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Samia et l'escroc potentiel

dimanche dernier, Paris Xème

P3230120 BILLET NON RELU

relu et modifié le 30/03/09 9h45

Pire que perdre un amant, pour moi perdre un ami, généralement s'il s'agit d'un homme pour cause de "ta place ne serait pas comprise, elle n'est donc plus ici". Le désir, on le sait, est plutôt fugitif alors qu'on aimerait inscrire l'amitié dans la très longue durée.

Il est élégant et attentif qui ne me l'a pas dit si crûment, pas ainsi, mais toutefois j'ai bien compris. Depuis la volatilisation de Wytejczk il ne m'est plus inconcevable que les plus belles tendresses, les plus solides affinités soudain ne comptent plus et que l'autre tourne la page sans nous en avertir et nous raye de sa vie.
Cette fois-ci j'étais dans la peine mieux lotie, prévenue, avertie et légèrement protégée par la géographie.

Pas suffisamment cependant pour pouvoir encaisser la nouvelle absence légèrement (1).

C'était dimanche.

Je rentrais chez moi. Trop fatiguée pour le vélo, trop tourmentée pour le métro. Parfois marcher m'est la seule solution. Mon Olympus me tenait compagnie, le plus fidèle de tous. 

Mes pas me portaient vers le quartier des gares, un des chemins possibles. Je me souvins alors que Samia le plus souvent le dimanche ouvrait.

Samia est libraire. J'aime sa maison mais n'en suis qu'occasionnelle. Qui me connaît peu pourrait trouver cela très logique : sa librairie n'est proche ni de mon quartier ni de mon ancien (attendez, je le retape tellement ça fait du bien : a n c i e n) lieu d'usine. Qui me connaît sait que je suis capable de traverser tout Paris et ses banlieues multiples pour le livre ailleurs introuvable, ou le libraire ami.

Mon souci avec Samia est d'une autre nature. Sa crèmerie est celle de quelqu'un qui préfère ne plus me rencontrer ("préférer ne plus rencontrer" étant une relation anti-réflexive, anti-symétrique et anti-transitive). Etant donné ma faculté à croiser par inadvertance ceux auxquels je pense (1 bis), j'ai tendance pour respecter à ne pas inutilement provoquer le destin. J'aimerais qu'il me soit favorable et nous offre un lieu où l'on pourrait enfin librement parler. Pas une librairie amie où l'on serait gêné.
De plus je sais par cette connaissance commune tant de belles choses sur la libraire alors qu'elle me connaît au mieux que comme cliente occasionnelle aux choix éclectiques et imprévisibles (2), que ce déséquilibre n'est pas sans me troubler.

Seulement ce dimanche-là, la soif de réconfort était bien supérieure à mes pauvres scrupules.

Samia se trouvait secondée par un homme en moustaches que je n'avais jamais vu. Ils s'occupaient d'une autre cliente ce qui me convenait. Je pus ainsi faire mon choix en toute paix. Je crains toujours de surprendre en connaissant trop bien des lieux et des livres que je n'ai en vrai que peu fréquentés. Le mode mémoire étendue que je possède parfois n'est pas très confortable aux moldus.

Parmi mon choix, un livre d'Arno Bertina, "Le dehors ou la migration des truites". J'aime l'auteur, voulais connaître enfin son travail et pas seulement une nouveauté.
Le libraire se révèla être de lui un fin admirateur, un fan, un vrai de vrai et qui m'accorda la grâce d'une leçon désintéressée (mes achats étaient déjà payés) sur la littérature algérienne. Il le fit avec tant de plaisir que je me retins de dévoiler le peu que je savais.

Entra alors un homme à l'air avenant et qui demanda le numéro de code de l'immeuble dont le magasin tient le rez-de-chaussée. Samia semblait le connaître de vue, mais n'était pas sans méfiance. Elle posa quelques questions judicieuses avant de se décider à confier l'info. 


Qui se révéla d'ailleurs incomplète (plusieurs portes successives ?) et l'homme revint.
Il s'était présenté comme un des professionnels chargé de vider l'appartement de M xxxx, mort à son domicile et sans héritiers (ou bien lointains) il y avait quelques temps de ça. Expliqua sa présence bizarrement dominicale par une surcharge de travail et la commodité à se garer. 


