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Rendre service oui mais ...

 

À la fin de notre entrevue il me demande si j'ai l'occasion de passer devant une boîte à lettre, je réponds sans hésiter, Oh oui je vais même passer devant la poste, et prends le courrier qu'il me tend.

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En arrivant devant l'établissement j'ai compris que les choses seraient plus compliquées que le simple service à rendre auquel je m'étais engagée. Le bâtiment était tout en travaux, et l'annexe dans la cour que les panneaux mentionnaient semblait inaccessible, du moins à ce moment du chantier.

Pas de boîte à proximité (la poste n'en était pas encore équipée de ces boîtes externalisées ; j'imagine que les travaux entrepris vont y remédier ; bientôt il sera suspect d'entrer dans une poste avec du courrier et mes petits-enfants si tant est que j'en aie me demanderont "ça veut dire quoi "postale" dans le nom de cette banque là ?").

Du coup, j'ai du un tantinet chercher avant de pouvoir remplir ma mission, soudain consciente de la responsabilité qu'elle impliquait (certains plis étaient urgents et importants).


Le bal des nazes


Réveillée au radio-réveil du tôt matin par la voix d'Éric Maravélias à la gouaille caractéristique (1), et qui disait sous l'effet de la dépendance aux drogues dures, l'impossibilité de réelle amitié, seulement des alliances ponctuelles, et les talents inouïs de comédiens que pouvaient alors déployer certains pour se procurer l'argent pour le produit. Il relatait les prospections de feu rouge, et la capacité à embobiner des automobilistes qui descendaient même ensuite aider avec leur carte bleue.

Ça m'a remis en mémoire l'arnaque dont une amie avait été victime dans les années 80, gare de l'Est, quelqu'un qui parlait allemand de langue maternelle et montait toute une histoire de sac volé avec les papiers, l'argent et le billet de train et pourriez-vous me le payer que je puisse rentrer chez moi, je vous rembourserai. Et combien c'était crédible. Avoir revu à l'œuvre la même personne quelques mois après et compris alors ce qu'il en était.

Une autre connaissance, plus tard, qui avait failli tomber dans le même panneau sauf qu'elle était trop désargentée pour pouvoir aider.

L'ennui c'est qu'après, quelqu'un qui se retrouve vraiment pris au dépourvu, piégé par un vol, égaré, ne trouve plus à se faire aider.

Ce gars qui faisait la manche dans les trains à une époque où La Kriz n'avait pas encore usé le procédé. Jeune, du charme, il offrait une histoire de foyer et d'âge limite, ou de cure de désintoxication réussie (2), et je me souviens d'y avoir cru, mais de n'avoir sur moi que de quoi acheter le pain du soir (le bien-être de mes enfants limite efficacement ma générosité, même encore maintenant), donc de n'avoir rien pu faire que de souhaiter bon courage et presque m'excuser de n'avoir rien à offrir. Puis pour une raison ou une autre (problème technique ou me souvenir soudain que j'avais des photos à récupérer (c'était du temps des photos en papier)) redescendre, et un peu après enfiler un autre quai ... sur lequel se tenait le garçon en plein bilan avec un confrère et qui commentait sur le mode C'est au point, ça marche bien tout en comptant ses sous qui ne semblaient pas rien.

Plus jamais je n'ai pu croire un manchard à histoire. Alors que parfois il se peut que quelqu'un soit dans une vraie misère. Le peu que je peux donner c'est au clochard silencieux et courtois du quartier, devant le marchand de journaux presque tous les jours et par tous les temps ce qui suffit à faire comprendre que quelle que soit sa situation l'argent lui manque réellement (3). 

