"À quel âge sommes-nous nous-mêmes ?"
26 décembre 2016
Je lis ceci sur le blog de Carl Vanwelde qui d'habitude m'est d'un grand réconfort, moins sur le billet que je cite et dont la citation initiale me donne, pour des raisons affectives encore mal cicatrisées, la nausée. Mais il faut savoir faire la part des choses et la suite est fort intéressante :
"Ils sont un vieux couple maintenant. Elle a perdu les jambes, il a perdu la tête. Il lui trouve une ressemblance avec sa femme, qu'il aimait tant. Elle lui dit qu'elle est sa femme, qu'il arrête donc de dire des bêtises. Elle en est triste, il en est contrarié. Il lui rétorque que sa femme était blonde, mince, avait la peau lisse et une voix douce, elle travaillait à l'Inno, il s'en souvient comme si c'était hier. Elle arrête de le convaincre, le laissant à ses fantômes. A quel âge sommes-nous nous-mêmes, avant de n'être plus qu'une image souvenir? En combien de personnes successives s'égrène notre existence, et où s'envolent celles que nous fûmes aux divers âges de la vie, dans quel ciel, dans quel récit, dans la mémoire de quel être cher? Y retrouvent-elles qui une fonction prestigieuse, qui un amour d'enfance, qui un enfant parti trop jeune? [...] Tout est vrai successivement. [...]"
Il se trouve que c'est une question que je me pose ces temps derniers bien souvent.
D'abord pour ma mère, dont le cerveau semble fonctionner encore parfaitement, du moins en ce sens qu'elle est égale à elle-même. Mais son enveloppe corporelle n'est plus qu'un squelette avec de la peau sur les os et un ventre gonflé pour lequel elle refuse le traitement pourtant logique qui la soulagerait.
Je me dis que ce qui reste d'elle n'est pas la vraie elle-même. Cette femme sportive et dynamique qu'elle aura été durant l'essentiel de sa vie. Je pense d'ailleurs qu'elle n'est plus elle-même depuis certains propos xénophobes et racistes tenus ces dernières années. La vraie elle-même ne pouvait s'abaisser à de telles pensées.
Il se trouve que c'est une question que je me pose ces temps derniers bien souvent.
D'abord pour ma mère, dont le cerveau semble fonctionner encore parfaitement, du moins en ce sens qu'elle est égale à elle-même. Mais son enveloppe corporelle n'est plus qu'un squelette avec de la peau sur les os et un ventre gonflé pour lequel elle refuse le traitement pourtant logique qui la soulagerait.
Je me dis que ce qui reste d'elle n'est pas la vraie elle-même. Cette femme sportive et dynamique qu'elle aura été durant l'essentiel de sa vie. Je pense d'ailleurs qu'elle n'est plus elle-même depuis certains propos xénophobes et racistes tenus ces dernières années. La vraie elle-même ne pouvait s'abaisser à de telles pensées.
Ensuite, pour moi aussi. J'ai traversé des années difficiles, en 2005/2006 puis 2013 j'ai eu le sentiment d'être expulsée de ma propre vie. Ça allait mieux depuis que j'avais retrouvé un emploi stable dans une librairie humaine avec des clients pour la plupart chaleureux et d'âme élégants. Le cumul de malheurs et tracas depuis l'été est sans doute en train de remettre cette relative accalmie en cause.
C'est un peu différent des périodes de malheurs précédentes : je ne suis pas exclue de ma vie, celle-ci suit son cours, en revanche la part personnelle en est réduite à presque rien. Mon temps est englouti et j'ai beau aimer mon métier et me sentir heureuse lorsque je travaille, entre hôpital, suites calamiteuses de l'affaire de la fuite d'eau invisible et horaires de travail complets, je me sens étouffer. Est-ce vraiment moi cette personne qui fait ce qu'elle a à faire mais sans moments apaisés, sans personne pour vraiment se soucier, sans temps pour écrire (à part, en désespoir de cause, ici) ? Je ne me retrouve qu'aux heures d'entraînements. Car cette décision de me mettre au triathlon c'est moi, vraiment. Seulement, entre Noël et jour de l'An, il n'y en a guère.
C'est un peu différent des périodes de malheurs précédentes : je ne suis pas exclue de ma vie, celle-ci suit son cours, en revanche la part personnelle en est réduite à presque rien. Mon temps est englouti et j'ai beau aimer mon métier et me sentir heureuse lorsque je travaille, entre hôpital, suites calamiteuses de l'affaire de la fuite d'eau invisible et horaires de travail complets, je me sens étouffer. Est-ce vraiment moi cette personne qui fait ce qu'elle a à faire mais sans moments apaisés, sans personne pour vraiment se soucier, sans temps pour écrire (à part, en désespoir de cause, ici) ? Je ne me retrouve qu'aux heures d'entraînements. Car cette décision de me mettre au triathlon c'est moi, vraiment. Seulement, entre Noël et jour de l'An, il n'y en a guère.
À quel âge sommes-nous nous-mêmes ?
Je crois que je l'ai été en 2012, j'avais 49 ans, un boulot que j'aimais pour quelqu'un qui en valait la peine, je me croyais aimée, dans chaque interstice j'écrivais, et d'ailleurs un petit quelque chose avait été publié.
Cette photo (merci Douja) d'un soir d'octobre, alors que nous recevions Joël Dicker avant que sa "Vérité sur l'affaire Harry Québert" n'atteigne des sommets de succès, avant son premier prix remporté, marque un instant de ma vie où j'étais moi plus que jamais. Bonne Mascotte et heureuse de l'être. Et même mon grand ami, mon presque frère, était présent.
Cette photo (merci Douja) d'un soir d'octobre, alors que nous recevions Joël Dicker avant que sa "Vérité sur l'affaire Harry Québert" n'atteigne des sommets de succès, avant son premier prix remporté, marque un instant de ma vie où j'étais moi plus que jamais. Bonne Mascotte et heureuse de l'être. Et même mon grand ami, mon presque frère, était présent.
Depuis mi 2013, ça n'est plus tout à fait ça. Je lutte sans arrêt pour limiter les dégâts. Plus encore que la fin de cette belle librairie cette année-là, et la rupture subie si violemment au même moment, même s'il y avait 320 km d'écart il y avait concordance des temps, ce sont les journées des 7, 8 et 9 janvier 2015 qui m'ont éloignée de moi-même. Mon visage, d'un seul coup, s'est affaissé. Je n'étais plus la même, plus tout à fait.
J'ai peur que 2017 apporte de si grands tourments collectifs que nous tomberons tous dans la simple survie. Que vais-je encore me faire arracher ? Et par qui ?
Peut-être que je [me] suis pour de bon perdue. Peut-être que le sport et le travail me permettront d'amortir la dégringolade [même] dans un monde en conflit.
J'ai peur que 2017 apporte de si grands tourments collectifs que nous tomberons tous dans la simple survie. Que vais-je encore me faire arracher ? Et par qui ?
Peut-être que je [me] suis pour de bon perdue. Peut-être que le sport et le travail me permettront d'amortir la dégringolade [même] dans un monde en conflit.
Est-il possible d'être soi-même lorsque tout se délite ?