A peine fut-il parti que nous nous lançâmes dans un scrupuleux débat. Avait-on ou non bien fait de communiquer l'un des codes qui permettait d'entrer ? Samia éprouvait un doute solide, un regret. Je me trouvai immédiatement à la conversation associée, comme si j'étais une vieille camarade à qui toute confiance était accordée. Et s'il s'agissait d'un escroc venu dérober ? Mais non c'est sans doute juste un homme vraiment surmené dans son métier. C'est vrai que pour se garer en semaine dans le quartier. Il avait une bonne tête. Samia et moi presque en coeur Oui mais ça ne veut rien dire (Quels souvenirs cuisants avons-nous partagés ? Bref regard échangé et rire non commenté).
Quand je pris finalement congé en disant "à bientôt", elle me lança en riant :
- On vous tiendra au courant des derniers développements.

Je rentrai chez moi le coeur plus léger. Il fait bon de se sentir quelque part bienvenue et qu'il nous soit accordé une confiance spontanée.


[photo, non loin de l'Ile Lettrée, bizarrement le lendemain]

(1) "- Tu pleures comme si tu avais perdu quelqu'un." dit le personnage de Franck à celui de Miriam, page 118 du livre que je tiens ce matin.

(Elsa Osorio, "Luz ou le temps sauvage", lu pour le cercle joyeux des lecteurs de l'Attrape- Coeur)

(2) J'aime selon les moments des livres et des genres si différents et me balade des grands classiques aux livres pour enfants, sans parler de ceux que j'achète en guise de présents.

(1 bis) 30/03/09 au soir
N'est-ce pas ?


Le square du printemps

today, earlier on

PICT0003 Amoureux joyeux ou cousins contents et qui regrettent de ne pas se voir plus souvent, les voilà qui tournent autour du kiosque à musique, l'une en vélo l'autre par ses jambes et que le meilleur gagne.

Je m'étonne qu'à cette heure malgré le soleil, la petite place soit désertée. Elle qui aux jours sans contrainte scolaire accueille généralement des manipules d'enfants que surveillent en grappes rassemblées sur les bancs quelques mères surmenées (ou bavardes).

Peut-être que juste avant il pleuvait.

L'absence de population favorise le jeu sportif qu'ils se sont inventés. J'ignore qui de la cycliste ou du coureur à pied s'apprête à l'emporter, ni d'où leur est venue l'idée, mais ils s'amusent ; on le voit de loin. Leur vitalité fait du bien.

Me revient l'espoir d'un temps où j'en aurai.

[photo : in situ]


Trucs de jeunes et trucs de genres

mardi puis vendredi, en fin d'après-midi

1. Je m'apprête à filer à une rencontre littéraire qu'avec espoir j'attendais. Mon ordi ayant été long à se fermer, je crains d'être en retard. Stéphanot cependant quitte le sien pour me faire un doux bisou de "Bonne soirée" même s'il déplore d'être laissé.
Il vient vers moi en chantonnant paroles incluses un vieil air du père Goldman. N'en connaissant pas de reprise récente, je m'étonne légèrement :
- Ben tu chantes des trucs de vieux maintenant ?
Sans se démonter il me répond que oui, qu'il n'est pas sans connaître bien des choses d'avant puis enchaîne :
- Tu connais bien des trucs de jeunes, toi.
puis faussement offusqué :
- Est-ce que j'en fais un scandale ?


2. Assis à son ordinateur, il grommelle de dépit :
- La fille avec laquelle dans Dofus (1) je me suis marié, elle est jamais connectée ! C'était bien la peine.
Intriguée par cette mésaventure matrimoniale, je demande :
- Qu'est-ce que t'en sais que c'est une fille en vrai ?
Et lui, imperturbable :
- Ah mais en vrai, je m'en fous. Et puis de toutes façons, elle, elle est pas sûre que je sois un garçon.
(ça m'apprendra à poser des questions bêtes de vieille maman)



(1) pour les non-initiés un jeu en réseau qui fait grand succès tous ces temps derniers.


