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C'est l'été !

La météo prévue pour cette semaine qui s'annonce 

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Je fais partie des personnes sensibles (et depuis longtemps) à l'urgence climatique (1), et qui tente de ne pas (trop) aggraver les choses par son comportement quotidien et par des voyages de pur agrément. 

Il n'empêche que je suis incapable de considérer comme un problème ou source d'inquiétude le fait qu'il fasse beau et chaud l'été. 

Je me demande à quel moment on s'est mis à trouver dangereux ce qui était normal : quelques jours de fortes chaleurs l'été ou de grands froids l'hiver. Je parle bien de quelques jours car j'entends bien, par exemple, qu'une canicule prolongée comme en 1976 et qui avait engendré une forte sécheresse pose effectivement un problème. 

Si vous souffrez, vous pouvez peut-être aller au ciné, non sans oublier d'emporter une petite laine : il y a "Parasite" en ce moment qui est un genre de chef d'œuvre, un film marquant dont on se souvient longtemps longtemps longtemps et qui peut ravir à la fois le grand public (une bonne histoire avec des rebondissements), ceux qui aiment qu'au delà du divertissement il y ait une réflexion (le point sur la lutte des classes au XXIème siècle) et les cinéphiles (bon sang, quelle maestria ! montage, angles, scènes impossibles (orage diluvien, mêlées humaines, (rares (mais intenses)) scènes d'action)).

Source de l'image : ce site météo norvégien qui est l'un des plus fiables que je connaisse et que m'avait fait connaître Franck Paul.

(1) Article d'Aude Massiot, équilibré me semble-t-il, sur la question paru dans Libé 


Légère dépression des victoires (ou plutôt : le prix de certaines victoires)

(billet à écrire dès que possible) 

 

Sur la recommendation de mes camarades des Joyeux Pingouins en Famille sur la radio Cause Commune, où pour les livres (et le football) j'officie, j'ai vu le documentaire de Dominique Rouch et Karim Rissoudi sur l'équipe de France de football hommes de 2018 et son chemin jusqu'à la victoire en coupe du monde.  

Il est riche de bien des choses, au point d'être certainement intéressant même pour qui n'apprécie pas ce sport, et comporte entre autre une séquence dans laquelle Adil Rahmi, calme, laisse couler ses larmes en évoquant la peine que sa mère se donnait lorsqu'elle avait dû élever seule quatre enfants.

Il est possible que tout le monde ne puisse pas comprendre, au vu de la réussite exceptionnelle par la suite. Seulement j'y vois la conscience de À combien ça s'est jouée d'un rien, la mesure des efforts inouïs pour arriver au même point (qui peut être très élevé, je ne veux pas dire) que d'autres pour lesquels ça n'était pas à ce point mission impossible, en plus de la reconnaissance pour un parent qui fit de son mieux, malgré l'adversité. 

Dans un autre domaine, puisqu'il n'y a pas de mérite personnel, si ce n'est d'avoir participé individuellement aux prémices lointains d'un mouvement, il y a ces larmes que je ne sais retenir lors des débuts de matchs de la coupe du monde de football actuelle ; je parle de ceux auxquels j'ai pu assister parce qu'ils avaient lieu au parc des Princes et que j'avais acheté des billets : toute l'organisation, tout le cérémoniel. Je suis bouleversée qu'on le fasse enfin aussi pour des femmes. Je n'espérais même pas une telle victoire, lorsqu'à onze ans je voulais simplement pouvoir continuer à jouer au foot et que ça m'était interdit, du moins en équipe officielle, parce que j'étais une fille. Comme le dit Adil Rami dans le documentaire "C'était trop loin dans mes rêves". 

Alors je pleure moi aussi de voir se réaliser un rêve que je ne m'accordais même pas. Légère dépression de nos victoires lorsqu'elles viennent de trop loin.  


Avis divergents (livre)

    Ce matin, j'ai lu ceci : sur l'instagram de Bree La Brèche dont je me permettrai de citer un extrait :

"[...] c'est une lecture qui apaise, à défaut de rassurer. Ça parle de deuil, d'écoféminisme, de science et d'émotion, d'interdépendance, des "autres qu'humains" (coucou Baptise Morizot* et Frans de Waal *). Ça raconte (c'est anecdotique dans le livre mais mon cerveau mouline comme il peut) comment la religion est une forme appauvrie de la spiritualité, ce à quoi j'adhère complètement."

