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Du nom des marques des sponsors

 

   Notre système économique veut que le sport professionnel (entre bien d'autres choses) soit financé par des marques qui voient là l'opportunité de se faire connaître. Il me semble que je n'y voyais pas d'inconvénient tant qu'il y avait de la logique : un équipementier de sport finançant des équipes de football, un fabricant de cycles une équipe de cyclistes pro. Ou alors une équipe d'une localité par l'industrie ou l'entreprise pour laquelle la ville était réputée. Saint-Étienne (l'ASSE) de la grande époque, c'était Manufrance, deux identités géographiquement associées.  

Et puis à un moment, ça s'est mis à n'avoir plus aucun rapport : une compagnie aérienne d'un lointain pays s'est portée au chevet d'une grande équipe de football en France, des assurances ont payé des cyclistes ou une société de jeux d'argent. Mon cerveau a alors décidé unilatéralement de ne plus établir de connexion entre les sponsors et les sponsorisés et je ne m'en étais même pas rendue compte. 

À l'instar de l'enfant d'une rubrique-à-brac de Gotlib et qui chantait joyeusement Leblésmouti labiscouti en allant à l'école et tombait déçu quand plus tard il comprenait qu'il s'agissait d'une chanson pour rythmer le travail (1), je suivais par exemple le tour de France sans relier en rien les noms d'équipes à des marques. Le nom était le nom de l'équipe et rien d'autre. 

Autant dire que si tout le monde avait été comme moi, les sponsors et autres mécènes n'auraient pas maintenu longtemps leurs investissements.

Et puis est survenu le Tour 1998 qui a viré au roman policier. Et je suis tombée de l'armoire en comprenant que Festina, entre autre était une marque de montres et que Doïchteutélékom était un opérateur de télécommunication en Allemagne, Kofi Dix un organisme de crédit (2) ... 

Je croyais naïvement que depuis ce temps-là je savais faire le lien, même si je m'en foutais complètement. Et cet après-midi en tirant du café à un distributeur, parce que je regardais rêveusement les noms sur la façade de la machine pendant que celle-ci préparait ma boisson, j'ai "découvert" de quoi était le nom de l'une des équipes de cette année. En fait mon absence de faculté de relier le financeur au financé, en bientôt vingt ans ne s'est toujours pas arrangée. 

Ça me fait bien rigoler. 

 

(1) Le blé se mout-y // L'habit se coud-y  

(2) Alors que je connaissais l'existence des sociétés Festina, Deutsche Telekom et Cofidis ...


Un souvenir de Cerisy

 

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Nous approchons du mois d'août, nos comptes en banque crient famine, et mon avenir professionnel, même si j'ai trouvé le local qui irait bien pour une librairie que je pourrais tenir, reste fort incertain. Alors je me rappelle les bons souvenirs et parmi eux celui-ci : le colloque Hélène Bessette fin août à Cerisy. 

J'ai failli connaître un bonheur d'une semaine, mais le décès d'une de mes tantes aura brièvement interrompu l'élan. Revoir les cousins et les cousines était pas mal non plus, même si deux hommes manquaient qui ont préféré tenter la vie auprès d'autres femmes, incapables qu'ils furent de faire face aux diminutions naturelles de leurs propres capacités physiques. 

Il n'empêche que cette semaine restera pour moi une parenthèse magique et probablement unique car mes finances ne permettent pas de telles folies, ni mes emplois, lorsque j'en ai, de choisir mes dates d'absence.

Je me souviens fort bien de tout ce que j'ai appris et du bonheur que c'était de découvrir certains textes inédits ou devenus des raretés, je me souviens de moments magiques, d'une grande balade à vélo vers la mer, d'une soirée de lectures à voix haute au grenier - ces moments pas si fréquents je crois, même dans une bonne vie, où l'on a la sensation d'être au bon endroit au bon moment et qu'on ne serait nulle par ailleurs aussi bien, aussi précisément en adéquation (1) -, des belles rencontres que j'y ai faites.

