Si je gagnais

 

C'est cet article qui m'est revenu en tête en lisant cet entrefilet dans le Canard Enchaîné de la semaine.

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Un Canadien vainqueur d'un très gros lot mais qui n'avait pas particulièrement besoin d'argent, après un long temps de silence et parce qu'apparemment il ne pouvait persister dans l'anonymat, a décidé "en accord avec ses enfants" de verser la somme à des œuvres de bienfaisances.

Ça m'a remonté le moral de lire ça.

Ainsi donc tout le monde n'est pas contaminé par cette fausse valeur qu'est le fric mais sans laquelle hélas il est si difficile de survivre, de vivre, d'avancer.

Je me suis vaguement demandée ce qu'à sa place je ferais. Il y a un volet pour moi évident : je liquiderai les petites dettes qui depuis bientôt 5 ans d'écriture dont une partie comme libraire à temps partiel se sont accumulées. Je m'arrangerais pour faire quelque placement autant que possible éthique (mais je suis très sceptique sur ce que proposent les banques sous ce genre de label, un peu comme pour les produits bio) qui me garantisse cette rente mensuelle dont pour vivre au quotidien là où je suis (1) dont j'ai besoin pour écrire l'esprit libre. Je garderais l'anonymat et je me tairais autant que possible (2).

Néanmoins rembourserais au centuple et si possible en exauceant leurs rêves les amis qui m'ont aidés et m'aident en ce moment aux heures de difficultés. Ce qui risque d'être compliqué en gardant le silence (non, non ce n'est pas du blanchiment ;-) )

Mais pour le reste. 

Mettre ce qu'il faut de côté pour la période de très grand âge de ma mère, je vois venir avec effroi le moment où elle perdra son autonomie et où je serai bien incapable d'aider à payer quelque placement que ce soit - si tant est que je lui survive, bien sûr -.

Mettre mes enfants à l'abri du besoin mais pour après ma mort, qu'ils puissent en attendant vivre une vie normale, dans laquelle contrairement à l'heure actuelle je pourrais les dépanner en cas de besoin, mais qu'ils aient quand même à se confronter au principe de réalité et d'utilité encore quelques années. Ça aide à acquérir de bonnes bases et préserve de certaines dérives. 

Me border, ainsi que leur père, en vue des prochaine étapes de nos vies qui peuvent être d'ici à 20 ans, et c'est très court 20 ans, la dépendance, la mort, toutes choses coûteuses pour les restants. Prendre mes dispositions pour en cas de maladie incurable dégradante ou violente dans les souffrances pouvoir aller mourir sans crainte et dignement là où on l'autorise (3). 

Faire refaire l'électricité dans l'appartement, car notre installation est dangereuse, refaire la salle de bain comme elle était avant notre installation (4), faire faire toutes les réparations qui s'imposent (chauffe-eau, fuites d'eau, plafond de la cuisine) et que le manque d'argent nous fait différer. 

Bref des choses sérieuses, et rien qui changerait fondamentalement ma propre vie. Peut-être un séjour en Toscane, en chambre d'hôtes, et un pied-à-terre modeste et discret à Bruxelles, pour pouvoir retourner nager dans la piscine de mes rêves dès que ça pourrait, et voir souvent les amis que j'y ai. M'habiller sans complexe financier chez le boutiquier hypermnésique. Renflouer la maison d'édition de mon bien-aimé

Et puis, cet entrefilet. Ces deux mecs virés pour avoir dit Non, qu'ils ne voulaient pas pour un job, sans doute en plus pas tant payé, mettre en danger irrémédiablement leur santé.