Il en est de même pour l'amour, avec celui qui les larmes aux yeux à la terrasse de ce salon de thé bruxellois fameux (4) m'avait confié que c'était fini pour lui et moi qui connaissant par le menu tous ses ennuis de santé n'ait pas eu l'ombre d'un début de doute et avais accepté le cœur chaviré cette façon d'aimer tronquée que son âge et la maladie nous laissait. Après avoir été quittée pour une autre à qui visiblement il n'avait pas tenu du tout le même discours, je m'en suis d'abord voulu de ma naïveté - comment peut-on rester si cruche à un âge déjà avancé -, puis me suis rappelé les enchaînements de circonstances et combien d'autres expériences de ma vie avait pu rendre l'explication plausible de son manque d'appétence après avoir séduit. D'avoir entendu l'auteur de "La faux soyeuse", je me dis que j'ai eu affaire à un acteur à son meilleur et qui avait besoin alors vital que je continue à l'aider dans son travail, puisque j'étais bien placée pour l'aider à le diffuser. Un acteur de dans la vie, au même titre que ceux qui tombés dans la consommation de produits destructeurs, trouvent pour refourguer leurs fictions d'affliction des ressources créatives inouïes et une qualité d'interprétation inégalable. Le rôle de sa vie.

Et dans ce cas comme dans ceux des arnaqueurs et des mendiants, mais hélas avec de plus lourdes conséquences, le barrage que ça met pour d'éventuels suivants dont l'histoire serait réelle, le besoin de secours, la détresse physique, l'incapacité, voire l'amour qu'ils auraient à exprimer (ce dernier l'avait auparavant fait, merveilleusement écrit, puis dénié, il avait juste "envisagé"). À présent quoi que dise qui qu'il advienne, je ne saurai croire ses mots.

Autant qu'à leurs victimes, les arnaqueurs, qu'il s'agisse d'argent ou de sentiments, font un tort infini aux sincères suivants.

Merci au passage à Éric Maravélias de m'avoir rafraîchi la mémoire et ouvert les yeux. Je lirai son livre dès que je pourrai.

 

 

(1) Combien de personnes en l'entendant et comme c'est le cas pour toute personne munie d'un passé troublé ont-elles pensé Bon sang, ce salaud ! (je n'écris pas ça contre lui personnellement, qui était peut-être resté autant que possible a decent guy, mais d'expérience de ce qu'on endure auprès de ceux qui cumulent charisme et fêlures et pas même forcément avec la circonstance atténuante de dangereuses addictions)

(2) J'avais eu droit aux deux à quelques temps d'intervalle.

(3) Ou alors je donne aux musiciens des couloirs du métro (je dis bien DES COULOIRS car à part un virtuose de temps en temps je déteste qu'on me casse les oreilles dans un wagon) mais pour remercier d'une belle interprétation.

(4) Enfin je crois vu le nombre d'amis qui spontanément me l'ont proposé comme lieu de rendez-vous du moins dans le quartier concerné.

PS : Pour les moins de vingt ans oui bon bien sûr le titre


Certes ultra-ponctuels mais des emplois

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L'article de "La voix du Nord" avec la liste complète des personnes recherchées est par là

Il nous est arrivé ma petite famille et moi, surtout le fiston gamin, de participer à des films comme figurants. Peu, parce que ma vie était trop chargée pour que j'aie beaucoup le temps de suivre les annonces, mais avec des réponses à chaque fois et des rappels pour d'autres films parfois. 

C'est une expérience intéressante à condition d'être prise pour ce qu'elle est : une chance ponctuelle de faire quelque chose qui sort du train train quotidien et permet de ramener trois sous et de jolies anecdotes à la maison.

Ça peut être fatiguant - tout dépend les conditions de tournages et si le réalisateur est de ceux qui font reprendre plus de 25 fois une scène ou se contente de quelques prises.

C'est instructif de toutes façons. Le cinéma, quand le budget y est, est un des rares domaines professionnels où il y a du monde pour faire chaque chose et c'est très intéressant à regarder un travail où les tâches sont bien réparties et où le plus souvent les gens sont motivés. On est devenu si habitués à un monde où ceux qui taffent sont en surcharge et obligés de s'occuper de plusieurs choses à la fois.

Le tournage d'un film a bien des points communs avec un chantier de bâtiments ou travaux publics.

