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MPdPEP (Méga Problème de Pas Encore Privilégiée)

L'appellation de départ est d'origine @tellinestory controlée 

 

Détenir une maison "de campagne" alors qu'on est d'invétérés citadins c'est découvrir un peu chaque mois de nouveaux impôts. Ainsi cet "assainissement" dont nous ignorions l'existence et qui se rappelle à notre bon souvenir. N'empêche que tu te dis j'ai payé l'eau, le gaz, l'électricité, tutto bene et bim voilà l'assainissement. 
Globalement je reste impressionnée par le nombre de choses à payer. J'ai l'impression (fausse, j'en suis consciente) d'un fourmillement de factures. 

C'est apprendre aussi qu'il n'y a pas de service d'enlèvement des encombrants, chacun étant supposé disposer d'un tracteur et d'une remorque, I presume. C'est intéressant cette histoire d'encombrants aka monstres : 

À Paris tu appelles un service qui te donne un numéro que tu fixes sur les objets que tu déposes sur le trottoir et un service ad-hoc passe dans la demi-journée.
À Clichy c'est un soir par semaine. Tu déposes ton bazar et au matin plus rien (soit qu'il ait intéressé des récupérateurs en maraude soit que le camion du service officiel l'ait embarqué à l'aube)
Dans le Val d'Oise il y a un calendrier avec un passage une fois par mois et le droit de déposer la veille des objets, mais à la condition expresse que ça soit des encombrants qui n'encombrent pas trop.
Dans la Manche, tu as juste le droit d'apporter toi-même tes gros meubles ou objets périmés à la déchetterie, mon interlocutrice a eu du mal à comprendre ma question tellement un passage collectif organisé n'entrait pas dans ses habitudes. 

Je me suis inscrite sur donons.org afin de distribuer les meubles que nous ne pouvons pas garder. J'espère que ça fonctionnera. Ça va être une course contre la montre, malgré tout le travail que j'ai entrepris depuis mars dernier et que la maison était fort bien rangée - moins, le grenier -.

Ça n'est pas une surprise mais je m'aperçois que ce dont je ne sais me séparer ce sont les meubles faits maison (mon père était un bricoleur averti), ou aménagés maison, tout ce qui comporte des traces écrites de la main des défunts, et les objets qui ont une histoire - par exemple ce lustre que je ne trouve pas beau mais dont j'ai le souvenir précis de l'achat en Italie et qui venait d'un oncle par alliance qui les vendait ; je me souviens du dialogue des grands qui marchandaient, je me souviens que je comprenais ce qui se tramait -. 

Quand toute cette onde de choc sera absorbée, et les meubles et les objets casés, je me consacrerai à notre appartement qui n'en peut plus d'absorber les flux successifs d'affaires liées aux fins d'emplois et fins de vies. Et il faudra que je règle mon problème de livres. Ils sont beaucoup trop nombreux pour le volume de l'appartement. Un nombre important me tiennent à cœur. Mais certains n'étaient que des lectures d'un temps donné, il n'y a pas de raisons particulières de les conserver. 

 

 


Pendant ce temps dans le vaste monde

 

    Aujourd'hui à la librairie, c'était comptabilité (en plus du travail habituel) et comme c'est ma première année là où je suis désormais, c'était instructif, des tâches que j'accomplissais en observant les consignes de l'amie qui m'avait précédée sont désormais pourvues d'une logique, d'une cohérence. Du coup sur l'élan je suis parvenue une fois rentrée à dépoter quelques tâches administratives domestiques ou de succession. 

Et aussi à lire un peu d'articles, d'informations. 

Ça faisait longtemps que je parvenais tout juste à grapiller trois sujets le matin avant de partir, ou une fois par semaine dans Le Canard. J'avais besoin de voir ce qui en dehors des sujets évoqués dans les flash d'infos se passait / s'était passé et puis un trou de mémoire à combler pour mon ami Jacques.

