Retrouvailles avec Paris (et découverte de l'existence de Shawn Mendes)
Librairie Charybde : on va commencer par faire la fête

L'arme compassionnelle (crapule, va)


    Ils marchaient derrière mais plus vite que moi. Juste un peu. Ce qui fait que le temps qu'ils s'approchent, me dépassent et s'éloignent, j'ai entendu sans l'avoir voulu, ni souhaité, un grand pan de leur conversation. 

Il s'agissait d'un homme jeune et d'une jeune femme. Elle écoutait, marquant son attention, posant parfois une brève question, il parlait.

La première phrase que j'ai entendue concernait la séparation de ses parents, 

Mes parents ont divorcé, ça s'est très mal passé. Enfin pour ma mère. Elle ne s'en est pas remise, même maintenant douze ans après. Elle était encore folle amoureuse de lui. A fait une tentative de suicide. Puis six mois d'HP.

Comme j'ai un trop bon petit cœur j'ai eu le temps de penser Pauvre garçon, comment s'en remet-on, avant de tiquer sur son ton de voix trop neutre, trop calme, trop égal ce qui combiné avec mon expérience de la vie, m'a ramené vers de plus prosaïques pensées : Mais pourquoi lui raconte-t-il ça ?

Assez vite il a expliqué qu'il n'avait pas été si affecté, qu'il s'était créé sa propre bulle, fier d'avoir su être aussi fort (1). Que lui ne souhaitait pas commettre la même erreur que son père.

Là ma part de gentillesse naïve a commencé à songer : Oh, il va lui annoncer qu'il ne la plantera pas dès qu'il se sera un peu lassé ? mais ma part d'expérience lui a soufflé Attends la suite, tu la connais.

Il avait bien compris que son père avait eu besoin passé 45 ans de vivre enfin sa vie, qu'il s'était enfermé trop jeune - là, ma naïveté avait battu en retraite et mon mauvais esprit prenait ses aises : - Hé, mec, s'il ne l'avait pas fait tu ne serais pas là devant moi -, que vraiment non c'était une erreur à ne pas faire.

Ils étaient à présent juste devant moi, selon la façon de certains piétons qui te doublent puis comme ils ne vont pas vraiment plus vite et que le trottoir ou le chemin n'est pas si large, te font en pratique, une queue de poisson. La jeune femme était une jolie ex enfant blonde pas retrafiquée, silhouette élancée, classe.

Et que d'ailleurs, il ne ferait pas comme son père, pour commencer il allait voyager, beaucoup, qu'il fallait profiter de faire certaines choses tant qu'on était jeunes et qu'à 27 ans, il devait bouger.

Alors j'ai ralenti.

Je ne souhaitais pas entendre la suite. Cet air international et immémorial trop bien connu.

Il l'avait séduite parce qu'elle était belle, et peut-être qu'une relation suivie s'était mise en place, mais il refusait de s'engager. 

Plus jeune, j'eusse probablement pensé Pauvre garçon ça a dû être pour lui enfant si rude qu'il est normal qu'il se sente incapable de se stabiliser. À l'âge qui est le mien et vu de l'expérience accumulée,  j'ai principalement songé qu'utiliser le suicide manqué que sa daronne comme départ d'argument pour dire à une femme, Je t'aime bien mais guère plus et d'ailleurs je pars voyager, était très très très moyen comme procédé.

J'espère que c'est la jeune femme qui en fait a filé.

 

(1) d'ailleurs il ne parlait pas du tout sur le ton de la confidence 

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