Pour la figuration peu de compétences, sauf cas particuliers, sont requises : être ponctuels, patients, capables de piger vite ce qu'on vous demande, patients, et d'être disciplinés et patients. Capables aussi de savoir faire abstraction de la présence de caméras. Et se taire lorsque "Silence" est dit. Il est extrêmement préférable d'arriver en forme et n'être surtout pas sous l'effet de quelques substances (médocs et alcool inclus).

 Enfin ce qu'il faut savoir c'est que si l'on convient vraiment à ce qui est cherché, même si on ne connaît personne et qu'on n'est pas recommandé, on a sa chance. Ça ne coûte d'essayer que le temps d'envoyer une candidature, et avoir deux ou trois photos à montrer. Pas la peine d'en faire des caisses, si on convient ça ira. Sinon tant pis, au moins ça sera sans regrets.

Bref, tout ça pour dire : si vous êtes dans la bonne région (Lille, Roubaix ...), si vous êtes un peu disponibles et ressemblez à l'une des descriptions, foncez. Sans illusions, sans rêver, mais foncez. Ce sont de brefs mais bons emplois.

 


Inquiétude pour la Maison des Écrivains

Lu ceci ce matin via Philippe di Folco : 

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L'intégralité de l'article est ici. Je suis inquiète de la disparition d'activités qui m'ont beaucoup appris, offert des moments d'émotions aussi, permis de belles rencontres. J'étais une assidue des mercredi midi organisés par la MEL au Petit Palais. Garde un souvenir ébloui de certaines rencontres, dont celles qui s'appuyaient sur des documents de l'INA et le récent hommage à Daniele Del Giudice. Si je n'y venais plus depuis septembre 2013, à part pour les rencontres placées le samedi, c'était uniquement car mon emploi du temps était devenu incompatible et l'est plus encore depuis mars dernier.

Je trouvais bien et tout à fait légitime qu'il reste ainsi cette place pour des auteurs de qualité, des échanges qui ne soient pas que de la com promotionnelle (1), des invités pas nécessairement équipés d'une grosse notoriété mais d'une belle exigeance d'écriture. 

Hélas, l'air du temps exige des paillettes, de l'accès facile, de la poudre aux yeux et surtout pas que le peuple s'instruise ; des fois que ça lui prenne de réfléchir au lieu de consommer.

Même si depuis un moment je ne peux plus directement en profiter, je serais triste si les activités ouvertes au public de la Maison des Écrivains devaient cesser. Ce serait d'autant plus étrange que la ministre de la Culture actuelle, Aurélie Filippetti connaît de l'intérieur le métier et aussi ce que c'est que de devoir apprendre par ses propres moyens et combien est précieux tout ce qui est accessible. À tous. À chacun de ceux qui sont prêts à faire l'effort de quitter l'écran de leur télé. Ou de cesser un instant de jouer.

 

(1) Bien des auteurs viennent hors de toute actualité personnelle.


Tant mieux pour elle (rire intérieur)

 

Évidemment ce n'est pas un bel homme qui m'a adressé la parole après m'avoir fixée (ce dont je n'avais pas été plus que ça consciente sans doute précisément pour cette même raison) mais une dame d'un âge certain de mon âge et qui me dit Pardon j'ai cru reconnaître de profil quelqu'un mais elle ne s'habille pas du tout comme vous alors ça m'étonnait.

Je me suis efforcée de répondre par une brève aimable amabilité. À l'intérieur je sentais le fou rire monter. Il est vrai que n'ayant rien prévu d'autre qu'être au calme à écrire, j'étais vêtue en mode "tombé de la pile", confortable, adapté et à la clim et au temps que dehors il faisait. Ce qui donnait : 

- des chaussures d'été en toile, neuves, toutes simples, trouvées dans la rue et qui m'allaient comme à Cendrillon son escarpin ; deux fois cette année que je trouve des chaussures parfaites - trois en comptant une paire qui n'est pas pour moi -, je vais finir par me demander ce que ça peut signifier.

