J'ai eu la chance de pouvoir assister à la master class littéraire dont l'invitée était Hélène Cixous. Le petit auditorium de la BNF débordait. Comme j'étais arrivée juste à l'heure j'ai fait partie de ceux qui furent dans une salle voisine. J'ai pris des notes n'importe comment. Je les laisse en vrac, je trouve que c'est beau.
C'est plus particulièrement en pensant @samantdi et son Jules que je les publie.
Lire c'est écrire.
(Hamlet) Cet état d'âme c'est le nôtre. Nous le public les amis de Hamlet nous savons que ce duel le conduit à sa mort. We defy augury
Vivre c'est défier l'augure. En Anglais se glisse un impératif : Vous voulez vivre ? Défiez l'augure
Quand on produit du texte, quand on tisse on utilise l'écriture principale. Une sorte d'analogie avec les arts voisins. Chez moi les pinceaux c'est pas propre, c'est un désordre généralisé.
Une très grande quantité de différents papiers de différentes dimension.
Les pinceaux écrivants.
Sur une seule page dix graphies différentes en fonction de l'affect qui passe. Le poids de chaque mot est modifié à tout instant.
Vous aimez les animaux, vous aimez les oiseaux.
Ce sont les sages.
Je suis en apprentissage tout le temps. Les chats me font rire. Elles sont très télégraphiques. Envoient des messages tout le temps. Leur rapport à l'autre est apaisant, comme un prêche de bonne vie.
J'ai eu une période naguère qui était très musique. Mais j'avais l'impression de tricher, de piquer à la musique sont énergie.
Ce dont j'ai besoin et que je n'ai pas à Paris ce sont les vents. J'ai dans le Sud Ouest une maison d'écriture qui est une maison de vents. La pluie qui provient des arbres lorsque le vent en joue.
Je dirais oui pour être honnête mais il ne faut pas s'y tromper. Je suis en état d'écriture en permanence mais poser sur le papier n'est pas toujours. On ne peut pas le mesurer, on ne peut pas le prévoir.
Pour le même livre, 59 jours ou 59 ans. C'est une forme d'être au monde.
Le poète de poème il passe dans la rue et le poème passe.
Dérida : Je posthume comme je respire.
J'écris comme je respire. Je ne vis pas avec du papier. Même si je suis toujours provisionnée. Même à la plage. Je ne pose mon carnet que lorsque je vais me baigner. Cueillir. Chasser.
Un secret sans secret, en rêves dans cet univers inouï. Un trésor qui m'est prêté, parce qu'il est très incertain. Ce sont des mines et c'est l'art suprême. Je retiens mes rêves. Par les franges. Quelques germes de rêves.
J'écris en pleine nuit. Ça donne des choses extrêmement bizarres. Parfois j'écris un rêve sur un autre car je n'ai pas retourné mon papier. Les chats se transforment en sphynx solidaires. Elles m'accordent la demi-heure qu'il me faut pour rédiger un rêve qui est encore palpitant. Je suis humblement dépassée par la puissance incommensurable d'un rêve.
Quand j'ai commencé à dérailler j'étais voleuse : tout était fait et mille fois mieux que je ne l'aurais fait. Je lui volais un rêve et je le glissais dans mes publications.
Pour moi c'est un acte pas une profession [écrire].
Je n'osais pas dire qu'il y avait eu rapine. Il faudrait que je signe "Rêve". Écrire en collaboration avec mes voix.
Je pense une chose et puis Shakespeare me dit Hé je l'ai déjà dit. Et puis Montaigne Et ça ...
Q : Le livre d'abord vu avant d'être écrit.
Il m'est arrivé de voir un livre en rêve. C'était vraiment soulagée. C'est quand même un effort d'écrire un livre pendant les 59 jours j'écris à marche forcée ça épuise toutes les ressources.
Je me réveille. Et puis après il faut que je l'écrive.
J'essayais de rester dans mes quatre pages et puis après une page fait éclosion.
Quantités d'idées, un cahier près de micro livres
Je ne sais pas quel livre va venir vers moi. Je sais qu'un livre va venir vers moi. Je me fie à.
C'était des archives particulières des nids souterrains. Je crois à la magie. Le problème c'est que le livre est très rapide. Moi aussi. Mais moins que lui.
Ensuite il me mène, avec tous les moyens de transports.
Très souvent et aussi chez les morts. Je ne suis pas la seule. Homère était là avant moi.
J'écris d'un trait ; qui est divisé en 50. D'une traite comme si j'étais à cheval depuis 6h du matin jusqu'à 15h. Mais finalement il y a trois pages. Or ces trois pages je n'ai pas arrêté de les écrire. Moi j'obéis, je suis le scribe. Ça rejoint un petit peu la condensation poétique. Je ne peux pas écrire si je ne suis pas en pleine forme.
Vous avez dû voir des oisillons. Ils mettent trois semaines pour atteindre leurs ailes. Plumes à plumes. Les livres c'est pareil.
Je regarde et je me dis : Ah c'est la dernière page.
Quand je me relis il m'arrive d'alléger mais en cours de route j'ai déjà allégé.
