Retour à pied

 

    La jeune femme dit à une amie Je me souviens de tes couleurs.

Il pleut comme si le ciel s'employait à renverser des seaux. Nous venions de parler du film "Parasite" et de la longue séquence de forte pluie. D'un seul coup, nous étions dans le film, avec les ami·e·s.

Je décide par sagesse de rentrer en métro. Ce n'est pas mon mode de transport favori surtout pour venir de là où nos chemins se quittent aujourd'hui : deux changements et le risque ligne 13 de tomber sur la rame qui à la Fourche file vers le mauvais côté. 

La jolie phrase de Léa occupe mes pensées, une fois les ami·e·s quitté·e·s. C'est sans doute ce qui provoque en moi une bouffée d'optimisme ; lorsque j'arrive à l'entrée de la station, la pluie a ralenti, je me dis qu'elle va s'arrêter, que je peux bien rentrer à pied. Et puis une fois chez moi, pas de problèmes, je pourrais me sécher. 

C'était une feinte météorologique, alors que j'ai opté pour la marche à pied, elle redouble. Je vais rentrer drinchée. Ne restera plus qu'à ajouter le savon.
(puis à rincer)
(sécher)

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Je descends de Montmartre et l'eau ruisselle. Elle se souvient qu'il y avait là une colline à dévaler. La ville doit s'adapter. Ses caniveau débordent. 

Boulevard Berthier les voitures joueront aux aventurières passant à gué donnant cette illusion aux conducteurs de piloter.

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Métro Guy Môquet, un coup d'avertisseur moto, un bref éclat de voix. Une dame âgée est tombée, un motard redresse sa machine. Le compagnon de la vieille dame l'aide à se relever. Je me tiens prête à venir aider, mais la dame semble aussi alerte que l'on puisse être lorsque l'on vient de se prendre un gadin sous la pluie alors que l'on tenait un parapluie qu'on n'a pas lâché ou bien tard. Et le motard est descendu qui semble les accompagner sur le trottoir, ils se parlent sans véhémence, les torts sont peut-être partagés - le couple était hors de tout passage piétons -, la moto a peut-être freiné un brin tardivement en s'approchant du carrefour suivant. Et surtout ça a l'air d'aller. 

Je poursuis mon chemin.

Au 104 de la rue de la Joncquière à 16h36 un homme jeune hoodie gris anthracite pantalon noir chaussures de sport sombres, passe par dessus la grille dans un geste d'une telle souplesse sans trop besoin d'élan qu'on a l'impression de qui s'amuse de façon sport à rentrer chez lui, pour un peu j'applaudirais ; à la réflexion et malgré l'aisance, peut-être était-il en train de commettre une effraction. Ma présence en tout cas ne le dérangeait pas - et j'ai passé d'au moins trois décennies l'âge qui peut donner envie aux jeunes hommes de vouloir quêter mon admiration -. Clef oubliée ?

Porte de Clichy sous un abri que constitue une pré-entrée d'hôtel se tiennent quelques personnes, une poignée avec un gilet jaune et l'un des gilets jaunes, homme de forte stature, porte un chapeau de cow-boy bleu blanc rouge. Quand je passe à proximité, je l'entends qui énonce des données économiques d'un ton mesuré que son allure ne laissait pas présager. 

Plus loin trois ou quatre véhicules de gendarme quittent la position qu'ils tenaient devant le tribunal. Leurs gaz d'échappement sont particulièrement forts et suffocants, je me demande s'ils ont la vignette crit'air ; ils ont une sorte de mégaphone qu'ils utilisent lorsque je passe pour tenter de mettre une honte à l'homme qui pisse à un angle de la palissade du chantier de la maison des avocats sous l'air un peu ébahi d'un ouvrier de l'autre côté. Tout à son envie qu'on imagine pressante pour qu'il fasse le choix de se soulager là avant de se diriger vers l'entrée du tribunal, il n'a calculé ni les gendarmes qui lui signalent que son forfait pourrait lui coûter 63 €, ni le fait que la palissade du chantier n'est pas franchement opaque vers l'autre côté, ni le fait que je passais tout à côté sur un trottoir peu large dans cette phase des travaux. La pluie s'arrête, comme si cette micro concurrence lui semblait déloyale et qu'elle renonçait à rincer son forfait.

Je rentre trempée mais sans avoir eu froid. Fullsizeoutput_187b

Le livre que j'avais acheté - un seul sur trois qui me tentaient, je sais être raisonnable - malgré le sac à dos sportif imperméabilisé avait pris un petit peu d'humidité. Mon agenda également, que je tiens à conserver de papier car la seule panne en tant d'année fut que deux d'entre eux avec d'autres affaires qu'un autre sac contenait, me furent volés. J'avais joué de malchance, c'était une fin d'année.

 

En rentrant en allumant l'ordinateur pour y déposer les photos prises au téléfonino de Paris sous la pluie j'ai appris que Toni Morrison était morte dans la nuit. C'est quelqu'un que j'admirais sans connaître toute son œuvre, guettant souvent pour la lire un moment de vacances autre que trop actives ou atteintes trop fatiguée, qui n'arrivait (presque) jamais.
Elle imposait le respect.

L'effet d'insouciance de la marche sous la pluie s'est immédiatement dissipé.

Quelles que furent les circonstances de la vie du monde, je sais gré à mes amies de la bonne journée passée.

 

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Quelques fatigues de la langue française


    Globalement et puisque, même à bas bruit, j'écris, je suis très heureuse et m'estime chanceuse, de disposer d'une langue maternelle formidable et nuancée. Dont on peut croire qu'elle a été faite pour ça, romancer, disserter, un bel outil de travail.

J'adore mon autre langue familiale, l'italien pour la beauté de ses sonorités et ses verbes où l'action s'avance avant ses sujets et objets - ça correspond à la façon dont mon cerveau fonctionne -.

J'apprécie infiniment l'anglais pour la création de termes qu'il facile, son humour possible - beaucoup plus qu'en français, en anglais on peut d'une formule lapidaire, condenser une situation et c'est drôle du fait même de la condensation, le côté "formule définitive" -, sa concision.

