La persistance de l'homophobie
06 octobre 2014
L'histoire de ce garçon concentre beaucoup d'éléments que j'ai déjà entendus mais séparés chez certains amis.
C'est quelque chose qui m'a profondément déçue et marquée ces dernières années : je croyais que si la fin du siècle dernier avait fait en quelque domaine des progrès c'était précisément en matière de tolérance, que désormais chacun à condition de n'être pas un danger pour l'autre, pouvait mener sa vie comme il l'entendait, qu'il était évident qu'il existait différents types d'orientations sexuelles. Et d'ailleurs aussi des personnes qui se ressentaient d'un sexe différent que celui de leur naissance et que les progrès de la médecine permettaient de remettre en cohérence avec leur ressenti profond.
Moi qui me sens si féminine que je n'éprouve pas le besoin d'en remontrer, ce qui me place souvent en discordance avec ce que la société attend des femmes, je peux parfaitement comprendre qu'on se sente mal dans son sexe apparent. Et comme j'ai grandi dans un milieu et à une époque qui évitait de se reconnaître homophobe en évitant de voir que l'homosexualité existât en dehors de "La cage aux folles", je m'étais fait ma propre opinion, que c'était très logique puisque je trouvais certains garçons si beaux et d'avoir envie de les embrasser, que certains garçons puissent voir les choses comme moi. Sauf que pour eux c'était techniquement pas de chance.
Je n'ai su que très tard qu'il existait aussi une homosexualité des femmes et je crois bien n'être jamais parvenue à m'ôter tout à fait de la tête qu'il pouvait s'agir d'autre chose que de se consoler des hommes absents ou défaillants.
Ce qui est clair c'est qu'en l'absence de toute éducation sur le sujet et d'une religion coercitive qui aurait à ma place décidé que c'était mal, j'ai grandi dans l'idée qu'aucune sexualité n'était supérieure à une autre, et qu'entre celles où l'on risquait de fabriquer trop de nouveaux humains sans le faire tout à fait exprès et celles qui rendaient la reproduction impossible (1), ça faisait une moyenne.
Je n'avais pas idée d'à quel point pour tant de personnes des interprétations religieuses d'un autre âge étaient présentes pour condamner toute sexualité qui sortait du traditionnel "croissez et multipliez" dans ce cadre si peu humain d'un couple éternel un pour un pour toujours (2).
Ça a été une très grande claque que de comprendre que ça n'était pas, mais alors vraiment pas gagné. Et que chez d'autres le vide d'instruction(s) qui avait été le mien au lieu de se remplir ensuite de tolérance avait été garni par la haine de l'autre, et violemment. Sans doute par peur de trop lui ressembler.
Alors le témoignage de ce garçon qui a vu une famille affectueuse se muer soudain en ennemis sans qu'il y ait eu conflit mais seulement révélation que le garçon n'aimait pas là où on l'on souhaitait qu'il le fît m'a particulièrement touchée. Sans doute aussi parce que loin des cas les plus dramatiques, il s'en sort grâce à son bien-aimé (et la famille du moins la mère, accueillante, de celui-ci).
Si le cœur vous en dit, il y a une pétition qui circule ces jours-ci en faveur du Refuge.
(1) Je vous parle d'un temps d'avant le premier "bébé-éprouvette". Donc les bébés tu les fabriquais maison ou tu les adoptais.
(2) Je me dis que si les gens ont gobé un truc pareil c'est que la plupart des vies devait être très brèves et très rudes et donc qu'on mourait avant d'avoir eu le temps et la force de désirer ailleurs. Que peut-être aussi dans une certaine mesure ça protégeait les femmes d'hommes trop dominés par leurs pulsions. Peut-être.