Parfois la vie c'est bien foutu (mais il faut vite en profiter parce que ça ne dure pas)
24 mars 2017
Ça démarrait, moyen, exactement comme l'autre jour, mais à tout prendre je préfère ça et que ça finisse bien plutôt que des journées entamées sans nuages, un jour à la Foire du Livre de Bruxelles, je dois retrouver une grande amie et cueille l'annonce d'une rupture, un dimanche de juin, tranquille, course à pied, la forme, je rentre et trouve un mail d'un bien-aimé au début tout à fait courant, sur le principal sujet en cours (une rencontre littéraire qu'on organisait) et puis presque en PS, l'annonce aussi d'une rupture (ou plutôt d'un changement de rôle, comme si les femmes étaient des pions), un dimanche brumeux d'un mois de janvier qui me voyait travailler dans les trop beaux quartiers et une collègue à la caisse qui lisait les infos entre deux clients qui pâlit - Il y a eu un attentat -, un vendredi de novembre, nous sommes au festival d'Arras, les films sont formidables, un peu de remue-ménages vers les places réservées lors de la projection du soir et puis à peine le générique entamé, l'annonce et un texto de ma fille, Paris est à feu et à sang ... Bref, je finis par vraiment préférer les journées qui démarrent avec un peu de poisse (mais pas trop), c'est devenu rassurant.
Et donc voilà celle-ci, le début pas mal - démarrer la matinée en nageant, rayons de soleils par moments, c'est beau, c'est bon, quel bonheur !, un petit-déjeuner littéraire passionnant -, je parviens à en profiter même si les lendemains d'attentats sont toujours délicats, une amie concernée mais de par son métier (1), et puis la "usual poisse" qui réapparait sitôt le téléfonino rallumé après : deux mauvaises nouvelles coup sur coup, rien à voir entre elles, une réapparition d'inquiétude pour quelqu'un que j'aime (entre autre). Rien de dramatique, c'est déjà beaucoup, mais une journée ensoleillée qui d'un coup s'assombrit.
C'est dans ce petit nuage gris que filant prendre le RER qui m'approche du travail, en plein milieu d'un trottoir, j'ai trouvé un coupe papier. Un de ces trucs so seventies avec le manche en marbre (ou pseudo, mais assez lourd), là par terre, loin de toute poubelle, loin de toute raison plausible qu'il ait atterri là. Au demeurant pas très loin d'une école maternelle, alors je m'en saisis avant qu'un bambin ne soit tenté d'en faire autant. Ce n'est qu'un vieux coupe-papier mais quand même.
Ensuite, il y a eu le trajet, le travail, et j'ai oublié l'avoir fait.
Au soir je suis dans une librairie, pas n'importe laquelle, et je tombe sur les Nouvelles en trois lignes de Félix Fénéon dont je suis une fan absolue - cet art du raccourci -. Elles sont dans une très belle édition illustrée et reliée à l'ancienne : les pages encore à découper.
Au métro du retour, illumination soudaine : j'ai ce qu'il faut pour procéder. J'ai ainsi pu commencer à bouquiner : je disposais comme par enchantement et le l'objet et de l'outil. Joli cadeau de la vie.
(dommage que ça soit dans l'ensemble trop rare, et que ça ne dure pas)
(1) C'est fou cette loi du "au moins une" : à chaque attentat perpétré dans une grande ville d'Europe, je (on ?) connais au moins une personne concernée d'une façon ou d'une autre. Et donc là c'est une amie que son travail amène à devoir rencontrer des témoins. Et bien sûr plusieurs autres présents à Londres et pour lesquels on s'est brièvement inquiétés - je me demande si le Brexit viendra modifier ça : beaucoup moins de parisiens qui vont à Londres comme de rien -.