Seulement ce qui me revient en premier, lorsque je ne réfléchis pas, ce sont deux éléments fort peu littéraires : 

Mon peu de goût à être servie, cet embarras dans lequel ça me met. Nous étions à chaque repas servis personne par personne à table par des jeunes femmes en livrée, nombreuses, et qui passaient même pour proposer du plat principal une seconde fois. Je n'aurais pas voulu être à leur place, mais je n'étais pour autant pas à ma place à la mienne.

L'absence totale de clefs. Je n'étais pas tout à fait tranquille concernant mon ordi - le vol de mon sac fin 2017, la volatilisation de mon téléfonino quelques mois plus tôt lors d'une assemblée de libraires, et les vols à répétitions dans la maison de Normandie la même année, m'ont rendue intranquille à ce sujet -, que la plupart du temps je m'arrangeais pour conserver près de moi ; seulement pour le reste, quel infini et formidable sensation de liberté. Pendant une semaine ne pas avoir à se préoccuper de serrures et de clefs et d'ouvrir et de fermer, et de vérifier qu'on avait bien sur soi des clefs, pendant une semaine vivre naturellement, se faire confiance. C'était si bon. Et rassurant. 

Je m'étais alors souvenu qu'en banlieue de Paris, dans mon enfance, on ne fermait à clef une maison que lorsque l'on s'absentait, faisant suffisamment confiance au monde pour laisser ouvert les accès en notre présence, sans avoir à craindre d'intrusions (2). On ne fermait présents que pour la nuit. Et c'était le cas pour les voitures aussi. Les portes n'étaient pas blindées, les grillages bas, les portails bouclés seulement si une famille s'en allait en congés.

Voilà ce qui reste de plus marquant, malgré de fortes et belles émotions et stimulations intellectuelles : les clefs, la belle vie que c'est sans. 

 

(1) L'amour fait ça également, lorsqu'on a un temps d'intimité qui nous est accordé et dans un lieu que l'on apprécie ou que l'on découvre, enchantés.
(2) Jusqu'au jour où Philippe, le mauvais garçon du quartier, est tombé dans l'héroïne et que lui ou ses fréquentations ont commis des larcins vite fait, dans les maisons, abusant de la confiance collective que les habitants avaient. 

 


Mini randonnée du tour de France

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C'est la troisième ou quatrième fois que je participe à ce genre de choses : opération promotionnelle en marge du tour de France. 

En 2003 pour le centenaire c'était somptueux : le vrai tour que les pros faisaient quelques heures plus tard dans Paris soit une trentaine de kilomètres. J'avais loué un vélo au "Groupe Sportif" de l'entreprise qui alors m'employait et roule Nénesse. 

D'autres fois c'était sympa mais trop court : un petit tour de Champs Élysées. Je le savais qu'aujourd'hui aussi ça aurait un goût de trop longue attente pour trop peu de vélo mais je n'ai pas su résister : j'aime quand la ville appartient aux vélos. 

Alors je me suis retrouvée affublée d'un casque trop petit - pas du tout fait pour ma forme de crâne platte dessus et allongée vers l'arrière -, d'un tee-shirt jaune de coton de base (1) à faire la petite boucle avec une foule de femmes et d'hommes (2), à part quelques-uns (il faut toujours qu'il y en ait qui fassent les malins à zigzaguer vite entre les autres) toutes et tous tranquilles. J'ai croisée une amie du club de triathlon mais qui elle-même attendait une amie alors nous nous sommes perdues de vue ; ne me suis arrêtée qu'à la toute fin pour prendre une selfie. C'est curieux comme la sorte de long peloton que nous formions s'était allongé (la selfie finale donne l'impression trompeuse de presque personne).

 

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J'ai attendu un peu à la fin après la distribution d'eau et de banane (oui une eau minérale et une banane chacun·e) voir si je revoyais ma camarade, mais ce fut en vain.

Alors je suis rentrée préparer mon autre vélo pour le lendemain matin puis faire ma dernière sieste royale de l'été devant une étape du Tour.