Seulement voilà, pour la subtilité notamment des sentiments, le français est un délice.

Il n'en demeure pas moins qu'il présente quelques défauts. 

Par exemple ce mot "plus" qui selon le contexte peut vouloir dire s'il n'est pas prononcé à haute voix, une chose et son exact contraire : il y en a plus (+) ou il n'y en a plus. Dans un usage ou la première partie d'une négative ("ne") tend à disparaître, l'ambiguïté est de plus en plus fréquente. 

Ou la confusion possible entre les premières personnes du présent singulier du verbe être et du verbe suivre. Comme sur les réseaux sociaux on suit d'autres comptes, l'emploi de la seconde acception est devenu plus fréquent et d'autant plus ambigu. Que signifie Je suis Charlie ? Le contexte ne suffit pas forcément. 

"Contre" est également porteur d'ambiguïtés : on peut être contre par proximité (au sens de "tout contre") mais contre par opposition. D'accord, dans le premier cas il s'agira plutôt d'une personne et dans le second d'une opinion, mais parfois dans l'emploi, ça n'est pas si simple. 

Pour être honnête il me faut reconnaître que je suis la première à jouer du double-entendre lorsque ça m'amuse. Il n'empêche que pour des moments de narration sérieux ou des discussions à caractère politique, j'aimerais moins de flou. 

On n'est pas merveilleux quant aux liens de parentés. Déjà qu'il manque un équivalent du mot siblings anglais, on a tendance à multiplier les cousinages quand d'autres termes seraient nécessaire pour préciser les degrés sans être obligés de rajouter une périphrase.

Et puis il y a les pronoms possessifs. Les "son" ou "sa" qui dans certains cas peuvent se référer à plusieurs personnes d'une phrase ou proposition qui précède, quand en anglais un "his" ou "her" permet de lever la question plus élégamment qu'en rajoutant "de cette dernière" ou "de ce dernier".

En revanche le fameux accord du participe passé avec l'auxiliaire avoir, remis en question car trop compliqué, est d'un immense secours de sens lorsqu'il est maîtrisé, on gagne un temps fou. 

Je suis curieuse de voir si un peu d'écriture inclusive parviendra à s'imposer, comme l'ont fait lorsqu'ils étaient évocateurs et harmonieux (1), certains termes inventés de toutes pièces pour contrer des termes anglais. Pour l'instant je l'utilise quand elle donne des résultats verbalisables sans heurts, et pas trop susceptibles de ralentir la lecture. Pour le point médian, je ne suis pas encore au point car il manque au clavier. Comme Kozlika l'avait un jour suggéré, j'utilise souvent l'apostrophe, même s'il s'agit d'un usage détourné. 

Si seulement j'aurais pu partir en retraite dans 5 ans, tel qu'il était prévu à l'époque où je suis entrée dans la vie active, et non pas 10 ou 12 tels qu'il le faudrait désormais, j'apprendrais un petit lot de langues étrangères que pour l'instant je ne connais pas, histoire d'élargir ma palette de mots justes. 

 

(1) Par exemple, j'aime beaucoup pourriel pour spam. Ça dit fort bien ce que ça veut dire.

 

 


Il y a deux ans - version longue -

nb. : Ce texte a été écrit bien avant le 7 janvier 2015 et le message autopromotionnel reçu de ta part le 8. À la réflexion j'ai décidé de le maintenir à la date que j'avais prévue. Il est une bonne mesure du chemin parcouru, de l'incidence qu'un acte de terrorisme même s'il ne nous touche pas physiquement, peut avoir dans nos vies, nos façons d'aimer, de penser, de percevoir le monde. À l'instar de Marie, je me suis longtemps demandé, surtout pour ma part devant les faiblesses que j'avais : Peut-on changer ? Je sais désormais que la réponse est oui. 


Capture d’écran 2014-11-04 à 18.03.12Il y a deux ans, à la même heure, je vendais "L'histoire d'Alice qui ne pensait jamais à rien (et de tous ses maris)". Le patron et moi étions efficaces.
J'étais heureuse et fière (1).

 

 

(deux mois après)

La librairie allait fermer. Définitivement.

Tu m'as dit Va-t-en (2).

 

(l'année suivante, autre établissement)

Je n'ai pas su vendre le roman d'après.

Toute compétence a ses limites.

 

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Il y a deux ans - Make it short

nb. : Ce texte a été écrit bien avant le 7 janvier 2015 et le message autopromotionnel reçu de ta part le 8. À la réflexion j'ai décidé de le maintenir à la date que j'avais prévue. Il est une bonne mesure du chemin parcouru, de l'incidence qu'un acte de terrorisme même s'il ne nous touche pas physiquement, peut avoir dans nos vies, nos façons d'aimer, de penser, de percevoir le monde. À l'instar de Marie, je me suis longtemps demandé, surtout pour ma part devant les faiblesses que j'avais : Peut-on changer ? Je sais désormais que la réponse est oui. 

 

Capture d’écran 2014-11-04 à 18.03.12Il y a deux ans, à la même heure, je vendais "L'histoire d'Alice [...]". Le patron et moi étions efficaces.
J'étais heureuse et fière.

Puis tu m'as dit Va-t-en.

Je n'ai pas su vendre le roman suivant.

 

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À 50 ans elle découvre enfin quel est son super-pouvoir

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Nous avons tous au moins une addiction et un super pouvoir. Proserpine, habitante de Clichy la Garenne savait depuis l'âge de 8 ans que son addiction était la lecture. Ce qu'elle n'a découvert qu'à 50 c'est que son super pouvoir était de passer commande à la rue de ce qui lui manquait comme objets courants de la vie quotidienne. Il y avait déjà eu plus d'une fois quelques jolies fortunes d'encombrant. Ainsi ce siège pour poste de travail informatique trouvé 2 jours après s'être fait la remarque que celui du fiston était vraiment trop usé. Une chaise trouvé au surlendemain d'avoir usé jusqu'au vide la paille de la sienne. Un carton plein d'enveloppe à la veille de devoir effectuer un envoi en nombre - pas tout à fait au bon format les enveloppes mais néanmoins utilisables -. Mais la confirmation qu'il ne s'agissait pas simplement de hasard est arrivée en ce 31 juillet.