Pourquoi mon blog n'est pas là pour que j'y raconte ma vie

aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain, dans une cuisine c'est certain


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De même que ce sont les amis photographes qui prennent de nous les photos les plus justes, où nous ressemblons à ce que nous étions à un moment donné, ce sont mes "mauvaises fréquentations" qui narrent mon existence beaucoup mieux que moi. Il le font même avec 12 ou 13 ans d'avance, pour les plus doué(e)s d'entre eux, parfois.





[crédit photo Pierre Cavard, janvier 2008, jour des Gilda]


Ma cosa è successo ?

Ne plus savoir où on (en) est

Hier dans la soirée, Salon du livre de Paris

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je gagne au loto de quoi acheter dix livres me trompe de station, retrouvant mes automatismes du temps où tu étais Hubert pose à Alain-Paul d'excellentes questions je sais que j'aimerai ce qu'il écrit me rappelle Yannick un vieil ami perdu son humour il donne son adresse au monde entier et son mail à moi (j'ai demandé, j'ai osé) d'habitude les auteurs manquent de chalands pour lui les livres sont absents leur nombre insuffisant j'en profite pour Chevillard et Rémy de Gourmont en passant entend Denis j'aime sa poésie.

Reste.

Puis, 

file écouter Claro et Laureli je repense à Baschung aux amis à ta volatilisation non ne pas et voilà Julien Heureuse de te voir il semble tout chose je crois à l'épuisement d'une fin de salon je sais combien c'est décalquant mais il s'agit de grave à peine m'a-t-il avec tact demandé si nous étions elle et moi amies que j'ai compris le sort brutal mais ne parviens pas à croire que c'était volontaire il est sous le choc je le deviens aussi comment ne pas penser je ne parviens qu'à éviter de dire les stupidités d'usage ou peut-être que j'en dis quand même failli avouer que sans Philippe B j'aurais qui sait il y a trois ans moi aussi bon sang mais que s'est-il passé j'attends néanmoins Emmanuel Carrère au stand d'à côté et j'y vais mais ce n'est pas comme si de rien n'était et toi à qui j'aurais soudain tant besoin de parler mais pour dire quoi que quelqu'un que j'appréciais quand je la croisais est morte comme j'avais failli étrange façon de renouer je ne veux te faire endosser aucune culpabilité l'enchaînement des circonstances était le premier responsable cependant ce soir j'éprouve celle du survivant pourquoi elle et pas moi je voudrais pour Julien trouver les mots réconfortants mais voilà Emmanuel installé et ce qu'il dit qui fait sens mais c'est la mort aussi comment on peut faire face justement comment Jack Lang passe en catimini difficile de faire discret il ne me marche pas sur les pieds de toutes façons j'écoute l'auteur et rien du reste et pose une question maladroite dans l'espoir qui fut satisfait que le journaliste enchaîne sur une autre qui me préoccupait mais que j'étais peu capable de poser avec ma peur d'être indiscrète le livre que j'écrirais je te demanderai ton avis tu ne répondras sans doute pas seulement si tu dis non je respecterai vois-tu je ne t'en veux pas Bon sang mais Ilaria, pourquoi j'aimerais en cet instant parler à un ami mais il habite trop loin s'il était à Paris je lui téléphonerai je peux passer si tu as un peu de temps et on tenterait de se consoler de toute cette dureté je lui dirai j'ai écouté Denis il parlait bien tu sais mais c'est fini Emmanuel C. en face j'obtiens un badge de princesse de nos jours les princesses servent à militer n'empêche à Philippe B je dois une fière chandelle ne pas oublier Romain je l'ai croisé avant hier sans pouvoir le retrouver et il est là escorté d'un Talisker ça ne se refuse pas on disait un remontant ou un cordial j'ai bien besoin de ça Jean-Hugues Oppel apprécie qui passait par là Thierry Crifo aussi et Pouy survient qui dédicace l'un montre un vestige de voiture l'autre parle d'un parpaing ou plutôt d'un bloc (de ciment tombé sur lui "comme dans un Tex Avery") ils ont survécu les bougres je suis admirative on évoque les séquelles mais juste à côté là c'est Norman Spinrad je bois un deuxième verre la vie devient comme un rêve si