Il s'agissait d'un souvenir de livre ou film dans lequel un père alors que son fils arrivait à l'âge adulte lui présentait la note de tout ce qu'il avait coûté. C'était particulièrement agaçant comme oubli, je sentais que j'étais à deux doigts de le retrouver précisément, mais ça ne revenait pas. Grâce aux camarades twittons et une amie sur l'autre chaîne, le voile de brume s'est enfin déchiré : il s'agissait d'"Alberto Express" un film italien de 1990. Mais au passage j'ai appris pas mal de scènes semblables ailleurs. Merci à toutes celles et tous ceux qui m'ont appris des choses que j'ignorais. 
Le hic ultérieur c'est que j'ai découvert plusieurs cas de vraies présentations de la note (un amant éconduit, des parents qui avaient prêté la vie plutôt que la donner.  Je reste stupéfaite et navrée (on serait en Allemand, je produirais un mot-valise autrement efficace, Traurigerstaunt ?) de constater que ce dont j'avais un souvenir de comédie pataude très exagérée fût un comportement possible. Quelqu'un se souvenait d'ailleurs d'une pièce de théâtre inspirée d'un fait réel.

J'ai (re?) découvert qu'en février dernier des douaniers français zélés avaient refoulé et interdit de transfert un skieur vénézuélien qui transitait par Paris pour s'en aller participer à une compétition en Suède. Leur soupçon avait empêché le garçon de pouvoir s'entraîner pendant un mois sur de la vraie neige et au moment de la compétition à laquelle il avait pu in extremis se rendre, ça s'était un peu vu. S'il était riche il pourrait peut-être se retourner contre l'état français et demander des dommages et intérêts.

Une autre affaire de prédateur sexuel avait précédé de peu la déferlante Harvey W. Il me semble que j'avais déjà lu quelques choses lorsque le silence avait commencé à se détricoter. Entre temps le procès avait eu lieu et l'homme, un médecin du sport de haut niveau aux états de service merveilleux, a été lourdement condamné. Ce qu'un article m'a appris ce soir c'est que deux jeunes femmes au moins avaient su parler sans attendre et dénoncer les faits, mais elles n'avaient pas été écoutées. D'autres s'étaient confiées mais des adultes tiers avaient dans un bel ensemble couvert les pratiques plus que douteuses du médecin. Enfin d'autres avaient pensé que quoi qu'elles fassent on ne tiendrait pas compte de ce qu'elles disaient. Désormais non seulement elles doivent se dépêtrer de ce qu'elles ont subi mais connaître les affres d'un sentiment de culpabilité pour n'avoir pas assez fait pour que d'autres après elles soient épargnées. Ce qui est édifiant c'est l'impunité et le sentiment visiblement de l'avoir crue éternelle. Et que ce qui fait que ça fonctionne c'est que la plupart des victimes croit son cas isolé. Je crois que le capitalisme triomphal qui est celui de notre temps joue aussi un rôle : l'esprit de concurrence règne, alors les femmes se taisent de peur de perdre qui son travail, qui sa sélection. Si les valeurs qui primaient étaient d'organisations collectives et de solidarité ça ne serait pas si facile pour les prédateurs de réduire leurs victimes au silence.
Enfin il y a ce phénomène de l'impunité que donne une notoriété : c'est impressionnant. 

(Et soudain je pense à Simone de Beauvoir, Sartre et Bianca Lamblin ; faut-il inévitablement que chaque être humain ait sa part d'ombre aussi profonde que sa part de gloire est grande ? Faut-il mieux, s'il n'y a pas de grave danger pour d'autres proies ultérieures se taire pour laisser les œuvres irremplaçables exister ?) 

 


"Et la parole des femmes [...]"

 

    Bel article de Zyneb Dryef dans Le Monde et qui fait le point sur ce qui aura marqué la fin de l'année 2017, 

Et la parole des femmes se libéra

Je crois que si plus tard je retiens une chose et une seule de l'automne 2017, à raconter plus tard à mes arrières-petits enfants (1), ça sera celle-là, la libération de la parole des femmes, qui n'en pouvaient plus de subir toutes sortes de conduites de pesantes à violentes et de fermer leur gueule soit par peur des conséquences, soit en pensant que c'était ainsi, et souvent en croyant subir une sale conduite isolée. 

Ce qui ne laisse pas de me surprendre, c'est à quel point alors que je suis moi-même une femme, et pas née de la dernière pluie, et ayant aussi subi quelques effets de mauvaises conduites masculines - pas même forcément consciente de leur part, sorte de En toute bonne foi du colonisateur -, j'ai été justement surprise par l'ampleur du déferlement. 