Alors je sais. Ça prendra le temps que ça prendra, mais si je gagnais un vrai gros lot monstrueux au loto je créerais une fondation ; il doit bien y avoir un moyen pour le faire en conservant une part solide d'anonymat aux yeux de l'extérieur. J'embaucherai un(e) assistant(e) pour tout ce qui relève du secrétariat et de la pré-compta et d'un peu plus que ça, la cheville ouvrière. Et puis aussi un(e) fin(e) limier(e) capable de se débrouiller dans le monde entier. Et quand je tomberai sur une information de ce style, je ferai en sorte que la fondation verse une compensation équivalente à ce que les gens auront perdu (ou par exemple une aide équivalente au salaire qu'ils touchaient le temps qu'ils trouvent un nouveau travail). Pour qu'au moins ponctuellement puissent s'en sortir ceux et celles qui auront eu le courage de dire non. De ne pas accepter le n'importe quoi qu'on leur aura imposé les croyant sans ressources ou endettés et donc à la merci de tout pouvoir abusif. Mais comme on ne peut pas même en étant devenu immensément riche aider le monde entier, et que changer le monde est un tout autre projet, qui nécessiterait sans doute de commencer par une sérieuse modification de la nature humaine, le critère d'entrée serait celui-là, ceux qui ont su dire non alors que dans l'immédiat ça les condamnait à de gros ennuis, mais qu'il en allait de leur intégrité, leur dignité, leur survie à plus long terme.

Par ailleurs je créerai une résidence d'écrivains (ou peut-être plusieurs mais séparées) dans des endroits accessibles à peu près en train mais qui n'ont rien de prestigieux ni de remarquables. D'anciennes villes industrielles par exemple. Des endroits avec le nécessaire mais rien de superflu et une bourse d'écriture permettant de tenir mais sans gras, et je sélectionnerai les candidats avec mon frère d'élection et peut-être l'assistant(e), en ne jugeant que sur la qualité de potentiel de textes fournis et la motivation d'accepter pour un temps les conditions de base offertes. Il n'y aurait aucune obligation simplement une limite de temps convenue au départ et non renégociable sauf ennuis de santé. Avec des possibilités de fractionnements pour ceux qui auront de jeunes enfants et des remboursement de frais de transport pour s'ils veulent aux week-ends retrouver leur famille. Mais le séjour de travail s'effectuerait seul(e) car c'est un service à rendre que parfois d'obliger.

Et puis bien entendu je continuerai à dépanner les potes comme je l'ai toujours fait lorsque c'était possible, mais pour ça pas besoin de gagner un gros lot, s'en sortir correctement au mois le mois suffit. 

 

 

(1) La proximité de Paris, même une fois les murs payés coûte si cher.

(2) Je veux dire d'un point de vue administrativo-juridico trucs comme ça. Ne rien dire sinon ne me pose aucun problème. 

(3) Vu comme c'est emmanché je sens que le gouvernement actuel va nous pondre un truc de b... molle en demi-mesure et qui fera semblant qu'on autorise la mort dans la dignité mais que dans tout plein de cas en pratique on en restera avec l'hypocrisie actuelle qui consiste à trouver la personne compétente pour aider en secret.

(4) Seuls travaux que nous avions faits ... et une erreur (mal conseillés, peu fortunés)


I should have read it before

Grâce au Bordel du vendredi, dont cette photo provient, j'ai enfin compris quelle avait été mon erreur. 

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I do miss John. Utterly.

(au delà de la plaisanterie, mon incapacité à faire quoi que ce soit intentionnellement, quand ceux que j'ai aimés étaient de ceux qui ne font rien sans une direction et ne séduisent pas sans au moins une petite idée derrière la tête, est sans doute la clef de mes chagrins ; une Bonne Mascotte, en apparence, ça ne sert à rien, ce n'est pas très joli, pas très fortuné, et ça n'appartient pas aux arcanes d'un pouvoir établi)


Tiens, ça faisait longtemps

... que je ne vous avais pas embêtés avec "ma" comédie croate 

  

Svećenikova djeca / The Priest's Children de Vinko Bresan (avec l'irrésistible Krešimir Mikić)

Vous allez voir, ils vont trouver un distributeur français, ça fera un succès phénoménal et vous me remercierez. 
(Après, j'espère seulement que les anti-mariage pour tous qui s'ennuient un peu désormais auprès de leurs bénitiers, ne s'en prendront pas aux cinés qui le diffuseront, car le film nécessite un peu de capacité d'autodérision pour être compris correctement)


Petite mise en garde à l'attention des apprentis auteurs de best-sellers histoire de pouvoir écrire autre chose après

 

Julien Doussinault, invité hier soir à l'Attrape-Cœurs pour nous parler d'Hélène Bessette, dans le cadre de la résidence qu'y effectue Fabienne Yvert, nous a fort bien parlé de l'auteur d'Ida et de La tour (1).