Elle avait en effet perdu ou égaré son porte-monnaie quelques temps plus tôt. Leur dernier moment commun identifié fut lors que l'affranchissement d'un courrier destiné à la Sécurité Sociale et qu'elle avait cru pouvoir déposer dans la boîte à lettre de cette administration. Cette dernière venait hélas d'être condamnée et il avait fallu filer à la poste afin d'affranchir la lettre. Les derniers centimes du porte-monnaie y étaient passé. Peut-être parce que si vide et devenu trop léger, il avait disparu dans la foulée (tombé sans faire de bruit ?). Il convenait donc d'en racheter un. Comme il n'y avait rien ou peu à mettre dedans dans l'immédiat, elle avait décidé d'attendre le début d'août.

Par ailleurs ayant entrepris quelques rangements et une collection de documents officiels récents à classer elle avait noté la nécessité d'acquérir des pochettes transparentes perforées. L'urgence n'était pas telle qu'il fût impossible d'attendre le début du mois suivant pour engager cette dépense.

Il s'est trouvé que dans une petite poubelle des beaux quartiers, soigneusement déposé près d'une poubelle officielle, un de ces sacs cartonnés de restauration rapide (dans lequel restait aussi canettes et paquets de gâteaux vides et quelques autres vrais déchets, mais propres, de ceux que selon les villes on peut ou non recycler), elle a dégoté très exactement un porte-monnaie (aussi vide que celui enfui, il ne faut pas (trop) rêver, et un sachet au 3/4 pleine de ces pochettes transparentes perforées. Comme si un ange de Wim s'était chargé de la liste de courses et sans attendre le 1er. Le porte-monnaie était usé ce qui pouvait expliquer sa disgrâce mais les pochettes neuves et propres. Qu'est-ce qui peut pousser quelqu'un à jeter dans cet état prêt à l'emploi un tel article de papeterie ?

En attendant de pouvoir résoudre cette épineuse question, Proserpine sait désormais que son super pouvoir est de pouvoir par une simple pensée de bonne ménagère contacter un père noël secret de la cité et le faire en dehors de toute saisonnalité.

 

PS : Le prénom a été modifié

 

*            *             *

 

PS' : Pour un peu je regretterais de n'avoir pas eu de d'achat différé plus ambitieux

Boutade à part, j'ai vraiment trouvé ces deux éléments à la veille d'entreprendre de les acheter car ils manquaient.

Et par ailleurs jeté dans un sac près des poubelles de l'immeuble du lieu de travail, un sac à main, lui aussi légèrement usé mais encore très correct, et qui ressemble de façon troublante à celui que dans un douloureux rêve récurrent de ces denier temps j'hérite avec une sorte de mission de devoir faire bon usage de ce qui est dedans. Celui trouvé ne contenait rien (pas même un carnet rouge), mais c'est vraiment LE sac de ces songes à répétition, par ailleurs assez violents. Si seulement l'avoir trouvé permettait leur disparition ça serait un soulagement. Même de façon onirique, je ne tiens pas tant à me venger du mal qu'on m'a fait. Les états belligérants du moment nous montrent suffisamment quelle spirale infernale s'enclenche dès qu'on s'y laisse aller.

 


Le code cul erre


Tu as fait des frais de lingerie pour ton nouvel ami - il est trop tôt pour parler d'amour, mais tout va bien au lit -. Ce n'est pas trop ton truc mais l'époque est dans l'apparence, et puis tu n'aimes pas porter pour l'un ce qui plu à l'autre, une façon de rêver en démarrant même pour les petits habits avec du neuf que cette fois-ci enfin ça se finira bien et pas par une mise en silence ni un Contente-toi d'être une amie, j'ai trouvé mieux, voire un aveu de 15 ans vieux, Depuis tout ce temps-là ce n'était plus toi (1). 

Bon, tu n'as pas changé, faire du shopping pour toi est une immense corvée, sauf quand il s'agit de chercher le bon vêtement pour un bien-aimé et qu'il contient du temps et des rires partagés. Tu es donc allée au bout de ta rue : une marque de lingerie et vêtements d'intérieurs, puis vêtements généraux - mais c'est la lingerie qui l'a fait connaître, y a posé son siège social il y a plusieurs année et une boutique garnit le rez-de-chaussé. Plus d'une fois sortie sans écharpe, sans bonnet, ou avec un pull trop léger, tu t'es rendue compte que ça n'irait pas pour affronter la journée et au passage tu t'es rééquipée car le temps pressait et qu'il était trop tard pour rebrousser chemin. 

Mais cette fois ce sont des sous-vêtements que très volontairement tu achètes. La vendeuse t'annonce que si tu as un smart phone en captant le code QR reproduit qui en motif dans la dentelle, qui sur l'étiquette, tu pourras accéder à un texte d'une page écrit par l'un ou l'autre des plus fameux écrivains. Tu as vaguement pensé On n'arrête pas le progrès, mais tu n'avais que le futur rendez-vous en tête et ça ne t'a pas outre mesure tracassée. Tu n'as même pas pensé à demander si le choix était aléatoire ou par couleur, modèle ou taille. Pour le rouge j'aurais du Barbey d'Aurevilly, pour le noir du Stendhal. Et si je prends ce "chair" vieillot, aurais-je un brin de Bovary ?

Voilà, tu es dans ces moments où ça plane pour toi, c'est l'euphorie des débuts de quand les corps exultent et que l'intendance ou la famille ou les dettes les chômages les poubelles à descendre les fuites d'eau les rages de dents la personne qu'on aimait avant et un peu moins maintenant mais qu'on ne veut pas blesser n'ont pas encore tout fait capoter. L'avantage de l'âge c'est qu'on sait que ça ne saurait durer.

Alors on profite, joliment habillée, sexytudinellement dévêtue, et que le moment soit parfait.

 

*            *            *

C'est en ramassant ton panty (2) après les instants extatiques que l'homme s'amuse, C'est quoi ce code sur ta culotte ?, saisit son téléphone, des fois qu'il y ait une pub avec une longue blonde aux jambes interminables, vu que sur ces points-là, avec toi il n'est pas sauvagement comblé (3). Mais voilà que le clic fait apparaître un texte, Hé dis-donc c'est une histoire, toi qui aimes lire, tu vas adorer !

