Journée sans sport et dès lors je pouvais sans risquer l'épuisement m'échiner pour le jardin (non, temps plutôt pluvieux, très frais) ou la maison (oui, le courage et la réflexion avaient atteint leur maturation).
J'ai donc saisi la perceuse, rassemblé les accessoires de la bonne taille (merci Papa qui m'a tant légué, tout y est ou presque, ne manque que ce que le voisin voleur s'était autorisé à prélever) et commencer à remettre en place certains éléments : le porte-manteau (où diable est passé le second ?), un clou pour les clefs, le portrait d'Ernestine Lemercier, mon arrière grand-mère maternelle², le dessin du château de Gratot. Au passage j'ai trié l'une des caisses à outils (1) et nettoyé une partie de l'établi canal historique sur lequel vers le fond quelque chose (laine de verre ?) s'était décomposé. Et trouvé un pot de peinture qui sera parfait pour la petite fenêtre de l'étage, ainsi que de quoi la raboter avant de peindre (2).
L'option d'attaquer ce qui est devant être fait dès après le petit-déjeuner pour laisser à l'heure de début de sieste les écritures quotidiennes matinales est assez efficace. La matinée n'avait pas semblé disparaître dans le rien puisqu'il en restait des traces très concrètes, appelées à durer. Supériorité indéniable du bricolage sur le ménage.
Je n'ai pas souhaité m'attaquer dès à présent au lourd miroir, ni non plus à la tapisserie. Je dois d'abord voir s'il n'y a pas de meilleurs accessoires d'accrochage disponibles dans la cabane à outils et affiner ma technique, pour le moment rudimentaire (en particulier lorsque deux trous sont à percer en vue d'une accroche droite de quelque chose d'assez grand (c'est pas gagné, malgré deux niveaux à bulles de bonne volonté))
La sieste est de lecture avec des temps de sommeil, c'est absolument parfait pour aborder ensuite en bonne forme la soirée, comme s'il s'agissait d'une seconde journée dans laquelle il ne resterait à accomplir que ce qui ne relève pas des petites corvées. Il faudrait pouvoir vivre ainsi : lever tôt, du sport puis tout ce qui est devant être fait (par exemple aller bosser pour gagner sa vie), puis déjeuner, faire la sieste et au réveil, être libre de ses activités (entraînements sportifs, projets personnels (écriture, photographie, musique, radio), ou temps culturels ou juste retrouver la famille, les ami·e·s). Hélas il faut une pandémie avec un nombre effarant de victime pour qu'en étant une personne du peuple on ait droit à cette vie-là (moins la part récréative, les spectacles, les entraînements collectifs, les retrouvailles).
"Feu de tout bois" est un ouvrage précieux à lire pour qui écrit. En ce moment je me contente de tenir ce blog, la situation générale actuelle me semble trop violente pour laisser place mentale à une fiction, il n'empêche, j'écris. Je sais que c'est ce que je dois faire et j'expérimente grâce au confinement la vie qu'il me faudrait pour ce faire et à quel point elle me convient, même si je ne saurais vivre uniquement de cette façon-là : l'amitié est trop importante pour moi, la famille, les pratiques sportives collectives, les liens, les apports culturels. J'y ajouterais les voyages si ma vie s'y prêtait. Je n'ai pas besoin d'un rôle social marqué, seulement d'argent pour subvenir à mes besoins dans ce monde tel qu'il est. Le problème c'est que le temps presse et que la retraite a foutu le camp à trop d'âge. Comment faire ?
Prise de conscience joyeuse que le confinement m'a permis de retrouver des compétences que le temps avait gommées : les plantes me reviennent un peu, et j'apprends, ainsi que les chants d'oiseaux. Je me régale décidément avec Birdup qui s'utilise comme un Shazam des oiseaux et un google translate : ça donne des indications qu'il convient d'affiner ensuite.
Les vaches sont curieuses et possèdent leur intelligence - je n'en doutais pas, cf "Le Parc" que j'écrivais oralement quand j'étais enfant -. Alors que je faisait du nettoyage dans la cabane à outils, j'ai entendu une voix d'homme les héler qui venait du vieux bâtiment devant lequel nous passons en allant vers la voie verte. L'une d'elle a dressé la tête et les oreilles et s'est mise en branle, peu après suivie de ses camarades, il s'agissait probablement de manger ou d'une traite (3), mais il était clair qu'elles avaient pigé qu'on les demandait.
J'ai beaucoup de chance, tant que nous ne tombons pas malades, d'avoir un confinement qui ne ressemble pas à du thé blanc.
Au soir, je m'aperçois que le petit carton que je croyais contenant les animaux miniatures du Parc, justement, contenait en fait un mode d'emploi manuscrit par mon père de mon enregistreur à cassettes audio, et quelques cassettes. Un vieux transistor.
C'est amusant d'être confinées avec des bribes éparses d'un déménagement correspondant à l'enfance et à des affaires ayant appartenues à ses parents.
Je suis volontairement, et parce que j'étais occupée, restée à l'écart des informations. Quelque chose en moi considérait que le week-end on avait le droit de débrancher, surtout dans la mesure où sauf preuve du contraire, nous sommes censés rester sagement confinés.
