Les infos perlées
29 mars 2018
C'était déjà le cas dès lors que ma mère était tombée malade et que mon temps ne m'appartenait pas, même hors du travail : je ne suivais plus les infos que par morceaux, de façon lacunaire, essentiellement via les réseaux sociaux et la radio mais seulement à certaines heures : France Culture le matin et les flashs sur FIP quand aux librairies où je travaillais il se trouvait qu'il n'y avait ni clients ni coups de fil au 50 minutes d'une heure donnée (1).
Ces derniers temps, sans doute à cause du déménagement des affaires de mes parents et tout le travail préalable et au fait que mon travail à et pour la librairie est très prenant - entre autre de belles plages de lectures quand je suis à la BNF ou chez moi, pour préparer les rencontres, et je me coupe bien du monde dans ces moments-là -, au fait aussi que la maison de Normandie est sans l'internet et que je me suis fait voler mes lunettes fin octobre sans les avoir encore réellement remplacées - j'utilise des lentilles progressives, formidables, mais ne les porte pas sans arrêt -, ce qui fait que lire sur l'écran de mon téléfonino est un peu hasardeux (2), c'est devenu particulièrement flagrant.
Et bizarre : par moment une info m'arrive pratiquement en temps réel. Et puis une autre, parce qu'elle s'est glissée alors que j'étais concentrée sur toute autre chose et qu'elle n'a pas eu tant de relais me passe totalement inaperçue. Ou alors je l'apprends par ses conséquences.
Ainsi du crime écœurant commis sur une octogénaire à Paris parce qu'elle était d'origine juive, je n'ai eu vent que par le touite d'une amie qui s'apprêtait à se rendre à un hommage. Et j'avoue dans un premier temps n'avoir pas compris, avoir cru (naïve) qu'il s'agissait de quelqu'un que l'amie admirait - un peu comme j'étais allée à la cérémonie pour Lucie Aubrac -, et j'ai eu le temps de me dire, qui était-ce qu'elle admire ainsi et que je ne connais pas, avant de mesurer, et mon erreur et l'horreur.
De la prise d'otage à caractère terroriste de Trèbes, je n'ai eu que le fait qu'il se passait un truc dans un supermarché, vers Carcassonne, et compris seulement au soir l'ampleur et là aussi l'horreur de cette tuerie.
J'ai découvert seulement ce soir que Philip Kerr était mort, alors que ça concerne mon métier - bizarre d'ailleurs que si peu de retentissement côté pro -.
Pour autant pour d'autres choses, il se peut que j'en sois au courant dans l'instant, si par exemple je consulte Twitter pendant un trajet en transports et que ça tombe sur les téléscripteurs ou leur descendance en ce moment précis.
Je me sens donc en même temps toujours autant en prise avec mon époque et à la fois pas du tout, décalée, déphasée, en parfaite inconscience de certains événements. Pour un peu ça me renverrait au temps où les informations ne parvenaient qu'au compte-gouttes jusqu'à la plupart des gens : journaux du matin ou du soir, informations à certaines heures précises sur les quelques radios officielles, journaux télévisés deux fois par jour au maximum pour qui cherchait à les regarder (3). Et je suis impressionnée de mesurer à quel point notre rapport à l'information, à intérêt constant - je cherche à savoir ce qui se passe, à me tenir correctement informée, je ne tiens pas nécessairement à tout savoir au plus vite dans tous les domaines tout le temps - a changé.
(1) Ce qui est assez rare en fait : si on voit une seule personne sur une heure donnée, elle passera à moins dix. ;-)
(2) En même temps ça me permet d'inventer des news en mode Professeur Tryphon, ce qui est parfois drôle.
(3) Et donc à être devant son poste allumé à l'heure dite, car les magnétoscopes n'étaient pas encore d'un usage répandu.