Tu sors propre et fraîche de la salle de bain au moment où il te tend l'appareil avec le texte dessus, 

C'est un extrait de quoi ? demandes-tu en le saisissant. Tu t'attends à Hugo, au torride Apollinaire, à l'insaisissable Rimbaud, quelque coquinerie de ces gars-là. 

Et vlan.

Le texte est de mots d'amour qui un temps furent pour toi, celui qui l'a écrit n'est autre que celui qui te quitta et qu'il t'aura fallu des mois non pas pour l'oublier, c'est impossible, mais pour parvenir à retrouver le chemin du désir. C'est peu dire que la magie du moment amoureux vient d'être vachement brisée.

(version 1)


*            *            *

 En dégrafant ton soutien-gorge d'un geste délicat (4), l'amant s'aperçoit que le motif de la dentelle fait code, la curiosité commune l'emporte sur la hâte sensuelle, vous supputez un jeu coquin, il attrape son téléphone, oubliant que le temps des ébats vous aviez tout éteint, prend quand même le temps de rallumer pour voir, bipe, semble déçu du résultat, C'est un texte, annonce-t-il un parfum de dépit dans la voix.

- Ah oui ? Fais-voir demandes-tu émoustillée, tout en espérant qu'il ne déb que le récit sera bref et bon.

Et voilà que c'est une histoire coquine et tendre, d'une page, écrite avec élégance par un bon copain, mais que ça fait bizarre de le retrouver là, en cet instant, comme s'il venait se joindre à vous - alors que votre relation n'est absolument pas amoureuse, tu connais sa femme, ils semblent très heureux, tu n'as jamais rien imaginé d'érotique, le lire alors et maintenant t'y oblige et ça te gêne un peu -.

L'amant n'a rien perdu de ses intentions, et tu as vite reposé le téléphone mais c'est toi qui d'un coup n'es plus tout à fait là, qui as changé de registre et te sens toute calmée, sortie du vif du sujet. Ce qui ne convient pas.

(version 2)  


*            *            *

 

(1) entres autres exemples glanés dans ma propre vie ou pas très loin ailleurs.

(2) toujours en littérature anticiper les retours de mode. #lettresàunjeunepoète

(3) mais tu as les attaches fines et les muscles harmonieux.

(4) Rêvons un peu.

 


*            *            *

Tout ce qui précède n'était que fiction, vous vous en doutiez.  Sauf que très prochainement ça sera techniquement possible, hélas pas tant pour les ébats que pour le code consultable (il sera sans doute fourni à part, j'ai simplement poussé un tantinet le concept).

Après mars et sa rubrique (que j'écrirai quand je serai capable de le faire en ne pleurant que de rire) Quand vous êtes libraire ne tombez jamais amoureuse d'un écrivain (5), je sens venir septembre avec cette constatation : Aimer des fournisseurs de matières à code QR peut nuire ultérieurement à votre libido. 

Le vrai gag, ça ne s'invente pas, c'est qu'il y a un bon camarade parmi les premiers fournisseurs, sans parler des amies, et qu'il s'agit vraiment de la marque où je m'équipe pour cause de proximité et qu'elle n'est ni de luxe ni de vulgarité. Pour une fois le marketing m'aura fait marrer.(Quoi que)

 

(5) Qu'une amie du métier qui se reconnaîtra si elle passe, résume ainsi avec romantisme : On ne couche pas avec la marchandise.

addenda du 04 août : Le Monde en parle un peu plus tard.

 

 

 

 

 


Je tu il / elle nous (vous ? ils / elles ?)

 


6a00d8345227dd69e2015391573eab970b-800wiC'est ce message du 7 novembre 2003, qui disait "N'as-tu jamais pensé à rassembler ce que tu écris ?" et que ça pourrait dessiner quelque chose, qui a marqué le début de la fin de ma première partie de vie.

 

Ce que j'écrivais à l'époque : des scènes de rue, de vie, la banlieue et aussi un peu Paris. Je n'y étais pas, j'étais dans ces petits récits comme une caméra qui enregistre et restitue, même si une pointe d'humour trahissait l'humain. De novembre 2003 à février 2004 et alors que je bossais comme cadre à temps presque plein et que les enfants n'avaient que 13 et 8 ans j'ai passé de gros morceaux de mes nuits à rassembler, organiser, fournir un petit manuscrit à qui me l'avait suggéré ainsi. Et c'est alors que "Poils de Cairotes" de Paul Fournel est sorti : mieux écrit, et portant sur une ville (Le Caire) qui pouvait intéresser le lecteur francophone bien plus que mon petit Clichy à l'exotisme réduit, mais vraiment pour le reste même veine d'inspiration. J'arrivais trop tard. L'amie qualifiée à qui j'avais passé le manuscrit ne m'en a plus reparlé malgré qu'elle avait aimé. Et puis de toutes façons la vie m'a poussée vers d'autres travaux (comme d'être béta-lectrice sur "Les trois médecins", ce qui fut une expérience formidable, mais d'autres choses aussi), puis mon père a eu son été d'agonie, je me suis battue pour ne plus bosser qu'à mi-temps, que j'ai utilisé aussitôt pour être de tout mon cœur et mes heures disponibles dans le comité de soutin à Florence Aubenas et Hussein Hanoun, tout en écrivant "Sans nouvelles", un billet par jour avant minuit, jusqu'à ce qu'on les libère.

J'étais jusque-là incapable d'écrire en "je", seulement d'écrire à la neutre. Mais ce récit nécessitait d'être incarné puisqu'il fallait sensibiliser qui lirait à une situation affective - je voulais de façon très volontariste me démarquer des discussions politiques sur le rôle des journalistes, aller ou non en zones de danger -. Donc je me suis forcée au "je". C'était un "je" qui avait été moi, mais 17 ans plus tôt.

Après, et même si je continue à le trouver inélégant (de son et de trop la ramener, donner l'impression de se placer au centre), il s'est installé. La plupart du temps, il est plus franc : puisqu'on écrit rarement sans se mettre du point de vue de l'un des personnages, autant l'avouer clairement. 

