Chercher la forêt
Les apparences trompeuses / Mouvements contre la réforme des retraites imposées par recours au 49.3

Mouvements de révolte 23

Passage d'un escadron de police à moto à Port Royal vers Montparnasse. Effet de nombre et de grondements. Je pense à Malik Oussekine et j'ai les larmes aux yeux. 

  Capture d’écran 2023-03-20 à 21.57.02  Traversée de Paris à Vélib en rentrant de chez le kiné. 

Dans ma longue vie de Parisienne et de relative manifestante, je n'avais jamais vu ça : chaque quartier semblait avoir sa manifestation. Il y avait toutes sortes de forces de l'ordre dans toutes sortes d'endroit, des véhicules d'urgence dans des directions variées. Des poubelles partout et quelques camions poubelles travaillant ici ou là avec des gars qui semblaient prendre soin du moindre sac, peut-être histoire de montrer qu'ils n'avaient pas eu le choix. Ou alors qu'ils étaient épuisés par la partie de la tâche immense déjà accomplie.

Non loin du Lutétia, je croise un groupe de manifestants, jeunes pour la plupart, et rapides. Au croisement où je traverse en ayant mis pied à terre, j'entends que l'un propose de tourner sur un axe qui va vers Concorde et un autre répond Non, tout droit, par la c'est Concorde et il y a des condés. Et, fluide, le groupe pourtant nombreux, s'adapte. Quelques poubelles sont renversées.

Je me demande par quel circuit des mots de l'argot du temps d'Alphonse Boudard (darons, condés) sont ainsi remontés en usage.

Comme j'ai croisé bon nombre de CRS solidement armés peu auparavant, j'ai le cœur serré en pressentant des affrontements. Beaucoup des manifestants sont très jeunes, qu'elle soit à 62, 64 ou 67 ans la retraite risque de ne jamais les concerner : la planète ou une guerre nucléaire, à moins qu'une autre pandémie, aura probablement bien entamé l'humanité avant. Celleux qui resteront travailleront directement pour leur subsistance tant que leurs forces le leur permettront. Le monde d'Enig Marcheur (1)  me semble l'avenir plausible. Ils se battent donc pour nous autres, qui étions près du but et le voyons s'éloigner.

Un quartier : Invalides et probablement l'Assemblée Nationale (mais justement je n'ai pas pu y passer, donc je n'en sais pas plus), entièrement bouclé par force forces de l'ordre, véhicules en rang serrés et hommes devant, en bouclier. De la rubalise en veux-tu en voilà. Il est possible de passer en tant que piéton, ou super-piéton (marchant à côté d'un vélo, d'une trottinette). Les sacs sont contrôlés (de façon amusante : pas le mien qui est sur le panier du vélib que je pousse en marchant).

Et au milieu de tout ça, des livreurs qui livraient, des touristes qui poussaient leurs valises, des gens savourant du temps libre aux terrasses des cafés, d'autres (dont j'étais) tentant de terminer leur journée / leurs trajets.
Dans le XVIIème comme si rien de tout cela n'avait lieu, un couple effectuait une danse de joie pour saluer une amie, de l'autre côté d'un passage piéton.

Notre fils est allé chercher sa sœur qui revenait de Normandie par le train. Il avait capté que c'était agité. Venant tout juste de rentrer non sans un solide détour (il fallait trouver un pont libre, puis le bon axe pour traverser les Champs Élysées (merci la rue Marbeuf), puis remonter vers le nord puis prendre soin de ne pas traverser le parvis du Tribunal de Paris (vaine précaution, tout était calme), je n'aurais pas eu la force de le faire.

Vers 23:30 dans les environs de la porte de Clichy, on a cessé d'entendre des sirènes de véhicules d'urgences ou de polices. Je viens d'écrire cette phrase et j'en entends une (il est 0:42).

 

(1) Rien à voir avec le premier nom du parti de l'actuel Président, mais tout avec le parlénigm, ce langage de demain. Le titre en V.O. est Riddley Walker

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