Merci monsieur Plenel
Alors on danse

En marge du débat sur le travail du dimanche (la question des "faux choix")

 

Pendant qu'une discussion fait rage sur twitter entre plusieurs de mes amis au sujet du travail du dimanche, je voulais juste à la marge rajouter un petit exemple personnel pour illustrer la notion de "faux choix". Parce qu'il est dans ce débat beaucoup question de volontariat. 


Seulement voilà, dans la pratique, il arrive que le volontariat ne soit pas si volontaire que cela. Entre ceux qui craignent pour leur poste ou le renouvellement de leur contrat s'ils refusent de venir travailler à des jours ou des horaires particuliers, ceux qui acceptent parce qu'ils sont financièrement coincés et que ces heures avec contraintes spécifiques sont pour l'instant mieux payées, je crains que les volontaires sincères, ceux qui peuvent réellement peser le pour et le contre et dire d'accord (ou pas), ne soient pas si nombreux que l'on croie.

Il m'est arrivé plusieurs fois durant ma vie professionnelle en entreprise d'être confrontée à quelques faux choix, des sortes de "On compte sur vous, n'est-ce pas ?". Ça ne concernait pas le dimanche mais le mécanisme était du même ordre.


Par exemple lorsque ma fille, qui avait alors 15 ans (1), était tombée malade avec périodes d'hospitalisation et surtout examens médicaux passés dans des hôpitaux différents avec contraintes horaires indépassables (2). Je travaillais par choix à mi-temps et m'efforçais donc de caler les rendez-vous hors de mon temps de travail. Mais ce n'était pas toujours possible. Pour prendre une demi-journée de congé ou de RTT, il me fallait l'autorisation de ma hiérarchie. Laquelle était à l'époque quelqu'un de correct, d'humain, mais qui avait ses contraintes de fonctionnement d'équipe. Notre travail, technique, aurait dû être planifiable, reportable en cas d'absence, mais une inorganisation organisée, ce mode de management dans l'urgence, venu d'en haut faisait qu'il nous fallait souvent répondre vite à des demandes et qu'effectivement une absence pesait. À ma demande d'un jour de congé ou de RTT pour la semaine suivante afin d'accompagner ma fille à l'hôpital, je m'étais entendue répondre : - Oui bien sûr mais tu prends tes responsabilités.

(sous-entendu : si l'un des sujets dont tu es responsable présente une urgence ce jour-là elle ne sera pas couverte, tu en paieras les conséquences)

Je ne pouvais vraiment pas reporter le rendez-vous médical à un autre moment, j'ai accompagné ma fille. Et finalement j'ai eu cette chance qu'au travail rien de fâcheux ne soit survenu pendant ce temps-là.

Mais n'était-ce pas typiquement un faux choix ?

(et qu'ensuite on est clairement catalogué comme quelqu'un de peu motivé, dont le travail n'est pas au niveau de priorité que l'employeur réclame)

 

C'est un exemple parmi bien d'autres, qui font qu'en vieillissant et n'ayant plus confiance en la bonne humanité des gens en général et des employeurs en particulier, je préfère que des garde-fous protègent le salarié y compris de lui-même. Quand on est jeunes, on peut se croire assez forts pour savoir dire "non" lorsqu'on ne le souhaite pas. Lorsqu'on devient parents, lorsqu'on s'est endettés pour payer son logement, ou que le loyer est un poids difficile à soutenir, tout change ou lorsqu'il nous faut prendre en charge les vieux jours de nos propres parents, on s'entend dire "oui" par sens des responsabilités. Entre temps le "non" s'est chargé de conséquences bien plus lourdes que celles d'un choix personnel, "I would prefer not to" reste un choix apparent mais qu'on n'envisage plus. Dans certaines circonstances, on peut tous être tentés de mettre le travail en toute priorité. Il peut être bon d'être parfois obligés de dire non, que des limites s'imposent ; aux employeurs comme aux employés.

 

(1) D'où qu'elle était trop âgée pour que je bénéficie de certaines garanties accordées au parents d'enfants malades petits, mais trop jeune et surtout trop malade pour aller seule à ses rendez-vous médicaux.

(2) Du type : les IRM c'est forcément le mardi ; ou bien : si vous ne prenez pas ce rendez-vous le prochain est dans 1 mois 1/2 (et le patient souffre, on ne peut attendre)

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