Il y a eu l'été 2005 l'expérience formatrice de "l'Hôtel des blogueurs" : tenir un personnage, qui lui aussi dit "je" presque par fait de cahier des charges du jeu, mais très loin de moi-même et auquel il arrivait des péripéties suggérées par les autres mais que j'ai accueillies, sinon ce n'était pas drôle, que je n'aurais jamais cru être capable d'écrire. Je ne remercierai jamais assez Kozlika et tout ceux qui furent de l'aventure. À la fois pour les progrès induits, et pour l'amitié et être venus au bon moment, m'avoir évité une dangereuse décompression post-aventure militante victorieuse (1) ; d'autant que je retrouvais ce job qui ne m'allait pas et dont désormais je débordais : la blouse grise mentale que j'endossais pour parvenir à traverser les journées de bureau était devenue trop étriquée. De partout les coutures craquaient.

A déboulé alors cette année en enfer où tout s'est mis à mal aller en même temps et où j'ai cru perdre mon bien-aimé, ma fille, la santé, le boulot (je n'attendais que ça sauf qu'il y avait un appartement à payer alors c'était prématuré) où j'ai perdu, et là vraiment, la presque sœur, la grande amie, et si brutalement sans pouvoir le piger, que tout s'en est trouvé ébranlé. Ma place à tenir debout dans ce monde. Plus rien n'avait de sens. L'amitié était mon mur porteur, il venait d'être pulvérisé.

J'écrivais alors les "Petites nouvelles d'Italie", pour la plupart à la 3ème personne (histoires dont j'avais été un témoin immobile ou que l'on m'avait rapportées), certaines à la 1ère (quand j'avais joué un rôle, enfant, en "pour de vrai"). Le danger encouru, la confiance massacrée les a plombées au noir. J'ai tenté coûte que coûte de prolonger l'écriture mais leur ton n'allait plus. Elles n'étaient pas, au départ censées être amères ni porteuses de graves tragédies.
J'ai écrit par ailleurs à titre presque professionnel pour un blog en anglais qui parlait de la vie à Paris et de ce qu'on pouvait y visiter, ça plus "Traces et trajets", plus le boulot, plus d'essayer de cesser de pleurer, et d'aimer qui restait à aimer, ça m'occupait en entier.

L'écriture sur blog permettait (permet toujours) de travailler les points de vue. J'y ai mis en ce temps-là pas mal de "tu" en adresse à l'amie disparue. Il aura fallu une rencontre épistolaire en septembre 2007, croiser Siri Hustvedt en juin 2008, un si beau début d'amour entre août 2008 et mai l'an d'après, et qu'enfin je me libère du job qui me permettait de gagner ma vie mais en me la bousillant, pour que je reprenne pied et retourne à mes projets, lesquels entre temps avaient évolués.
Le métier de libraire et dans un lieu étrange et merveilleux d'un quartier si bizarre, m'aura ensuite permis de subvenir en partie à mes besoins. Mais il était, là où c'était, un peu trop physique pour me permettre d'avancer en même temps dans la part d'organisation et de conception de l'écriture. J'ai accumulé sur la période un monceau de matière première, textes et notes épars. De quoi sortir quatre entités distinctes. Ma bataille actuelle, un chagrin plus tard et qui m'a à nouveau fait redégringoler en bas de la colline, est celle du travail d'articulation des pièces entre elles, de corrections, d'homogénéisation des niveaux d'écritures et des tons. Je sais que quand je perds l'humour j'écris chiant. Et quand je perds l'amour je perds l'humour ; au profit de noir sombre matinée d'une ironie grinçante qui certes peut séduire certains, mais que moi-même je n'aime pas. Je suis capable de produire ça. Mais ça n'est pas moi.

Il n'en demeure pas moins que ce dernier chagrin, curieusement me laisse entre les pattes d'un "tu" que je ne me connaissais pas - il n'existait pas même dans ma tête, je me souviens très bien de cette incapacité-là -, le "tu" autoadressé, de bien des textes littéraires, et du bon "Docteur Sachs", un "tu" qui en tant que lectrice m'a longtemps agacée. Je crois qu'il correspond au fait que cette ultime peine, et qui au vu de mon âge est sans doute la dernière dans sa catégorie, me laisse détachée de tout, distante, y compris de moi-même car j'ai vraiment aimé et me suis sentie, au vu de la fin, flouée. Et que je m'en veux d'avoir fait preuve de tant de naïveté. D'où que je me suis, pour survie, éloignée très vite de la personne que j'étais il y a encore six mois. Mais que comme on ne peut tenir à ce point amputée - c'est peu dire que celui qui est parti comptait-  j'ai ce recours au "tu" pour rester un brin unifiée. Au moins le temps que de nouveaux appuis aient repoussés. Ou qu'un ancien ait enfin décidé de prendre pleinement sa place et d'arrêter d'être celui sur lequel je ne peux compter.

Peut-être que le roman "Confiteor" qui me prouve que l'on peut passer d'une adresse à une autre sans pour autant perdre le (bon) lecteur et que j'ai lu au pire du chagrin, quand tout tangue autour de soi et que l'absence de qui nous a quitté(e)s semble insurmontable, a laissé son empreinte. Le "tu", finalement, va bien. Et peut se tisser de "je".

À présent que bon an mal an je dispose enfin de toute la pallette, je souhaite y adjoindre l'énergie et le temps et enfin déboucler ce qui doit l'être. C'est compliqué, c'est (financièrement) risqué. il faut que je tienne le coup affectivement et que j'accepte d'oublier ce(ux) qui manque(nt) et de vivre sans. Ça reste jouable tant qu'aucune nouvelle mauvaise péripétie ne vient s'en mêler. C'est dire si c'est fragile et s'il me faut faire vite.

Restera quoi qu'il advienne cette double perplexité : pourquoi faut-il que ça soient ceux qui me tendent la main et me font le plus progresser qui m'enfoncent ensuite et me laissent désespérée (mais pour des raisons affectives et non le travail en lui-même, du moins pas que je sache) ? Pourquoi ne suis-je capable d'acquérir des niveaux, des registres d'écritures différents qu'à coup de tragédies plus ou moins intimes dans lesquelles je me trouve embarquée ? 