Il s'agit du livre "Une autre fin du monde est possible" de Servigne Stevens et Chapelle

Cet après-midi en cherchant une chronique d'Emmanuel Requette de la librairie Ptyx concernant un autre ouvrage, voilà que je suis tombée sur ceci, avis tout à fait divergent, au sujet du même. Voici sa conclusion : 

"Qu’aujourd’hui des teletubbies du végétal auto-proclamés collapsosophes, sous prétexte que « le réchauffement, la domination, la méchanceté, c’est la faute à la science », s’échinent à saper les fondements mêmes de la raison au profit de ce qu’il nomme le « spirituel », n’est pas sans risque. Après qu’on soit enfin parvenu à établir indiscutablement, grâce à des discours communément partagés que la science parait aujourd’hui être la seule à offrir, les causes d’une situation donnée, mettre aujourd’hui radicalement – et bêtement – en doute les paradigmes de production de ces discours ne pourra, aux yeux des suspicieux enfin convaincus, que discréditer les moyens d’action censés en pallier ou atténuer les désastreuses conséquences. S’il est important d’interroger continuellement ce que l’on fait de la raison, il parait au moins aussi essentiel de continuer à la considérer comme un bien partagé par le plus grand nombre.

Sauf si, évidemment, l’on cherche à se « reconnecter à la part féminine de la Terre-Mère » (et à se faire un paquet de thunes en vendant du bouquin)…"

Comme l'écrirait un mien ami blogueur, on n'est pas rendus. 

PS : Ces deux ami·e·s ayant la lecture subtile, je suis surprise d'un tel écart d'avis, sans savoir si mon goût personnel et mes convictions me porteront vers l'une ou l'autre analyse. Il ne me reste plus qu'à lire le bouquin. 


S'imposer (du foot pour les filles)

 

    À l'occasion de cette coupe du monde qui rend enfin justice au fait que les femmes peuvent jouer au foot aussi bien ou mal que les hommes, en courant juste un peu moins vite et en étant un peu moins brutales globalement, ce qui rend le jeu plus fluide et beau, je lis et j'entends beaucoup parler de filles qui voulaient jouer, par exemple dans la cour de récréation, et que les petits gars rejetaient (1).

De mon expérience personnelle qui date des early seventies du siècle dernier je peux témoigner que jusque vers 13 ans et que les gars nous mettent généralement 15 à 20 cm dans la vue, courent plus vite, sautent plus haut, deviennent plus brutaux ou peuvent être plus tentés par des gestes déplacés, on peut parfaitement faire jeu égal, en compensant par une technique plus fine la pointe de vitesse que l'on possède plus basse.

Je jouais beaucoup avec les copains du quartier. Avec eux zéro tracas : on jouait ensemble depuis nos 5 ans, sur la placette devant les pavillons de nos parents puis plus tard au terrain de foot de la cité, j'avais ma place égale dans la bande, et à part quand ils se battaient, car je n'avais aucun goût pour ça - souvent je ne comprenais pas ce besoin irrépressible qui leur venait de se foutre sur la gueule -, ou quand ils se montraient trop bêtes (2), je partageais leurs jeux, et dans une moindre mesure eux les miens (3). 

Jouer avec un ballon avec les pieds, c'est simple, ça allait de soi. 

Alors c'est certain, j'avais un atout : si dans des équipes qui se formaient pour jouer ailleurs figuraient certains de mes potes, ils disaient Elle joue bien et la question que j'étais une fille était mise de côté. 

Mais il m'est arrivé plus d'une fois de devoir m'imposer. Il est vrai que l'époque se prêtait moins à des formes de harcèlement et d'exclusion d'un groupe que maintenant, vrai aussi que je n'en avais rien à carré que l'on me traite de ou considère comme un garçon manqué, j'ai pigé très très jeune que de toutes façons si l'on veut avoir une belle vie il faut se contre-foutre de ce que racontent les gens, de toutes façons ils trouvent toujours à redire. Je crois que sans l'analyser je percevais la somme infinies d'injonctions contradictoires auxquelles les filles un peu plus que les garçons (mais eux aussi) sont soumises et que j'avais décidé une fois pour toute que pour exister mieux valait faire selon sa propre inclinaison dans les limites du respect d'autrui.

