L'article de So Foot est ici et j'ai eu le bonheur de le trouver délicatement déposé sur mon mur FB par Laure (Colmant), merci, merci, pendant que je roulais vers ma Normandie pour de mini-vacances d'intendance légère.
Pour le cas où il vienne à n'être plus accessible et si personne n'y voit d'inconvénient, je me suis tellement régalée à le lire et aux souvenirs qu'il a convoqués, que je me permettrais de le partager en intégralité ... et d'y mettre mon grain de sel, sachant qu'en gros mes années football sont les années 70 et le début des années 80 :
… Tu as déjà transformé un couloir d’appartement en terrain de foot.
Oh, et pas que le couloir ! Parfois même des genres salle à manger avec tables finement dressées en vue d'un repas de fête.
… Tu as également déjà transformé une place, un trottoir, un terrain vague, un parc ou un jardin en terrain de foot. En fait, tous les endroits où un ballon pouvait rouler.
... et surtout ceux où il n'était pas censé le faire (une salle de classe en l'absence momentannée du professeur ...) comme de par hasard.
… Ton but, c’était une porte de garage. Et à chaque fois que tu marquais, ça faisait un boucan incroyable.
Non, elle n'était pas assez solide et il y avait des petites vitres qui risquaient de casser. Mais sinon, on se serait pas gênés.
… D’ailleurs, plus d’une fois, le voisin t’a insulté par la fenêtre, en te disant qu’il allait venir voir tes parents. Tu as arrêté. Et tu as recommencé.
Les voisins gueulaient parce qu'on jouait sur la placette autour de laquelle se trouvaient une douzaine de pavillons tous pareils ou presque. Les voitures s'y garaient. Les gens craignaient pour elles. Et puis l'un d'eux avait un chien qui aboyait sans arrêt alors il prétendait que c'était de notre faute et à cause du ballon. Plus grands, on allait jouer à "la zone" sur un vrai terrain.
… Tu as déjà « fait les équipes ». Avec un bon vieux chou-fleur, ou un plus subtil « une bague en or c’est toi qui sort ».
Non, nous c'était que chou-fleur ou bien un gentlemen's agreement (la dernière fois c'était toi, cette fois c'est moi). Et il n'y avait pas contestation sur les deux qui faisaient les équipes, la hiérarchie du terrain faisait foi (et il y avait ceux qui avaient le balon qui leur collait aux pieds et les autres). Mais j'étais très honorée d'être généralement choisie parmi ceux du milieu et pas les derniers. Surtout que quand parfois c'était des nouveaux en face et que je voyais bien qu'ils se disaient Mais ils sont cons pourquoi ils prennent la fille. #héhé
À ce propos, c’est toujours toi qui faisais les équipes. Bah ouais : être celui qui ramène le ballon, ça donne droit à quelques privilèges.
Non. Le ballon était souvent une possession collective. On se cotisait pour s'en repayer un quand le berge allemand du pavillon près du terrain nous le crevait. Et donc les équipes c'était les "trop bons", capitaines naturels qui s'y collaient (salut Laurent !)
… Tu as déjà fait des buts avec deux pulls.
Et si souvent. Mais en fait plutôt des blousons de survêtements. Sans marque. En ce temps-là nous n'étions pas griffés. Ou de vieux adidas au rabais (peut-être pas des vrais ?)
… Tu as oublié ce pull et tu es revenu le chercher à la nuit tombée.
Éclat de rire. Souvenirs. En plus que c'était souvent moi qui m'y collait parce que j'étais la même-pas-peur du lot. Et que mes parents étaient sympas si j'expliquais que c'était la veste de Machin que son père allait taper au martinet sinon (car j'oubliais rarement mes propres affaires, j'en avais peu, j'y faisais gaffe)
… Tu as déjà fait des buts avec deux bâtons. Sauf que l’un des deux bâtons a volé dès que quelqu’un a tiré dessus. Et d’ailleurs, le débat est toujours ouvert : quand le ballon dégomme le bâton qui sert de poteau, c’est but ou c’est poteau ?
C'est pour ça qu'on préférait les pulls.
… Les deux buts, faits avec des pulls, des bâtons, des sacs à dos ou des canettes, ne faisaient jamais la même taille et n’étaient jamais pile en face. Même si le mec qui les avait installés était toujours très sûr lui. « C’est bon c’est en face là ».