Autrefois 40 jours était la durée considérée comme convenable aux deuils. 40 jours que nous sommes confinés et pour la première fois de ma vie, trop active, quarante jours que j'ai pu l'un après l'autre apprécier, mesurer, voir se dérouler (5). Je me dis qu'il y avait une sagesse correspondant à ce délai : j'étais fatiguée en arrivant au confinement, ayant eu la chance de ne pas tomber malade, je suis en forme à présent. Quarante jours est le bon délai pour que le corps reprenne des forces et que l'esprit se fasse à une nouvelle situation dans l'idée qu'elle puisse durer.
Par curiosité et aussi parce qu'il me semble qu'ici les gens passé les quinze premiers jours (en gros la même durée que notre quarantaine) se sont mis à retourner bosser, j'ai regardé des offres d'emplois régionales. Et effectivement des entreprises recrutent, là maintenant. Pour la première fois dans une annonce j'ai lu ces mots "Les mesures de protection sanitaire liées au COVID-19 sont mises en application au sein de cette exploitation".
Cela faisait un mois (en même jour de la semaine) qu'un homme s'est tué en voiture à 100 m de chez nous, passant en trombe et fonçant droit dans le mur. J'y ai pensé tout au long de la journée. Pas trouvé d'autres articles que les entrefilets qui relataient brièvement l'accident. On ne saura donc ni qui il était, ni s'il y a eu la moindre explication. C'est quelque chose qui reste dans un coin de la tête - ça ne resterait pas tant si par exemple il s'était agi d'un accident de circulation entre plusieurs véhicules au carrefour voisin, le truc terrible mais qui peut s'expliquer (un refus de priorité, une mauvaise évaluation de ce que l'autre allait faire) -. Il y a aussi ce lampadaire plié qui marque désormais l'emplacement. Le verrons-nous remplacé avant la fin du confinement ? Et le fait que le mur, lui, n'a pas une égratignure, ce qui étant donné la violence de l'impact, dont le son inidentifiable sur le moment me reste présent -, surprend.
Cela dit, en cherchant des informations, je suis tombée sur cet article, intéressant, qui parle de l'organisation face au Covid-19 du Pôle de Santé local.
En Italie, début d'assouplissement sur les sorties, qui est à la mer ou à la montagne peut désormais s'y promener mais en restant raisonnablement à proximité du domicile et en respectant la distanciation sociale. Le président Mattarella est allé seul honorer les résistants (25 avril jour anniversaire), arrivant avec le masque, et dans un grand espace vide. Images que l'on avait auparavant vues plutôt concernant le Papa Francesco.
Une petite fille de 5 mois est morte aux USA, il y avait une image du bébé alors sous respirateur, son regard était terrible et inoubliable. Son père est pompier à New-York on peut supposer que c'est par son travail qu'il a été en contact avec le virus qui aura contaminé l'enfant (mais peut-être que non).
J'ai LT comme d'habitude mais avec le sentiment que les informations désormais n'étaient plus aussi primordiales : en Italie comme ailleurs on s'apprête à déconfiner parce qu'on ne peut rester confinés, que les gens doivent manger, et pour cela bosser et que l'argent public ne peut à lui seul maintenir le pays à flots. Aussi parce que les gens n'en peuvent plus de rester enfermés, que pour beaucoup d'entre eux, un seuil de type, Je m'en fous de tomber malade je veux sortir est atteint.
La deuxième vague de contaminations sera terrible sauf si la chaleur rend le virus moins actif ou les organismes mieux résistants.
Je pense à la phrase de conclusion du billet de Couac aujourd'hui : Comment on va faire pour reprendre la vie où on l'avait laissée ?
(1) pour mémoire celle en métal, gris clair. Essentiellement des accessoires de perceuse.
(2) Le seul truc c'est qu'il ne sera peut-être pas judicieux de le faire pendant le confinement, car comment échapper aux odeurs de peinture fraîche ?
(3) J'en doute, leur pis ne me semblent pas gonflés. Mais qu'est-ce que (pour l'instant (4)) j'y connais ?
(4) J'espère bien faire quelques progrès.
(5) En temps normal je fonctionne, mais avec pour seul objectif de tenir jusqu'au soir et les journées de trop de travail tombent dans un entonnoir de mémoire, sans que j'y aie participé totalement ; l'esprit seulement concentré sur les choses à faire et que le corps tienne bon.
Lien vers le site de la santé publique en France
Liens vers des statistiques :
Wordometer covid-19 coronavirus pandemic (depuis quelques temps le plus complet, entre autre parce qu'il indique le nombre de tests ; un pays comme la France qui teste jusqu'à présent très peu a forcément moins de cas officiels que de cas réels)
Official Data from The World Health Organization via safetydectetives.com
Coronavirus COVID-19 Global Cases by John Hopkins CSSE
2 910 918 cas (dont : 202 865 morts (54 049 aux USA) et 832 550 guéris)
Je n’arrive pas à replier mon ts 850, bien que je fasse comme sur les vidéos