J'oubliais : nous étions précédées par d'anciennes championne cyclistes inconnues du grand public (malgré des palmarès remarquables, mais voilà une championne femme ça compte pour du beurre) et de deux anciens coureurs pro hommes, un Australien et Cancellara, applaudi pour ses 28 ou 29 jours en maillot jaunes sur des tours de France, comme si de rien n'était

 

Ce fut globalement un bon moment, malgré l'attente longue du départ, mais bien un peu court. 

 

(1) Un peu surprenant à l'époque où chaque course nous gratifie d'un tee-shirt en tissus technique 
(2) Et oui, je m'étais inscrite à un truc qui s'appelait "Les Champs pour elles" mais il y avait en même temps d'autres cyclistes, ceux-là hommes ou femmes pour une association et d'autres encore pour une autre. Nous avions le tee-shirt et le casque FDJ obligatoire et les soutiens d'associations seulement le tee-shirt.


Les blogs m'ont fait grandir

 

    Voilà, j'ai expurgé ma liste de blogs amis qui normalement figure ci-contre, des liens qui renvoyaient dorénavant vers plus rien ou vers des sites de ventes de choses étranges sans rapport avec le blog initial. 

À la réflexion j'y ai laissé les liens vers ceux qui étaient en sommeil mais encore accessibles. J'ai aussi laissé, sans trop hésiter, les liens vers les blogs des personnes qui ont disparu de ma vie, toutes écrivent fort bien et la dégradation ou la fin de nos relations n'y change rien, et surtout pas pour le passant qui trouvera matière à lire de belles choses et se permettre de ne pas penser que les attitudes dans la vie concrète sont parfois éloignées des sentiments exprimés aux titres de généralités. Nous ne sommes que des êtres humains et tout le monde n'est pas pareil avec tout le monde. Il se trouve qu'après bien des années difficiles, je connais un certain apaisement, dû au passage du temps et à la mort de ma mère en 2017. Ce deuil et tout le travail afférent ont en quelque sorte délavés les chagrins antérieurs. Si je tombe sur des écrits de ou concernant qui m'était proche et m'a rejetée, ça n'est plus qu'un vestige de pincement au cœur, presque un peu de surprise Comment cette personne a-t-elle pu tant compter ? 

Pour l'une d'entre elle je le sais (1), je n'avais de toutes façons jamais cessé d'apprécier son travail, et nos convergences militantes sont si fortes qu'elles sont toujours là. Nous n'avions pas tout à fait le même sens de l'amitié, c'est pourquoi j'ai morflé.

Pour l'autre, j'aurai été la victime bête d'une forme d'escroquerie affective, classique et prévisible. Il n'en demeure pas moins que l'aide apportée lors de moments particulièrement difficiles fut réelle, et que des moments magiques eurent bien lieu - pas si fréquents dans une vie comme la mienne -, qu'en l'aidant moi-même j'ai progressé et que même si  pour l'instant seule une discrète publication en atteste, mon écriture à son contact s'est professionnalisée. 

De toutes façons la majorité des blogs liés sont ceux de personnes devenues amies. En les parcourant à nouveau je mesure à quel point grâce aux blogs j'ai grandi, combien ils ont élargi ma vie et ma perception du monde. 

Ils m'ont permis de croiser des gens avec lesquels sur certains points (au hasard : les bouquins (mais pas que)) j'avais de grandes affinités mais dont les vies étaient totalement différentes, les expériences et l'arrière-pays de ce qui les avait rendues telles qu'elles étaient. Quoique toujours gaffeuse, je suis beaucoup plus attentive à certaines choses dont j'ignorais avant qu'elles pouvaient poser des problèmes à quelqu'un. Plus aguerrie aussi pour tenter de défendre ce qui me tient à cœur, sans doute du fait de me rendre compte que d'autres pensent de la même façon alors que bien souvent j'étais la seule personne de mon entourage professionnel et familial à envisager les choses sous un angle différent du sens majoritaire. 

Au passage je me suis aperçue que lorsque j'ai rencontré les un·e·s et les autres, j'avais pris leurs écrits en cours de route sans chercher, fors pour La Fille Aux Craies puisque tout fut trop vite totalement terminé, à remonter le fil du temps des billets. En allant ponctuellement regarder si les archives des différents blogs étaient encore en ligne, j'ai eu l'amusement de découvrir que certaines lectures faites en leur temps m'auraient bien rendues service. Je ne vais pas tous les énumérer.