Si, si j'étais là au moment de les faire, ils étaient pile en face pour de vrai. Mais bon des fois j'arrivais après, et effectivement ...
… Tu as forcément poussé une fois la balle dans le but vide à quatre pattes avec ta tête.
Non. C'est peut-être un truc de mecs ?
… Tu as déjà célébré un but comme si c’était la finale de la Coupe du monde. Alors que c’était juste un 5 contre 5 avec tes potes, dans un parc.
Oh ben oui, té. Surtout qu'il m'est arrivé d'en marquer des vrais beaux.
… Tu as dribblé trois potes de suite et un gars a crié « Woooh Ronaldo ».
Oui dans l'idée mais pour moi c'était Platini. Question d'époque et que physiquement il aurait pu être mon cousin.
… Tu as fait la célébration Thuram dans les mois qui ont suivi la Coupe du monde 98.
Non, mais question de génération. En 98 je ne jouais plus au foot (ni ne m'y étais encore remise)
nb. : Je viens de me rendre compte que je peux faire une célébration Thuram au moment où je suis en train de tomber amoureuse
(je ne source pas ça serait mettre un lien vers le site de celui qui m'a effacée ; et si ça pose le moindre problème je l'enlèverai)
… Tu as vu que l’on pouvait faire un match sans arbitre et que cela se passait très bien.
Un arbitre ? Où ça ?
… Tu as vu que l’on pouvait faire un match sans la règle du hors-jeu et que cela se passait très bien. Enfin, sauf quand l’un de tes copains justifiait sa réputation de campeur.
Alors nous, nous pratiquions le hors jeu d'évidence. Par exemple lorsqu'un attaquant était resté à la traîne tout près du but adverse, que tout le monde était dans l'autre moitié de terrain et que soudain le ballon venait vers lui.
… Tu as joué la touche au pied. Enfin, quand il y avait touche. Parce que bien souvent, le terrain n’avait pas de limite sur les côtés.
Si si, une limite floue mais une limite quand même.
… Faute d’avoir une barre transversale, tous les ballons qui lobaient le gardien étaient considérés « au-dessus ». Oui oui, même si c’était le petit frère d’1m12 aux cages.
Alors en fait soit nous jouions sur le vrai terrain avec des vrais buts et un gardien mais donc une barre transversale. Soit en travers aux buts à pulls mais dans ce cas c'était goal volant et assez peu de contestations.
… Les fautes de main étaient toujours involontaires. Putain de mauvaise foi de gosse.
Allez, elles l'étaient assez. Le ballon touche plus facilement une main qui est près du sol que la main d'un grand gaillard. Faire une main, c'était la honte. Du coup, peu de triche.
… Tu avais toujours une paire de gants et un jogging quand tu jouais gardien. Ça faisait plus « vrai ».
C'est surtout que ça protégeait. Les gants étaient de vieux gants de jardin du paternel.
… Tu as tenté la roulette de Jay-Jay Okocha.
Alors je m'aperçois que j'avais confondu la roulette de Jay-Jay Okocha avec un autre mouvement similaire, variante moins ambitieuse du rainbow flick dans laquelle au lieu de faire passer la balle par dessus la tête on se contentait de la reporter devant soi (pas forcément en remontant si haut). J'ai su faire, n'y parviens plus (grumbl).
… Tu as même tenté la bicyclette des frères Derrick et le tir de l'aigle de Mark Landers. Moralité, t'as mis le ballon chez le voisin.
La bicyclette des frères Derrick un retourné à deux, n'était pas encore inventée mais oui, on adorait marquer d'un retourné et parfois on y parvenait (grand prestige). Le Eagle Shot n'était pas encore attribué à Mark Landers, lequel n'existait pas, mais nous avions déjà les grands brésiliens pour modèles de jeux avec de la beauté. En fait marquer un but n'était pas si important que de le marquer joliment. Je savais faire des lucarnes en travaillant le ballon de l'intérieur du pied (un peu comme les coups francs à la Platini mais en moins puissant). C'était déjà beaucoup.
quelques beaux tirs manga-réalité par là.
… Et la prise d'appui sur le poteau façon Ed Warner quand t'es pris à contre-pied ? Mauvaise idée.
