Perplexité postale
29 août 2023
J'avais déposé un statut sur FB mais je le reprends ici, pour le cas où un jour j'aurais le fin mot de l'histoire :
J'avais déposé un statut sur FB mais je le reprends ici, pour le cas où un jour j'aurais le fin mot de l'histoire :
Jamais je ne me suis sentie aussi libre dans ma vie que pendant le premier confinement, le en-dur, le vrai : un peu plus de 2 mois à être entièrement libre de mon temps, même si limitée dans mes déplacements.
C'était être infiniment plus libre qu'au reste de mon quotidien habituel, où certes, des congés permettent parfois d'aller ici ou là, dans mon cas, rarement loin et de toutes façons (et aussi par conscience de l'état de la planète : pas de voyage de pur agrément) avec des choses à faire.
Depuis je suis à nouveau salariée avec un gros plein temps, charge de travail intense, je me sens enfermée.
Comme mes objectifs sont clairs - tenir jusqu'à une retraite qui permettrait de subvenir à des besoins modestes pour deux personnes -, je tiens le coup, finie la récré, le choix du métier (libraire, ça me convenait), la condition physique peut se détériorer, j'ai l'âge des fins possibles et quelqu'un dépendra toujours de moi dans le meilleur des cas, fini de plaisanter.
Je profite de ma légère aisance (comprendre : des fins de mois qui ne sont plus dans le rouge à chaque fois) pour aider celles et ceux qui tentent de persister dans leur vrai travail, de ceux qui dans notre société permettent rarement de joindre les deux bouts.
C'est OK pour moi comme ça, tant que ça va.
Et puis parfois une bouffée d'imagination me rattrape car l'écriture (et la photo et l'envie de faire des films et de la musique et le manque de la danse) est toujours là, contenue, tapie, mais qui bouillonne.
Ce matin je lisais ce billet sur le blog de Fanny Chiarello, avec laquelle j'ai un certain nombre d'affinités du moins dans la perception du monde, et la photo de son amie dans le café de la gare de Bangor, m'a soudain emportée dans un film, l'écriture du scénario du film dans lequel cette image serait fusait. C'était irrésistible.
Mais c'était l'heure d'aller travailler.
J'ai résisté. Il le fallait.
J'en ai pleuré.
Bien sûr au retour ce soir, il ne restait rien de ce qui était en train de jaillir, quelques notes jetées en vrac en arrivant, dans le premier cahier qui m'est tombé sous la main, un enfant qui disait à l'un de ses frères, Regarde, je vais sauter [en longueur], attends, pousse-toi, mais pousse-toi ; un slogan Du temps pour tous ; une bribe de phrase : Au milieu des moments morts, il y avait des moments vivants ; une réflexion : qu'est-ce qui fait que l'on destine certains morceaux, tels La lettre à Élise, à se faire massacrer inlassablement par des débutants, quand d'autres non - j'imaginais peut-être que c'était l'un d'eux que Valentina Magaletti entendait dans ce buffet de gare -. Il y avait la vie des autres gens, celles et ceux que l'on entrevoit en arrière-plan et l'image en suivra certains un temps et puis finalement non, d'eux davantage on ne saura rien. Ils n'étaient qu'en marge de ce qui survient.
Comme ma propre vie de ces années-ci.
Puisse du temps m'être accordé après.
(1) Je ne veux pas finir vieille dame à la charge de mes enfants. Mon emploi actuel est ma chance d'éviter ça et je n'en retrouverai pas d'autre facilement. De plus il est utile aux autres.
J'ai un tantinet raté mon Vélotaf ce soir, mais c'était amusant.
J'avais trouvé un Vélib non loin de la Porte d'Orléans et quand je l'ai détaché ma petite sœur m'a appelée au téléphone.
Malgré que les téléfonino sont entrés dans nos vies depuis environ trente ans, ça m'amuse toujours beaucoup (tant qu'il ne s'agit pas de mauvaises nouvelles) ce truc de la vie moderne qui fait qu'en tout lieu en tout moment on peut communiquer avec des gens loin qu'on aime bien.
Ça n'était pas un problème, j'ai pris le vélo d'une main que j'ai poussé à pied tout en répondant au téléphone que je tenais de l'autre.