Je crois que de n'être pas sexy, d'être sportive et vêtue le plus souvent à l'avenant, et d'être assez imperméable à la peur, celle qui fait qu'un début d'incident déplaisant peut soudain dégénérer et faire de nous une proie de choix, et prête à coller un bourre-pif à qui m'emmerde, quitte à me prendre un pain en retour mais au moins j'aurais essayé, m'a tenue à l'abri de bien des vicissitudes, jusqu'à l'âge auquel les hommes (hétérosexuels) nous mettent au garage même si nos corps ressemblent encore à ce qu'ils étaient. Je crois aussi que je me suis toujours sentie suffisamment libre pour ne pas me formaliser de certaines tentatives de drague un peu lourdes, dès lors que le gars ne devenait pas menaçant ni agressif devant ma réponse qui disait non, la Bécassine Béate en moi c'est toujours dit dans ces cas-là, Pauvre type comme il doit être seul pour tenter le coup jusqu'à une femme comme moi. Dès lors je n'ai pas perçu le peu que j'ai subi comme des agressions mais comme des moments tristes pour ceux qui ne se comportaient pas d'une façon élégante. Plus d'une fois des approches de drague de rue se sont transformées en conversations : des hommes seuls qui avaient besoin de parler et déjà heureux, et redevenus respectueux du fait que j'aie su écouter sans trop me formaliser de leur tentative déplacée.

Il n'empêche que je n'imaginais pas combien de mes consœurs avaient subi de saloperies et de coups et s'étaient senties ou se sentaient meurtries. Je crois que mon état d'esprit rejoint celui des hommes respectueux - il y en a -, atterré par ce qui fait le quotidien des autres, par l'ampleur des dégâts.

Je me méfie du retour de balancier, mais j'ai l'impression ou du moins l'espoir que puisque le courage a changé de camps : il est désormais du côté de celles qui osent parler et ne plus s'écraser, les choses s'arrangent vraiment et qu'un ré-équilibrage respectueux ait enfin lieu. 

 

 

(1) Comme Alice du fromage je pense que je tiens ce blog pour des lecteurs du futur qui le liront avec le même intérêt amusé (2) sur l'ancien temps que j'avais eu jeune femme à lire le journal de ce sacripant de Samuel Pepys, lequel aurait sans doute justement de nos jours des ennuis.

 (2) du moins je l'espère pour eux, et qu'il n'y aura pas eu deux ou trois apocalypses entre temps.


Naturalisé

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Dans un dossier sur lequel ma mère avait écrit "Papiers (à distance, rigolos)" j'ai donc retrouvé une ancienne carte d'étudiant de mon père dont les photos d'enfance et de jeunesse sont rares, deux télégrammes, celui annonçant la naissance de ma cousine Annalisa dont j'ignore le devenir, "tutto bene" disait le télégramme alors qu'en fait pas tant que ça, celui annonçant la mort de ma Nonna, des lettres d'elle pleines d'affection et de mots tendres aussi pour moi (ça alors ?), elle dont je me souviens peu, nous ne nous voyions qu'une fois quelques jours par an, et le dossier de naturalisation de mon père.

 

Je crois qu'il avait entrepris la démarche parce qu'il se sentait français - arrivé dans ce pays à 20 ans -, qu'il avait des opinions politiques et voulait voter, qu'il voulait que les choses soient simples pour nous, qu'il en avait sans doute marre des démarches de renouvellement de cartes de séjours, que quelqu'un de bien informé l'avait sans doute averti que les choses allaient se compliquer pour la circulation des étrangers (1), et qu'enfin il en avait marre qu'à la frontière lorsque nous allions en Italie l'été notre voiture soit systématiquement fouillée quand presque aucune autre ne l'était.

