Dans ce petit immeuble de la toute proche banlieue 17 ou 18 logements guère davantage, deux sont désormais loués en colocation, un via un organisme à une famille de réfugiés - avec parfois quelques enfants joyeusement turbulents ce qui est plutôt vivifiant, quand je pense que certains cherchent à refuser l'accueil, ça me met en colère -, les autres sont plutôt occupés par leurs propriétaires. Nous qui étions jeunes parents à notre emménagement sommes désormais parmi les anciens occupants. C'est bref une vie.
L'avantage des colocs c'est de croiser régulièrement de nouvelles personnes, souvent actives, parfois venues de loin - une année heureuse nous eûmes en voisins des Colombiens -, ça créé une diversité.
Les deux inconvénients des colocs, qu'elles se renouvellent entièrement (généralement par années scolaires) ou partiellement, sont les travaux entre deux baux, et les PENDAISONS de CRÉMAILLÈRE.
Le truc étant que les fêtes semblent désormais devoir toutes se poursuivre toute une nuit, commencent en soirée, tranquillement - sans doute un buffet, un dîner - et qu'à partir de minuit, il est de mise de mettre la musique à fond.
Il me semble qu'autrefois on faisait plutôt l'inverse, la musique jusqu'à une certaine heure puis on refaisait le monde autour de derniers verres successifs (voire plus si affinités) mais au seul son des conversations. Et vers 2 ou 3 heures même les plus valeureux rentraient chez eux (ou restaient dormir, mais c'était ensuite silencieux).
Les pendards de crémaille de nos jours sont tous au départ fort civilisés : nous avons même parfois été conviés (partagé un verre ou deux en début de soirée puis redescendus pour ne pas gêner) et toujours poliment avertis.
Certains écoutent de la bonne musique : nos ex-ex-voisins de palier mettaient la sono à faire tomber les murs, mais du fond de nos lits respectifs au moins ma fille et moi écoutions sans déplaisir. À un moment, le sommeil vient.
Ils oublient simplement, qu'à un moment donné les humains normalement constitués ont :
1/ du mal à dormir sur fond sonore élevé ;
2/ besoin d'un minimum d'heures de sommeil même en étant tolérants envers une fête prévue.
Ils ignorent sans doute que certains prolétaires ou commerçants travaillent le dimanche.
Depuis que c'est mon cas assez régulièrement, j'ai l'impression que toutes sont tombées des samedi soirs de veille de dimanche travaillés.
Je ne m'en plains pas trop, il se trouve que, sauf karaoké, je ne fais pas partie de la catégorie 1/, que presque rien ne m'empêche de dormir. Il y a toutefois toujours cette sorte d'obligation de se coucher plus tard alors que l'on comptait se coucher tôt et une vague appréhension que ça soit réellement plus difficile que d'autres fois de gagner les rêves. Cette coïncidence de calendrier m'amuse plus qu'autre chose, en fait.
Et lorsque la police (municipale je présume) intervenait systématiquement, faisant parfois payer une solide amende (une nuit j'en ai entendu le montant), aux ex-ex-voisins d'en face dont la musique était bonne, ça me navrait qu'ils puissent supposer que nous étions à l'origine de la plainte. Je crois tout simplement qu'à partir d'une période il y a eu des patrouilles et qu'ils faisaient cesser toutes fêtes privées passé 3h30.
Les nouveaux crémaillants avaient fait les choses bien, en sonnant pour demander si ... désolés par avance ... pendaison de crémaillère ... vous comprenez.
Peu conscients, mais c'est normal que leurs prédécesseurs en avaient fait autant pas si longtemps auparavant, et leurs voisins du dessous et les prédécesseurs de ces derniers, et la demi équipe arrivante en remplacement lors d'une modification d'équipe de leurs pré-prédecesseurs et ...
Quoi qu'il en soit, j'ai profité de la fin de soirée - rentrée tard de mon propre travail et son after et, pour une fois que nous étions en voiture, les embouteillages - pour accomplir quelques tâches ménagères et lancer une lessive tardive. Les voisins bruyants sont une excellente couverture aux rattrapages à heures indues de retards ménagers.
Le fiston était sorti, la fille dans les étages plus élevés potentiellement moins gênée, leur père qui avait beaucoup circulé pour rendre service tout au long de la journée, s'était endormi comme une masse.
J'étais heureuse aussi de pouvoir suivre un moment du Ironman d'Hawaï auquel participait une camarade de club - je débute, je n'ai fait que la croiser, moi rendue timide et impressionnée par le simple fait de sa sélection -, que j'avais envie de suivre et d'encourager à fond.
Pour ma part, à l'ancienne, après le retour du fiston - parfois mon côté Mamma italienne ressort inopinément -, j'ai pu lire deux pages avant de sombrer malgré moi malgré un bouquin qui embarquait (1).
Pour être réveillée en cran d'arrêt à 5h30, par une voix d'homme calme, indiscutable, déterminé, qui prononçait ces mots que j'entendais comme s'ils étaient dit à notre propre porte :
- Il faut couper la musique et arrêter de parler.
et derrière un grand silence qui a achevé de me réveiller au point que j'ai pu noter la phrase précise sur mon téléfonino (horodatage 05:34).
Pour un peu j'en aurais voulu au(x) fauteur(s) de silence. (2)
Il n'en demeure pas moins que le vrai problème du travail le dimanche, ce sont les crémaillères du samedi.
(1) Olivier Truc, "La montagne rouge"
addenda du dimanche soir : Ma fille nous dit que vers 5h elle a été réveillée par un type ordurier qui gueulait de l'un des immeubles d'en face son exaspération. De façon surprenante, cet échange m'est resté inconnu, et c'est donc sans doute un policier, probablement appelé par ses soins, venu frapper chez les fêtards tardifs et leur intimer calmement de cesser qui m'a réveillée trente minutes après.
(2) Rancune flash : à peine les mots notés, je me suis rendormie, la joue sur le téléfonino.