Le questionnaire de Sophie Calle - sept ans après
26 juin 2013
Période délétère porteuse de tant de fins, au travail comme ailleurs. Je passe du temps à préparer des caisses de livres que l'on renvoie, il n'y a plus assez de clients. Ces retours se font désormais sur un rythme impitoyable, et je m'attriste que certains ouvrages partent sans qu'on ait pu les défendre vraiment.
Ainsi ce volume pour lequel Sophie Calle, qui est quelqu'un que j'aime et dont le travail me touche, a répondu à quelques questions.
Par ricochet j'en suis venue à retrouver son questionnaire et me demander si aujourd'hui, sept ans après et un cycle complet dans ma vie plus tard, je répondrais de la même façon.
Il y a dix ans aujourd'hui que j'ai écrit mon premier texte. Je préparais le gâteau d'anniversaire de mon fils, tard le soir après le travail et afin qu'il fût prêt pour le dîner du lendemain. La semaine précédente, par la suite d'un joli enchaînement de circonstances dans lequel elle n'était pas pour rien, j'avais participé à un tirage au sort qui m'avait permis de gagner un home cinéma. Alors en attendant que le gâteau cuise, et dans l'idée de ne pas m'endormir et le laisser cramer, j'ai voulu envoyer à mon amie la plus proche un message pour lui raconter ce qui m'était arrivé de joli.
Ce n'est pas un message, mais un texte qui est venu.
Cinq mois plus tard, elle me mettait le pied à l'étrier. Six ans après, je parvenais à quitter le job alimentaire nécessaire à payer notre logement, toutes dettes apurées.
J'ai depuis la chance de travailler comme libraire, c'est un métier que j'aime, que je peux exercer tant qu'il existe encore.
Il n'empêche qu'il est temps désormais que je me consacre entièrement à mon travail. J'ignore si économiquement je pourrai. Je n'ai plus l'âge d'être raisonnable.
Le questionnaire de Sophie Calle
Le livre que je n'ai pas fini (réponse 2006).
ma vitesse de lecture et un certain sens de l'orientation (sauf lors des enterrements qui me déboussolent). (réponse 2006 toujours d'actualité)
la confiance en moi (réponse 2006, toujours vraie) et en les autres (ajouterais-je quelques déceptions plus tard)
Je n'en sais rien. En revanche je sais que si on l'est mais en n'étant pas né au bon endroit au bon moment ni du sexe favorable, on est mal barrée (réponse 2006, toujours OK).
from outer space, no doubt about it (réponse 2006, unchanged)
Toutes sans exception (et ce n'est pas le père de mes enfants qui me contredira). (réponse 2006 et rien n'a changé)
Rire, lire, écrire, photographier, passer de bons moments avec ceux que j'aime, nager, aller au cinéma, écouter de la musique, chanter, voyager. (réponse 2006, toujours valable)
Je n'ai plus aucun rêve matériel. Du temps à ma main, de la bonne santé, de l'amour à bonne hauteur.
J'ai du mal à détester les gens en général et les artistes (les vrais, pas les vendeurs de soupes industrielles) en particulier.
n'être qu'une amie pour un homme qui m'a donné envie de l'aimer.
Voilà qu'à présent je n'ai plus de fragilités particulières (ça alors !). Vive le sport et le fait d'exercer un métier un peu physique.
(presque) mourir et plusieurs fois (réponse 2006, hélas toujours valable)
De ne pas tenir compte de ce qu'on ne m'a pas dit.
« C'est dommage, y a pas l'internet» (réponse 2006, mais peut-être que depuis, l'enfer s'est équipé ?)
un fantôme favorable (réponse 2006, inchangée)