Il n'avait pas encore été inventé. Les mangas n'existaient pas (ou peut-être si mais ils étaient encore au Japon). Et je n'ai jamais vu un gardien le faire en pour de vrai.
… Tu t’es déjà retrouvé avec un seul pote pour jouer au foot. À défaut de pouvoir faire un match, tu as fait des tirs, puis des pénaltys. Et chacun prenait une équipe nationale. « Baggio contre Taffarel… »
Oui souvent, avec mon copain Jean-Mi et que contrairement aux autres mollassons nous étions capables d'aller jouer par tous les temps.
… Tu as tenté souvent la panenka. Mais vu qu’on ne plonge pas quand on est gosse, bah tu l’as toujours foirée.
La Panenka, c'est ça. Et Zidane en fit une particulièrement splendide lors d'un France Italie (j'adore le gardien qui se crache dans les mains comme on faisait gamins ... quand on n'avait pas de gants). En fait il y avait parmi nous de bons goals qui plongeaient. Et comme je manquais de puissance mais visais plutôt bien, des Panenka j'en faisais avant même qu'on appelle ça comme ça. Et non, ça ne foirait pas (mais je savais regarder du côté où je n'allais pas tirer, des petites coquineries comme ça). Et puis sur coup de pieds arrêtés dès que je jouais avec pour partie des gars que je ne connaissais pas, être une fille était un incurable avantage : persuadés que j'allais envoyer un ballon tout mou où mal maîtrisé ils ne se méfiaient pas. Or je ne tirais pas plus mal que bien des gars.
… Tu as déjà fait un match à 8 contre 9 parce que le neuvième joueur devait entrer dîner à 19h30. En général, toujours le même pote.
Nous devions tous être devant nos assiettes et proprets et bien coiffés à 19 heures pétantes. Milieu ouvrier, le dîner avait lieu tôt, les réveils étaient matinaux.
D'où qu'on tentait toujours de quitter le terrains à 18h30, ce qui faisait 18h45 et des douches très vite faites (histoire d'avoir les cheveux mouillés bien plaqués). J'étais régulièrement de ravaudage (abimer un vêtement méritait punition). En ce temps-là ça ne rigolait pas avec le peu qu'on avait.
… Pire : sa mère l'appelait toujours du balcon en plein match.
Le terrain était assez loin des balcons. En revanche quand nous jouions sur la place, mais alors le plus souvent à la balle aux prisonniers car pour le foot les voisins râlaient (voir plus haut), madame Puteau rappelait toujours sa fille pour faire des corvées, jamais son fils. Et moi, ça avait le don de m'énerver. Il m'est arrivé, en déjà graine de féministe (en fait je trouvais tout simplement ça pas juste et Nathalie m'énervait, elle, de si platement obtempérer) de tenter de m'interposer. Souvent effectivement avec l'argument du nombre et que ça serait déséquilibré. Mais la petite fille profitait peu des sursis négociés, elle avait peur, grapillait 5 minutes puis filait avant que ça mère à nouveau ne la réclame.
… Tu ne faisais jamais de tête. Ça fait mal.
Je n'en fais toujours que peu. Non, ça ne fait pas mal si on la prend ou il faut et qu'on frappe la balle (sans attendre que ça soit elle qui vienne à notre front). Mais j'avais peu de détente. Et quand la balle venait à mi hauteur préférais le ciseau.
… Tu as déjà fait un match avec un seul gardien de but parce qu’il n’y avait pas assez de joueurs pour faire deux équipes. « Pas le droit de marquer directement sur le renvoi du gardien ! ».
On jouait souvent comme ça avec un seul but dans la surface de réparation mais obligation d'en ressortir après chaque interception (histoire de bien marquer qui étaient ponctuellement défenseurs ou attaquants). Je crosi qu'on appelait ça un Attaque-Défense.
… Tu finissais la journée par dormir avec ton ballon avec ta tenue posée sur ton fauteuil de ta chambre. De temps en temps, tu rallumais la lumière pour vérifier que rien n'avait disparu.
Quand même pas, mais les chaussures à crampons (quand j'en ai enfin eues ce qui fut un long combat puisque j'ai mis trois ans avant de me trouver une équipe officielle et donc avant d'avoir droit aux vrais crampons vissés) sur un sac en plastique par terre dans la chambre et les regarder d'un air affectueux et fier, si.