La palme en revient à Tarquine avec ce billet de 2004 concernant les sas vélos qui, l'eussé-je lu en 2005 lors que j'ai fait la connaissance de son blog, m'aurait fait gagner bien du temps et de la sécurité dans mon usage du vélo citadin. Je suis longtemps restée comme l'une des commentatrices à me demander ce que ce marquage au sol pouvait bien signifier. Entre temps je l'avais appris par ailleurs mais ça m'aura pris au moins sept ans (2).

Enfin je n'ai pas encore complété la liste des blogs que j'ai découverts ces dernières années. 

Ça sera pour mon prochain temps personnel libéré.

En attendant grand merci à toutes celles et tous ceux qui en partageant leurs écrits plus ou moins intimes ont contribué à quelque chose qui tenait beaucoup de la solidarité et de s'entraider. 

 

(1) Et qui n'a pas de blog ou alors sous un pseudo que j'ignore.
(2) Au passage, puisque l'on est en période de canicule, il est pertinent de relire ce billet 


Heureux ceux qui n'apprennent qu'après [qu'une catastrophe a eu lieu]


    Au lendemain d'un incendie qui a soufflé l'un des derniers garages qui restait dans le quartier (1), les gens se parlent dans les magasins. Une jeune femme confie sa confusion : elle habite dans une petite impasse presque en face du garage, était chez elle tout l'après-midi et ne s'est rendu compte de rien, d'où une absolue stupéfaction en débouchant de l'impasse au matin et de constater que le garage d'en face n'existait plus.

Il est vrai qu'il y a en ce moment un important chantier tout près, elle dit avoir perçu des bruits forts, mais supposé qu'ils y étaient liés. 

Je reste surprise qu'elle n'ait rien senti de la chaleur (les volets roulants en plastique des immeubles voisins ont tout bonnement fondu) ni de l'air acre, asphyxiant ; mais c'est une chance pour elle, alors tant mieux. 

Je me souviens que lors de l'incendie sur siège du Crédit Lyonnais en 1996, un collègue qui était parti en week-end et n'avait pas du tout écouté les infos, rentrant tard le dimanche, se réveillant le lundi juste pour aller travailler, et c'était un temps de peu de téléphones portables (2), de peu d'internet perso, il n'avait strictement rien su. Et donc était arrivé dans l'une des rues d'accès, avait franchi sans le savoir plusieurs barrières de sécurité - bien vêtu, l'air décidé, il avait dû passer pour l'un des experts venus expertiser -. Ce n'était qu'aux pieds de l'immeuble qu'il avait levé les yeux et ...

Une autre collègue partie en vacances à l'étranger, rentrée un dimanche soir une semaine plus tard, avait trouvé parmi tout son courrier d'en papier, encore abondant à l'époque, une lettre générale du PDG d'alors, laquelle commençait en substance par quelque chose comme : "Après l'événement grave qui nous a frappés". Et elle avait cru, ça y était, que l'entreprise avait été mise en liquidation judiciaire (3). Elle avait téléphoné à quelque autre collègue et amie et appris la vérité. Non sans avoir eu le temps de se faire un tout autre film.

Dans un roman lu récemment, un fils meurt accidentellement, sa famille en est avertie mais le père, cycliste amateur, est en entraînement ou randonnée, c'est une époque de peu de téléphones portables et de toutes façons il n'y a plus rien d'autre à faire que de au mieux se rendre sur place au pire attendre que le corps ne soit rapatrié, alors voilà, l'homme a ce dernier parcours d'avant la tragédie qui lui est accordé quand elle a déjà eu lieu.

À ceci près que le "après coup" rend le choc plus violent, il me semble que les retardataires d'une info malheureuse sont comme des bienheureux provisoires, détenteurs pour peu de temps d'une innocence préservée. Il ne sauront qu'après qu'ils l'avaient été.

Bon courage à la jeune femme du voisinage pour digérer sa surprise absolue du matin.