- un tee-shirt d'encombrants d'il y avait longtemps et donc doublement hors mode (sans doute jeté car il ne l'était plus) ;

- un pantalon d'une marque sportive (mais pas de survêtement : une belle toile de coton) d'une coupe assez street-dance et que j'ai depuis depuis depuis ... allez, mettons 10 ans ;

- un gilet un peu trop grand, terriblement doux, sans doute prévu pour homme, trouvé aux encombrants récemment. État neuf. Soit il s'était mis à déplaire, soit il n'était pas à la bonne taille ou possédé par quelqu'un qui soudain avait grandi.

L'ensemble était complété par ma sacoche d'appareil photo. Je ne sais pas pourquoi mais dans cette société une femme n'est pas censée prendre des photos quotidiennes. Et les hommes ont des poches assez grandes pour pouvoir y tenir un appareil plat. Je n'ai pas un très gros appareil mais j'ai besoin d'un sac pour qu'il y soit.

Bref, un ensemble qui devait donner une allure Deschiens-Sport Technicienne que ne devait certainement pas avoir la connaissance de la dame à la mise bourgeoise et très comme-il-faut-pour-son-âge qui se tenait devant moi. 

Et je pensais si fort "Tant mieux pour elle", envers cette personne qui me ressemblait de profil mais savait s'habiller, que j'en ai eu les larmes aux yeux de me retenir de rigoler.

J'avais quand même une fort jolie veste, un vêtement de créatrice et qui allait bien avec l'allure "dance" du pantalon, achetée à La Rochelle il y a presque ou dix ans. Il faut toujours que subsiste un petit chic, c'est Maria Callas qui disait ça. Tout n'est pas perdu.


Les photos du mariage à Clohars-Carnoët

[billet pour une fois un peu "members only" mais l'idée est que tous ceux qui sont concernés puissent venir récupérer ce qui leur plaît. que les lecteurs inconnus habituels veuillent bien me pardonner]


Alors bien sûr je voulais ne garder que les moins ratées, recadrer, rééclaircir, bref un tantinet travailler. Puis j'ai été trop fatiguée et aussi peut-être qu'une photo que j'estime manquée peut amuser quelqu'un d'autre. Alors je n'ai pas trop trié.

Certaines sont un brin #WTF oui je sais (mais aussi prise pour telle ou telle personne, pour l'amuser).

En mode diaporama

En album

Enfin, pour les participants qui auraient raté le message général de Matoo et Alex (ça m'arrive, donc je pars du principe que ça peut arriver à d'autres), l'album général compilé par les jeunes mariés est par là (attention : il est déconseillé de cliquer sur ce lien si l'on a une connexion faiblarde de vacances au fin fond d'assez loin)

 


Toujours vivant(e), cet étonnement

 

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Une fois de plus tu as cru mourir de fatigue (ce qui l'été est rare) et puis finalement non. Après deux jours dans d'étranges limbes mais qui te sont assez familières, heureusement la lecture reste encore possible - et tu t'es régalée des livres cousins d'Olivier et de Thierry -, tu reprends pied dans la vie. 

Revoir Simone, revoir Milky, croiser un ami (oui parce qu'en vrai Paris c'est tout petit) ; porter un appareil à la révision et voilà la journée remplie. 

Recevoir cet appel sur ton téléphone que tu as cru de ton banquier : il y était question de ta banque et si c'était là ton compte principal. Tu as mis plusieurs répliques avant de piger qu'il s'agissait de réunions de consommateurs et tu as été sidérée d'être discalifiée au motif que tu consultais tes comptes par l'internet à ton âge avancé (1). 

Bon d'accord tu y as ajouté un instant de beauté - et oui, ça peut paraître bizarre, la beauté peut fatiguer, elle touche quelque chose tout au fond qui laisse un peu secoués -, un détour pour saluer Paul et comme j'aime autant taquiner
les défunts définitifs que les vivants marrants
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j'ai lu non loin de là quelques chapitres d'un excellent roman où son "ami" est évoqué souvent. J'aimerais bien savoir ce qui s'est joué entre vous à Bruxelles, il se joue toujours à Bruxelles entre les gens des trucs surprenants.