Work and see.

[photo : une to-do list de juillet 2010 retrouvée en septembre 2011.]

(1) J'imagine qu'il en est de même pour ceux qui participent à un tournage exaltant, après tout le monde se disperse et si l'on n'a pas une vie intéressante vers laquelle retourner, un amour à retrouver, des enfants petits qui nous ont manqués, une passion toute personnelle à laquelle à nouveau se consacrer, c'est une période de dépression post-exaltation, jointe à l'épuisement physique du trop d'intensité qui a précédé.

PS : Et je ne remercierai jamais assez ceux qui m'ont aidée et celle qui m'aide très concrètement ces derniers temps, en m'ayant en particulier évité une erreur de choix professionnel qui m'aurait sans doute encore davantage éloignée de ce qui est devant être fait. Si un jour enfin je m'en sors, ça aurait été un sacré boulot d'équipe. 


Papelitos

 

PB257587

Je dois me rendre à l'évidence : de même qu'il y a par période des migrations de chaussettes solitaires et désolidaires, il semble y avoir des épidémies de désagrégation de sacs désireux de prouver leur biodégradabilité.

Il se trouve qu'un autre sac que celui, récent, dont je parlais, vient de se morceler étalant en plein passage ce qui y avait été en vrac, il y a plusieurs années, fourré. 

Sa composition totalement désordonnée - alors que je pratique plutôt une forme de désordre par zones organisé, et que le bazar est quand même en général regroupé par thème ou par teneur - me laisse à penser qu'il faisait partie des affaires entassées dans l'urgence lors d'un dégât des eaux par remontée d'eaux de cuisine usées fin 2008 ou 2009 -. Donc s'y trouvait tout et n'importe quoi : un vêtement dont je ne me souvenais pas, des câbles d'alimentation ou de connexion (qui ne m'ont pas manqué tant que ça), des papiers ennuyeux (vieilles factures, heureusement honorées), des cartouches Parker bleu-noir (difficiles à trouver) et tout un lot de post-it pour la plupart non datés. 

J'y ai jeté un œil avant de les jeter. Ils sont divers et variés de couleur et d'intérêts. Sans doute certains sont-ils des notes de lecture, mais le livre n'est pas indiqué. Il y a les éternels numéros de téléphone non nommés (depuis, j'ai fait des progrès, n'en note plus sans au moins une indication), des chiffres devenus mystérieux. 

Tous sont de ma main, je crois reconnaître ma façon de griffonner. Ce qui me semble intéressant c'est qu'aucun sauf un ne me rappelle rien. Ils pourraient avoir été écrits par quelqu'un d'autre. Most of them don't ring any bell. Je serais incapable pour certains de savoir s'il s'agit de quelque chose qu'il m'est venu d'écrire et que j'aurais noté sur la première feuille à ma portée ou bien une citation tirée d'un livre.

Ils vérifient donc parfaitement la pratique du Robinson (je ne mets pas le lien le bougre ne blogue plus) : à savoir que des écrits éventuellement intimes au bout d'un temps certain perdent cette qualité. Les détails de leur raison d'être immédiate se sont perdus dans les mois voire les années écoulées, les personnes concernées ne sont plus là ou plus vraiment les mêmes. Devenues affaires de mémoire, les faits, nécessairement se sont paré d'une aura de fiction. La réalité est trop complexe pour être saisissable via ce qu'il en subsiste un long moment après.

La suite n'est pas nécessairement destinée à être lue : si vous vous faites chier, vous l'aurez voulu. D'autant plus que je compte battre au passage mon record de notes de bas de pages. Je vous aurais prévenus. C'est pour moi dans l'idée d'un travail ultérieur que je n'aurais sans doute pas le temps d'effectuer (je connais ma vie), afin de savoir où retrouver la transcription exacte et exhaustive (matière première). Dans l'ordre de leur étalage sur le sol : 

Post-it 1 - bleu vert - carré - stylo bille 
Hubert Lucot "Le Noir et le Bleu Paul Cézanne" (Argol)
06 78 61 38 68 le 17/07 à 18h40

Post-it 2 - bleu vert - carré - crayon à papier et feutre violet
rue de Croulebarbe
Nuala O'Faolain Mona gildaf
flickr
la vie sauve (1)
pedzouille = country bumpkin

Post-it 3 - blanc - petit format - stylo bille noir stylo plume bleu en surcharge
Esmeralda Dennison (2)
300 000
3000 3000 300 300
Marianne Marion
Will Collins (3)

Post-it 4 - rosé - carré - stylo bille et feutre violet
→ incapable de répondre non même à un référendum (4)
42 25 17 (5)
6 12 70 72

Post-it 5 - bleu vert - carré - crayon à papier (6)
- Pourquoi la fenêtre a des barreaux
- Pourquoi on perd sans arrêt nos chaussettes
- Pourquoi on n'est jamais allé à Hauteville House (7)

Post-it 6 - bleu vert - carré - stylo bille (8)
Jonathan Coe 26/08/06 20h-21h
Viviane Hamy 26/07/06 France Cul 23h20 → ? (9)
6 août 21h-22h Sylvie Germain

Post-it 7 - bleu vert - carré - stylo bille (10)
17h-17h30 Culture
11 août Marie Darrieusecq
14 août Sylvie Testud
17 août Rykiel ⤻ Sarraute - Woolf
24 août Ariane Ascaride
25 août Frédéric Mitterrand
07/11/01

Post-it 8 - bleu vert - carré - stylo bille
② ──────────── France Cul
Annie Saumont (Losfeld)
qu'est-ce qu'il y a dans la rue qui m'intéresse tellt ?
────────────
lundi 17 juillet 11h20→30
Italo Calvino
jeudi 20 juillet Ourania
Le Clezio

Post-it 9 - bleu vert - carré - stylo bille bleu fin
dimanche 25 juin
France Culture
Vivre sa ville
7h05/8h00
cimetière parisien des Batignolles

