Previous month:
septembre 2007
Next month:
novembre 2007

0 billets

Où Wytejczk réapparaît (mais seulement à l'image)

Ce soir, sur l'internet

Mon ordinateur, prévenant, avait classé le mail dans les "indésirables" le considérant ainsi qu'une bête publicité. Il s'agissait effectivement d'un message d'entreprise, une "newsletter" comme ils disent.

Pas de n'importe quelle boîte. En fait du dernier employeur qu'à Wytejczk j'ai connu. Dans les premiers temps où son absence inexpliquée se faisait sentir, j'avais eu cette idée, sur le mode sait-on jamais, des fois qu'ils annoncent l'ouverture d'une succursale à Copenhague, Beyrouth ou Erevan et que son nom soit cité, ce qui expliquerait du même coup son silence.

C'était j'en conviens relativement stupide, je ne connais aucune ville au monde qui ne soit déjà dûment pourvue de ses propres coursiers locaux bien plus performants sur le terrain que tout étranger fraîchement débarqué. En même temps je savais mon ami, sous ses dehors bonhomme(s?), non dépourvu d'ambition, alors un poste de responsable d'une unité ouverte au loin avec des employés du cru, pourquoi pas.

J'avais ensuite totalement oublié cette inscription dont le résultat de loin en loin avait dû se noyer dans le flux des infos reçues chaque jour.

Pourquoi a-t-il fallu ce soir en rentrant d'un heureux moment où j'ai eu le plaisir allant voir une connaissance qui présentait un travail de retrouver un ami lui-même ami du premier, que je pousse le zèle de consultation de mes messages jusqu'à vérifier les indésirables ? Dieu seul le sait ou peut-être précisément que ça confirme son absence.

J'étais d'humeur productive et soulagée, l'après-midi aussi avait été heureuse, c'était un de ces moments où je me prends à nouveau à croire que la roue peut tourner enfin dans un sens favorable et que je pourrai enfin construire au lieu de passer mon temps à ne pas sombrer.

Non seulement j'ai repêché le message autopromotionnel de l'employeur de l'ami évanoui dans les limbes de la ville, mais je l'ai ouvert et parcouru. J'ai même consulté quelques vidéos, présentées sur le mode, notre force d'action témoigne. Belle idiotie. Le premier à ouvrir le bal était Wyjteczk lui-même, détendu, l'air parfaitement à l'aise devant la caméra, un tantinet trop pour que ça soit naturel, le casque sous le bras, l'oeil pétillant avec un brin de malice mitterrandien (ce petit côté Je-tiens-mon-monde-et-je-m'amuse-bien), plein d'esprit.

Le document n'était pas daté, il était présenté comme récent, quelque chose de l'ordre du "Cet automne nous sommes plus fort que jamais". Son intervention cadrait tout à fait avec le propos. Il  causait avec aisance de l'amitié entre camarades, de leur solidarité des jours de pluie et d'embouteillages, que c'était l'absence de son père qui l'avait (indirectement) conduit à cet emploi, et qu'il avait au fil du temps compris que c'était un métier qui pouvait aussi convenir aux femmes (Ah tiens, j'avais donc fini par le convaincre ?).

Partagée entre le soulagement de le voir si en forme, et un raz-de-marée de questions réactivées concernant sa disparition de ma vie quotidienne, je me demandais si au bout du compte l'amitié entre non-camarades de travail officiel avait un sens pour lui.

J'interrogeais Eugène du regard, et qui semblait avoir suivi attentivement la vidéo, l'extrait était relativement court ; mais il prit sa pause rigide de dragon plastifié qu'il tient quand il souhaite éluder nos demandes et qu'on apprenne (enfin) à faire sans ses avis secourables.

Je sortis du site avant intervention des trois autres collègues de mon ami perdu. Qu'auraient-ils pu m'apprendre ?

De la soirée douce le charme fragile était rompu. Serais-je encore longtemps la seule à ne pas savoir ce qui s'était passé et avait si irrémédiablement éloigné de moi et des miens mon ami coursier ?

M'efforçant de croire à la fraîcheur de l'enregistrement et malgré l'agacement d'Eugène que son immobilité masquait mal ("Pourquoi te soucier de qui pouvait te tuer ?" pensait-il avec son bon sens de dragon domestique), je cherchais consolation dans le fait que mon absent inexplicable au moins se portait bien. Son frère Farid aura 47 ans demain, je songeai soudain à la fête possible dont pour la seconde année j'ignore si elle aura lieu ou non lieu. Etrange et rude vie qui fait et défait les liens entre humains au gré de si mystérieux zéphirs.

