Fin de Salon (du livre) (de Paris)


    Cette fin de salon un dimanche soir laisse une sensation de trop peu - bien sûr pas pour ceux qui tiennent les stands et doivent être exténués -. Mais la demi-journée pro du lundi était toujours intéressante. La réduire à deux heures le jeudi (?!) matin, signe qu'aucun des décideurs de l'organisation ne fréquente, pas même à titre personnel, de bibliothèques ou de librairies, c'était de facto la supprimer du moins pour ceux qui travaillent tout au long de l'année au contact avec le public.

Finalement être entre deux emplois et n'avoir pas tenu non plus de stand m'aura permis quelques plaisirs : assister en simple public à des tables rondes dont certaines résistent au commercialisme ambiant. J'ai fait connaissance avec la littérature de Corée (du Sud) et ce que j'en ai entrevu m'a donné envie.

Soudain j'ai songé à Lydie Salvayre. Inquiète pour elle.
(Je n'ai pas vu ni cherché si elle était en dédicaces ou pas).

Il manquait quand même au moins trois éditeurs à mes yeux importants.

La loi des croisements sur les salons : on voit toujours qui on ne s'attendrait pas spécialement à croiser et ceux à qui on a dit À tantôt on repart sans les avoir vus. 

Deux amis me racontent le Géant Letton. Ils en font une légende. C'était pour moi un heureux bref moment.

Je parle avec quelqu'un que j'admire et apprécie. Toujours un peu surprise que dans un endroit pareil on trouve du temps à me consacrer. Probablement que je représente une détente : quelqu'un à qui on n'a pas à vendre (du moins pas directement et ceux que je fréquente ce sont ceux que j'aime alors pas besoin qu'ils m'entreprennent je suis déjà de leur côté), ni quelqu'un qui a quoi que ce soit à vendre (et quand j'aurai un manuscrit, si enfin l'existence s'apaise, je le leur présenterai au calme), tout en étant quelqu'un à qui on peut parler boulot. 
C'est d'ailleurs très intéressant d'assister à un salon en spectatrice tout en étant au courant de l'arrière-boutique. Un peu regarder un film pour lequel on aurait assisté ou participé pour partie au tournage.

J'ai hâte de retourner à mes propres travaux et de démarrer mon nouveau travail. Il est temps que je passe du côté producteur de la force.

Avant de quitter les lieux je croise quelqu'un que j'aime. Occupé et moi sur le départ, mais déjà une bise et quelques mots, ça me donne du courage pour les jours à venir.

Je vois sur son stand un patron (partenaire ?) de quelqu'un que j'ai aimé, on se connait un peu mais je ne sais pas du tout ce qu'il sait ou non et je crains le pire sur ce qu'on a pu lui raconter. Dans le doute je m'abstiens d'aller le saluer, tout en me disant que j'ai peut-être tort. Nos rapports ont toujours été courtois et c'est quelqu'un dont j'admire la culture.
Je m'abstiens également d'aller saluer celui qui s'était permis de venir complètement bituré à Livre Sterling (alors qu'il n'avait pas rendez-vous, donc rien ne l'y obligeait) tenter de nous faire l'article pour sa sous-section de la maison d'édition. Je le vois de loin faire son numéro auprès de connaissances communes et claironner en prenant congés Salut les hommes. Probablement pour être spirituel.

Deux des tables rondes avec des auteurs coréens sont de très bonne tenue. Jérôme Leroy, participant de l'une d'elle, pose en ayant demandé l'autorisation avec courtoisie, LA bonne question, qui libère la parole d'un des auteurs du pays lointain. C'est émouvant lorsque même sans comprendre la langue ni aucune de ses racines, on peut percevoir à quel moment une personne qui parle en public sort des propos guindés pour entrer dans quelque chose qui se rapproche de la confidence ; quelque chose qu'elle n'aura pas l'occasion de redire ailleurs. Qu'elle ne dira peut-être qu'une seule fois.

Je trouve des toilettes dans un coin à un rez-de-chaussée. Ne les avais jamais remarqué les autres années. Si c'est une innovation pour une meilleure accessibilité il faut reconnaître son bien fondé.

J'ai vu aussi des voitures logotées du salon, sans doute comme pour Roland Garros. Pas étonnant ensuite que les entrées soient à 12 €.

À un moment donné je prends des portraits. Et sur ce temps là je ne suis presque plus que photographe.

Ma voisine d'assistance prête ses lunettes à Carole qui a su malgré le succès garder son don pour rendre toute assemblée vivante, en prise avec la vraie vie, ses contraintes et ses rires. Si j'avais douze ans elle serait la personne qui me lancerait dans la vocation d'écrivain. Il se trouve que je suis plus âgée qu'elle et que ce fut quelqu'un d'autre mais la moi de douze ans, avec laquelle j'entretiens d'excellents rapports éprouve une grande gratitude pour ce que Carole aurait pu faire pour elle.

Soudain elle dit quelque chose qui fait que je comprends l'effet que ses livres me font. Ils [me] guérissent. 

Je ne voulais pas dépenser d'argent mais j'ai craqué pour l'avant dernier sandwich d'un des stands du fond. Et pour un livre aussi d'une auteure coréenne qui a failli ensuite me passer sa carte bancaire au lieu d'une carte de visite. Nous en rions de bon cœur. Quelque chose me dit qu'au delà des barrières de cultures et d'usages et de langues et d'alphabet, nous avons elle et moi beaucoup en commun.

À un moment circulant, je consulte mes messages sur mon téléphone intelligent et voilà que quelque chose que j'y lis me fait tellement rire que je dois m'arrêter dans un coin (non sans avoir failli me manger une paroi de tissus rouge). Une fois le rire calmé comme des pleurs se serait asséchés, je reprends mon périple.