 

- Hé, tu sais quoi, monsieur Paul, ça serait maintenant, vous pourriez vous épouser. En revanche revendiquer poète comme profession, ça pourrait plus, c'est mort. Ou alors vos textes il faudrait les slamer, les raper. En faire des paroles punk-rock. 

 

Vous dites quoi ? Ah, vous dites : "quoi" ? Ah oui, il s'est passé des trucs quand même un peu depuis tout ce temps là. N'empêche, vos textes on est encore tout plein à les connaître, et pour certains par cœur. Moi je suis juste une voisine, je passe donner les nouvelles, comme ça, mais j'ai quelques amis qui savent vraiment tout. Et est-ce qu'on vous a dit au moins pour le débarquement ? "Les sanglots longs. Des violons" ?

 

Le quoi ? Ah je vois, même ça. Je crois qu'il va falloir que je revienne plus souvent. C'est bizarre comme votre tombe est toujours fleurie je croyais qu'on était nombreux à venir, à vous dire. A te dire. Au fait je ne sais plus, on se vouvoye ou on se tutoie ?

Ah, les autres ne parlent pas. C'est dommage, si j'y arrive pourquoi ils n'y arrivent pas ?
Peur ? Ah oui, moi non. Peur j'ai pas, je suis toujours un peu entre les deux, des maladies enfants, des fièvres fortes, de l'épuisement, quelqu'un qui nous quitte violemment. Ça tient à pas grand-chose qu'on revienne ou pas. Si je devais éprouver un truc ce serait la surprise d'être toujours là. Enfin je veux dire : du côté où aujourd'hui je suis moi.

Bon, je vous laisse, j'ai un livre à finir. Oui, je travaille comme libraire. C'est un métier qui existe encore, mais plus tout à fait pareil et plus pour très longtemps. On lit moins qu'avant. Et puis aussi sur des écrans. 

D'accord la prochaine fois j'explique les écrans et le débarquement. On garde le slam pour la rentrée, OK.

Salut monsieur Paul, repose toi bien. Quoi ? L'éternité ? C'est malin, alors je fais l'effort d'éviter l'allusion pour pas être reloud et c'est vous toi qui la fais. Charleville ? Non, jamais allée. Je suis quelqu'un qui n'a eu que les sous moyen moyen pour voyager, et Charleville ça s'est pas trouvé. Mais j'ai un ami qui est pas trop loin et qu'à chaque fois il fait le détour. Un peu comme moi pour vous. 

(C'est vrai que ça serait top un wi-fi des morts). Ah zut, c'est vrai vous entendez aussi ce que je me dis à moi-même. Wi-fi c'est un peu compliqué à expliquer sans les étapes qui précédaient. Mais je le mets aussi sur la liste des trucs à expliquer.

Allez, maintenant j'y vais.

Et tu es allée lire un peu plus loin, un passage où il était solidement question d'Arthur et de ses voyelles. Après ça, quoi d'étonnant à ce que tu ne croies pas que le hasard soit si hasardeux qu'on croie. 

Tu croyais avoir passé l'heure de la sieste, victorieusement, pas ensommeillée pour un rond et puis ça t'a pris après le retour de bonne heure de l'homme de la maison. Il était secoué par l'annonce du départ en retraite du médecin qui le suit. Tu as tenté maladroitement de le réconforter. Tant d'échanges tout au long de la journée t'avaient en fait épuisée alors tu t'es endormie en tout début de soirée. 

Mais ça avait été quand même une belle journée, allez.

 

(1) Ça n'était pas dit comme ça mais s'ils cherchaient des personnes de ma catégorie d'âge c'était précisément pour évaluer leur capacité à passer enfin aux consultations de comptes et autres opérations via l'internet. #ohwait comme on disait sur twitter il y a deux ans.


Pendant ce temps l'air qu'on respire (et la modification du climat)

On ne pourra pas dire qu'on ne savait pas. Mais bon il fallait semblait-il continuer de produire toujours plus, croître et se multiplier et surtout consommer. 