 

 

(1) Moins qu'à Levallois mais cependant, les garages étaient nombreux à Clichy jusqu'aux années 1990. Puis ils ont commencé à se raréfier. 

(2) En Italie les gens étaient déjà beaucoup équipés mais en France seulement ceux qui en étaient dotés de par leur travail ou qui étaient à la fois technophiles et très aisés.

(3) Ça n'était pas stupide, en 1994, le sort de la banque s'était retrouvé suspendu à une décision d'un conseiller européen, Karel van Miert.


Un incendie à Clichy

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Il était environ 15h45 quand nous avons quitté les locaux du tout début de la rue de Paris où j'ai peut-être une chance de créer enfin ma librairie. J'étais en la compagnie de l'entrepreneur qui ferait les travaux si mon dossier est accepté.

Alors que nous cheminions rue des Cailloux, nous avons vu un léger panache de fumé gris clair vers le nord. 

On venait de dire C'est plutôt calme comme quartier.

On a remarqué le signe d'incendie, très vite des sirènes de pompiers. Comme d'où nous étions on ne pouvait déterminer d'où ça venait et que les choses semblaient sous contrôle, nous avons poursuivi notre chemin. Son véhicule était garé près de l'entrée de la rue Chance Milly, nous nous sommes salués et il est reparti vers la suite de sa journée de travail. 

Je me suis dit qu'avant de rentrer chez moi envoyer un message à mes interlocuteurs pour l'éventuelle location du local, j'allais passer dans l'un des libres-services du quartier faire quelques courses (des fruits, du lait, des yaourts ...) et puis j'éprouvais le besoin de savoir d'où exactement venait la fumée. 

J'ai traversé les jardins Bic, remonté l'avenue Anatole France dans l'idée d'aller rue Henri Barbusse et de là soit vers le magasin bio (si pas le courage d'affronter le bruit et la foule), soit vers un Franprix, soit un Intermarché. J'hésitais. Et puis j'ai croisé une femme accompagnée de deux enfants et au même moment où quelque chose me mettait en alerte, ce truc un peu du fond des âges qui nous fait nous retrouver sur le qui-vive sans que le cerveau pensant n'ait identifié pourquoi, elle s'arrêtait, disait aux enfants quelque chose comme Regardez ça brûle. Et effectivement, par le passage ouvert vers un parking de l'immeuble devant lequel nous passions, on voyait des flammes, nettement.  IMG_20190723_162855_013

Ça n'était pas extrêmement rassurant et pour le coup j'avais besoin de comprendre où c'était exactement ne serait-ce si c'était près que pour avertir ma fille (1), restée dans l'appartement. Sans aller jusqu'à un risque de propagation - je voyais arriver au bout de la rue pompiers nombreux, véhicules de police qui organisait barrage -, je craignais que le quartier ne fût bouclé et que nous ne puissions plus entrer ou sortir.

Je suis donc allée jusqu'à l'intersection Barbusse Castérès Anatole France.

C'est au moment à 15:53 (2) quand je prenais la photo du haut du billet qu'a retenti une explosion. Et le panache de fumée est devenu noir et plus fort. Elle n'avait pas fait vibrer le sol, de là où j'étais le souffle n'était pas perceptible, pas de bruits de verres brisés et pas d'air étouffant ni d'odeur pour l'instant, le nuage noir filait vers le nord / nord - ouest 

Des gens se rassemblaient dans la rue, des policiers s'apprêtaient à fermer les accès sur la rue Henri Barbusse, le plus sage était de vite rentrer, avertir ma fille, et voir de mon balcon arrière si la situation semblait dégénérer davantage ou passer sous contrôle. 

Je me méfiais de la toxicité éventuelles des fumées : quelqu'un sur Twitter avait suggéré (ou vu ailleurs) qu'il s'agissait d'un garage, je pensais du coup au garage autonemo, l'orientation coïncidait. À partir de ce moment-là et jusqu'à la lecture d'un article qui indiquait 6 blessés légers (de type incommodés par les fumées) et que le propriétaire du garage était en état de choc (on le serait à moins), la pensée "J'espère qu'il n'y a pas de morts ou de blessés graves" ne m'a pas quittée. 