J'avais 8 ans lorsqu'il a entrepris les premières démarches et presque 10 lorsqu'il a obtenu gain de cause. Les documents qui attestent des différentes étapes m'ont émue. Il y a même un certificat de scolarité me concernant, des papiers attestant qu'il a un travail bien stable dans l'industrie (automobile), des certificats de nationalité française pour ma mère ma sœur et moi ; celui de ma mère est particulièrement impressionnant, qui dit qu'elle n'a pas perdu sa nationalité française qu'elle avait d'être "née en France qu'un père qui y est également né" [et la mère, elle compte pour de la déco ?] car "EN EFFET (2) il n'a été trouvé aucune trace d'une déclaration au nom de l'intéressée , en vue d'acquérir la nationalité étrangère de son mari". La dernière péripétie concerna les droits de sceau dont visiblement mon père ignorait l'existence et qui représentaient une somme importante pour l'époque (un peu plus de 400 FRF). Il avait tenté d'obtenir une remise, en vain.
Mes souvenirs d'enfant concernaient des difficultés,, bouffées de colère et d'abattement, dont les causes me restaient mystérieuses (3) ; j'en ai peut-être conçu cette difficulté des documents et démarches administratives qui est la mienne depuis l'âge de devoir m'en occuper par moi-même. 

Jamais je n'oublierai, sauf maladie, ce que mes parents ont dû vaincre de complications et tracasseries pour pouvoir tenter de s'aimer, du simple fait qu'ils n'étaient pas nés sur cette planète dans le même quartier.

 

(1) Il me semble que c'est au début des années 70 que les hommes n'ont plus pu circuler à leur guise entre leur pays de naissance et leur pays de travail, ce qui rendit vite nécessaire les mesures de regroupement familial, ce qui fit qu'au bout du compte ceux qui voulaient moins d'étrangers ce sont retrouvé avec l'effet inverse de ce qu'ils avaient tenté d'imposer. Peut-être que mon père avait eu vent de ce qui se tramait. 

(2) Les majuscules sont d'origine

(3) C'était un temps où l'on n'expliquait pas aux enfants. D'ailleurs j'ai enfin découvert la nature d'une opération subie par mon père alors que j'avais 10 ans. Qui comme ils me l'avaient dit était effectivement pas grave, mais bon sang comme leur refus de me dire m'avait inquiétée - S'ils ne veulent pas me dire, c'est que c'est grave -. 


Gâtée

 

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Ça fait long de Noël qu'on ne peut fêter vraiment, avec de l'allégresse et autour d'une table, sans doute depuis 2004 en fait. Et puis on est tous devenus un peu des militants de la non-surconsommation, sauf l'homme qui l'est par suite d'un léger souci dans son rapport à l'argent qui au bout du compte revient au même.

Nous nous sommes rendus compte qu'à part l'hôpital d'Ermont et pour moi le beaucoup de boulot (dans une belle énergie, les clients étaient gentils) de Noël en librairie, et le grave problème que posait l'hospitalisation à domicile de ma mère à mettre en place l'an passé à même période, nous n'avions pas de vrais souvenirs de Noël dernier. 

On s'est cette année échangé quelques cadeaux dans la cuisine encombrée à l'issu d'un petit dîner de type dimanche soir amélioré - pas ou si peu de temps personnel, quand ranger ? -. Et j'ai été gâtée. L'Homme a entendu un souhait qu'en novembre (ou début décembre) j'émettais.

J'ai l'impression que quelque chose se recoud du passé ; et aussi que m'attend un délicieux rattrapage de chansons que les problèmes de respiration de l'artiste vieillissante m'avaient empêchées de savourer (1).

 

(1) J'ai un effet miroir avec tout ce qui touche à ça. Je ne peux par exemple regarder de natation synchronisée. Et tout ce qui comporte des respirations haletantes me fait un effet de malaise. En revanche sur d'autres choses, effet miroir total zéro alors que tout le monde y semble sensible. 


En plein syndrome du diariste

 

 
DSC00409  Les deux semaines qui s'achèvent ont été de ouf comme ne disent déjà plus les jeunes. 

J'aurais tant à vouloir noter. Des retrouvailles, même brèves, ça fait plaisir, une disparition annoncée qui me fait de la peine - mais le fait qu'on me l'ait annoncé m'a beaucoup réconfortée -, des moments d'inquiétude sur divers sujets, des joies, un soulagement sur un point précis, plus le soulagement particulier d'avoir à nouveau des papiers d'identité, une nouvelle qui me peine et m'inquiète, concernant quelqu'un que je vois peu mais qui compte beaucoup pour moi. 