La conversation achevée, j'ai enfin enfourché ce vélo que je n'avais pas eu l'occasion de tester. Las, il avait un problème dans les vitesses qui faisaient qu'il fallait maintenir fermement le dispositif qui permet de les changer si l'on souhaitait qu'au moins l'une d'elles reste enclenchée. Mais ça empêchait de freiner avec la même main, du moins pour une femme de mon gabarit dont les doigts ne sont pas longs. Plus loin voyant une station assez remplie je l'y ai laissé.
Pas de chance, les autres vélos étaient en maintenance, du moins tout ceux que j'ai essayés. C'était la station proche du Lutétia.
Pas de station garnie proche, j'ai pris la ligne 12 du métro.
Puis à Satin Lazare, le train (1). Dont le départ a tardé de 5 à 6 minutes. Pas bien grave, j'avais averti de mon retour tardif et lent. Et puis, je lisais. Ça n'était donc pas du temps que je perdais.
Il était 21:30 lorsque je suis rentrée. Marche, vélo, métro et train, pas mal pour 11 km à parcourir.
(1) J'avais hésité avec ligne 14 à Madeleine, mais comme je la prends souvent le matin, je souhaitais changer.
On sait que trop d'exposition au soleil est mauvaise pour la peau (1). Admettons que quand j'étais petite les gens ne le savaient pas encore. Mais à présent, si, forcément. Et pourtant ça continue, les gens s'aplatissent encore en plein soleil pour se faire frire. Il y en avait même qui payaient des séances dans des cabines pour en ressortir orangés (2).
Par ailleurs on assiste sinon à une résurgence du racisme, du moins à de plus en plus d'expression de celui-ci. Je vais finir par croire que certains ont l'impression d'une concurrence déloyale, quelque chose comme ça.
Soulagée de lire chez Guillaume dans une entrée concernant le mois dernier, que je ne suis pas la seule à m'interroger sur cette inconséquence humaine (parmi tant d'autres).
Il y a pour moi d'autres mystères, les ongles artificiels, la chasse à la pilosité, même quand elle n'est pas excessive, les cheveux teints quand ça n'est pas pour une raison précise.
Je parviens à comprendre l'usage du tabac, j'ai bien pigé qu'il s'agissait d'une addiction dans laquelle on tombait à l'adolescence, pressés d'avoir l'air "plus adultes" et dont on ne parvenait ensuite plus ou très difficilement à se départir (3).
J'ai aussi pour partie compris la mode des tatouages, certaines et certains m'ont expliqué les leurs et j'ai compris le sens que ça pouvait avoir - même si je ne peux m'empêcher de songer que la peau est sans doute à terme abimée par les encres, et puis : en vieillissant, quand elle se fripe, le dessin, il devient quoi ? -.
Mais il me reste encore bien des perplexités face aux micro-mystères humains.
Sans doute suis-je assez imperméable au phénomène de modes, et que cela contribue à ma perplexité.
(1) Pas assez aussi, c'est comme pour presque tout. Une juste mesure est le bon dosage.
(2) Elles ont disparu, c'était vraiment trop mauvais pour la santé, et ça a fini par se savoir (article d'octobre 2018 sur France Info)
(3) Et que renforce le fait qu'au travail, les fumeurs ont droit à des pauses clopes quand les non-fumeur doivent trimer sans arrêt.
Je tente de sauver mes journées perdues à gagner ma vie par des vélotafs somptueux. Paris est d'un grand secours.
Il y avait aujourd'hui le test event du triathlon femme en vue des J.O. et j'étais coincée au bureau.
Beaucoup de boulot, et un sentiment d'utilité, la journée est passée vite, je ne veux pas dire.
Et ce Vélotaf, je l'ai vraiment savouré. Il faisait un temps idéal, parfait.
À l'anneau de vitesse de Longchamp que je longeais dans l'autre sens, j'ai croisé une amie du triathlon et nous faire signe a été mon petit encouragement d'après la journée de labeur.
Seulement une fois rentrée, à peine la force de prendre une douche, de dîner, d'étendre la lessive qui attendait depuis la veille au soir. Il ne restait plus rien sous la semelle.
J'étais triste et je savais pourquoi : une camarade du ciné-club avait été enterrée ce jour.
Prendre un jour de congé (c'était à Rosny sous Bois) n'était pas concevable un tel jour d'effectifs réduits. Trop de deuils ces deux dernières années dans mon entourage amical.