Il nous a entre autre raconté que la malédiction des vents contraires dont elle semblait équipée avait particulièrement frappé son best-seller-to-be "Les petites Lecocq", volontairement écrit avec un souci d'accessibilité au bon petit lecteur, à peine un peu de scènes frétillantes pour pimenter, mais rien que du très sage, vous verrez. Ou pas, puisqu'une dame Lecocq qu'elle avait croisé plus tôt dans sa vie - et je suis très prête à croire que l'homonymie était involontaire (2) - a cru se reconnaître dans l'une des personnages, a intenté un procès - dont une partie pour quelque chose comme "atteinte aux bonnes mœurs" -, avait les moyens de se payer un très prometteur et brillant jeune avocat (Roland Dumas !) et bref, un mois après sa sortie, le potentiel best-seller était retiré des librairies sur décision de justice.

Il aura fallu à l'écrivain trois ans pour refaire surface, tant ce procès l'avait essorée (du temps, de l'énergie, de l'argent, sans doute aussi un solide sentiment d'injustice et de découragement devant tant d'absurde adversité (3)).

Donc prenez garde les amis :  pour votre best-seller, soyez très prudents sur les fonts baptismaux.

(spéciale dédicace à ceux qui se reconnaîtront ;-) )

 

(1) C'est ce titre-là qu'hier je ne retrouvais pas.

(2) Je me suis rendue compte récemment que j'ai oublié (finalement retrouvé car ma mémoire n'est pas si mauvaise, mais retrouvé après réflexions et recoupements) le nom de l'espèce de cheftaine scoute débridée à qui je devais d'avoir pu quitter "l'Usine" plus tôt que je ne le prévoyais. De même que celui certains collègues dont deux que je trouvais sympathiques. Mais voilà, mon existence s'est embarquée dans une tout autre dimension et ils n'y sont pas. 

(3) Je ne crois pas qu'Hélène Bessette fût folle, juste un peu au départ, différente, décalée, et trop en avance sur la société qui aux femmes ne le pardonne pas (dans le même cas un homme se trouve plutôt auréolé d'une considération d'artiste maudit, ce qui ne donne pas un quotidien des plus rigolos mais n'est pas sans prestige, ni vu sans indulgence) ; elle l'est devenue à force de s'en prendre plein la gueule, et des trucs parfois si gros qu'il est inévitable de finir par croire à une forme de persécution et de coups répétés d'un sort funeste ; ainsi, elle qui était anti-fasciste si clairement et se retrouva à devoir faire des ménages à Londres chez l'ex-médecin de Mussolini. Ce qu'elle refusera, mais au prix d'un enfoncement supplémentaire dans les difficultés financières. 

La soirée à l'Attrape-Cœurs n'était pas filmée mais pour qui s'intéresse au sujet, il reste pour l'instant trace d'une intervention au Comptoir des mots, trois ans plus tôt : 

 


Rencontre Hélène Bessette au Comptoir des mots par laurelit

Ton livre en vente chez les amies


P5072820Certes il n'est pas en pile et plutôt discret, vertical, sous les volumes plus grands et mieux exposés. Mais j'apprécie l'attention. 

Ce présentoir est la première chose que l'on aperçoit en entrant.

Qu'il soit un des voisins de "Nos gloires secrètes" (1) m'a amusée. Il y a de ça, ne trouves-tu pas ?

[mardi 8 mai 2013, librairie l'Attrape-Cœurs place Constantin Pecqueur, en soirée]

 

(1) D'autant plus que tu m'y as glissée dans les remerciements.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Merci Joël (la soirée formidable)

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Merci aussi à Pierre d'être, malgré son emploi du temps chargé, venu

[la dernière des trois photos est de Douja]

addenda de longtemps plus tard : Nous l'ignorions alors même si nous nous en doutions : Joël Dicker était à la veille d'obtenir un premier prix qui serait suivi de bien d'autres et à l'orée d'un succès de type long seller best seller. J'ai vraiment commencé à croire que j'étais une Bonne Mascotte (et pas seulement pour faire sourire l'ami Serge) 

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