je fais un effort est-ce que Conan Doyle viendra Fred Raynal regarde la couv du bouquin légèrement étonné que je sache qui il est c'est un peu normal son père vient de passer Ilaria bon sang mais qu'est-ce qui s'est passé la vie est en même temps "sombre comme un cauchemar et belle comme un soleil" (Thierry a bien raison) je croise un ancien collègue qui me dit que je fais une drôle de tête il y a un peu de quoi il parle de choses qui me semblent venir d'une vie qui m'était étrangère plus que jamais je m'en sens sauvée comment peuvent-ils supporter de rester j'avais dit aux amis marseillais que je passerai mais voilà Emmanuelle qui reçoit un prix je ne la savais pas à Paris Hippolyte est là après tout pourquoi pas et ce lien certes (très ?) indirect avec toi je prends des photos puisque je suis là (pour ça ?) c'est un instant de grâce quand un prix est mérité j'imagine qu'arrivant de chez elle et d'une journée de cours l'amie qui écrit a plus que moi la sensation de dé-réalité je n'en oublie pas François mais quand plus tard je passerai il ne sera plus là et ça sera trop tard pour passer au Passage (pardon Gilda) Ilaria bon sang mais que s'est-il passé si elle pouvait nous dire que ça n'a rien à voir avec la mafia l'idée absurde m'effleure de lui téléphoner est-ce qu'un téléfonino ça peut capter une fois dans l'au-delà ce n'est pas la peine de me croire guérie tant que dans ces moments où l'on ne sait plus où l'on est c'est vers toi que vont mes pensées l'instant de grâce du prix remis un bonheur à partager ne pas s'enliser dans le sombre Dominique est avec Viviane l'espoir d'un instant de normalité qui me sauve et advient je partage le bon tais le tragique le dépose entre déni et incrédulité hélas qui m'a parlé est fiable et de lui je ne doute pas l'un m'a demandé des conseils en whiskies l'autre en lectures je parle de ce que j'aime c'est un havre des gens celle qui veut payer celle qui cherche de la Chick Litt égarée et l'homme qui ne s'intéresse qu'à Fred ici tout le monde semble habitué s'il la connaissait vraiment il saurait entre deux on parle de livres une fois de plus ils sont les bouées pour ne pas sombrer pourquoi la mort ne fait-elle grève jamais sagesse de partir en même temps que Dominique j'écrirais à ceux que je n'aurais pas retrouvés ce soir la réalité une fiction trop extrême j'ai eu peur d'à nouveau dévisser j'intercepte un taxi nous étions heureuses de nous être retrouvées 8 + 13 je me souviens de Balard en ta compagnie c'était si naturel pourquoi es-tu partie il faut qu'on se retrouve avant qu'il ne soit trop tard si seulement l'alcool m'étourdissait mais il n'a sur moi que peu d'effets une jeune femme si pleine de vitalité ce n'est pas possible pas possible se concentrer sur la lecture à Miromesnil je manque de descendre changer alors que je suis déjà sur la ligne 13 le reste sans encombre à peine arrivée chez moi me jeter sur les moteurs (de recherche) et la confirmation hélas j'envoie un mail à une amie commune il faut bien que quelqu'un se charge de prévenir je suis maladroite mais au moins le choc moins brutal que s'il venait d'ailleurs ne pas s'endormir avant l'amour certains gestes qui sauvent tenir la camarde à distance par ceux ancestraux des vies préludées ne pas répondre avant le sommeil au chaleureux et bon message du matin même ce serait trop tourmenté, puisse l'ami me pardonner. Elle fut pour lui l'ultime pensée avant victoire des rêves.  

[photo : in situ à peine avant]


 

 

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Alain Maximilien

Lundi soir, soudain

Alors que depuis samedi soir j'écume méthodiquement mes carnets de bord anciens dans l'espoir d'y trouver un compte-rendu d'époque du concert qu'Alain Bashung avait donné dans le gymnase absolument pas fait pour ça de ma banlieue éloignée et qui, je le croyais, me l'avait fait connaître, voilà qu'en consultant wikipédia afin de vérifier la date de sortie d'un album bien ultérieur ("Novice" sorti en 1989) que j'avais découvert en décalé et ne savais donc plus situer, je m'aperçois qu'au fond la première fois que j'ai entendu l'artiste sur scène datait de bien avant.