Mais bien sûr, c'est là qu'on a trop pas le temps pour noter, précisément. Et le boulot, intense, comme chaque année en cette période depuis que je suis libraire, a ce double étrange effet : d'épuiser et de stimuler. À me décarcasser pour autrui, j'en oublie mes tracas, ce qui donne une forme de force.

Pour l'instant j'ai l'illusion de pouvoir enfin retrouver un "rythme soutenu normal" de vie après la vente conclue du pavillon de mes parents et le déménagement vers la Normandie des meubles et des affaires personnelles. Alors je tiens comme quelqu'un qui se dit Allez, une dernière bosse et cette course ça sera fini. Et je m'entraîne en chemin. 

Puisse tout ceci fonctionner, et la fin de l'année 2017/2018 être d'un calme relatif, de bonne sérénité. 


Notes en vrac : Master Class BNF - Hélène Cixous

J'ai eu la chance de pouvoir assister à la master class littéraire dont l'invitée était Hélène Cixous.  Le petit auditorium de la BNF débordait. Comme j'étais arrivée juste à l'heure j'ai fait partie de ceux qui furent dans une salle voisine. J'ai pris des notes n'importe comment. Je les laisse en vrac, je trouve que c'est beau.

C'est plus particulièrement en pensant  @samantdi et son Jules que je les publie.

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Lire c'est écrire.

(Hamlet) Cet état d'âme c'est le nôtre. Nous le public les amis de Hamlet nous savons que ce duel le conduit à sa mort. We defy augury 

Vivre c'est défier l'augure. En Anglais se glisse un impératif : Vous voulez vivre ? Défiez l'augure

Quand on produit du texte, quand on tisse on utilise l'écriture principale. Une sorte d'analogie avec les arts voisins. Chez moi les pinceaux c'est pas propre, c'est un désordre généralisé.
Une très grande quantité de différents papiers de différentes dimension.

Les pinceaux écrivants.
Sur une seule page dix graphies différentes en fonction de l'affect qui passe. Le poids de chaque mot est modifié à tout instant.

Vous aimez les animaux, vous aimez les oiseaux.

Ce sont les sages.

Je suis en apprentissage tout le temps. Les chats me font rire. Elles sont très télégraphiques. Envoient des messages tout le temps. Leur rapport à l'autre est apaisant, comme un prêche de bonne vie.

J'ai eu une période naguère qui était très musique. Mais j'avais l'impression de tricher, de piquer à la musique sont énergie.

Ce dont j'ai besoin et que je n'ai pas à Paris ce sont les vents. J'ai dans le Sud Ouest une maison d'écriture qui est une maison de vents. La pluie qui provient des arbres lorsque le vent en joue.

Je dirais oui pour être honnête mais il ne faut pas s'y tromper. Je suis en état d'écriture en permanence mais poser sur le papier n'est pas toujours. On ne peut pas le mesurer, on ne peut pas le prévoir. 

Pour le même livre, 59 jours ou 59 ans. C'est une forme d'être au monde.

Le poète de poème il passe dans la rue et le poème passe.

Dérida : Je posthume comme je respire.

J'écris comme je respire. Je ne vis pas avec du papier. Même si je suis toujours provisionnée. Même à la plage. Je ne pose mon carnet que lorsque je vais me baigner. Cueillir. Chasser.

Un secret sans secret, en rêves dans cet univers inouï. Un trésor qui m'est prêté, parce qu'il est très incertain. Ce sont des mines et c'est l'art suprême. Je retiens mes rêves. Par les franges. Quelques germes de rêves. 

J'écris en pleine nuit. Ça donne des choses extrêmement bizarres. Parfois j'écris un rêve sur un autre car je n'ai pas retourné mon papier. Les chats se transforment en sphynx solidaires. Elles m'accordent la demi-heure qu'il me faut pour rédiger un rêve qui est encore palpitant. Je suis humblement dépassée par la puissance incommensurable d'un rêve.

Quand j'ai commencé à dérailler j'étais voleuse : tout était fait et mille fois mieux que je ne l'aurais fait. Je lui volais un rêve et je le glissais dans mes publications.  

