Trois jours pour reprendre souffle
06 mars 2017
C'était peu, mais beaucoup mieux que rien. Longtemps que je n'avais pas eu droit à une aussi longue trêve et un peu de bonne vie avec zéro intendance, de bons repas (surtout ce midi) et du carburant intellectuel pour le cerveau, peut-être au fond ma seule addiction.
Après, il reste de sombres nouvelles du monde et du pays dans lequel je vis - et s'en couper quelques jours ou ne suivre que de plus loin c'est se manger des coups au moral encore plus violents lorsque l'on reprend contact avec le courant du monde - ; il reste à hauteur personnelles que les nouvelles amours d'une personne, ou plutôt deux puisqu'il y a une nouvelle aimée, plombent la vie de quatre autres et assombrissent les pensées d'au moins neuf autres. J'espère que le nouveau couple est vraiment heureux et qu'il durera un peu parce que sinon ce serait faire du mal à beaucoup pour un résultat qui n'en valait pas la peine. Les séparations sont très différentes selon qu'un couple ne s'entend plus et qu'un jour l'un des deux finit par faire le mouvement vers la fin qui s'imposait, ou que les choses semblaient aller pour le mieux, du moins l'un en avait la certitude et que l'autre unilatéralement se détache au profit d'une nouvelle expérience, non sans l'avoir déjà bien entamée en loucedé.
En attendant, et dans le cas qui me concerne un peu, même si je n'en suis qu'un élément de marge, c'est un chagrin de plus qu'il faut assimiler et sans doute un nouvel absent. Ce qui me fait plus particulièrement mal c'est qu'il s'agissait d'un des rares et derniers hommes pour lesquels j'éprouvais de l'admiration. Il en reste que j'admire pour leurs talents professionnels, mais pour la vie dans son ensemble, j'ai quasiment perdu tout référent. Ma foi en l'humanité ne passe presque exclusivement plus que par des femmes. Et je suis triste que ça ait ainsi tourné.
Après, on ne peut pas reprocher aux amoureux de totalement négliger les peines collatérales. C'est le propre et la force de l'amour d'être ainsi sans pitié et facteur de liberté. C'est terrible pour qui reste sur le carreau, son plus solide soutien transformé en bourreau.
Me cueillent au retour d'inquiétantes nouvelles d'une grande amie. J'ai peur de la perdre elle aussi.
Je songe aux jolies photos de mariages de deux petits-cousins, pour lesquels nous n'avions pas été au courant - tout s'explique à présent -, c'est la vie qui avance, la nouvelle génération qui prend les rênes du monde, que nous leur laissons dans un piteux état - en même temps, à ma hauteur, je ne vois vraiment pas ce que j'aurais pu faire d'autre ou de plus - et fonçant vers une fin prématurée. Leur bonheur de jeunes mariés fait plaisir à voir même s'il est étrange d'y voir, sur certains visages, une part de faux-semblants a posteriori éclatants.
J'apprends des éléments de l'histoire familiale, rien de secret, simplement des points, y compris très positifs, qui par taiserie ne m'avaient pas été transmis - et je ne pose que très rarement des questions directes -. Certaines choses en expliquent d'autres. J'aime quand la logique ou des cohérences, même dans le malheur, (re)prennent le dessus.
Le film "Laisser-passer" de Tavernier, revu dans le cadre de ce week-end, tout romancé et glorifiant qu'il soit (pas dupe), me donne une pinte de courage. La soirée de vendredi, l'effort remarquable de prise de parole par celui qui n'était pas fait pour ça et son succès dans l'exercice, resteront pour toujours un appui par pensée. Ainsi qu'un souvenir ébloui. Et peut-être, qui sait, le jalon d'entrée vers une nouvelle phase. Ce moment-là plutôt qu'un autre.
Je ne suis pas encore sortie du plus récent deuil, mais me voilà d'attaque pour de nouveaux bonheurs et [pratiquement] d'aplomb pour les prochains combats.