Liebster award - part 1
05 avril 2015
Alors j'ai eu l'honneur et la joie d'être taggée comme on disait par Sacrip'Anne pour sa chaîne confraternelle (1) des Liebster award, et je m'étais fait une joie d'y répondre. Sauf que je ne voyais pas trop quand et que mon petit ordi, qui avait chopé un pervers adware l'été passé et était saturé des photos que je peinais à trier a fait un AVC électronique, et que le peu de temps que depuis j'ai pu passer au calme à l'ordi a été consacré à remettre ce qui pouvait au carré.
Et puis c'est une période où au boulot j'ai assuré mais pour le reste, épuisée, pas très.
Je vais essayer de profiter de ce dimanche enfin au calme à la maison pour commencer à participer.
Commencer car vu la richesse de l'exercice et l'étriqué de mon temps personnel disponible effectif, si je veux parvenir à tout faire il me faut procéder par étapes.
1/ Citer la personne qui vous a dénoncé ✔︎
2/ Raconter 11 petits (ou grands) secrets sur soi.
Déjà ça commence mal. Il y en a peu ou pas. Surtout pour les lecteurs assidus de ce blog et quelques autres qui approche de ces dix ans. J'ai plutôt envie d'aller y voir du côté des choses cinématographiques. C'est tellement plus drôle que les soucis de plomberie.
"This is the west Sir, when the legend becomes fact, print the legend"
What about fact looking like some legend ?
2.1 Je suis venue vivre à Clichy par admiration pour Henry Miller (et par la grâce initiale du 1% patronal, c'est moins glamour, je sais).
2.2 Mon père racontait qu'un de ses frères qui fut mon parrain, avait échappé de peu à la tragédie du 4 mai 1949 car il aurait pu (ou dû) être sélectionné dans l'équipe qui trouva alors la mort. Parfois il rajoutait un élément de narration : que la sélection avait eue lieu mais qu'une maladie providentielle avait cloué mon futur zio au lit.
J'étais alors gosse, mais je pensais déjà que mon papa inventait une belle et émouvante histoire pour moi. Ce qui est sans doute vrai c'est que mon oncle a été un jour gravement malade, alité longtemps avec une fièvre dangereuse. Et ce qui est certain c'est qu'il était passionné par le foot et qu'il avait sans doute jadis joué fort bien. Dans les années 70, plus tout jeune et pas très mince, il avait encore un excellent toucher de balle, je conserve un souvenir ému d'avoir joué à la "zone" lors d'une visite qu'il nous fit.
2.3 Mon père en parlait parfois et j'ai longtemps cru qu'il blaguait (2) mais depuis l'internet je sais que c'était vrai, qu'un de ses (lointains ?) cousins avait fait star à Hollywood.
Il s'appelait Enzo et ça n'était pas faux. Boxeur, il était devenu un pro des seconds rôles de voyous.
Comme je ne connais pas l'arbre généalogique de la famille, j'ignore s'il avait lui aussi la thalassémie en héritage. J'aimerais bien le savoir pour éventuellement pouvoir me donner du courage et considérer plus sereinement l'avenir de mes enfants.
Ce qui par mon père m'en a été transmis, le goût de l'effort physique, l'amour du cinéma, et quelques rudiments de boxe (au moins savoir coller un honnête bourre-pif en cas de besoin) m'a été très utile dans la vie.
2.4 J'ai fait de la figuration dans un film et il en reste une trace que j'aime beaucoup parce que je m'installe à une table en posant un bouquin. La consigne était : vous arrivez dans ce café, vous vous installez, surtout faites comme si vous n'étiez pas filmés. Le livre était arrivé à la maison la veille c'était un bouquin pour les jeunes écrit par ma grande amie.
Moralité : on n'échappe jamais au capitalisme, en voulant être parfaitement naturelle, j'ai réinventé le placement-produit ;-) . C'est à 0'15" de la bande annonce.
2.5 J'ai donc joué au foot adolescente, dans une des rares équipes de filles qui existaient dans ma banlieue. J'étais arrière gauche. Et j'ai arrêté pour cause de disparition de l'équipe, l'entraîneur ayant pris sa retraite, les meilleures de l'équipe ayant été recrutées par un autre club, et personne n'étant très motivé pour reprendre le flambeau d'une section qui n'était pas valorisante pour qui l'encadrait. Le club le plus proche était à plus de 10 km et je n'avais pas de moyen d'y aller autrement qu'en vélo ce qui eût été trop fatigant et peu compatible avec ma scolarité.
2.6 Ma première publication aura été une lettre un brin tronquée mais quand même dans le courrier des lecteurs d'un magazine de foot. C'était le 6 juin 1976. J'en parle plus longuement dans ce billet.
2.7 Je suis née huit jours avant l'assassinat du président Kennedy et j'ai quitté mon premier métier (en gros de l'informatique dans une banque) très brutalement au soir de la première investiture de Barack Obama. C'était ma rubrique empreinte de modestie : les présidents des États-Unis et moi.
(N'empêche, l'air de rien, ça aide à dater)
2.8 Mon premier texte libre et long c'est le récit d'un match de foot auquel j'avais été conviée au déboté le 28 octobre 1980. Ce n'est pas une écriture littéraire fors quelques traits d'humour, mais bien un récit presque minute par minute d'une gamine qui avait été si comblée de bonheur que la vie soudain sorte de l'ordinaire qu'elle voulait n'en pas oublier une seule miette.
Une bribe par ici. Et une autre là.
Un autre texte long fut vers la même période le récit d'un dîner avec mon oncle Piero, pas tant le dîner lui-même que des anecdotes du passé qu'ils nous y confia - un peu le restau chic quand même -.