Pour moi c'est un acte pas une profession [écrire].

Je n'osais pas dire qu'il y avait eu rapine. Il faudrait que je signe "Rêve". Écrire en collaboration avec mes voix.

Je pense une chose et puis Shakespeare me dit Hé je l'ai déjà dit. Et puis Montaigne Et ça ...

Q : Le livre d'abord vu avant d'être écrit.

Il m'est arrivé de voir un livre en rêve. C'était vraiment soulagée. C'est quand même un effort d'écrire un livre pendant les 59 jours j'écris à marche forcée ça épuise toutes les ressources. 

Je me réveille. Et puis après il faut que je l'écrive. 

J'essayais de rester dans mes quatre pages et puis après une page fait éclosion.

Quantités d'idées, un cahier près de micro livres 

Je ne sais pas quel livre va venir vers moi. Je sais qu'un livre va venir vers moi. Je me fie à.

C'était des archives particulières des nids souterrains. Je crois à la magie. Le problème c'est que le livre est très rapide. Moi aussi. Mais moins que lui.
Ensuite il me mène, avec tous les moyens de transports.

Très souvent et aussi chez les morts. Je ne suis pas la seule. Homère était là avant moi.

J'écris d'un trait ; qui est divisé en 50. D'une traite comme si j'étais à cheval depuis 6h du matin jusqu'à 15h. Mais finalement il y a trois pages. Or ces trois pages je n'ai pas arrêté de les écrire. Moi j'obéis, je suis le scribe. Ça rejoint un petit peu la condensation poétique. Je ne peux pas écrire si je ne suis pas en pleine forme. 
Vous avez dû voir des oisillons. Ils mettent trois semaines pour atteindre leurs ailes. Plumes à plumes. Les livres c'est pareil.
Je regarde et je me dis : Ah c'est la dernière page.

Quand je me relis il m'arrive d'alléger mais en cours de route j'ai déjà allégé.

Parfois des pages je me dis Là tu t'es arrêtée pour te faire une tasse de thé et j'enlève.  

Liberté. Jouer [avec la langue]

Au fur et à mesure que l'on a scolarisé la langue, des règles d'inhibition. 

Ça s'impose lorsque c'est harmonieux. Ça n'est pas discordant. 

Le français une langue etcoetérante . Le français est totalement impur, dieu soit loué.

Joyce a écrit en une seule langue faite de 18 langues (Finnegan's ...)

Des langues qui vont faire ami. Qui vont muter. Qui vont colorer. La traduction est un peu plus loin en train de se lever.

La vie est S.

Tous les bienfaits de ces molécules merveilleuses (des différentes langues)

La nuit des rois. Nous mêmes ne nous possédons pas nous-mêmes.

I do I know not what.

Le tournant a été pris il y a très longtemps, je crois que c'était en 94. Quand on écrit en invitant.
Je te prends je te mets dans mon livre. On est un peu anthropophage.

Les gens dont je pouvais disposer parce qu'ils étaient morts. 

Je me suis retournée et je me suis dit Toute mon œuvre est à mon père. Puis j'ai pensé à ma mère. Alors que je lui dois mille vies et que de rires !

Chaque fois que quelque chose m'est impossible qu'un grand drapeau rouge est devant pour y aller, je me dis il faut y aller. C'est une règle en écriture.

Ça a été mon premier Osnabruck.

Un geste d'un grand amour et d'une grande violence.

Ma grand-mère maternelle est partie en novembre 38.

Chaque année je me disais L'an prochain à Osnabruck

La rescousse est là. (Livre 2016 avec Cécile Wasjbrot)

Je me suis fiée quand même à son invitation (Mnouchkine) Drapeau rouge, donc il faut y aller [début des années 80]. Va en Asie et écris. 

Tu m'as fait un village, nous on est grand, on est un royaume. 

Je suis allée d'impossible en impossible. 

Au départ, j'étais côté Chamber music. Avec le théâtre, 50 personnages. Des scènes avec 50, 5 par 5 .

L'écriture de théâtre a des temporalités radicalement différentes de celles de fiction. Il faut que tout se comprenne instantanément. Le signal est d'une impatience totale. 

J'ai mis mon oreille sur le poitrine. J'ai écouté les battements de leur cœur.