L'explosion, même si j'avais été assez loin pour ne rien ressentir à part de me trouver encore plus en éveil, avait accru mes craintes, il s'agissait d'un incendie de grande ampleur et qu'il fallait se méfier de suites encore plus dangereuses. Je n'en ai pas entendu d'autre. Rentrée j'ai averti les différents membres de ma famille, celle qui était présente, par WhatsApp ceux qui étaient à leur travail. Suivi les choses de notre balcon collectif du côté des cuisines : il faisait de toutes façons trop chaud pour se calfeutrer alors autant savoir comment les choses évoluaient. 20190723_160515À 16h05 c'était encore inquiétant, avec notamment un hélicoptère qui survolait la zone ; à 16h14, l'incendie semblait circonscrit 

20190723_161409J'ai tenté alors, de rassurer qui je pouvais et de reprendre le cours de ma journée. 

Seulement le quartier pour la circulation était encore bouclé et c'était l'heure de pointe qui commençait. 

La rue des Cailloux était interdite à la circulation à hauteur du croisement avec Anatole France, la rue Barbusse sans doute toujours autant. Alors les véhicules s'entassait avenue Anatole France, dans tous les sens (ceux qui arrivés au bout constatataient qu'ils ne pouvaient pas contourner par la rue des Cailloux, et tentaient le demi-tour). Tous les moteurs qui tournaient dans la chaleur rendaient l'air irrespirable - et pourtant nous sommes à un étage légèrement élevé -.

Soulagée d'apprendre, par un article d'actu Île de France,  qu'il n'y aurait que des blessés légers, je suis parvenue à aller faire quelques courses. Les dégâts que j'ai entrevus en passant à proximité étaient vraiment très importants. Du garage il ne restait plus qu'un pan de mur. Les piétons étaient encore filtrés à la hauteur du sinistre (qui habitait là pouvait passer).

Un camion de pompiers assez imposant présentait l'inscription "Reconditionnement des personnels". Des pompiers semblaient attendre (leur tour ?) à proximité. 

Les enfants avaient des sorties de prévues, j'ai rejoint l'homme de la maison à la gare et nous nous sommes réfugiés à Levallois. J'ai repris mon souffle (que je sentais acre, et les yeux qui piquaient) au parc de La Planchette. Puis nous avons trouvé un restau à la terrasse loin des rues à voitures.

En rentrant vers 22h nous avons pu mesurer l'étendue du sinistre. D'autres résidents se tenaient en silence de l'autre côté du trottoir. Recueillis. Répétant, Ça aurait pu être bien pire. Louant les pompiers. Une ancienne inscription avait été rendue à nouveau visible par l'éclatement de la façade isolante qui l'avait un temps recouverte. Elle disait "Pneumatiques, parallélisme, équilibrage". Cruelle ironie du sort. Fullsizeoutput_1817

La façade de l'immeuble d'en face n'était pas noircie mais bien un peu déglinguée. Les habitants ont dû avoir très peur, ou un grand choc en rentrant du boulot.

Il était temps pour nous de rentrer. Les rues étaient pratiquement vidées de toute circulation. Un gamin allait et venait à vélo. 

Les restaurants du bout de l'avenue [Anatole France] semblaient mener leur activité normale. Le #Hashtag, quant à lui, était resté fermé. 

 

nb : un Touite des pompiers de Paris 

 

(1) adulte, mais quand même
(2) horodatage de la photo


des noms sur un monuments (Ce ne sont pas que)

 

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Après une petite séance d'entraînement artisanal à la piscine Montherlant, je cherchais un vélib de maintenant afin de rentrer chez moi (1).

Je traversais donc le Square Lamartine quand une plaque à attiré mon attention. Entre 2013 et octobre 2015 j'ai travaillé dans ce quartier et je ne l'avais jamais remarquée. 

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Elle est édifiée à la mémoire de tout jeunes enfants qui habitaient le quartier avec leurs parents quand les rafles anti-juives de la seconde guerre mondiale eurent lieu. D'enfants qui furent déportés si petits qu'ils ne connurent jamais la scolarisation. 