Pas traces d'Eduardo. Nous nous étions dit À dimanche. Zut alors !
(c'est exactement ce que je remarquais plus haut).

Sur l'une des tables rondes il y a un homme qui m'agace car il est extrêmement présomptueux. Les autres invités m'intéressent alors je reste mais peux constater qu'il m'agace de plus en plus au fil des années. Est-ce lui que le succès fait de plus en plus gonfler ou moi qui en vieillissant devient moins indulgente ?

Rarement je me serai sentie aussi libre que cette année ; personne pour occuper plus qu'un-e autre mes pensées, entre deux emplois dont aucun soucis concret immédiat - grande légèreté -, personne de gravement malade à la maison en ce moment (savourer cette trêve). Pas de grands chantiers en cours, 2015 a tout mis en stand-by et j'éprouve ce besoin de reprendre des forces avant de me ré-embarquer dans cette double-vie qu'est l'expérience de l'écriture lorsque l'on n'en vit pas.

Un tram passe alors que je sors, ça serait donc tram + 13 au retour (comme à l'aller). Arrivée à Clichy, je remarque, sans en souffrir plus que ça, que quand même il fait rude froid pour un jour de printemps - c'est désormais du constaté extérieur -, le dîner a été préparé par l'homme de la maison et c'est rudement bon (et en qualité et qu'il l'ait fait et la coordination parfaite sans s'être consultés). Je me sens fatiguée, pense, une douche, régler les réveils pour demain et au lit mais en fait j'écris ce billet. 

Tout en dormant.

Mais j'ai peur si j'attends, d'oublier mes impressions. Comme toujours j'aimerais me rappeler du bon. 
Et dire à Sophie (Q) qu'elle prend de l'assurance comme modératrice de débat et fait ça de façon formidable. Elle a trouvé sa place et par la qualité (cet exploit).

Tout n'est peut-être pas perdu.

Je vais tenter dans la semaine d'envoyer à chacun-e les photos qui le/la concernent (mais je ne promets rien).

PS : Le film de Téchiné "Quand on a 17 ans" est résolument de facture classique et destiné au plus large public possible mais très réussi. Et émouvant, malgré certains côté copieusement téléphonés. Je pense qu'il fera du bien à certains de mes amis. Et on aimerait qu'il permettent aux cons de le devenir moins, mais ça, c'est pas gagné. On sent l'influence (bénéfique) de Céline Sciamma. Dommage que Sandrine Kimberlain y soit en vulgaire fausse blonde. Ça détonne avec son personnage et elle serait tellement plus belle sans ça. J'ai aimé que le film nous montre des gens normaux qui se veulent du bien et ne se font du mal que lorsque la pression sociale ou les circonstances de la vie font qu'ils y sont poussés. Ça paraîtra culcul la praline à bien des sinistres et des cyniques qui ces dernières années tiennent résolument le haut du pavé. Mais moi qui n'ai envie de faire du mal à personne sauf lorsque ma survie est en danger, ça me fait du bien de me dire que ça n'est pas être fou que d'être généreux et gentil. Au moins y croire de temps en temps.

 

 

 


Jours de salon


    Trop fatiguée pour écrire jeudi soir en rentrant : la journée de salon se prolongeait par une soirée chez Charybde et comme nous avons refait le monde après, malgré les cafés qui mettent de la musique fort dès qu'on parle politique (1), et qu'il y a vraiment beaucoup de choses qui ne vont pas, ça prend du temps et j'ai raté mon changement en métro, pas autant que l'une des fois récentes où j'avais dû remonter tout du long en vélib, mais suffisamment pour me retrouver vers 1h du matin à marcher près de l'Élysée et que c'était désert fors un automobiliste qui se dé-garait et que je commençais sérieusement à me demander s'il n'existait pas un couvre-feu dont j'aurais ignoré l'existence.

Je ne suis pas encore totalement détachée du quartier d'où j'ai travaillé avec bonheur, c'est très bizarre, comme si l'année et demi écoulée ailleurs entre temps n'avait pas vraiment existé, un rêve qui avait bien commencé puis s'était mis à mal tourné, les gens changeant d'attitude, des contraintes montant peu à peu comme un serpent enserre et le fond de l'air du temps devenu dramatique, effrayant. 

Et donc là je me suis réveillée, le mauvais rêve est fini - et d'ailleurs ceux qui mettaient les autres en danger sont pour partie arrêtés juste en ce même moment, comme s'il s'agissait de rendre sur la toute fin le cauchemar supportable -, mais quand même il en reste des traces cruelles dans la réalité. Dont très concrètement un ami définitivement absent et d'autres pertes d'encore plus proches pour d'autres personnes que je connais.

De retour dans la réalité d'en vrai, c'est donc le salon du livre. 

Jeudi matin : deux heures (deux heures !) réservées aux professionnels. Un fiasco en tout cas pour ce qui concerne les libraires : la plupart des petits indépendants n'auront pas pu quitter leur boutique un jeudi matin alors que du temps où la demi-journée pro était le lundi, en général, si.

Je suis arrivée en retard : pas de mon fait mais pour cause d'une panne de la rame dans laquelle je me trouvais - nous avons dû descendre à Invalides, nous faire transvaser - suivi de consignes de sécurité drastiques qui font qu'on ne peut passer les grilles côté Balard, même avec une accréditation pro. Faire tout le tour prend dix minutes. Du coup j'ai à peine croisée l'auteure qui était fêtée au stand qui m'avait conviée. En plus que l'amie qui devait être là aussi n'avait pas pu venir. Une femme est passée coupant la conversation que j'avais avec une des éditrices qui s'est servie à l'abondant buffet intact et est repartie aussi vite. On aurait cru un gag (triste).