J'ai su que j'étais de toutes façons le sujet de la troupe. Une aventure d'imagination inouïe. 

Quand j'étais en Patagonie, je me glissais sur la banquise avec ma mère. 

Et en même temps c'est absolument exaltant parce que c'est un mariage avec le public [écriture pour le théâtre].

Mon lecteur va arriver comme pour Stendhal dans 60 ans.

 

[se mouiller le doigt pour tourner la page ; geste qui revient]

Écrire : quelque chose qui va avec l'instant miraculeux de la création.
Parfois désastre. 
Des sensations extrêmement fortes.

En lisant, des joies extrêmes, plutôt sur des phrases seules.
Stendhal : La vie de Henry Brulard

Dans ces cas-là écrire et lire se touchent pour moi, là il y a contact et frrt il y a une flamme qui part.

On devrait fabriquer le verbe éclire.

Il a fallu une belle révolution pour que ça puisse apparaître et qu'elle soit jeune et artistique [Vincennes]. Les mathématiques c'est un art.

En ce moment on est plutôt à marée basse mais je n'exclus pas la possibilité d'une apparition. 
68 c'est simplement le moment où l'orage éclate mais il se préparait depuis un moment.
Parce que les vieux en général ils en ont marre ils sont assis. 

En attendant qu'est-ce qu'on fait : on se bouge à petite échelle. Comme le théâtre du soleil. Créer des troupes, des cercles illuminés.

La dominante c'est quand même la jeunesse parce quand on est vieux au théâtre du soleil on est jeune.

68 c'était un mouvement de jeunes hommes. L'idéal de Vincennes qui était une pure merveille. Une collection extraordinaire qui devait s'appeler le Féminin Futur 

Comme je disais tout à l'heure il a intérêt à être en bon état [mon corps] [pendant l'écriture]. J'ai l'air d'être immobile mais je n'arrête pas de courir, de grimper, de nager. 

L'économie d'un Balzac ou d'un Stendhal, écrire vite et beaucoup. 9h de rang, sans s'arrêter sauf pour boire (expérience d'avoir eu des effets secondaire pour l'avoir oublié)

Est-ce devenu un livre émancipateur. Je ne considère pas du tout Simone de Beauvoir comme une féministe. À la demande de Catherine Clément, Le rire de la méduse. 

Un très beau texte de Proust sur la méduse qui décrit les asperges qui sont des couleurs de méduses.

Le type américain ne me convenait pas c'était un féminisme assez fruste. 

Je n'avais pas pensé que ce texte allait devenir ma persécutrice préférée.

La dernière en date étant le Féroé [toutes les traductions]

À un moment j'en ai eu marre, elle était toujours là. Voilà où en sont les femmes, là. 

Je pense que ça m'arrivera quand je serai sur le point de mourrir c'est certain [la fin de l'écriture]. C'est tellement organique chez moi. 

  


Je ne suis plus sans papiers

Gilda with ID card

Voilà, grâce à l'initiative heureuse et sympathique d'une employée de la mairie, me voilà à nouveau pourvue d'une carte d'identité.

Après le vol de mon sac fin octobre et de tout ce qu'il contenait, j'avais pensé à faire refaire le passeport en priorité et qu'une fois seulement lorsque j'en disposerai je pourrais faire ré-établir les autres documents. Elle m'a suggéré fort intelligemment de tout faire en même temps. 
J'ai dû filer en courant chercher de l'argent pour acheter au Tabac un timbre fiscal et de ce fait, alors qu'il faut prendre rendez-vous et que ça n'est pas si simple (pré-demande en ligne à remplir, puis presque autant à refaire au moment même du rendez-vous), et pas si simple de se libérer, les deux demandes sont parties en même temps.

Ce matin alors que je disposais, ô miracle, de deux heures de temps personnel, mon téléfonino a émis son signal de SMS arrivé, lequel disait, "Votre carte d'identité est disponible jusqu'au 17/03/2018 dans votre lieu de recueil". Autant vous dire que je n'ai pas attendu un seul instant de plus.

Je suis donc extrêmement reconnaissante envers cette femme et sa suggestion. 