De retour à la maison j'ai tapé les deux premiers noms de la liste sur un moteur de recherche, Antoine Baur et Francine Baur. 

La photo que je me permets de publier en avant de ce billet apparaît en premier. Elle provient d'un site de recherches généalogiques. J'ignore qui l'a prise ni de quand elle peut dater. En revanche, les dates et lieux de naissance et de mort figurent sur le site. 
Il s'agissait donc d'une famille qui comportait quatre enfants, Pierre, Myriam, Antoine et Francine Baur. Respectivement 10, 9, 6 et 3 ans, quand ils sont morts, ainsi que leurs parents, à Auschwitz le 19 décembre 1943. Aucune d'entre elles, aucun d'entre eux n'aura survécu. Leur seule culpabilité était, aux yeux du régime nazi, leur origine juive.

Personne en aucun lieu en aucun temps ne mérite d'être assassiné pour une appartenance à une origine, une religion, une couleur de peau ou quoi que ce soit qui ne relève de sa part d'aucun choix. L'être humain ne sait éviter la violence, on l'a hélas compris, mais qu'au moins on se cantonne à ce qui tient de conflits entre adultes et d'éléments relevant d'un choix, d'idées à défendre, d'appartenance volontaire à un parti. Mais pas ça, pas se saisir d'un groupe donné pour en faire des boucs émissaires et de façon plus ou moins raffinée les massacrer.

Je n'ai pas poursuivi mes recherches pour les autres noms, j'avais à avancer dans ma journée, je ne pouvais davantage consacrer de temps au passé.

Mais j'aimerais que l'on n'oublie pas, qu'on ne les oublie pas et qu'on évite, moins d'un siècle plus tard, de repartir dans les mêmes criminelles dérives. 

 

(1) N'en ai trouvé aucun d'opérationnel, j'ai dû rentrer en RER C


jour de repos (En vrac d'un)


    J'ai cru que j'étais sortie de ma récupération du trail de samedi parce que j'avais retrouvé mes jambes et une belle sensation de légèreté, seulement c'était une illusion, sans doute aidée par une nuit trop courtes et plusieurs présence de moustiques, efficaces facteurs de diminution du sommeil profond, j'ai dû par la force des choses m'accorder une journée de repos alors que j'ai beaucoup à faire. 

Ça n'était pas un luxe : alors que je regardais une arrivée d'étape du tour de France intéressante, complétée par le suspens inédit d'un abandon de coureur connu sans aucune explication - Rohan Dennis - avec en prime un moment de flottement où personne ne semblait savoir où il était (1), je me suis endormie sans même m'en rendre compte. Réveillée à la fin, lors du retour à la maison d'un membre de la famille et alors qu'il était l'heure de dîner.

Pour autant, de l'écriture, un peu, oui.

Une info qui passe un peu inaperçue au radio-réveil du matin : un célèbre studio d'animation a pris feu à Kyoto, il y aurait un mort et de nombreux blessé et qui entre-temps au soir est devenue un incendie criminel a ravagé un célèbre studio d'animation à Kyoto, il y aurait 33 morts et de nombreux blessés. L'homme qui a allumé l'incendie a été arrêté. Et là du coup ça devient une nouvelle qui concerne et qui peine.

Des infos via les réseaux me parvient aussi la nouvelle de la mort d'Andrea Camilleri. Il était très âgé (93 ans) et on le savait affaibli (il avait perdu la vue depuis un moment je crois), il n'empêche que son décès marque la fin d'une époque, et remémore des heures de voyages par la lecture. Elle ne laisse pas indifférente.

Au vélo club, un début d'avancée vers le cyclisme des femmes, même Marc Madiot doit concéder qu'il avait dit des trucs oui mais bon c'était il y a 35 ans quoi, pour ne pas perdre la face, il tente l'humour (comme ça je suis resté célèbre). Nicolas Geay, en revanche, est impeccable - mais il faut quand même qu'à la fin un des autres hommes rappelle qu'il a sa fille qui fait du cyclisme, comme s'il s'agissait encore d'excuser qu'un homme se montre l'allié intelligent des femmes parce que vous comprenez c'est pour raison familiale -. Marion Rousse et la jeune championne de France, Jade Wiel, défendent calmement leur droit au vélo. 
Ça n'est pas encore ça, vraiment pas, mais on sent, comme pour le football, qu'un virage a enfin eu lieu.

