Config canicule
J'avoue ma faiblesse (six ans après)

Les sportifs éternels

 

    J'ai longtemps cru et même un peu au delà de l'enfance, que les grands sportifs étaient impérissables ou alors au bout d'un temps très très très long, par exemple quand ils devenaient grands-parents - et encore c'était comme si j'imaginais qu'ils se retiraient volontairement afin de consacrer du temps à leurs petits-enfants -. De la même façon que mes propres parents me semblaient d'un âge adulte stable, je voyais les effets du temps qui passe à l'aune d'une crémaillère : on grimpe sans jamais redescendre sur l'autre versant (on peut toujours mieux faire, sans arrêt progresser), ni beaucoup reculer (ou alors c'est une blessure, une maladie, une méforme passagère). Quand on est enfant on tend vers l'âge adulte sans imaginer que ceux que l'on rejoint pendant ce temps avancent vers le grand âge. Rien n'est figé ou stable, même dans la mort. Tout évolue tout le temps. Ces évidences ne le sont guère pour les enfants. Sans doute qu'eux-mêmes grandissant ont besoin de points de repères qu'ils imaginent stables afin de tendre vers eux.

Et donc les grands champions l'étaient de toute éternité, je pensais que Borg, Mc Enroe et Platini seraient toujours au sommet, Johan Cruijff et Eddy Merckx aussi. Chris Evert allait régner sur le tennis de toute éternité. Puis j'ai vu Mats Wilander suivi de peu par Stefan Edberg devenir grand puis au sommet de son art puis ne plus être aussi brillant, plus tard abandonner ; dans la même période la vie me faisait piger le coup de la gaussienne, toute activité ou production humaine suit une loi normale, une progression, un sommet puis une décroissance (1), parfois avec au sommet un petit plateau au lieu d'un arrondit mais guère davantage. Et bien sûr des effondrements en à-pic toujours possible dus à des éléments extérieurs, éventuellement une fin de vie brutale et avant l'âge d'usure. La gaussienne c'est quand tout se passe bien. 

Ça ne les empêche pas de tourner sympathiques et de rester élégants, mais le très haut niveau peut se terminer assez vite et définitivement.

C'est pourquoi cet article (2), bien écrit, m'a fait sourire. 

Seules les légendes qu'ils auront construites resteront éternelles. Eux non. Et pas forcément mécontent-e-s de retourner à des vies avec moins de tensions.

 

(1) C'est d'ailleurs pourquoi le capitalisme comme tout système économique mais plus encore peut-être est en train de planter, qui ne fonctionne correctement qu'en phase de croissance. La planète est en train de voir ses capacités d'hébergement (appelons ça comme ça) décroitre ça ne va pas pouvoir continuer à cohabiter. 

(2) Even Roger Federer gets old par Brian Phillips pour The New York Times

Commentaires