Post-it 10 - bleu vert - carré - stylo bille noir fin
La goutte d'eau
désaltère
en même (abrégé) tps qu'elle
altère
────────────
"quelques fois j'ai les idées
si claires qu'elles me 
font mal aux yeux"
du pas de plus la 1ère

Post-it 11 - bleu vert - carré - stylo bille noir fin (11)
vers les 26 et 27/05/05
photos pour Arles
à nice and new pedestrian way

Post-it 12 - orange - carré - stylo bille noir fin et la dernière phrase au crayon à papier (12)
Pour les ressemblances
c'est pas
exprès et
pour le reste
d'ailleurs non
plus
───────
à plus tard comme tu voudras

Post-it 13 - bleu vert - carré - stylo bille noir fin et des essais de refaire fonctionner un stylo bleu
mettre en mot
pour moi
c'est parfois
un peu lourd
(+/- from David)

Post-it 14 - bleu vert - carré - stylo plume bleu sombre qui n'aurait pas fonctionné depuis longtemps
une tâche de café en bas à droite
on en crâme
on en crêve
name from spam
→ Zelma Magnani
why be an avera guy
any longer (13)

Post-it 15 - bleu vert - carré - stylo bille noir fin et feutre mauve (au dos)
① France Cul
mercredi 26 juillet
Viviane Hamy
de minuit à 0h40
────────────
dimanche 23 juillet 18h10
Stella Baruk
dimanche 6 août 21h
Sylvie Germain
(au dos) qui ont permis à cette fiction d'échapper à la réalité.

Post-it 16 - orange - carré - stylo noir (14)
→ 020406
name : Marcelino
14h27 1h47 36 jours 40 8 mois
37 jours
11'39
1 47
07/11/03
99
47
9h52 1h47 

Post-it 17 - orange - carré - stylo noir puis feutre
La beauté déborde
je ne peux la cadrer
────────────
pour Traces
Monsieur Pinault
se préoccuperait-il 
de ma pilosité ? (15)

Post-it 18 - orange - carré - stylo noir puis feutre (16)
Prova racogliere
meie pezzi si
che ti sei portata via
con te -
je suis en permanent danger

 

Ce dernier post-it est presque réconfortant : ça a beau être rude, c'est quand même moins pire cette fois-ci. Je crois plus en l'amitié qu'en l'amour d'où que celui-ci fait moins de dégâts en disparaissant brutalement.

   

(1) Ça je sais, c'est le titre d'un roman qui pour moi a beaucoup compté. 

(2) Not the slightest idea who it can be. Rien trouvé de probant sur les moteurs de recherche. Il s'agit donc peut-être d'un nom de personnage de roman. Lu ? Que je comptais écrire ? Ou d'un patronyme qu'un spam utilisait.

(3) Lui, je sais : famous old poet

(4) Je ne pense pas qu'il s'agisse de moi dont la capacité à envoyer promener sans la moindre diplomatie n'est pas à prouver. Qualification d'un personnage ?

(5) chiffres écrits verticalement. Je soupçonne une soustraction.

(6) forte thématique "questions existentielles" :-) . Ce serait des notes en vue d'un de ces billets de blog pour participer à un questionnaire qui circulait (et dont l'usage peu à peu se perd mais qui florissaient au début des blogs), que ça ne m'étonnerait guère.

(7) Hauteville House ou bien l'appartement de celle qui était mon amie intime et que j'appelais ainsi par référence au nom de sa rue. La question porterait alors sur le fait de n'y être jamais allée en famille au complet.

(8) On dirait un relevé d'émissions de radio que je souhaitais écouter.

(9) Cette entrée est encadrée, sans doute voulais-je ne surtout pas louper cette émission

(10) On dirait le petit frère du précédent, le mois est le même mais la seule date entière indiquée précède de cinq ans. Elle n'a donc peut-être rien à voir.

(11) Je me souviens très bien avoir joué les photographes en second pour le comité de soutien de Florence Aubenas et Hussein Hanoun. Aurions-nous fourni des images pour le festival d'Arles ? (plus aucun souvenir - pas exclu) 

(12) Troublant : on dirait des bribes de messages. Mais je n'ai pas l'habitude de noter quoi que ce soit avant : quand j'en écris c'est dans l'instant. Ou alors étais-je à "l'Usine" et dans un cas d'empêchement mais ne voulais surtout pas oublier. Ces phrases pourtant semblent anodines. Perplexité.

(13) La fin semble provenir d'un spam

(14) Plus aucune idée de ce à quoi peuvent correspondre ses décomptes. Peut-être m'embêtait-on sur les heures du temps partiel que j'ai occupé du 1er avril 2005 au théorique 1er avril 2009 ? Marcelino est peut-être un prénom de spam qui m'avait amusée.

(15) Le "pour Traces" étant précédé d'un "OK", je peux supposer que j'ai réellement sur ce thème écrit un billet, je crois savoir quoi (billet du 28 juillet 2006)

(16) Note d'après le 17 février 2006 c'est évident. Et je reconnais bien ce qui m'arrive quand ça ne va pas d'avoir recours à mes autres langues plutôt qu'au français

 

 

 

 

 

 


Calcio sequenza

[photos sans doute plus tard, de retour dans la grande ville fibrée]

 

"Plus de cœur, plus d'implication !"

Je suivais la partie plus à l'œil, qu'à la voix. Prendrais-je des photos ou pas ? 

L'homme d'ici me dit J'aime ce que dit l'entraîneur, il faudrait noter pour que je le redise en matchs après. Je ne me suis pas rendue compte que chroniqueuse insubmersible de la vie quotidienne, j'avais aussitôt obéi. Peut-être aussi par reconnaissance des efforts qu'il fait ces temps-ci pour me maintenir assez près de la vie.

*            *            *

On n'est pas dans le match.

Plus de cœur, plus d'implication.

On s'encourage au lieu de s'engueuler. Putain, mais t'es seul.

L'entraîneur sert aussi (un peu) de médecin des premiers soins (en cas de choc).

Monsieur l'arbitre ! (dit avec déférence).

J'avais oublié que pour un petit club c'est un budget les ballons.