J'étais en 6ème et une de mes cousines que j'adorais et admirais (pourquoi d'ailleurs mets-je cette phrase au passé ?) était venue habiter chez mes parents le temps de se trouver à Paris un logement étudiant. De cette période qui n'avait probablement pas dû durer plus d'un trimestre, je garde un souvenir ébloui. Mes parents n'osaient pas en sa présence se disputer comme à leur ordinaire et c'était pour moi qui vivais dans la peur d'être le prochain prétexte et qu'un jour ça dégénère, une trêve merveilleuse.
M'ayant sentie par ailleurs réceptive et sans doute bien un peu seule, elle avait entrepris de me transmettre ce qu'elle pouvait. Je lui dois les Vallès et les Misérables, d'autres lectures probablement, et quelques sorties miraculeuses que sans elle et son fiancé courageux (1) je n'aurais jamais faites.

L'une d'elle fut "La révolution française" au théâtre Mogador. L'éblouissement fut tel, avec ma soeur et mes parents nous ne sortions que pour le cirque du 1er janvier, un peu de ciné pour enfants et quelques rares concerts classiques, que je me souviens encore de certaines mélodies de cette comédie musicale ("Chouans en avant" et "On m'appelle Charles Gautier"). En revanche du haut de mes 10 ou à peine 11 années, j'avais prêté peu d'attention au nom des interprêtes. Je me souviens seulement que malgré un rôle de méchant (2), Robespierre m'avait semblé sympathique. Je devais probablement assez peu ressentir de compassion spontanée pour les ci-devants (?).

Ma cousine et son amoureux étaient assez critiques quant à la qualité historique du spectacle mais moi qui ignorais, j'avais simplement été bouleversée.

Voilà que 36 ans après, j'apprends que c'était l'air de rien à un peu d'un concert de Bashung que j'avais assisté. Le bougre y tenait le rôle de Maximilien. Pas étonnant que j'aie trouvé le révolutionnaire émouvant malgré les décisions sanguinaires qu'il prenait.

Quand j'avouais avant-hier à un ami qu'Alain Bashung pour moi c'était une longue histoire et sa mort une page de la mienne qui se trouvait aussi tournée, je ne croyais donc pas si bien dire.



(1) devenu son mari et le père de ses enfants, capable de venir en vélo exprès depuis Saint Germain en Laye ce qui tenait de l'exploit et à mes yeux d'enfant constituait une preuve d'amour inébranlable.

(2) Si mes souvenirs sont bons le Charles Gautier beau jeune premier, "fils d'un simple couturier", était amoureux d'une femme de noble extraction et bien entendu les jours de celle-ci se trouvaient révolutionnairement en danger.
Je suppose que tout bien-finissait.


D'un salon au Salon

dimanche, à l'est puis à l'ouest

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Quel beau dimanche et pourtant triste, joyeux et nostalgique de plusieurs temps révolus.

J'aurai en tête toute la journée les musiques du chanteur disparu. Je suis certaine de partager avec toi ce chagrin diffus de ceux qui nous manquent sans qu'on les ait connus de façon personnelle (Et toujours ma petite peur persistante d'apprendre par la presse le décès de bien-aimés, que chaque annonce de ce type ne fait que réactiver).

Une cuisine mythique dans un salon accueillant puis un Salon professionnel dans un hangar certes efficace, mais peu avenant.

J'aurais aimé te croiser mais sans qu'on se soit cherchées. Laissé donc faire le hasard qui n'en a pas voulu. Je suppose, toi non plus.

En revanche il m'a au gré des allées offert de bellesretrouvailles. "Tu connais tout le monde" disent Dominique, Etienne, Philippe, Julien, Chantal (mais pas cette fois, elle n'était pas là), Romain (un autre jour), un autre Julien, un Denis, plusieurs Sylvie, quelques François, mais pas Marc (absent cette année) ... Tant et si bien qu'à force je les croirai.
Je n'ai pas fait exprès, c'est juste arrivé.  Au fil des ans et des affinités.