Je suis triste à l'idée que nous n'aurons sans doute jamais de petits-enfants et que si nous en avions nous serions terriblement inquiets pour leur avenir.
Des records de chaleurs sont franchis dans différents points du monde et si à titre personnel et tant que je dispose d'eau, je sais que je peux tenir assez longtemps assez haut, je sais qu'il faut s'inquiéter de cet avenir décomposé qui déjà survient.
L'humanité est en train de vivre en collectif "Flowers for Algernon" et on en est à la redescente et ça s'accélère.
La prochaine pandémie pourrait ne pas tarder (je ne parle pas de la résurgence du Covid, que l'on feint d'ignorer).
"Les enfants de septembre" de Jean-René Huguenin est d'une justesse infinie sur les aléas et duretés de la vie, mais contient des bouffées d'antisémitisme très pénibles. Tout en se montrant en soutien - l'un des jeunes protagonistes est un enfant dont les parents ont été déportés et la compassion y est -. Mais bon sang les idées reçues iniques et moisies ! Celles d'une époque où elles étaient considérées comme allant de soi, j'en voyais les ravages sur la génération de ma mère, mode "les bienfaits de la civilisation" sur les catégories inférieures "on". Une éducation collective qui laisse des traces.
Je puise consolation dans une brève vidéo de Rhys Mclenaghan.
Il pleuvait. Il était tard. J'étais bien entamée par le travail mais trop contente depuis deux jours d'avoir retrouvé ma mobilité sans douleur particulière (1), j'ai bondi sur un Vélib (électrique, je me ménage encore un peu).
En allant vers la bidir de la porte de Vanves, je suis passée près d'un banc où des personnes se tiennent souvent, le soir, aux mêmes heures que je rentre du taf.
Elles y étaient malgré la pluie.
Et un homme, touriste éméché ou réfugié ivre de fatigue avait entrepris de leur faire la conversation / partager des coups à boire.
Les habitués du bancs lui répondaient tant bien que mal en anglais.
Et à l'instant où je passais, j'ai entendu cette phrase
Malakoff is such a beauty
dit par l'une des habituées.
J'ai eu comme une pensée de partager cet instant de poésie avec F. le poète devenu romancier et éditeur, oubliant une fraction de seconde qu'il n'était non seulement plus dans ma vie mais plus dans celle de personne d'autres puisqu'il est mort il y aura bientôt deux ans et que des chroniqueurs de livres l'évoquent en disant "Le regretté" avant ses prénoms et noms.
Étonnant et joli, comme une bribe de conversation aura par mon intermédiaire épuisé (2) offert un fragment d'éternité à quelqu'un qui avait compté.
En attendant, j'en ferais bien un titre.
Mais avec quel temps pour écrire ?
(1) Une chute à l'entraînement de course à pied il y a presque deux semaines m'aura gênée jusque là.
(2) Je gage que la même phrase entendue au vol en passant à l'aller vers la journée de bureau n'aurait pas croisé le moindre oubli de quelque mort que ce soit.
Vendredi soit cinq jour après être tombée lors d'un entraînement de course à pied, j'ai tenté un retour du boulot à Vélib.
Celui que j'avais dégoté n'était pas terrible, un problème de vitesses et je moulinais, mais en plus le genou était douloureux. Ou plutôt la peau et les couches supérieures, ça tiraillait, ça brûlait bien plus qu'en courant.
Alors, privilège du vélibant, j'ai déposé la monture à une station près d'un métro et j'ai terminé par les transports en communs.
Ce matin, un lundi, donc, j'ai préféré ne pas tenter le diable, j'étais juste en délais et je subis l'arrêt de la ligne 14, mesurant si besoin en était, combien elle me permet de gagner du temps lorsqu'elle fonctionne.
En revanche, ce soir, j'ai pu enfin, plus d'une semaine après le fatal instant d'avoir mal évalué à quelle distance d'un rebord de route face à l'accotement était mes pieds, reprendre mon trajet Vélotaf de retour.
Ce fut comme une petite victoire, en plus qu'après des travaux ici et là je découvre désormais de nouvelles pistes, des endroits plus larges et mieux protégés, même si partagés avec des autobus.
J'ai mis 1h04 pour rentrer, en étant extra-prudente (je ne peux me permettre de rechuter sur la chute, j'ai marathon dans deux mois et demi) et en prenant mon temps.