Parfois des pages je me dis Là tu t'es arrêtée pour te faire une tasse de thé et j'enlève.
Liberté. Jouer [avec la langue]
Au fur et à mesure que l'on a scolarisé la langue, des règles d'inhibition.
Ça s'impose lorsque c'est harmonieux. Ça n'est pas discordant.
Le français une langue etcoetérante . Le français est totalement impur, dieu soit loué.
Joyce a écrit en une seule langue faite de 18 langues (Finnegan's ...)
Des langues qui vont faire ami. Qui vont muter. Qui vont colorer. La traduction est un peu plus loin en train de se lever.
La vie est S.
Tous les bienfaits de ces molécules merveilleuses (des différentes langues)
La nuit des rois. Nous mêmes ne nous possédons pas nous-mêmes.
I do I know not what.
Le tournant a été pris il y a très longtemps, je crois que c'était en 94. Quand on écrit en invitant.
Je te prends je te mets dans mon livre. On est un peu anthropophage.
Les gens dont je pouvais disposer parce qu'ils étaient morts.
Je me suis retournée et je me suis dit Toute mon œuvre est à mon père. Puis j'ai pensé à ma mère. Alors que je lui dois mille vies et que de rires !
Chaque fois que quelque chose m'est impossible qu'un grand drapeau rouge est devant pour y aller, je me dis il faut y aller. C'est une règle en écriture.
Ça a été mon premier Osnabruck.
Un geste d'un grand amour et d'une grande violence.
Ma grand-mère maternelle est partie en novembre 38.
Chaque année je me disais L'an prochain à Osnabruck
La rescousse est là. (Livre 2016 avec Cécile Wasjbrot)
Je me suis fiée quand même à son invitation (Mnouchkine) Drapeau rouge, donc il faut y aller [début des années 80]. Va en Asie et écris.
Tu m'as fait un village, nous on est grand, on est un royaume.
Je suis allée d'impossible en impossible.
Au départ, j'étais côté Chamber music. Avec le théâtre, 50 personnages. Des scènes avec 50, 5 par 5 .
L'écriture de théâtre a des temporalités radicalement différentes de celles de fiction. Il faut que tout se comprenne instantanément. Le signal est d'une impatience totale.
J'ai mis mon oreille sur le poitrine. J'ai écouté les battements de leur cœur.
J'ai su que j'étais de toutes façons le sujet de la troupe. Une aventure d'imagination inouïe.
Quand j'étais en Patagonie, je me glissais sur la banquise avec ma mère.
Et en même temps c'est absolument exaltant parce que c'est un mariage avec le public [écriture pour le théâtre].
Mon lecteur va arriver comme pour Stendhal dans 60 ans.
[se mouiller le doigt pour tourner la page ; geste qui revient]
Écrire : quelque chose qui va avec l'instant miraculeux de la création.
Parfois désastre.
Des sensations extrêmement fortes.
En lisant, des joies extrêmes, plutôt sur des phrases seules.
Stendhal : La vie de Henry Brulard
Dans ces cas-là écrire et lire se touchent pour moi, là il y a contact et frrt il y a une flamme qui part.
On devrait fabriquer le verbe éclire.
Il a fallu une belle révolution pour que ça puisse apparaître et qu'elle soit jeune et artistique [Vincennes]. Les mathématiques c'est un art.
En ce moment on est plutôt à marée basse mais je n'exclus pas la possibilité d'une apparition.
68 c'est simplement le moment où l'orage éclate mais il se préparait depuis un moment.
Parce que les vieux en général ils en ont marre ils sont assis.
En attendant qu'est-ce qu'on fait : on se bouge à petite échelle. Comme le théâtre du soleil. Créer des troupes, des cercles illuminés.
La dominante c'est quand même la jeunesse parce quand on est vieux au théâtre du soleil on est jeune.
68 c'était un mouvement de jeunes hommes. L'idéal de Vincennes qui était une pure merveille. Une collection extraordinaire qui devait s'appeler le Féminin Futur
Comme je disais tout à l'heure il a intérêt à être en bon état [mon corps] [pendant l'écriture]. J'ai l'air d'être immobile mais je n'arrête pas de courir, de grimper, de nager.
L'économie d'un Balzac ou d'un Stendhal, écrire vite et beaucoup. 9h de rang, sans s'arrêter sauf pour boire (expérience d'avoir eu des effets secondaire pour l'avoir oublié)
Est-ce devenu un livre émancipateur. Je ne considère pas du tout Simone de Beauvoir comme une féministe. À la demande de Catherine Clément, Le rire de la méduse.
Un très beau texte de Proust sur la méduse qui décrit les asperges qui sont des couleurs de méduses.
Le type américain ne me convenait pas c'était un féminisme assez fruste.
Je n'avais pas pensé que ce texte allait devenir ma persécutrice préférée.
La dernière en date étant le Féroé [toutes les traductions]
À un moment j'en ai eu marre, elle était toujours là. Voilà où en sont les femmes, là.
Je pense que ça m'arrivera quand je serai sur le point de mourrir c'est certain [la fin de l'écriture]. C'est tellement organique chez moi.