Alain Maximilien
17 mars 2009
Lundi soir, soudain
Alors que depuis samedi soir j'écume méthodiquement mes carnets de bord anciens dans l'espoir d'y trouver un compte-rendu d'époque du concert qu'Alain Bashung avait donné dans le gymnase absolument pas fait pour ça de ma banlieue éloignée et qui, je le croyais, me l'avait fait connaître, voilà qu'en consultant wikipédia afin de vérifier la date de sortie d'un album bien ultérieur ("Novice" sorti en 1989) que j'avais découvert en décalé et ne savais donc plus situer, je m'aperçois qu'au fond la première fois que j'ai entendu l'artiste sur scène datait de bien avant.
J'étais en 6ème et une de mes cousines que j'adorais et admirais (pourquoi d'ailleurs mets-je cette phrase au passé ?) était venue habiter chez mes parents le temps de se trouver à Paris un logement étudiant. De cette période qui n'avait probablement pas dû durer plus d'un trimestre, je garde un souvenir ébloui. Mes parents n'osaient pas en sa présence se disputer comme à leur ordinaire et c'était pour moi qui vivais dans la peur d'être le prochain prétexte et qu'un jour ça dégénère, une trêve merveilleuse.
M'ayant sentie par ailleurs réceptive et sans doute bien un peu seule, elle avait entrepris de me transmettre ce qu'elle pouvait. Je lui dois les Vallès et les Misérables, d'autres lectures probablement, et quelques sorties miraculeuses que sans elle et son fiancé courageux (1) je n'aurais jamais faites.
L'une d'elle fut "La révolution française" au théâtre Mogador. L'éblouissement fut tel, avec ma soeur et mes parents nous ne sortions que pour le cirque du 1er janvier, un peu de ciné pour enfants et quelques rares concerts classiques, que je me souviens encore de certaines mélodies de cette comédie musicale ("Chouans en avant" et "On m'appelle Charles Gautier"). En revanche du haut de mes 10 ou à peine 11 années, j'avais prêté peu d'attention au nom des interprêtes. Je me souviens seulement que malgré un rôle de méchant (2), Robespierre m'avait semblé sympathique. Je devais probablement assez peu ressentir de compassion spontanée pour les ci-devants (?).
Ma cousine et son amoureux étaient assez critiques quant à la qualité historique du spectacle mais moi qui ignorais, j'avais simplement été bouleversée.
Voilà que 36 ans après, j'apprends que c'était l'air de rien à un peu d'un concert de Bashung que j'avais assisté. Le bougre y tenait le rôle de Maximilien. Pas étonnant que j'aie trouvé le révolutionnaire émouvant malgré les décisions sanguinaires qu'il prenait.
Quand j'avouais avant-hier à un ami qu'Alain Bashung pour moi c'était une longue histoire et sa mort une page de la mienne qui se trouvait aussi tournée, je ne croyais donc pas si bien dire.
(1) devenu son mari et le père de ses enfants, capable de venir en vélo exprès depuis Saint Germain en Laye ce qui tenait de l'exploit et à mes yeux d'enfant constituait une preuve d'amour inébranlable.
(2) Si mes souvenirs sont bons le Charles Gautier beau jeune premier, "fils d'un simple couturier", était amoureux d'une femme de noble extraction et bien entendu les jours de celle-ci se trouvaient révolutionnairement en danger.
Je suppose que tout bien-finissait.