Je le suis aussi envers le photographe de la rue de Charenton chez qui j'étais allée me faire tirer le très officiel portrait. Il a trouvé moyen tout en respectant les consignes strictes des documents de maintenant (1) que j'aie l'air d'être moi, même avec un splendide RF sur le nez. 

Au soulagement que j'éprouve moi que la conformité soucie peu, je mesure combien doit être source de tension le fait de n'avoir pas de papiers d'identités, du moins pas ceux qui autorisent à séjourner dans un pays plutôt qu'un autre.

J'ai vécu le reste de la journée dans l'illusion que puisque c'était allé si vite, le reste de mes tracas administrativo-quelque chose de ces jours derniers allait rapidement s'aplanir, chèque et chéquier, carte de mutuelle ..., mais je crains que ça ne soit pas si simple.
Ma carte vitale, quant à elle, est déjà là (2).

Avant que d'oublier et de passer à la suite de mes aventures, je dois noter que mon pass navigo m'a été utile comme seul document un peu sérieux quoique non officiel avec photo me restant. Je déplore que son abandon prochain ait été voté par la région au profit d'une sorte de future appli smartphone - particulièrement injuste puisque sa facilité d'utilisation dépendra de la qualité de notre équipement -.

Et qu'il m'a été secourable malgré qu'il n'était ni obligatoire ni mentionné, d'avoir pris avec moi mon livret de famille lors du premier rendez-vous.

Dans l'absolu il faudrait s'arranger pour avoir toujours un document d'identité à la maison lorsqu'on en a un autre sur soi, et jamais dans le même sac ou au même endroit le téléphone portable et l'ordinateur. Moyennant quoi il devrait suffire de moins d'un mois pour retrouver une vie sans surcroît de complications. Ç'aura été presque mon cas.

 

(1) Je me souviens d'un temps où l'on pouvait sur un passeport arborer l'air souriant, des cheveux débordants, une barrette pour les maintenir, ce qu'on voulait comme vêtement du moment qu'on voyait le visage.

(2) Quand tu penses à la façon fastidieuse de 2009 (vol du portefeuille), que de progrès !

.


Anne Sylvestre : l'écouter quel bonheur


    C'était une journée triste sous l'emprise d'un deuil diffus, quelqu'un qui n'était déjà plus là, et depuis longtemps mais l'est à présent définitivement. 
Les souvenirs affluent. 

Il y avait beaucoup de travail à la librairie, j'avais en quelque sorte une hotte de Père Noël à garnir de paquets.

Alors j'ai été heureuse en rentrant, de voir que @Nasiviru parlait d'un passage d'Anne Sylvestre sur France Cul. 

C'était . Et ce fut un bonheur de l'écouter, quoi que pour moi en léger différé (un des charmes de la vie moderne). J'espère que le lien perdurera.


L'absence du net


    Alors que la neutralité du net est sérieusement en danger (ça n'est pas nouveau mais la menace se précise), voilà que je reçois un bien triste courrier, qu'étrangement je m'attendais à recevoir depuis quelque temps tout en me disant Ça va pas la tête ?, pourquoi même si ce que tu crains advenait, t'écrirait-on : une ancienne amie, perdue de vue depuis longtemps car nos vies avaient vraiment trop divergé, est morte en octobre.

J'écrirai ce week-end un billet en son honneur, mais sans y joindre de photo : elle ne voulait pas de photo d'elle sur l'internet, elle n'aimait pas l'internet, et n'utilisait que ce qu'un usage professionnel nécessitait. Et encore, les réseaux sociaux commençaient tout juste leur apparition lorsque nous avons divergé. J'ai regardé : elle aura réussi jusqu'au bout à n'y pas apparaître, les seules traces qu'elle a laissé sur la toile sont celles de travaux professionnels dont je soupçonne la publication d'être automatique ou du moins difficile à empêcher. Il n'y a aucune photo d'elle. 
Ce qui tient de l'exploit

À l'époque où elle affirmait haut et fort ne vouloir figurer nulle part, vraiment nulle part, je m'étais posé la question de Pourquoi diable publierais-je une photo d'elle ?

Ce soir j'ai la réponse : en hommage, tout simplement.

Mais je respecterai ce à quoi elle tenait, son invisibilité numérique.