… Tu as déjà perdu un match que tu étais en train de gagner 13-4 juste parce qu’un mec de l’équipe adverse a lancé : « Allez, dernier but, but vainqueur, but vainqueur ! »
Ah non, en fait on jouait jusqu'à temps que ça soit l'heure d'aller dîner, ou qu'un violent orage n'interrompe la partie, ou que quelqu'un ne se blesse. Souvent si l'on constatait que c'était trop déséquilibré on changeait les équipes, parce qu'on trouvait que ça n'était pas drôle. Sauf quand c'était ceux des Lignières qui venaient parce qu'alors c'était l'honneur du quartier que l'on défendait.
… Souvent, tu n’arrêtais pas de jouer parce que tu étais fatigué, mais parce qu’il faisait nuit.
La nuit nous arrêtait peu. L'heure du dîner familial si.
… Ton meilleur moment de la journée, c’est quand tu rentrais chez toi, que tu allais immédiatement à la cuisine et à la salle de bain, et que tu t’enfilais un litre d’eau directement au robinet. Quel pied putain.
Non, on était toujours un peu tristes après la partie de se retrouver chacun chez soi, où d'une façon générale ça ne rigolait pas (époque où les parents persuadés que donner une bonne éducation c'était engueuler les enfants se montraient très souvent sévères et reprochants). Et puis les pères de famille avaient des boulots éreintants. Les fins de mois étaient serrées. Rentrer chez soi c'était la fin de la récré (et je ne parle même pas de ceux chez qui c'était se confronter avec un père violent qui avait picolé avec ses collègues avant de rentrer ; je faisais partie des privilégiés chez qui ça ne tapait pas).
… Tu as niqué tellement de joggings et de T-shirts à cause du foot.
Pas tant que ça, mais des retours aux vêtements boueux si. Et la mère qui rouspétait à cause du surcroit de lessive.
… Et tu as salopé tes pompes en jouant sur du stabile.
Euh ... La question ne se posait pas trop. On jouait sur du vrai gazon théorique c'est à dire en pratique de la terre dégarnie et souvent boueuse sauf l'été (craquelée). Et quand on jouait dans la rue, ben c'était du bitume, quoi.
… Tu as déjà eu un goal volant. Bien souvent parce que l’autre équipe était supérieure, et qu’il fallait un joueur de champ supplémentaire pour rééquilibrer.
Quand on faisait goal volant c'était des deux côtés.
… Tu as déjà dit à l’équipe adverse : « Allez, on change les équipes, c’est pas équilibré, même pour nous, ce n’est pas marrant ».
C'est ce qu'on faisait (voir plus haut). Il y avait une sorte de code de l'honneur qui voulait qu'une gagne trop facile ne soit pas digne.
… Les mecs en face ont refusé.
Parfois nous, nous refusions. Vous allez voir on va remonter (et le plus souvent ça marchait).
… Tu allais au terrain en vélo. Et tu ne savais jamais où mettre ton ballon. La plupart du temps, il finissait sous le T-shirt.
Oh l'aut hé ! Les vélos c'était si on voulait sans tenir le guidon ou tout au plus d'une seule main. Il en restait au moins une pour le ballon. Mauviette !
… Tu as souvent essayé de marquer le même but que Van Basten en finale de l’Euro. Sans succès.
Ce but n'existait pas encore. C'est Van Basten qui nous a imité !
… Tu as vécu la situation où le match ne débute jamais parce tout le monde a la flemme de faire les équipes et préfère faire des frappes.
Oui, ça arrivait. On avait parfois des jours artistiques (petites frappes, dribbles l'un contre l'autre, jongles et passes millimétrées). Souvent quand le goal était un vrai bon qu'on prenait plaisir à tester par des tirs travaillés.
… Tu rêvais de jouer contre des grands. Et de les battre.
Je rêvais en 5ème de faire du foot un métier, j'avais mis "footballeuse" sur mes fiches de rentrée, pas consciente qu'à l'époque plus encore que maintenant pour une fille c'était juste pas possible. Dès la 4ème , j'ai voulu faire de la recherche en physique nucléaire et quantique, j'étais devenue raisonnable, croyais rentrer dans le rang.
Eric Maggiori, avec Mathieu Faure pour l'article
Camarades amateurs (et -trices) de foot, à vous de jouer ?