J'essaie de m'intéresser au pays invité (2). Pour l'instant j'ai découvert deux auteurs Eun Hu-kyung et Kim Jung-huyk. C'est surtout la première qui m'a paru intéressante. Mais je n'ai pas pris le temps de feuilleter leurs livres. 

Aller d'un stand ami à l'autre, passer du temps avec les amis croisés au gré des allées. Le temps file.

Ce vendredi deux tables rondes professionnelles dans un espace dédié, c'était sur inscriptions et très intéressant. Mais dans de piètres conditions : bien qu'étant un peu fermé, le stand ne protège en rien des bruits de l'extérieur. Or des stands de BD ou d'animations liées à des séries étaient sis tout près et des enfants criaient comme aux spectacles de Guignol.

Viviane Hamy me parle de son expérience, à la fin de son intervention. Mais un homme arrive se présente, parle business et invitations et je me suis sentie de trop.
Qu'il me considère comme quantité négligeable, soit : j'écoutais avec attention comme quelqu'un qui apprend. Mais il interrompait Viviane. Qui a dû penser dans un premier temps à un simple salut d'où qu'elle s'est laissée faire, sauf qu'ensuite il ne l'a pas laissée reprendre le fil de ce qu'elle disait.
Quand tu penses que la veille je n'avais pas osé interrompre une amie éditrice qui était en grande conversation. Le monde appartient (hélas) aux malotrus.  

Je fais la connaissance de libraires français itinérants en Australie. Leur conversation est vraiment intéressante, mais elle tourne court aussi quoique plus naturellement. Il y a du monde.

On me propose de visiter les entrepôts Hachette en partant là maintenant. 

Quelqu'un part accueillir une ministre et un ancien-ministre en exprimant la lassitude de rigueur. Y a-t-il un seul de ses interlocuteurs qui soit dupe ? C'est la technique de Tom Sawyer inversée : faire croire qu'une tâche prestigieuse est une corvée (tellement même ça on vaut mieux que ça).

Des amis ont faim sur leur stand, nous partons chercher des sandwichs. La file d'attente est telle que nous sortons, non sans nous faire renvoyer de portes en portes, une seule sortie et (bien sûr) elle se trouve à l'autre bout. J'avoue ne pas comprendre : que l'entrée soit sur un seul accès, admettons, pendant qu'on arrête les terroristes plus que présumés, il se pourraient que de leurs collègues en un baroud d'honneur tentent de remettre ça et un tel salon qui représente tout ce qu'ils détestent pourraient constituer une cible. Donc on filtre l'entrée et une seule par souci d'efficacité. 

Mais la sortie ? Pourquoi ne pourrait-on pas repartir par où c'est physiquement possible ? - d'autant plus que contrairement à bien d'autres années, il n'y a aucun contrôle des sacs quant aux livres -.

Nous nous retrouvons dans une pizzeria. Correcte mais surchargée.

Conversation professionnelle. Revue. Édition. J'ai toutes les cartes pour comprendre et connais les personnes. Pour autant pas impliquée sur ce projet. Du coup c'est très détendant.

Les rencontres littéraires valent autant pour les "modérateurs" que pour les auteurs, plus le temps passe plus j'en suis convaincue. 

Je me souviens d'Henning Mankell et j'ai envie de pleurer. J'étais venue un samedi, exprès, l'écouter.

Pour l'heure j'apprécie le travail de Nils Ahl, Sophie Quetteville - ça me fait plaisir de voir qu'elle a un programme chargé -, Eduardo, croisé dans un couloir, puis plus tard et ailleurs Marie-Madeleine Rigopoulos. Ils savent mettre leurs invités en valeur.

Un Ogre est là. 

Il y a des musiques d'ambiance dans les toilettes. L'une d'elle, vaguement asiatisante me plaît suffisamment pour que j'en sois surprise. Fond sonore discret et reposant. Mais la personne qui nettoie en permanence les lieux doit en avoir assez en fin de journée.

Je n'ai toujours pas trouvé "la" pépite ; ma petite découverte annuelle. Dimanche ?

La nouvelle de l'arrestation du terroriste restant me parvient sous forme d'une "alerte" du Monde. Je ne sais qu'en penser : doit-on s'en féliciter et se sentir moins vulnérable ou au contraire penser : Ils auront mis tout ce temps ? et s'attendre à une nouvelle vague d'attentats en guise de protestation ? J'imagine des tas de personnes recoupant des tas d'infos pour en arriver là, bossant d'arrache-pied week-ends inclus. (Certains déjà mal en point en couple, auront divorcé).

Je retrouve Anaïs et quelqu'un me parle d'Élise. C'est comme de faire partie d'une famille heureuse.

Il fait quand même froid pour un mois de mars, non ?

Nous loupons de peu Marie Richeux.

J'entends parler au vol des bébés élevés au vin de palme (en Afrique sub saharienne, quand la mère mourrait en couches). 

Un ami me fait admirer un Dictionnaire des mots manquants. C'est marrant j'y avais pensé. Entre autre en français dans les liens généalogiques. Et d'ailleurs comment dire des parents dont sont morts un enfant ? Orphelin d'enfant ?

Je pense qu'une femme toute tirée, blondie, refaite, déridée qui parle de féministe, s'en trouve un brin disqualifiée. 

Plusieurs personnes que je suis quasiment certaines de ne pas connaître me font à différents moments de larges sourires. Pour qui m'ont-ils prise ? (j'ai vérifié dans la glace des toilettes musicales que je ne présentais rien de risible).

Une auteure danoise dit des choses particulièrement intelligente tant et si bien que j'ai l'illusion de comprendre sa langue.

J'apprends que pour les éditeurs, un stand coûte aussi cher dans cette version réduite jeudi-vendredi-samedi-dimanche qu'il y a quelques années dans la version vendredi-samedi-dimanche-lundi-mardi-mercredi. Je comprends mieux certaines absences. 