Qu'adviendra-t-il quand nous aurons détruit la planète qui nous fut confiée et qu'on est en train de bousiller comme un sale gosse son plus beau jouet ?


Et si on se disait "tu" ?

 

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Française de langue maternelle j'avoue ne toujours pas être parvenue à m'y retrouver. Ni d'ailleurs non plus dans mon propre usage, capable que je suis de rester pour certains sur le "vous" par admiration alors que pour d'autres c'est pour garder distance, capable de "tu" totalement intempestifs ou parfois de revenir au vous parce que je ne me souviens pas, bref, un guide ne m'était pas non plus inutile. J'ai trouvé grâce à deux canaux d'amis touitons celui qui suit, anglo-saxon et hilarant et si bien vu en même temps : 

Brush up on your french with this Bastille Day flowchart

(un grand bravo à William Alexander)

 


Comme un vide étrange et léger

 

Je me souviens gamine puis jeune, d'avoir suivi des compétitions sportives comme si j'étais personnellement impliquée, d'avoir regardé des JO comme une fête (ah, 1976, Nadia Comaneci), suivi des Roland Garros en remplissant des grilles scores à scores matchs à matchs (et bien avant l'internet, ce qui voulait dire piocher les infos dans les résumés télés, à la radio, plus rarement (ça coûtait des sous) dans les journaux, de m'y faufiler dès que ça pouvait, d'avoir vibré pour l'ASSE en coupes d'Europe (1) et les coupes du monde de foot étaient des grands rendez-vous. Moments de partage avec mon père, ce qui n'était pas rien, lui qui était enfermé dans un rôle de dictateur familial qu'il croyait devoir exercer pour être un chef de famille tel qu'il croyait que son devoir était.

Puis la pratique du foot c'est éloignée, les compétitions / retransmissions se sont multipliées, les joueurs sont devenus des gros machins violents (2), et puis il y a eu les morts du Heysel, les blessés, le match joué quand même et comme ma vie était bien remplie ça m'a éloigné de tout ça.

Au point de ne plus trop savoir, sauf en 1998 parce que ça se jouait "chez moi" et qu'en fait de ce que j'en ai vu ce fut plutôt festif (3), quand a eu lieu quoi et gagné par qui. À part vaguement 2006 un certain France Italie regardé le cœur brisé (4) et si déçue par ce geste de Zidane que je trouvais classe jusqu'alors et admirais (5).

Et puis voilà, cette année, les horaires de matchs étaient presque compatibles avec une vie de labeur salarié, les premiers matchs ont semblé riches en actions, arrêts, jolis buts, j'ai repris de jouer un peu depuis l'été dernier et il s'est passé suffisamment de temps pour que certains des morts du Heysel aient pu s'ils avaient vécu mourir de tout autre chose (7), du coup je me suis prise au jeu de regarder.

Ou plutôt d'envisager de regarder ... sans pour autant le faire. Soit que ma vie m'accaparaît, et d'ailleurs au dernier match de l'équipe de France je tenais boutique et nous avions bien des clients : tous ceux qui fuyaient le foot, le bruit, l'agitation incompréhensible pour qui n'est pas intéressé, la télé.

Soit que je m'organisais pour voir, mais suivant sur le petit ordi dans un canapé en bonne compagnie ou bien mon lit, je m'endormais comme une enclume. J'ai le souvenir d'un match de 23h avec prolongation, pendant lequel j'affleurais l'éveil par moment, persuadée que les règles avaient soudain changé, que les scores se comptaient comme au tennis (ou tout autre sport sans temps limité), qu'un match désormais pouvait ne pas cesser, durer une nuit en entier.

Au bout du compte il n'y a que la plutôt décevante finale que je suis parvenue à regarder dans sa quasi intégralité. 

Et comme j'ai mis du temps à accrocher, j'ai tout ignoré des différentes poules, le peu que j'ai suivi c'était sans vue d'ensemble. Des bribes. Des bouts. Des souvenirs des conversations plus que des parties jouées.