Donc, voilà, filles de maintenant, si vous sentez qu'en pratiquant un peu, le foot vous pourriez aimer, ne laissez pas les garçons vous dissuader. Les premiers temps seront rudes, ils ne vous fileront pas le ballon ça sera à vous d'aller le chercher, donnez du jeu collectif, soyez bien placées pour sauver les ballons, offrir des solutions à un coéquipier, n'ayez pas peur des éventuels chocs on s'en remet, hors des terrains et des jeux organisés passez du temps balle au pied. À partir du moment où vous serez meilleures que les garçons qui jouent sans trop aimer ça, ça sera gagné. Soyez au dessus des insultes et des remarques à la con. Un jour, elles cesseront.

Vous aimez les sports co, courir, taper dans un ballon, il n'y a pas de raison de vous laisser confisquer ce plaisir par les garçons.

(Et si vous n'aimez pas, vous pourrez toujours savourer le fait qu'aucune injonction de genre ne vous oblige à vous y intéresser)

 

(1) Par exemple ici dans cette émission de France Culture. Mais aussi le jeune père triathlète d'une gamine de maintenant. 

(2) Les défis stupides qu'ils aimaient se lancer. J'ai toujours été la résistance à l'effet de groupe incarnée.

(3) Ils se joignaient volontiers à une marelle ou à des jeux de cordes à sauter quand elle était collective et assez physique (celle longue que l'on faisait tourner à deux quand une troisième et parfois une quatrième personne sautait). Bon, on n'avait pas encore inventé le double dutch, c'était déjà le bout du monde d'avoir une seule corde assez longue assez lourde. 


Bonheur persistant du triathlon

 

  19-cordeillan-bages-M-16708  Je n'en reviens pas du chemin parcouru depuis ce beau jour d'octobre 2011, alors qu'avec l'homme de la maison j'étais venue à Bruxelles encourager Pablo qui y courait le marathon, que c'était un week-end magique à tous points de vue, y compris une météo favorable, et qu'à ce moment précis, je m'étais dit à la fois Ça serait bien pour moi un tel défi, et que compte tenu de mon métier de libraire ça serait peu raisonnable, que j'y avais trop besoin de jambes et articulations en bon état pour les rudoyer comme cela. Une coureuse de mon gabarit s'était débarrassée, juste à ma hauteur, d'un tee-shirt qui l'encombrait, c'était marqué "Triathlon". Et en le ramassant je m'étais dit Mais bon sang, c'est ça. 

J'avais repris la natation en 2004, je circulais à nouveau à vélo depuis 2007, grâce aux Vélibs, il me restait à attaquer la course à pied et je pourrais faire du triathlon. Je savais qu'il en existait aux distances humaines. 

Je ne saurais jamais qui était cette dame qui m'a en quelque sorte passé le témoin mais dès lors je n'ai eu de cesse que de réaliser ce qui me semblait devant être fait.

Au printemps 2012, un jour pluvieux normand d'avril, je suis allée au magasin Mi-Temps de La Haye du Puits acheter une paire de chaussures et avec l'homme c'était parti, via une ancienne voie de chemin de fer qui allait vers Lessay. 

Il m'avait fallu deux ou trois mois pour parvenir à trouver ce que j'appellerai mon rythme de souffle, celui qui me permettait de durer longtemps sans être essoufflée. Ensuite les progrès avaient été rapides, c'est l'un des charmes de la course à pied. Assez vite on parvient à 5 km. Puis chaque semaine - en admettant que l'on soit trop pris par le travail et autres contraintes pour courir davantage qu'une seule fois le dimanche - on rajoute  1 km ; un beau jour ce sont les premiers 10 et dès lors des courses sont abordables et l'on se prend au jeu. 

Plus tard on se rend compte que 10 kilomètres, ça n'est rien, juste une petite séance de base. Viennent les trails, pour qui a du plaisir à crapahuter en forêt et se manger du dénivelé, et les semi-marathons. 

Ce qui est formidable avec la course à pied c'est l'absence de matériel - fors une paire de chaussures (1) -, la possibilité de pratiquer presque partout, presque par tous les temps et de se décider en un instant. De pouvoir aussi s'arrêter quand on veut et au pire revenir en marchant.

Une fois rassemblées des compétences minimales (nager 1,5 km par entraînements, courir 10 km sans problème, parcourir 50 km à vélo sans souffrance particulière) et un petit budget (2), j'ai cherché un club. 