Le sommeil finit toujours par l'emporter.

 

(1) La persistance de l'état d'urgence rend parano, à force.
(2) La Corée (du sud)


Salon 2016 toutes premières impressions


    Cette année le salon, même si je suis déçue de n'avoir pas trouvé à m'y employer - j'avoue que l'idée m'étant venue d'une proposition finalement avortée, je m'y suis prise trop tard -, s'annonce pour moi assez détendu : entre deux emplois, n'ayant rien à vendre, ni rien à acheter, simplement le plaisir de retrouvailles et du repérage de nouveaux ouvrages qui pourra servir par la suite mais que j'aurais de toutes façons effectué pour mon plaisir personnel. 

C'était déjà le cas, cette détente, pour la soirée inaugurale à laquelle je n'ai finalement qu'au dernier moment prévu d'aller (grand merci à mon transmetteur d'invitation).

Sans doute pour cette excellente raison j'ai pu retrouver quelques bribes du côté "à la bonne franquette" et retrouvailles entre bons potes qui ne se voient pas si souvent que j'appréciais autrefois.

Comme toujours ce ne sont pas ceux qu'on s'attendait à voir que l'on croise (à quelques exceptions près) et ce ne sont pas ceux qu'on suppose sur-occupés qui le sont forcément. 

Ce qui m'a valu une belle et longue conversation avec un de ces éditeurs encore passionnés par leur métier - même si de nos jours il leur faut sans arrêt garder les yeux rivés sur les compteurs des ventes -. Et deux autres, qui sont quasiment des amies - du moins tant que je n'ai pas tenté de leur refourguer le moindre manuscrit ;-) -. 

Il n'y a plus à manger, mais encore un peu à boire. En rentrant chez moi j'ai dîné. Peut-être aurait-il fallu arriver très tôt. Je le signale non pas tant pour le fait lui-même que pour l'écart entre ce qui est et ce qui fut ; l'époque où les petits éditeurs régionaux "montaient" avec leurs livres, certes, mais également leurs spécialités (boire et manger) ce qui faisait de certaines soirées un régal.

Moins de stands. Tendance qui pré-existait mais qui devient palpable encore plus chaque année.

Les gens, dans l'ensemble, particulièrement fatigués. Tous et toutes, les traits tirés.
Ce salon est peut-être pour certain-e-s celui d'une sorte de dernière chance. On les sent tendus - mais néanmoins charmants, du moins avec les copains -. 

Un ami qui en tenait une bonne. Et ça le rendait touchant, ce qui est plutôt rare.

Une curiosité de ma part pour la Corée. Il faudra que je prenne le temps d'aller y voir de plus près.

L'étonnement que j'ai toujours à être reconnue et à me faire (joyeusement) héler.
Cette gêne perpétuelle qui me fait hésiter lorsque je croise un ami en pleine conversation à l'interrompre pour le saluer ; avec la crainte si je ne le fais pas et qu'il m'a lui aussi vue, qu'il me soupçonne de le snober. Je n'ai rien au départ d'un animal mondain.

Ne pas avoir mal aux jambes en restant debout de façon prolongée (quel bonheur de).

La découverte fortuite que deux amis dont j'ignorais le lien militent parfois ensemble et se connaissent fort bien. 

Savourer le fait d'être entièrement libre, les pensées prises par personnes, seulement occupées par une petite hâte d'entamer le nouveau boulot, les soucis sous-plomberie-voisin procédurier-cave (celui-là vient de sortir, est tout récent), mes questions d'écriture (ce souci-là j'adore l'avoir), et pour le reste tout le reste, pouvoir me consacrer à savourer l'instant. Personne pour m'habiter ; c'est de la solitude, certes, mais une belle liberté.

Les renforcement de sécurité ont eu raison de la loi Evin : à un moment donné bien des fumeurs ont craqué et se sont mis à fumer à l'intérieur. Il faut dire que sortir puis revenir n'est plus une chose que l'on peut faire instantanément.

J'ai tenu sans que le sujet ne vienne de moi au moins trois conversations dans lesquelles au lieu de parler de livres on se trouvait à parler, avenir collectif sombre, bruits de bottes et malheurs des migrants. Et d'ailleurs Olivier ayant utilisé la métaphore d'un paquebot pour l'expérience que c'est de tenir un stand, je n'ai plus pu m'ôter de l'idée qu'on était peut-être là dans une sorte de Titanic. Encore en train d'écouter l'orchestre. 
Une gênante homogénéité d'allure et de couleur de peau : le livre redevient l'objet élitiste que pendant quelques décennies aux alentours des années 70 du siècle passé il avait cessé d'incarner.

Reste qu'un peu de passion des livres flotte encore un peu, trop peu, mais un peu, en ces lieux. C'est comme pour les champignons, il convient de connaître les bons coins.


À l'orée d'un nouveau Salon


(mercredi 16 mars 2016) À l'orée d'un nouveau Salon, je reste une partie de la matinée à la maison, il y a beaucoup à faire et je sais qu'avant lundi je n'y serai guère. C'est le temps des lessives, des factures et des poubelles, d'un peu de correspondance administrative ou professionnelle.

