soir se trouve victime dans le métro d'un malaise. Les pompiers sont appelés qui l'emmènent aux urgences

"Les médecins vont vous remettre sur pied, croyez-nous, on dit les pompiers qui disent toujours nous." 

puis je lis :

Ils vous ont soutenue jusqu'à la sortie puis promenée en camion vers l'hôpital où vous avez fait de la fièvre. Vous aviez un bon trente-neuf. 

Quelque chose n'étant pas tout à fait raccord avec la phrase suivante, je rembobine et m'aperçois alors qu'il était en fait écrit : 

"Ils vous ont soutenue jusqu'à la sortie puis promenée en camion vers l'hôpital où vous n'avez pas fait la fière. Vous aviez trente-neuf ans, un bon poste [...]"

Julia Deck "Viviane Élisabeth Fauville" (ed. Minuit p. 50)

 

Je crois que je lis parfois un peu trop vite.

(ou que la douzaine de kilomètres parcourue ce matin en course à pied, m'a un peu entamée)

 

 


Merci Joël (la soirée formidable)

PA240180_3 PA240179

 

PA240184_3

 

Merci aussi à Pierre d'être, malgré son emploi du temps chargé, venu

[la dernière des trois photos est de Douja]

addenda de longtemps plus tard : Nous l'ignorions alors même si nous nous en doutions : Joël Dicker était à la veille d'obtenir un premier prix qui serait suivi de bien d'autres et à l'orée d'un succès de type long seller best seller. J'ai vraiment commencé à croire que j'étais une Bonne Mascotte (et pas seulement pour faire sourire l'ami Serge) 

141028 1930

 


366 - Aujourd'hui un geste qui veut dire

Écarter les bras, paumes levées vers le ciel, faire Non, de la tête, un geste qui veut dire, désolée, je n'en ai plus.

Je n'imaginais que Radio Classique eût une telle audience, ni que tant de gens en une fin d'août écoutaient leur poste vers 8 heures du matin (1). 

Alors voilà, assez vite dans la journée je me suis trouvée, libraire, en rupture de stock des livres dont au matin j'avais, enthousiaste, parlé. 

(sauf un).

Les commandes sont repassées mais quand diable vont-elles arriver ? C'est la fin de mois dans mes comptes mais pour la boutique aussi et l'impécuniarité engendre quelques délais.

 

(1) En fait quand j'ai quitté mon emploi de bureau, j'ai découvert surprise combien de gens en ville aux jours de semaines et heures ouvrables semblaient sans contraintes et dans les rues en liberté, c'était exactement comme chez Grand Corps Malade Je connaissais pas Paris le matin . Ce qui fait qu'à présent je suis surprise de constater combien ont des vies au contraire régulières et très habituées (tout chaque jour, presque à la même heure et dans le même ordre).

 

366 réels à prise rapide - le projet 
366 réels à prise rapide - les consignes.

 


À la radio (billet de complément)

à l'instant

 

J'ai eu le privilège d'être, en remplacement de mon patron, sollicitée par radio classique afin de parler de mes "coups de cœur" de la rentrée littéraire. Liberté de choisir mes titres, en revanche comme toujours dans ces cas, le temps est très limité. Il était question de cinq titres et c'est bien un peu injuste pour d'autres que j'ai aimés.

Puisqu'il appert que j'ai quelques lève-tôt parmi les copains, et que j'ai je crois parlé trop vite pour qu'on puisse retenir ou noter tous les titres, j'en reprends la liste :

 

1/ Olivier Adam, "Les lisières" (Flammarion) et qui était incontournable, Olivier est en passe d'être institutionnalisé, ce qui est glorieux et amplement mérité, mais non sans danger (pour la suite de son travail et pour lui). 

j'ai déjà dessus écrit une chronique Côté Papier, parce que quoi qu'il advienne, Olivier Adam restera toujours pour moi lectrice quelque chose comme "mon petit frère bien-aimé et qui écrit de chouettes bouquins avec notre vie dedans" (même que c'est un peu triste, souvent, mais c'est la vie).

 

2/ Mathias Énard, "Rue des voleurs" (Actes Sud) pour moi l'équivalent en cette rentrée du "Purge" de Sofi Oksanene, il y a deux ans. Un livre majeur, tout simplement.

Lui aussi, déjà chroniqué (mais c'est que j'ai été super sérieuse, moi, cet été)

Je suis un jeune arabe d'une vingtaine d'années

 

3/ Cédric Villani "Théorème vivant" (Grasset)

Là c'est mon honneur de libraire qui est en jeu. Car 99,8 % d'entre vous auront les pétoches s'ils l'ouvrent, il y a des maths dedans et pas du léger. 

Mais justement.  P8299054

Je suis assez fière d'avoir pu nommer Clément Mouhot qui est le Watson du Holmes qu'est Cédric Villani et une fois dans ma vie avoir pu lire le début d'une équation un peu couillue à la radio

 

4/ Joël Dicker "La vérité sur l'affaire Harry Québert" (ed. de Fallois)

Je regrette de n'avoir pas eu le temps d'en dire davantage, simplement de le mentionner et dire combien la lecture m'en avait impressionnée.

En vérité La vérité

nb. : Ce livre sortira en France le 16 septembre

 

5/ Francis Dannemark "La véritable vie amoureuse de mes amies en ce moment précis" (Robert Laffont)

que je n'ai pas encore chroniqué (Le ferais-je un jour ?), mais sur lequel je sais avoir été efficace (Comme disait Marie, Peut-on changer ?).