L'homme revient d'une de ses multiples sorties (le club, les courses, une voiture à rentrer au garage ...) en ayant croisé Jérémy. Ils ont échangé quelques mots malgré la pluie, parlé triathlon. Alors que j'étais à deux doigts de renoncer à la séance de piscine très matinale prévue, ce simple fait, savoir que les camarades de club poursuivent leurs entraînements, me redonne courage. Soudain je trouve de l'énergie pour préparer mon sac. J'essaierai d'y aller.

Je consulte l'itinéraire, la fantaisie me prend de laisser l'application RATP itinéraires automatiser le départ d'après ma localisation. Ça donne ceci,  Capture d’écran 2019-07-18 à 21.53.40c'est amusant. 
(La distance est par rapport au bus que je serais censée prendre)

Je m'aperçois soudain que je ne suis plus abonnée au site du Monde : les prélèvements étaient faits par carte bancaire, l'ancienne carte, celle sur laquelle j'avais fait opposition après le vol de mon sac en octobre 2017. Curieux que je ne m'en rende compte qu'à présent et précisément en allant voir un article concernant Camilleri alors que le vol avait eu lieu lors de ma trop grande attention envers les propos de son traducteur. 

 

PS : Grâce au tour de France j'ai appris aujourd'hui l'existence des cagots, ses habitants du sud ouest longtemps considérés comme d'une caste inférieure. Je suppose que cagole vient de là ?

Grâce à Kozlika j'apprends que le terme gaslighting vient du film de George Culor "Gaslight", "Hantise" de son titre français. 

Capture d’écran 2019-07-18 à 23.19.23Une fois de plus je me surprends à avoir connu deux côtés d'une information sans avoir su en faire la jonction ; comme typiquement lorsque mon amie Jeannine me parlait du film dans lequel allait jouer sa nièce, et Tatiana du film tiré de son livre et que j'ai mis des mois avant de piger qu'il s'agissait du même (l'une donnait un titre français, l'autre l'anglais mais quand même, le prénom commun et la concordance de calendrier auraient dû m'alerter). 

Bon alors je me sens bête de n'y avoir pas pensé toute seule et moins bête de le savoir enfin. Merci Kozlika !

(1) Et cette réponse du directeur du tour de France qui restera dans les annales et qui disait en substance Notre travail est d'enregistrer l'abandon, à partir de là, le sort du coureur concerne son équipe (ou : son directeur sportif). Ce qui était probablement vrai du point de vue juridique, mais ne fait pas rêver du point de vue de la déontologie.


Le présent si passé que c'en est étonnant

 

Fullsizeoutput_17e4   En parcourant quelques blogs pendant mon déjeuner (1) je suis tombée sur ce billet chez Nos consolations qui m'a permis de redécouvrir via une video sur Youtube l'un des concerts de Jacques Higelin à Bercy en 1986. 

Il se trouve que je suis allée fin 1985 à l'un des concerts de cette même tournée. J'en garde un souvenir ébloui, celui d'une magie, d'un exercice de funambule musicien, d'une ambiance comme je n'en croyais pas possible dans une si vaste salle. 

Entre temps l'homme jeune et si plein d'indomptable énergie a vieilli, est tombé malade, est mort à un âge de trop tôt mais de vie pour l'essentiel accomplie. Nous-mêmes avons vieilli, même si la retraite s'éloigne. 

Le souvenir de cette soirée reste vif, une sensation de "concert d'il y a tout juste quelques années". Je compte puis recompte sur mes doigts, tellement je n'y crois pas. Ça fera trente-quatre ans à l'automne. 34. 

Et je ne parviens pas à concevoir que ce présent d'hier soit à ce point passé.

 

(1) Je suis toujours en train de mettre à jour ma blogoliste