Malgré moi je suis inquiète pour les événements bruxellois récents, j'y ai encore de bons amis, je perçois encore cette ville, ainsi que Torino, comme un autre "chez moi" - alors que ça fait des années que je n'y suis pas retournée pour cause de persistante impécuniosité, du coup je regarde la conférence de presse accordée par les autorités et que la RTBF retransmet. Le retard transforme tout d'abord l'exercice en un sketch de caméra cachée dans lequel des gens se rajustent, téléphonent, selfisent, et rajoutent sans arrêt de nouveaux micros, testent ceux qui sont installés. Buster Keaton n'aurait pas renié. La conférence est efficace et sobre, glaçante en cela même. Un type est mort d'une trentaine d'année et alors que je n'éprouve pour lui aucune compassion si ce n'est celle pour ceux qui mal nés ont emprunté The wrong way, croyant se sauver, ou être héroïques, crédules, je songe qu'il y a peut-être quelque part une femme, sa mère, qui a dans les années 80 du siècle passé été fière de donner naissance à un garçon, s'en est occupé, le nourrir, le tenir propre, accompagner ses premiers progrès et qui si encore en vie désormais pleure, peut-être fière si elle a été contaminé par les mêmes convictions assassines, peut-être écrasée de stupéfaction et se demandant sans fin où ça a donc bien pu foirer, à quel moment il s'est fait confisquer aux siens et à lui-même. Je pense aussi aux policiers qui s'attendaient sans doute à devoir faire face à autre chose qu'à de la facilité mais probablement pas à se faire flinguer et semble-t-il d'assez près. Même si l'on est entraîné, ça doit un brin secouer.

Je reste encore sous l'emprise d'un dernier rêve de la nuit, directement issu des infos lues hélas avant de me coucher ; quelqu'un, un passant, s'était fait tuer dans des échanges de tirs consécutifs. Je l'avais bien connu. Me rendais à ses obsèques.
Charmant !

Traverser Paris en milieu de journée du lendemain d'une chasse à l'homme terroriste bruxelloise, c'est observer l'expression "La police est sur les dents" parfaitement incarnée. Je pense que même des fous amoureux fous effectuant le même trajet s'en seraient rendu compte. Je suppose que c'est autant pour donner l'illusion à la population d'être protégée que par réel souci d'efficacité.

La BNF est un havre de paix, malgré ses contrôles depuis 2015 renforcés. Une fois installés en salle de travail on peut s'accorder le luxe d'oublier.

Je m'amuse à effectuer sur mon propre blog la recherche par mot clef qu'Anne (Savelli) aujourd'hui a choisi : "salon". Curieusement c'est sur un billet évoquant le Salon du Livre jeunesse de Montreuil que je tombe en premier. Puis effectivement on part au Salon du Livre de Paris avec l'histoire en 2008 d'une alerte à la bombe (dont le changement d'habillage du blog a rétroactivement rendu la mise en page hasardeuse) ; en ce temps-là on pouvait encore se permettre de plaisanter devant l'annonce d'un potentiel danger. Il est aussi brièvement question d'Alain Bashung, d'autres salons (dont celui aux Jardins d'Eole où il m'arriva d'aider), d'un souvenir ému avec Daniel Pennac, d'une virée à Draveil, et de l'annonce sidérante de la mort d'une jeune amie, en plein salon 2009 - pas besoin de retrouver une trace écrite, je me le rappelle avec une précision extrême -. Je retrouve une photo retrouvée, liée d'une façon déjà alors mystérieuse au Salon du livre de Genève. Je retrouve également d'anciens Instantanés, qui me font encore sourire (pour certains). Un billet cryptique mais dont j'ai encore les clefs (sourire triste, j'y ai cru, j'y croyais). Il est même question de mes cheveux, toujours hirsutes pas encore blancs il y a cinq ans. Parce que salon ... de coiffure.
Rien sur le salon du livre de Bruxelles qui a la bonne idée de s'appeler Foire. À quoi ça tient, les choses.

Lorsqu'on atteint ce point où la mémoire du blog est supérieure à la nôtre, bloguer prend tout son sens. Merci, Anne, de me l'avoir ainsi rappelé.

Il est plus que temps de retourner à l'écriture longue. Ce soir ce sera l'inauguration. Il sera sans doute curieux de m'y rendre en étant entre deux boulots, libraire sans librairie, à quelques lots de jours près. Mais au moins j'aurais cette bonne nouvelle du travail bientôt repris à annoncer aux amis.


Triste salon mais heureusement

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J'ai d'abord cru que c'était moi: moi qui suis heureuse mais fatiguée par la reprise du rythme de travail salarié (1), et qui parviens d'autant moins à sortir du chagrin qui depuis l'été dernier m'enserre, que dans le monde des livres trop d'éléments m'y ramènent ; ainsi voulant passer saluer une amie au stand de son éditeur je tombe sur les portraits de ceux qui y sont publiés dont celui de la dulcinée du bien-aimé qui pour elle m'a brutalement jetée.
Passer devant la maison d'édition pour laquelle il bosse, même si ceux qui tiennent le stand sont adorables et que je connais bien un peu l'une des femmes qui pour eux travaillent, me rappelle à ma peine (du coup je n'ai pas même eu la force d'aller la saluer, alors qu'elle n'est pour rien dans l'affaire), passer au stand de qui l'éditait était aussi à éviter : j'y aurais sans doute retrouvé les romans pour lesquels j'ai soutenu celui qui défaillait, tout ça pour que ça aille mieux au point d'aller séduire la belle fausse blonde flatteuse.

Cette année pour moi le salon était miné.

Et je n'ai pu que constater que ces derniers mois, alors qu'il me semblait durant l'automne avoir enfin avancé, je n'ai fait aucun progrès quant à tourner la page d'une relation qui pour moi aura tant compté.

Alors j'ai cru que c'était moi, simplement moi, qui n'allait pas.

J'ai cru aussi que c'était à cause du dimanche.

Il me semble que ça fait un moment que je fréquentais les lieux plutôt le vendredi (tout le monde encore frais) et le lundi (pour des présentations professionnelles, généralement fort intéressantes pour qui comme moi n'est pas blasé d'en avoir trop organisées ou écoutées). Il n'y avait aujourd'hui qu'une seule dédicace à laquelle j'aurais souhaité spécifiquement allée car j'avais un cadeau à faire, envie d'offrir ce livre précis, et relativement peu de chance de croiser rapidement l'auteure par ailleurs : celle de Florence Seyvos pour "Un garçon incassable". Mais elle fut annulée (rien de grave j'espère).