Rigolardo-admiratif, il constate : - Tes amis ont tendance à devenir des auteurs à files d'attente.
Je finirai par m'imaginer un pouvoir magique (c'est si vrai), ou comme un enchantement.

J'aime quand il y a du monde pour les vrais i.e. ni politiciens ni chanteurs ni sportifs retraités ni célétélébrités. Le succès de certains livres ("Des vents contraires" ou "D'autres vies que la mienne", cette année) n'est pas sans fortement me réconforter. Peut-être qu'on peut ne pas complètement désespérer de l'humanité. Peut-être un peu.

La (re)présentation des amis est un succès, certains mots me restent. Je suis heureuse d'y avoir assisté.

Mes enfants rient avec un livre qui décrit notre chez-nous à si peu de chose près. C'est un ami qui l'a écrit, oui, mais je vous promet, je n'ai pas cafté. Et il n'est jamais venu jusqu'à Clichy même quand ses jours s'y prêtaient.

Voir mon fils heureux au milieu des livres me fait du bien, même s'il lit peu de ceux qui ont des phrases dedans en entier. Je n'ai que ça à transmettre, au fond.




[photo : la belle équipe de Borbotruc sauf le pianiste hélas caché]


Salon du livre, cahier de brouillons (comme un)

jeudi 12 mars au soir, vendredi 13 mars, milieu de journée, Paris, Porte de Versailles

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Ton ombre portée est plus grande là qu'ailleurs. Je pense que tu le sais.

Des retrouvailles qui me rendent heureuses puis encore plus consciente de combien tu peux me (nous ?) manquer. Nous n'avons lui comme moi pas osé t'évoquer. Tu n'en fus que plus présente, d'être ainsi contournée.
Que s'est-il donc passé qui t'ait fait à ce point changer de ce qui semblait bien aller ?

Tant de gens pendus à leur téléphone portable et qui semblent égarés : c'est pourtant simple, le quadrillage est régulier et l'ordre des allées alphabétique dans un sens, numérique dans l'autre. Comment font-ils quand ils jouent aux mots croisés ? (Schadenfreude, petite satisfaction mesquine : constater que les hommes autant que les femmes semblent désemparés par une telle complexité (!)).

Toujours ceux qui par le même outil négocient à voix très haute des détails de contrats tout en arpentant les allées. Supposent-ils qu'on ne les reconnaît ni ne les entend ? Ou est-ce une façon détournée de faire savoir au monde entier ?

François me réserve toujours le meilleur accueil, s'il savait comme ça me fait du bien. Il est si bon d'exister aux yeux de ceux qu'on aime.

Je présente entre eux de mes amis de même métier qui auparavant s'ignoraient. Ceci me fait toujours autant (intérieurement) rigoler. La gosse qui traînait la rue avec les autres va-nu-pieds de son quartier, me regarde goguenarde de 30 ans avant et dit, vaguement moqueuse mais un peu fière aussi : - Tu vois, tu t'en es pas si mal tirée.
Je lui réponds, gênée, - Ce sont mes amis, j'ai pas fait exprès. C'est à force de lire et tu le sais.
Et l'autre à présent triste : - Tu te souviens qu'on m'engueulait parce que je lisais trop, pour à table et le soir, et en vacances parfois aussi ("Prends le soleil ! Va plutôt jouer !"). 
Et comme elle me voit malheureuse d'avoir été si longtemps empêchée, elle ajoute : - Tu as tenu bon, bien joué !
et s'en retourne au siècle dernier. Et si réussir sa vie c'était parvenir à faire place à l'enfant qu'on était, malgré les contraintes, l'argent triomphant, les peines insurmontables et les responsabilités ?