Et là, chance inouïe : il en existait un tout près de chez moi et des plus accueillant, ce qui était indispensable : je suis une dame et j'avais alors 53 ans. Il me fallait donc un club particulièrement indulgent. À cause de la frontière qui séparait deux villes, celle du club et celle de mon domicile, pourtant si proche du stade, j'ai dû attendre une année scolaire avant de pouvoir confirmer mon inscription. On était en septembre 2016. Le manque de moyens et le manque de temps (3) avaient intercalés cinq ans entre l'idée et la mise en œuvre, que l'adversité à bien tenté d'enrayer (4), mais j'étais néanmoins lancée, je me suis accrochée aux entraînements du matin, j'ai quand même pu accomplir un premier triathlon en juillet 2016 après un premier essai manqué en juin. 

Depuis, la vie a continué à être mouvementée, je ne le fais pas exprès, mais il n'empêche que même en ne parvenant pas à tenir le niveau d'entraînement qui serait pour moi satisfaisant, j'ai progressé.

Grâce à un stage d'entraînement d'une semaine au printemps, j'ai franchi un (petit) niveau. 

Grâce à un vélo moderne racheté d'occasion à une camarade de club, je peux faire des temps cyclistes décents. Il est si léger.

Et voilà qu'à présent si les conditions sont bonnes (5) je suis capable d'accomplir un M (6) à mon rythme lent mais qui n'est plus hors délai, sans me sentir épuisée à la fin, voire même tellement heureuse que je me sens plutôt bien.

Il m'aura simplement fallu un demi-siècle pour trouver le sport qui me convenait, non que j'y fusse douée, mais c'est celui qui - danse mise à part, qui tient plutôt de l'art de vivre, d'une philosophie - me rend heureuse, me rend en forme, me donne une sensation d'accomplissement inouï.

Au passage, une foule de gestes de la vie quotidienne me sont devenus faciles, quand je devais avant pour les réussir, rassembler auparavant mon énergie : j'attrape des bus, des trains, des métros, je peux en maintenir ouvertes les lourdes portes sur qui suit, je peux ouvrir les portes d'accès vers les corridors à la BNF sans mouvement de bascule pour faire contrepoids, je soulève les cartons en librairie sans problème (à conditions de les porter bien), j'ouvre des couvercles de boîtes de conserves, je grimpe des escaliers sans être essoufflée, je les descends à une vitesse normale (7) et si je souffrais déjà moins du froid avant de m'y mettre, je suis presque devenue résistante à ce qui me rendait très vite amoindrie. 

Puisse ce miracle durer. J'ai tant travaillé pour les autres qu'il me reste encore beaucoup à faire avant d'en avoir fini avec la part plus personnelle de ce qui me semble être dû, compte tenu des aptitudes et des petits handicaps (8) avec lesquel·le·s je suis née. Et je compte exercer mon métier encore un bon paquet d'années.

Grand merci au club du Levallois S C Triathlon, pour l'accueil, les entraînements, les encouragements, l'ambiance qui fait que l'on se sent porté·e·s. quel que soit notre âge et notre niveau. 61803765_10157073810981826_1942372756020527104_n

Grand merci à celles et ceux qui ont rendu l'accès possible pour les femmes à un choix des naissances plutôt qu'aux grossesses subies. Je suis extrêmement consciente que ma condition physique doit beaucoup au fait de n'avoir porté que les deux enfants que leur père et moi nous sentions capables d'accueillir, nourrir et choyer. Mes grand-mères, par exemple, n'avaient pas eu ce choix.

 

(1) Et encore, certains minimalistes courent pieds nus ou quasi. En ville quand même je déconseille : raisons d'hygiène et de morceaux de verre.

(2) Erreur de débutante : il en fallait un plutôt conséquent. Mais je ne regrette pas de ne l'avoir pas su, ça m'aurait freinée. 

(3) Il m'avait fallu retaper mon vieux biclou de courses.

(4) maladie et décès de ma mère entre l'automne 2016 et le début d'année 2017

(5) Je ne garantis pas d'être capable de boucler un triathlon par mer forte, ou avec un ou deux franchissements de cols, ou dans des conditions de pluie, tempête ou froid.

(6) distance olympique : 1500 m de natation, 40 km de vélo, 10 km de course à pied. 

(7) Longtemps j'en fus incapable, comme si j'étais très âgée.

(8) dont une béta-thalassémie mineure ; parents d'enfants atteints ne vous inquiétez pas : on peut mener une vie bien remplie avec ça. Et durer. Et s'améliorer. 

crédits photos : le photographe officiel du Frenchman et pour la seconde un ami du club