Et le dimanche après-midi, c'est un peu le festival des signatures "pipoles" : ces gens qui drainent une foule qui soudain fait croire que la lecture est encore appréciée, avant qu'on ne constate qu'il s'agit d'un politicien, d'un(e) acteur/trice, d'une star du sport ou de la télé, de l'ex-femme d'un ex-président de la République. Jusqu'à des personnes dont je n'avais jamais entendu parler dont une américaine pour jeunes femmes ou filles (2) et une journaliste médium. On en est soudain reconnaissant à Catherine Pancol d'attirer son monde : qu'on apprécie sa production ou pas, ce sont des histoires racontées et elle est connue à cause d'elles.

Heureusement restaient quelques personnes que j'aime bien et qui attiraient trop de monde pour que j'ose passer les saluer, ce qui me rappelait au passage que Serge, un des absents, m'avait un jour traitée de Bonne Mascotte. Le destin d'une bonne mascotte qui réussit est de se retrouver seule au bout du compte, pas besoin de médium pour prédire l'issue des relations de camaraderie une fois le succès établi. C'est une simple question de temps disponible rétréci.

Des absents nombreux : les petits éditeurs souvent venus d'un peu loin ne sont plus que peu. Les stands régionaux offrent encore un semblant d'illusion d'une diversité qui si elle persiste peine à exister mais également à prendre place dans un lieu dont les grandes parties vides  P3230190

 laissent à penser que le ticket d'entrée est chaque année vraiment plus élevé.

Je n'ai pas vus mes amis de Borborygmes. Seulement quelques-uns de leurs petits livres sur une parcelle d'un stand collectif. Ça n'est pas sans m'inquiéter.

J'ai voulu aller parler avec le monsieur de Monsieur Toussaint Louverture mais des amis à lui (ou son épouse ?) sont passés le voir juste à ce même moment, et j'étais en lutte contre une bouffée de chagrin, alors nous n'avons échangé que quelques mots. J'espère que ce n'est que partie remise : c'est une maison qui représente un peu d'espoir : la qualité des textes, le courage des livres exigeants, le travail sur les objets - qui est le seul avenir du livre en papier (à part les poches qui se vendront toujours parce qu'on utilise toujours des allumettes malgré l'invention du briquet), que ce qu'on tient entre les mains ait une apparence, une texture, un quelque chose de l'ordre de la sensualité que l'écran n'aboliera jamais. Je dois beaucoup à la lecture d'"Enig Marcheur" et j'aimerais un jour remercier.

Et puis il y a ceux qui sont présents mais désormais séparés. Et comme j'apprécie les deux hommes et que j'aimais le travail qu'ensemble ils accomplissaient, quelles que soient les raisons de ce divorce professionnel, il me laisse désemparée.

Je ne supporte plus les ruptures.  

Dans les allées de bordures, là où il était fréquent de découvrir des petits nouveaux, je n'ai croisé que des entreprises qui frôlent l'auto-édition ou le compte d'auteur et rien n'a attiré mon attention (3). Du rêve auto-financé. 

Ici et là on m'a dit qu'il y avait nettement moins de monde que les années qui précédaient. Dans la plupart des stands on sentait comme une tension. La crainte tangible pour ceux qui travaillaient de ne pas rentrer du tout dans leurs frais.

J'ai croisé également davantage de personnes excessivement raisonnables, et qui (moi la première) notaient quelques titres plutôt que de se laisser tenter à les acheter pour les faire ensuite découvrir au travail, qui dans une médiathèque, qui dans une librairie. J'ai vu une jeune bibliothécaire à deux doigts de se laisser tenter par une dédicace personnelle de Françoise Héritier, puis renoncer et qu'elle prendrait le livre pour son établissement - mais j'ai bien vu qu'elle en était navrée, de ne pouvoir s'accorder un extrat -. Les gens en repartant avaient tous au moins un sac. Mais il était assez souvent assez plat. Où sont passés les lecteurs fous d'antan qui repartaient, j'en fus, chargés comme des mulets un jour de foire aller. Je croyais que le dur de La Kriz était l'an passé mais on serre tous encore nos budgets.

L'impossibilité d'une rencontre

P3230195Cet homme mince et séduisant qui signait ses livres, sur les régimes pour maigrir. Je l'ai légèrement taquiné - il était lui-même une parfaite réclame pour ce qu'il proposait -, il avait du répondant. C'est moi qui étais vide, plus rien à offrir qu'un début de boutade et éviter d'encombrer davantage. Pas l'envie de m'entendre à nouveau dire un jour, ou écrire "Tu n'es pas attirante pour moi". Quelque chose d'immensément décourageant de ce côté-là. Les plus beaux mots d'amour on me les a déjà envoyés. Pour me dire ça une fois leur effet fait. Alors que faire après ? Que croire des regards quand les plus beaux mentaient ? 

 

Heureusement, les amis.

À commencer par Eduardo qui a animé une très réconfortante rencontre entre Françoise Héritier et Alain Rey. Ils parlaient de l'amour des mots. Je me sentais moins seule, moins désaxée. J'eusse aimé les écouter des heures, ils tenaient mon chagrin en respect. Quand les hommes peuvent se défiler, les mots, eux, s'ils séduisent, savent se laisser aimer. P3230204

Puis ceux qui tenaient des stands. Je me suis aperçue que je n'avais pas assez dit avoir retrouvé du boulot. Or tous semblent pour moi sincèrement heureux. Alors pourquoi me retenir d'annoncer cette nouvelle qui n'est mauvaise pour personne ?