Ça m'a fait beaucoup de bien.
Le pont Alexandre III était fermé d'accès sauf sur les trottoirs (je suis descendue de vélo en le poussant) et ce n'est qu'une fois rentrée qu'en lisant ici ou là des infos sur l'épreuve test de natation annulée au dernier moment et qui aurait dû partir d'un ponton relié au pont que j'ai pigé qu'il s'agissait sans doute d'un chantier provisoire lié au démontage des installations.
Un article du Parisien où il est question des morsures de mouches noires, et qu'elles sont aussi présentes en France, me fait douter au sujet de ce que je prenais pour des piqûres de moustiques tigres à Bagatelle, début juillet et qui m'avaient déclenchées aux deux jambes une belle réaction allergique au point de n'avoir pu courir comme il le fallait au trail de La Chouffe quatre jours après. Mes appuis n'avaient pas leur habituelle sensibilité et le trail était très technique sur certaines descentes et ... escalades. Je n'avais en effet pas senti la piqûre ou morsure, ça faisait trois points qui saignaient et j'ai aperçu un petit insecte au corps noir moiré. La réaction allergique était apparue progressivement au cours de la journée suivante avec un pic 24h après, qu'une prise d'un comprimé de Zyrtec chaque soir avait calmée en trois fois, mais simplement calmée, pas tout à fait effacée.
Je le note ici pour le cas où ça serait utile à quelqu'un d'autre : vers Bagatelle au Bois de Boulogne, pas bien loin de l'anneau de vitesse de Longchamp pour les vélos, rôdent des insectes, mouches ou moustiques, dont les piqûres ou morsures sont moins anodines que celles de leurs confrères plus communs. Et un anti-anti-histaminique peut assez bien calmer le jeu mais pas instantanément.
Je note aussi pour un éventuel plus tard, qu'on est encore dans les températures frisquettes qui ne donnent pas une impression d'été, même s'il n'a pas ou peu plu en cette journée. J'ai l'impression, si j'en crois les amies et amis "du sud" et les collègues déjà rentrés de vacances, que le souvenir de cet été 2023 sera très varié entre celleux qui n'auront pas quitté Paris et la partie nord ou ouest du pays, un été fort frais, déjà d'automne en août et les autres pour qui 2023 sera synonyme de canicule.
Pour mémoire, se rappeler que c'est à peu près à cette date qu'on aura pu se dire que D. Trump ne se sera peut-être pas impunément dispensé de respecter les lois de son pays. On commençait par finir à en douter. Même s'il risque de mener un début de campagne électoral en surfant sur le fait d'être une victime de méchants juges ou procureurs qui lui en veulent parce qu'ils ont trahi. Et que vu le fond complotiste de sa fanbase ça ne pourra que bien fonctionner.
Moins d'une semaine après ma chute en course à pied contre un rebord de bitume que j'avais mal évalué, j'ai pu reprendre mes entraînements. Nous sommes donc retournés à Maisons Laffitte mais cette fois-ci en restant du côté des haras, des maisons, d'un stade, et sans prendre la route qui n'était pas faite pour les piétons.
Il nous a ensuite fallu attendre une quarantaine de minutes notre train de retour, ce qui nous a permis de faire quelques pas (en marchant) dans le quartier de la gare.
À l'entrée d'une vaste demeure, qui est peut-être aujourd'hui un établissement de soin, cette plaque.
Nous ne connaissions pas le destin héroïque de Claude Lamirault mais lorsque nous avons lu qu'il était mort accidentellement un mois après avoir été rescapé des camps de concentration, notre première pensée a été Mazette, bad karma !
En rentrant j'ai tenté de me documenter : en fait à peine rentré il avait repris du service et c'est lors d'une mission qu'il a subi l'accident de voiture fatal (1). Il était donc plutôt une conséquence d'un courage inlassable et d'une force probablement peu commune. Il avait 26 ans.
Sa femme, Denise Rousselot Lamirault, avait pris pendant sa captivité sa succession à la tête du réseau Jade-Fitzroy (2). Elle a vécu jusqu'en 2012 (3).
(1) C'est sur le site peoplepill que j'ai trouvé le concernant l'information première.
(2) Divers articles dont celui-ci sur Military history
Article sur Français libres.net
(3) D'après une entrée sur geneanet.