 

J'ai grand regret de n'avoir pu parler également des livres suivants :

- Jean Mattern "Simon Weber" (Sabine Wespieser)

Hé les amis, ne partez pas, vous venez d'arriver !

- Agnès Desarthe "Une partie de chasse" (Ed. de l'Olivier)

Agnès nous pose un lapin (et le fait fort bien)

- Audur Ava Olafsdottir "L'embellie" (Zulma)

(pas encore chroniqué) un délice de drôlerie mais sur fond de sérieux

- Clara Hoffman "So much pretty" (La Cosmopolite Noire - Stock)

(mais il ne sort qu'en octobre)

 

Je n'ai pas non plus disposé de La Minute Colombo, sinon j'eusse évoqué 

- Amin Maalouf "Les désorientés" (Grasset)

 

 

Et de ceux là (lecture commencée ou PDLP (prochains dans la pile) :


- Serge Joncour "L'amour sans le faire" (Flammarion), quelque chose d'attachant, tendre

- Claro "Tous les diamants du ciel" (Actes Sud)

- Goliarda Sapienza "Moi, Jean Gabin" (Attila) et là mea culpa je l'avais bien à l'avance (merci les Attila) mais je ne l'ai toujours pas lu - honte à moi -. Attila : la maison d'édition qui publie un bouquin avec un titre tout ce qu'il y a de bien pour donner envie, et qui le cache avec un bandeau sage :-) .

- Jérôme Ferrari "Le sermont sur la chute de Rome" (Actes Sud) que je n'ai pas encore lu tout bêtement parce que je l'ai reçu en feuilles A4 en vrac et que je viens seulement d'acheter les boudins de la bonne taille pour les relier. Tant qu'à faire des économies, si on m'avait envoyé le livre sous forme de fichier je l'aurais sans doute déjà lu (à quoi ça tient, les choses ...). 

- Aurélien Bellanger "La théorie de l'information" (Gallimard)

 

Et il y en a bien d'autres et non des moindres en attente (Laurent Gaudé, Simonetta Greggio, Jean Échenoz ...) et quelques dont-on-parle que je vous ai épargnés en expliquant comme pour Amélie Nothomb que les lecteurs venaient tous seuls les chercher et que donc ils pouvaient de moi en tant que libraire se passer.

L'émission sera peut-être un peu réécoutable après coup par là , mon intervention avait lieu à 8h15.

Et là je vous laisse afin d'aller répondre aux sarcasmes de mon garçon (c'est l'inconvénient des interviews par téléphone quand on loge dans un appartement pas très grand, les habitants présents entendent tout).


 


Vous êtes gentils mais ...

à la librairie, aujourd'hui

 

Très peu, trop peu de clients, mais à part les habituels touristes que nous décevons avec notre absence de livres en espagnol ou en anglais, ils furent tous charmants, y compris une dame de prime abord revêche et que ma bonne humeur a fini par contaminer.

Le touchant de l'histoire est que presque tous ont eu un mot pour compatir sur le fait de devoir travailler par cette chaleur. 

Sauf que moi cette chaleur me met en forme et me ravit. Entre le fait que pour une fois je n'ai pas de pull, des manches absentes, et sans doute dégager une certaine énergie, j'ai rarement eu en proportion du peu de monde tant de compliments masculins qu'aujourd'hui. 

Alors vous êtes gentils mais revenez fin septembre - début octobre et alors plaignez-moi du froid, surtout à la mi-saison quand nous laissons la porte ouverte. C'est ce dernier que je ne supporte pas ; ou plutôt que je supporte vaillamment mais qui me laisse exangue une fois rentrée chez moi.

Reste que quelque chose de mon été état est mystérieux : que la chaleur soit pour moi une source d'énergie j'en ai conscience depuis l'enfance, c'est sans doute lié à l'anémie - ainsi ces dernières années qu'à une thyroïde un peu flappie -. Mais en ville par ce temps, et dans une zone comme celle de la boutique, solidement polluée par une forte circulation, y compris en plein août, tout me laisse croire que l'air est étouffant. Or pour moi c'est l'inverse, je respire avec d'autant plus de facilités. Je me demande si mes globules rachitiques y sont pour quelque chose ou si c'est le simple fait d'avoir le moral parce que le climat enfin me va.

Aujourd'hui si je n'avais pas été triste pour une amie, pour ses proches, j'aurais probablement, du fait du climat, sautillé de joie.

 


Le ton changé

à la librairie, today

 

Il est de ces clients dont la politesse exquise me met parfois mal à l'aise ; j'ai du mal à me mettre au diapason d'une excessive civilité dans laquelle je ne suis pas née, sans que ne s'y glisse une pointe d'ironie qui en l'occurrence serait déplacée.

Il cherche un livre, que nous avons, et un second pour lequel je dois sur l'ordinateur aller à la pêche aux informations. C'est alors qu'il est près de moi pour examiner l'écran que son téléphone sonne et qu'il prend l'appel non sans une expression immédiate d'agacement. 

Je ne saurais dire pour quelle raison je suis aussitôt persuadée qu'il s'agit de sa fille. Il concède très vite à l'appelante quelques informations de localisation d'un établissement puis d'une voix sèche lui reproche Tu n'appelles que pour prendre des informations jamais pour donner des nouvelles.

La conversation ne se prolonge pas. Ce n'est pas sauvagement surprenant.

Il revient dans l'instant au titre recherché, réactive son infinie courtoisie. Le contraste me laisse sans voix.