Huit ans
29 août 2013
Ça fait huit ans ce jeudi que j'ai commencé à bloguer ici. Le tout premier billet faisait deux lignes, c'était plutôt comme un essai, une déclaration d'intention qui ne fut pas tenue :
"Une cuisine, Paris ou pas loin, des barreaux qui dans un sens protègent, dans l'autre enferment et de toutes façons étaient là d'avant, la silhouette d'Eugène ..."
Ou plutôt qui le fut dans un premier temps mais que les circonstances subies ne me permirent guère de tenir longtemps. L'année 2005/2006 fut en effet celle où ma vie me tomba sur la tête et si je vais bien à présent (1) et qu'en tout cas je suis guérie, fors une séquelle, du plus lourd des accidents de ce temps, je le dois en belle partie aux amis rencontrés grâce à l'écriture sur l'internet. Sans eux, j'aurais peut-être sombré (et je ne disposerai pas de l'outil sur lequel je tape ces mots, ce qui est indéniable, très concret).
Inévitablement, les petites choses légères et réconfortantes que j'espérais partager ont pris du plomb dans l'aile, j'ai même parfois dû déclarer forfait.
Je tenais déjà régulièrement un fotolog depuis le 29 juillet 2004, un mini-blog chez 20-six sur une histoire de changement d'auto et qui reste à rapatrier (2) et le "Sans nouvelles" écrit à raison d'une note par jour pendant la période du comité de soutien à Florence Aubenas et Hussein Hanoun, racontant une de mes (més)aventures de jeunesse et dont je ne désespère pas de faire un bref roman.
Mais voilà, bloguer, le faire réellement, le faire pour de bon, c'est avec Traces et trajets que ça a commencé.
À l'époque il ressemblait à ça (3)
Je trouvais (et trouve encore) le texte clair sur fond noir beaucoup plus lisible (à l'écran) (que du noir sur blanc). Seulement il s'est avéré que ce n'était pas l'avis général. Quand j'en ai eu le temps, j'ai fini par tenir compte des protestations.
Au bout d'un moment aussi, j'ai éprouvé le besoin d'être moins limitée en largeur d'affichage qu'on ne l'était alors.
Huit ans après, les choses commencent à devenir intéressantes : j'ai moi-même paisiblement oublié la teneur de la plupart de mes propres billets, alors c'est instructif de se relire, parfois carrément drôle, parfois un brin flippant (4). La ville où j'habite et que finalement je n'ai pas quittée pour celle de la piscine de mes rêves (5) a profondément changé. Les sociologues diraient qu'elle s'est gentrifiée.
Je suis heureuse de retrouver, grâce à moi (!), des images de ce qu'elle était. Ce n'est pas particulièrement nostalgique, c'est pour savoir que ça a existé, rendre palpable ce qui a été, conforter ma mémoire.
Un petit exemple parmi d'autres, celui de "ma" piscine, comme elle était avant la restructuration des vestiaire. J'y ai passé tant d'heures, j'aime qu'en ayant conservé une trace objective, ces heures n'aient en quelque sorte pas comptées pour rien. Elles sont, pourrait-on dire, homologuées. Ça ne procède pour autant pas d'un regret, la nouvelle installation à part la curieuse altitude des sèches-cheveux est plutôt plus fonctionnelle [billet à retrouver, la photo était drôle].
Entre-temps mes enfants sont devenus adultes et comme mon fils a beaucoup changé (de gabarit s'entend), c'est amusant de retrouver sa silhouette enfantine en tant que personnage (c'était lui Stéphanot, renommé pour l'occasion, afin de ne pas lui créer d'embarras éventuels).
Il me semble que lorsqu'on écrit, tenir un blog ou tout autre journal, permet d'assouplir la plume et de s'entraîner à s'y coller même quand on préfèrerait ne pas (car l'exercice n'a vraiment de sens et plus tard de valeur que s'il est, sinon quotidien du moins soutenu, par rapport au déroulé des jours). Il est évident qu'on n'échappe pas au paradoxe du diariste, mais si l'on parvient à tenir le rythme, il se peut que plus tard, ou que plus longtemps plus tard d'autres que nous, amusés des vestiges d'une époque passée, n'aient pas à le regretter.
(1) ou disons normalement mal compte tenu de nouveaux développements ; il doit être écrit dans quelque sombre grimoire que mon lot est de me faire jeter douloureusement tous les sept ans. J'aimerais bien savoir ce qui chez moi provoque ça.
(2) Pour l'instant je n'ai fait qu'esquisser la migration
(3) Merci à qui à la BNF s'occupe de la sauvegarde d'une partie de la mémoire de l'internet. Je retrouve ainsi des éléments de mon propre travail dont je ne dispose déjà plus.
(4) Il m'arrive d'être, croyant plaisanter ou envisager l'impossible, terriblement prémonitoire.
(5) Quand je serais riche, un petit pied-à-terre, qui sait ?