Un troisième écrit en 1983 oublié et retrouvé longtemps plus tard fut un récit érotique écrit "pour me faire sourire plus tard". Hé bien ... cette part-là du projet réussit. J'ai même carrément ri.
Ce ne sont pas les idées de fiction qui me manquent c'est le temps de m'y consacrer. Reste au fil des ans mes tentatives pas nécessairement littéraires, plutôt très littérales pour protéger certains moments de l'oubli. Mon oubli personnel. Et un oubli plus général, longtemps plus tard, de ce que fut pour la classe moyenne de ce pays où j'ai grandi et jusque-là vécu ce truc impalpable qu'on nomme l'air du temps.
2.9 J'ai participé alors que j'étais en 5ème à l'écriture collective d'un bouquin.
C'était du temps où en banlieue sévissaient de jeunes profs qui avaient réellement choisi ce métier, étaient militants et motivés. Le prof de français s'appelait Compain, il avait fait un travail formidable (3) et c'était même mis en cheville avec notre prof de travaux manuels afin que dans ses cours nous préparions chacun la reliure de notre exemplaire ainsi qu'un marque-page. Le bouquin s'appelait "Le clipper de l'an 5555 ou inquiétude chez les dieux". Quand je le relis je n'ai même pas honte, il nous avait sacrément tiré vers le haut, ce bougre - et pour autant : chaque phrase, chaque mot est de nous -.
2.10 Il m'est récemment arrivé au sein d'un groupe d'amis de me retrouver en cible de paparazzi. Les circonstances étaient d'une tristesse infinie. Tomber sur la photo (la première en fait car en la recherchant j'en ai vu ailleurs d'autres, surtout ne pas s'attarder) alors qu'on est malheureux, qu'on cherche tout autre chose - en l'occurrence le nom d'un des intervenants qui avait dit des choses si justes et l'avait dit si bien - fait mal. Sans compter que lorsque l'on fait un métier qui implique d'être exposés, on peut considérer qu'il s'agit du prix à payer ; alors que quand on est personne en particulier, qu'il a dépendu de la gentillesse d'une collègue qui a accepté au pied levé de vous remplacer pour pouvoir venir aux obsèques d'un ami, qu'on se retrouve fragiles à devoir assumer une vie quotidienne pas des pires mais où il faut tenir, on aimerait au moins pouvoir traverser ça en paix.
J'ai éprouvé une sorte de colère.
Trois mois après, elle s'est apaisée et finalement j'ai pris conscience que cette photo, le fait de me voir avec les camarades sur une image m'aura sans doute aidé à reprendre pied dans la réalité dont la succession d'événements, rudes, m'avait fait décoller, ou du moins rester deux longues semaines engluée dans la sensation, qui me revient encore par bouffée, que la réalité avait été hackée par un monde parallèle. Violent. Dangereux. Sans pitié ni repères. Le moment a existé. J'y étais en vérité. On se serrait les coudes. Ça n'empêche pas la sensation d'invasion [de la sphère intime] mais d'un autre côté ça a pu aider. Un bien pour un mal.
However sad you feel it has really happened.
Et pour tenter de finir sur autre chose qu'un élément triste :
2.11 J'ai déjà chanté devant 700 000 personnes il parait. Je faisais partie d'une sélection de choristes qui sur un titre orchestré façon symphonique accompagnait au Champs de Mars Johnny et Sonia Lacen pour un concert de l'an 2000. C'était presque impressionnant
Je me souviens qu'il fallait arriver des heures avant dans le périmètre de sécurité. Que c'était un peu curieux d'être enfermés entre quelques tentes et un peu de verdure au pied de la tour Eiffel. Que j'avais fait pour passer le temps lecture à voix haute de la nouvelle du "K" de Buzzati qui concernait la Tour Eiffel, que Catherine Ringer, elle aussi enfermée dans le périmètre protégé était venue un moment parler avec nous, tranquillou. Je me souviens que j'avais eu du mal à me maquiller (dans la vie je ne pratique pas) car nous n'avions pas (ce que j'avais vaguement espéré) droit aux services de professionnels, que sur le moment j'avais été rudement heureuse d'avoir l'opportunité de participer à une telle expérience mais qu'apprenant plus tard quel avait été le budget de l'ensemble de l'opération et combien d'autres intervenants marginaux comme nous autres (des danseurs notamment) avaient touché, je m'étais sentie flouée : petits choristes amateurs nous avions été les naïfs bénévoles d'une opération commerciale alors qu'il s'agissait bien d'un travail, même s'il nous enchantait.
Voilà, la première partie du défi est à peu près remplie. Rien de secret mais quelques moments ou éléments un peu surprenants ou peut-être pas tant. Ce qui paradoxalement m'a surtout conduite à parler de choses particulièrement visibles ou qui l'avaient trop été.
La suite des ou du Liebster Award au prochain dimanche paisible (4).
(1) J'aimerais tant qu'il existât un équivalent pour filles à tous les termes frérots - on a beau tenter de les employer, les dérivés de sœurs, sororité et autres cousines ne fonctionnent par pareil -.
(2) Je pensais que ce qui était vrai était : une honnête carrière de boxeur et de la figuration en tant que tel dans des films dont quelques-uns pourquoi pas, assez importants.
(3) Quand j'y repense : taper tous les textes à la machine, + les photocopies et en particulier celles de nos dessins. Quel dévouement.
(4) C'est à dire pas le prochain car entre un retour de Lille et une fin de marathon de Paris auquel participent plusieurs ami.e.s, je sens que je serais une fois de plus à la maison fort peu.
[photos personnelles + photos de photos que l'on m'a données]