Entre ne pas savoir me vanter - j'ai bien compris que cette société requérait qu'on le fasse, mais je ne sais pas m'y prendre - et ne pas oser y croire tout à fait (trop de coups précédents encaissés, trop de confiance meurtrie, trop l'habitude d'une certaine poisse affectivo-professionnelle sans que je sache ce que je pourrais bien me reprocher à part de n'être pas une de ces belles femmes qui font les hommes rêver). Alors j'ai tenté de penser à prévenir (4).

Enfin, si j'ai perdu Eduardo en chemin - dommage nous aurions pu de conserve entreprendre celui du retour puisque nous sommes presque voisins -, j'ai retrouvé une amie dont j'ignorais qu'elle y serait aussi et ce fut un plaisir de se parler un peu (à la fois trop (il n'y avait pas assez de monde qui la sollicitait) et trop peu (il y avait un peu de monde quand même)) et de se confirmer un rendez-vous très prochain.

Je suis ensuite repartie sans tarder. L'envie de rester sur du bon. Profiter de l'élan du sourire amical.

En rentrant et alors que l'homme de la maison (5) s'activait pour le dîner, un billet d'Aux bords des mondes, m'a prise au dépourvu et offert un ancrage. Il ne pouvait mieux tomber. J'étais rentrée un brin désespérée sur l'avenir d'écrire - en général, pas le mien en particulier - et voilà que d'être ainsi lue et très exactement pour les raisons profondes qui jours après jours me motivent malgré sommeil, peines et fatigue, me redonnaient courage. S'il y a une seule personne que ma perception - transmission brute des choses peut mener vers des pensées plus élaborées ou amuser, ça vaut la peine de lutter, repousser le premier chaque soir de quelques minutes, tenir les deuxièmes en respect, et faire comme si la troisième n'était pas là. Certains jours je n'y parviens pas. Je suis limitée dans mes capacités. Mais je ne dois pas renoncer à transmettre vers d'autres qui eux, pourront.

Il faudrait quand même que je (re)prenne l'habitude de relire mes billets. Et de conserver ceux qui sont trop introspectifs au secret.

 

 

 [photo : à 15:25 au salon même]

(1) En fait je crois que je traîne toujours une fatigue résiduelle supplémentaire de cette semaine de fin janvier début février où j'ai été si violemment enrhumée puis tousseuse, quelque chose d'un équilibre n'est pas d'équerre depuis.

(2) Sur le moment j'ai cru à un accès d'incompétence de ma part (par profession je suis censée être avertie des phénomènes éditoriaux, que je les goûte, conseille ou non), mais toutes les personnes auxquelles j'ai posé la question ignoraient qui elle était (soulagement).

(3) Il m'est arrivé parfois d'entrevoir par là quelques apprentis prometteurs, mais là, non.

(4) Et du coup j'ai peut-être gavé tout le monde. Comment savoir ?

(5) Je tiens à préciser ou plutôt me sens désormais tenue de préciser que je n'utilise pas cette expression dans le sens que lui donne Édouard Louis. Pour moi il s'agit simplement de dire celui qui partage encore la vie quotidienne, les choses de tous les jours, de la maison et qui aide en partie pour partie des corvées. Entre autre, le dimanche soir il prépare le (bon) dîner. 


A brand new concept : the unself-made selfie

 

J'avais prévu une journée sport et librairie, et puis dès le matin c'est parti bizarre : une lettre que j'avais envoyée en novembre à une grande amie (et qui d'ailleurs m'a téléphoné dans le même temps, comme pour me rassurer sur le fait qu'il n'y a bien aucune raison que nous soyons fâchées) m'est revenue avec la mention "pli refusé par le destinataire". 

Ceci m'a plongée dans des abîmes de réflexions (1) jusqu'au moment où j'ai pu lire une explication rationnelle proposée par Akynou :  le courrier est parfois distribué à la va-comme-je-te-pousse dans des boîtes qui ne sont pas toujours les bonnes à quelques numéros ou noms près et le voisin réceptionnaire d'un courrier qui ne lui était pas destiné l'aura rejeté dans une boîte postale. Il m'est d'ailleurs relativement fréquemment arrivé de jouer les sous-facteurs (redistribuant dans la boîte d'un voisin son courrier tombé chez nous) et aussi de rejeter des missives qui n'étaient pas du même numéro d'immeuble tout simplement parce que je n'avais aucun moyen d'y avoir accès (vive les codes ! :-( ).

On m'a proposé d'aller à l'inauguration du salon du livre et je me suis laissée convaincre. Il faut dire que c'était proposé par quelqu'un que j'avais envie de voir, que j'estime ne pas voir assez souvent car nos vies sont trop remplies.

Même si ce fut un peu dur d'un certain point de vue (2), bien m'en a pris, entre autre pour une heureuse revoyure avec un Nantais récent.

Mais surtout j'ai découvert un concept qui peut-être fait déjà fureur : 

la selfie prise par quelqu'un d'autre.

Tout près de moi un homme qui voulait immortaliser le moment partagé avec un autre qui est sans doute quelqu'un de connu du monde entier (sauf de moi), a demandé à une amie de prendre la photo avec son téléphone à lui, tout en faisant le geste qui généralement trahi les selfies, l'appareil tenu à bout de bras.

(sauf qu'il ne le tenait pas puisque c'était la dame qui s'y collait (vous me suivez ?))

Une sorte de selfie parodique qui m'a laissée songeuse.

D'autant plus qu'il y eut peu après aussi le concept du CDD éternel. Mais c'est une tout autre histoire.