Connaître plusieurs personnes (1) qui savent interroger les auteurs au coeur de leurs travaux et animer des débats en maîtrisant leur sujet, m'a rendu exigeante. Celui qui en présentant quelqu'un dont je connais l'oeuvre parfaitement commet plusieurs erreurs se trouve à mes yeux totalement disqualifié. Pas même capable d'utiliser un moteur de recherche pour vérifier avant d'arriver ?
Un jour j'en attraperais un très nul par la peau du cou, le virerai sans ménagement, prendrai sa place et ferai de la rencontre un moment passionnant. En plus que je pourrai assurer la plupart des traductions. L'impréparation, sauf cas de force majeure, n'est rien qu'un manque de respect pour les invités.

L'auteur mexicain met un point d'honneur à parler français et nous lui en savons gré. Hélas il croit que causer vite permet de masquer les inévitables erreurs qu'il fait, et son accent est trop parfait. Des lycéens à côté de moi et qui (apparemment) connaissent Tex Avery à un moment ne savent plus retenir le fou-rire qui leur vient. Les plus atteints s'éclipsent.
Je crains d'être à mon tour gagnée par leur hilarité (pas très charitable, je sais) et évite de croiser le regard du camarade qui questionne.

Au détour d'une allée, j'entends la voix d'Alain Mabanckou. Le texte qu'il lit, hélas, n'est pas de lui (s'en rendre compte à l'oreille). Mais j'aime sa façon. Alors je reste, ravie.

Dans la file d'attente pour se ravitailler ils parlent de comment virer efficacement un stagiaire qui déplait. Sachant que dans l'édition ils sont souvent gratuits, ou si peu payés, je trouve leur cynisme éhonté. Et si c'est une fille et qu'elle est jolie, vous la gardez ?
Je pense mais je me tais. Discrétion ou lâcheté ?

Au moment de partir je croise un ami, mais qui semble occupé ; attendue tout ailleurs pour causer je dois me hâter. Les jours à venir nous offriront-ils une nouvelle chance de nous revoir plus longuement qu'en s'étant à peine salués ?

 
(1) Pascale Arguedas, Eduardo Castillo, Hubert Artus (liste non exhaustive, mais au moins eux)


[photo : chaussettes mexicaines]


Le tableau blanc

avant-hier ou bien mardi, cuisine


11032009
Stéphanot : - Dis, maman, pourquoi tu as effacé ton tableau ?

moi : - Parce que je commence une nouvelle vie.

Stéphanot : - Et pourquoi tu n'as rien ré-écrit ?

moi : - Parce qu'avant,  j'attends un peu.

Et Stéphanot rit (c'était le but recherché).

Depuis hier soir, je sais que je peux. Ce n'était pas seulement une question matérielle.
J'ai retrouvé un ami d'avant, un de ceux que je croyais avoir perdu par mes tourments. Il n'en était rien ou pas vraiment.
Découvert aussi qu'un de mes amis d'à présent était un grand copain du premier.
Et c'était comme si cet ensemble d'affection croisées et retrouvées enfin m'autorisait.
Car cette nouvelle vie, c'est reprendre enfin le cours de la vraie mienne, libérée qui plus est de ce qui l'entravait.

Reste un mystère. Mais le réduire devient possible, en atténuer l'effet, peut-être un jour, qui sait, le neutraliser. Si la santé m'est donnée, je sais que tranquillement j'y parviendrai.
Je reprends route après qu'il m'ait perdue et quelques rudes tempêtes. Il fait fort beau, quoiqu'un peu froid. Bientôt la chaleur elle aussi reviendra.

[photo de téléfonino : le tableau devenu blanc]


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Quand Libé devient Salut les copains

ce matin

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... j'aime bien.

Mention spéciale à Arno Bertina qui semble avoir particulièrement bossé, bonheur de retrouver Dominique Manotti (alors ça va mieux, ça y est ?) et Marie D. avec Camille C. ensemble sur un même projet.
Sans parler de Philippe au café et de deux Oulipiens confrontés au pire, une blogueuse bien aimée, et la digne personne du coeur transparent.

Et forcément j'oublie quelqu'un.

Dommage qu'ils aient hérité d'une actualité particulièrement sanglante.

PS pour Chiboum : ChEr est passé à l'allemand. Warum denn ?

PS' : Et en plus nous avons depuis hier récupéré notre machine à café qui nous parle italien. Que demander de plus ?

[photo : instantané personnel de cuisine, vite fait]

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