J'avais oublié les échauffements d'avant match (mais pas les échauffements d'avant remplacement, alors que du temps où je jouais en club, les effectifs de filles étant assez limités, on était vite titulaire).

Blessures, chutes, sobriété. Un cri et c'est tout. Certains jouent un peu rude mais peu de mauvais gestes, de ceux faits pour casser.

Le ballon, les mecs, le ballon. J'avais oublié que nos entraîneurs, par force de l'habitude nous disaient "Les gars" parfois.

Visiteurs 1 - 0 Locaux

Le local qui fait juge de touche ne peut s'empêcher d'intervenir, de causer. Personne ne s'en formalise (ni ne semble l'écouter).

C'est pas grave, c'est généreux ! (après une belle action, trop belle, pas tout à fait très réaliste, et au bout du compte manquée)

J'avais oublié qu'un terrain officiel, même pour des hommes adultes, c'est grand.

J'avais oublié how tough a kid I was. Un engagnement physique en proportion de mes capacités gamines équivalent au leur. Jamais peur d'aller au contact (sauf pour les têtes). 

Allez les gars, il faut mettre plus d'intensité, il faut travailler.

Somewhere I'm still that tough.

La passe au Petit Prince (1) !

Bien joué Petit Prince ! (il avait reçu la passe, en avait fait bon usage). Je me (sur)prends à imaginer une équipe dont les membres auraient tous des noms de personnages littéraires mythiques. Gavroche, putain, mais tu vois pas que Madame Bovary est démarquée !?

Comme l'avait fort justement estimé La Vita Nuda (2), les Dylan et autres Kevin seront adultes un jour. Ce jour est arrivé, une première fournée a désormais 20 ans.

Tu trouves que ce match a quelque chose de bizarre, pourtant tout se passe bien. Mais alors quoi. Puis tu piges : ils sont tous blancs et même à majorité blondinets, les beaux ténébreux sont fort peu nombreux. Attention : aucune pratique discriminatoire, c'est juste le gisement humain local qui est absolument monochrome. Citoyenne du monde, ça me met mal à l'aise.

C'est important ces moments-là ! 

On est tous en tas qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse ?

C'est mieux ! Concernés sur le premier départ !

Attends mon Jeannot !

Aïe aïe aïe aïe aïe

C'est bon !
C'est bon quoi ?

C'est bien Erwan, t'es bien placé !
Ça sert à rien, répond Erwan, dépité.

Bravo Charly, t'es bien placé !
(Charly n'a rien répondu il s'est contenté de poursuivre son action) 

À  20 ans on a encore les articulations invicibles. Plusieurs des chocs auraient eu raison des miennes (celles de maintenant).

Monte d'un cran, Matthieu, monte d'un cran !

Vas-y Francky c'est bon, vas-y Francky 
(cherchez l'intrus)

Faut que ça centre, y du monde.

Putain, ça me saoule
Pas grave Dylan.

Visiteurs 2 - 1 Locaux

Ah quand même (en écho) ! Car les locaux étaient menés 2 à rien et qu'il était grand temps de siffler la fin.

Le deuxième but des visiteurs était sur une incompréhension entre le gardien et deux défenseurs avec un attaquant adverse en embuscade.

Tu peux récupérer le poteau de corner demande l'un des juges de ligne au gardien qui dit non pour un mais attrape l'autre qui était sur son chemin. 

On récupère aussi ceux des ballons partis dans les champs, le collège voisin, un arbre ...

La nuit peut tomber sans plus déranger.

 

 

 

 

(1) Un grand quinze-côtes élancé mais costaud avec une belle vitesse de pointe et une technique assez classe ; de l'équipe Visiteurs.

(2) Je ne sais même plus s'il reste trace de son blog. Quel dommage !

 

 


Au ciné

 

P8064890 

J'étais chez le kiné, il est venu plus tôt, car j'arriverais pour la séance, sans trop de marge en fait. 

Il a pris les billets pour m'éviter la honte de devoir débourser pour une seule séance, à deux, l'équivalent de deux heures du boulot que je viens de perdre.

M'éviter aussi d'être tentée par les offres de cartes ceci ou abonnements cela, ces pièges à consommer encore et toujours plus.

Ce qui fait que quand je suis arrivée je n'ai pas eu à m'inquiéter d'attendre, ni me préoccuper du moindre achat. En plus qu'il m'a embrassée avec une grande tendresse.

Le film était formidable, plein de scènes dansées, certes pas aussi bien que Pina mais quel plaisir de voir des corps aussi libres et vifs que ceux-là.

Nous sommes sortis heureux, avec du temps de libre, et comme il se doutait que je n'avais rien avalé depuis le matin il m'a proposé sur le pouce un petit restau. Nous sommes allés au Quigley's où la dernière fois je n'avais pu prendre qu'une bière. Manger m'a sortie un peu du chagrin qui m'enserrait et que la séance de kiné qui fait du bien au corps mais par certains gestes thérapeutiques presques tendres, rend vulnérable qui est blessée, avait dans un premier temps revigoré.

Nous sommes rentrés lentement, en nous promenant comme des amoureux.

Il comptait profiter de ce jour de congé pour aller jouer à la pétanque, s'entraîner. Mais comme j'avais piètre moral il est resté

*        *        *

 

pour m'aider à traverser cette journée difficile, entre impuissance et écœurement. Six ans d'une relation intense mis au rebus comme de rien après une hésitation trop longue ; on dit "sauver les apparences" mais l'apparence condamne en fait. Je ne suis pas spectaculaire, je le sais. Mais un homme sans lâcheté, après avoir tant fait, m'aurait accordé une chance. Et parlé.

Ça tombe mal, très mal qu'il n'y ait plus le travail pour s'amarrer à la dignité de l'activité, le travail pour autrui s'entend. Mon travail personnel devient noir, trop noir or c'est le moment où jamais où je devrais avancer au lieu de me retrouver avec les mots mazoutés.

Où trouver la force de ne pas renoncer ?

 

[à part le cinéma et le kiné, d'y être allé vraiment, et les paragraphes après les *        *        *, ce texte est une fiction ou plutôt une anti-réalité. Rêver est tout ce qui me reste. En particulier, le film était décevant]