Alors c'est très étrangement que ce soir je ressens un peu de ce vide d'antan ; quand il faut retourner à sa bête petite vie parce que "le" truc du moment s'est achevé. Ce qui structurait les journées, aidait leur part fastidieuse à passer, donnait la force de se hâter d'expédier telle ou telle corvée pour ne pas rater telle ou telle retransmission, offrait des sujets de conversations entre collègues ou inconnus, donnait l'impression d'une intensité alors même que notre quotidien n'avait en rien changé. De la même façon que les tout débuts d'un amour, quand tout semble prendre davantage de sens alors qu'on ne connaît rien de l'autre ou si peu et qu'on n'est pas même certain(e) de se revoir sous peu.

Et je me suis sentie toute bête, tout à l'heure, lorsqu'il n'y a plus eu aucun match à manquer, aucune mi-temps à passer en lutte contre le sommeil, aucun gardien de but à admirer, aucune dramaturgie somptueuse à saluer (8).

Il n'y a plus à nouveau que les guerres à compter. Elles semblent avoir profité de l'attention détournée pour bourgeonner. On ne se méfie jamais assez.

 

 

(1) Comme je suis heureuse d'avoir conservé des traces écrites de mon enthousiasme d'alors, d'avoir pris le temps de me le garder au chaud alors que je n'avais que 12 et 13 ans et déjà l'idée que si je n'atteignais pas l'âge adulte (ce que ma santé fragile souvent me laissait penser) il faudrait au moins qu'il reste une trace de ces bonheurs-là ou que si je passais la barre, un jour longtemps plus tard je me ferai rigoler (Bingo ! J'ai gagné). J'avais aussi un peu peur que les si fortes fièvres que le moindre rhume me déclenchait me laissent un jour la tête perdue dans les délires engendrés et que je devais écrire pour m'aider éventuellement à retrouver des morceaux de moi, j'étais donc diariste comme le petit Poucet semait ses cailloux. 

(2) J'ai des souvenirs de bouts de matchs entrevus dans les années 90 où le jeu semblait n'être plus que de la supériorité physique et se faire salement tomber.

(3) Je sais et me souviens qu'il y eut des violences ici et là, mais il se trouve que les situations que j'ai croisées (ne suis allée à aucun match : trop cher, trop compliqué, trop pas le temps, n'ai suivi que dans la rue, vu les supporters, la liesse dans les cafés) furent toutes joyeuses et bon enfant.

(4) Je souffrais encore comme une malade de la rupture brutale d'amitié encaissée quelques mois plus tôt. Le sol n'était pas stable. 

(5) Je m'étais dit à l'époque qu'il avait dû abuser des produits stimulants mais qui donnent les nerfs et que peut-être aussi ou par ailleurs ce salaud de Materazzi (bizarre, pourquoi vouloir in peto qualifier de salaud un type que je ne connaissais pas ? Qu'avais-je capté ?) lui avait glissé qu'il était l'amant de sa femme et que ça avait fait au grand taiseux le coup du rideau qui se déchire, cet instant où d'un seul coup des petites bizarreries cumulées auxquelles on n'avait pas prêtées attention s'aggrègent pour prendre sens - généralement qu'on est en train d'être quitté(e)s pour quelqu'un d'autre - et qu'alors on s'effondre ou on devient tuant (6). Ce qui est curieux c'est que des années après un ami m'a dit qu'un bruit circulait en ce sens. Longtemps plus tard, lisant l'excellent livre de David Lagercrantz sur Zlatan j'ai appris que le joueur italien était coutumier des pires provocations verbales ciblées que c'était dans sa panoplie pour diminuer les attaquants adverses. Et que donc mon imagination n'était pas si improbable.

(6) ou encore on s'effondre en se tuant soi-même.

(7) Oui je sais ça peut paraître tordu comme raisonnement mais ça n'en est pas un. Ni non plus du cynisme. C'est une sorte de ressenti animal, une bouffée pas très politiquement correcte, j'en conviens, de vitalité.

(8) Ah cet entraîneur batave qui fait entrer juste avant la fin du match LE gardien arrêteur de pénalties. Grand moment Shakespearien.