 

(1) À cause entre autre de cette sale rupture subie en juin, si désinvolte dans son expression, dans un reproche qui m'a été fait de ne pas tenir compte de ce que j'ignorais, si loin de l'homme que j'appréciais, que je me demande encore des mois plus tard avec assez de régularité s'il n'y a pas eu une lettre qui se serait égarée et devait me prévenir de mon infortune, rendant la lâcheté moindre et le message cohérent ainsi que la chronologie beaucoup plus supportable, un "J'ai rencontré quelqu'un" qui fait toujours aussi mal mais moins s'il est formulé à temps avec un tant soit peu de respect pour la personne laissée pour compte.

(2) Quinze fois j'ai cru entrevoir le bien-aimé qui m'a supprimée et qui n'avait effectivement pas vraiment de raison de venir et à Paris et au Salon (il détestait ça de mon temps, m'avait si longuement exposé combien tout ça était vain ce à quoi j'opposais qu'on pouvait y trouver du bon ne serait-ce qu'en revoyant les amis lointains qui ne "montaient" pas aux capitales si souvent) mais puisqu'il a été "perverti" au numérique (une discussion si sérieuse au printemps pour m'expliquer qu'en étant progressiste sur le sujet j'avais tort et des préjugés, pour faire une co-publication numérique avec sa nouvelle femme à peine quelques mois après) et qu'à la Foire du Livre il est cette année allé joyeusement s'exhiber, ah le fameux syndrome de l'empêchement masculin.


La fin d'une époque (un élément marquant de)

 

À la question terre-à-terre que je lui posais, elle a fourni la réponse professionnelle parfaite, mais son esprit disait Qu'allons-nous devenir et j'ai entendu la pensée charriée par la réponse, je ne sais comment l'expliquer. Je n'écoute pas ce qu'on me dit, mais j'entends ce qu'on ne prononce pas.

Alors j'ai guetté mes mails, de loin en loin dans la journée. Mon téléphone rudimentaire permet de le faire si vraiment il le faut. Mais non, rien.

J'écoutais ce débat intéressant, fors les questions de l'un des animateurs qui faisaient descendre le niveau de quelques crans, que les participants remontaient, chacun connaissant bien le domaine pour lequel il était convié, bonne sélection des invités, et emmenant la discussion assez vite assez loin des clichés, seulement c'était dommage ce ralentissement qu'il imposait.

À force qu'il n'y ait rien sur la messagerie et que je passe de bons moments entre amis, j'ai cru m'être trompée. Plutôt soulagée d'avoir mal saisi, même s'il est désagréable d'être confronté au doute quant à nos capacités.

Une douleur sérieuse au genou droit a disparu comme par enchantement après quelques crevettes, du pain beurré et un verre de vin blanc (1) dégustés en bonne compagnie.

Une fois arrivée dans mon quartier, j'ai différé d'un quart d'heure mon retour, une petite course incontournable à faire dont je devais m'acquitter depuis plusieurs jours, une autre qui pouvait attendre le début du mois mais je savais qu'il ne resterait plus qu'un seul exemplaire à ma taille. Me suis occupée de la poubelle aussi. De prendre une douche sans tarder.

Toutes manœuvre dilatoires avant de sérieusement allumer l'ordi.

La mauvaise nouvelle m'y attendait. Au delà des personnes strictement concernées - une pensées pour elles -, on pourra sans doute dater par celle-ci la fin d'une époque. Et le début d'une solide phase de grande incertitude pour les professionnels du milieu concerné, déjà passablement bousculé. Vingt-cinq mars deux mille treize.

 

(1) Merci à qui de droit pour cette thérapie radicale.


Ce mystère de la notoriété

P3242091Pour moi qui vis hors télé, il est toujours surprenant de constater l'écart faramineux entre ce que je perçois des notoriétés d'auteurs au travers de mon métier de libraire, et ce qui doit correspondre à une réalité des ventes.

Ainsi il y avait foule pour cette personne, dont le nom même, D.J. Daugerthy, n'était pas parvenu jusqu'à moi (1).

Un monde impressionnant pour Didier Van Cauwelaert, dont je savais en revanche les lecteurs nombreux mais pourquoi cette année soudain à ce point la bousculade ?

L'agréable surprise d'une longue file d'attente pour Eduardo Mendoza, si discret et tranquille. J'imaginais ses lecteurs nombreux mais plutôt du genre à rester au calme dans leur coin et ne pas affronter la masse des visiteurs d'un dimanche. J'étais heureuse aussi de constater qu'il y avait beaucoup de jeunes parmi eux.

Et puis il y a ceux pour lesquels on s'attendait  P3242102

à ce qu'il y ait beaucoup de monde et ce fut bien le cas.

 

(1) Et c'est là qu'en commentaires tout le monde va m'expliquer qu'elle est aussi connue que J.K. Rowlings. 


366 - En toc

 

Quand il a parlé de son nouveau livre, lui par ailleurs éditeur chevronné, mais cette fois auteur, j'ai bien compris que son émotion était tout sauf en toc, qu'il redevenait comme un qui écrit et qui débutait. 

Et ses rares très légères maladresses, qu'ici ou là il commettait, donnaient d'autant plus envie de le lire, son livre, qu'on le devinait sincère, peut-être imparfait, mais en tout cas pas (pré-)fabriqué. Et né d'une nécessité.

Je suis heureuse qu'un hasard de salon, de ceux qui font parfois bien les choses, m'ait permis de le lui dire ensuite, même si imparfaitement, puisqu'émue à mon tour.

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Petite maison d'édition gauloise implantée sur le littoral

aujourd'hui au salon

(merci Mathias)

P3290009 

Il peut être nécessaire de double-cliquer sur la photo afin de lire l'inscription sur le carton.

(oui, bon, je sais, cette photo tient de la plaisanterie privée, mais on a si bien ri et c'est si précieux quand les nouvelles du monde plongent dans le dur)

une variante moins poétique mais plus visible :

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