C'est parce que mon nez soudain inélégamment se mit à renifler que je pris conscience que j'avais pleuré, sans doute dés la première image où il apparaissait.


Raucherbereit - bientôt à Paris ? -

Stuttgart, ce soir

billet à suivre

Cimg7258_2

Non-fumant sans efforts de même que mon régulier qui ces jours-ci m'accompagnait, je n'ai remarqué à quel point le pays était rauchfrei à moins que rauchlos que lorsque j'ai vu une cliente de l'hôtel cloper devant l'entrée de celui-ci malgré une température extérieure plutôt frisquette.

Je me suis alors souvenue que jusqu'aux chambres mêmes dûment dépourvues de cendrier et équipées de charmant panonceaux pour dire "interdit de fumer", l'hôtel intégralement était non-fumeur. J'espère qu'un jour on ne se mêlera pas non plus, au prétexte qu'en pratiquant ces activités réservées aux adultes on peut attraper et transmettre toutes sortes de maladies nous interdire de baiser dans celles de certains réseaux hôteliers. L'hygiénisme et l'ordre moral on sait quand ça commence mais jamais trop où ça finit.

C'était ensuite samedi soir nous sortions dans un typiquement typique Bierstube servant de la vraie bière vom Fass non filtrée, tout un lot d'habitués au comptoir et qui s'en régalaient. Mais pas l'ombre d'une fumée, pas une once de cendre et aucun cendrier.

Oserais-je dire qu'à l'ambiance, ça manquait un peu ? (quoi que pour ce qui était de la dégustation de bière c'était bien mieux).

Pour autant dans chaque établissement ou presque, les sempiternels distributeurs automatiques de cigarettes et de briquets, le tout à un prix plus décent qu'en France. J'ai même un temps songé à rapporter quelques munitions aux copains concernés et puis comme presque tous voudraient arrêter de, je me suis dis que c'était une fausse bonne idée. J'aimerais de chacun respecter le souhait personnel, sans pousser ni à la consommation ni non plus à l'arrêt, si cette pratique est de bon secours.

Arrive l'heure du départ, le train est là que nous longeons chargés de nos bagages qui seraient légers si je n'avais eu l'idée d'emporter l'ordinateur (1). Soudain je me prends une bouffée surprenante et je le concède fort peu agréable en pleine aspiration d'effort.

Me voilà fort surprise. Ainsi donc alors que fumer semble interdit partout, dans les gares ici on pourrait ?

C'est en prenant un brin de recul que nous avons compris. Au sol un carré délimité de jaune. Une ou deux tables hautes et une sorte de poubelle-cendrier. Au dessus de l'ensemble un panneau bilingue "Raucherbereich" "Smoking aerea".

Comme souvent quand une absurdité visible agrémente la ville, je me pose la question d'un gag, d'une caméra cachée, de quelque chose qui par la dérision expliquerait.

Hélas, ça semblait sérieux et ils n'étaient pas qu'un à s'entasser au centre de cette étrange marelle. Penser que c'est un bel effort de tolérance ? La gare est grande, aller fumer dehors quand un train va partir qui roulera trois heures sans arrêt sans permettre aux voyageurs en accoutumance de pouvoir soulager leur manque, n'est pas évident, cette micro-zone autorisée peut donc les aider.

J'avoue qu'elle était si exigüe que j'ai un peu de mal.

Et que dire de cette limite au sol, qui serait censée, telle une frontière française face au nuage de Tchernobyl empêcher la fumée de traverser ?

Mon envie de sourire devant le ridicule du dispositif n'a pas duré longtemps. Je me suis posée la question de s'il en existait autant en France (sans que j'ai remarqué) ou si nous étions pour l'instant encore préservés d'une rigueur si absurde.

Et puis j'ai pris mon train à l'air frais et climatisé (pressurisé ?) et sans doute pas si sain.

[photo : in situ]

(1) Cela dit, il m'a servi.

 


Perplexité germanisante

Stuttgart, heute

Pa280067 C'est dans un parking de centre ville, au premier étage où l'on peut se garer.

La traduction littérale serait "places de parking de (ou pour) femmes".

Si quelqu'un a une idée de pourquoi c'est, je suis preneuse, humour bienvenu, vraie explication aussi parce que franchement j'aimerais bien comprendre.

(Il y eu un seul passant et comme nous avions besoin d'un tout autre renseignement beaucoup plus terre-à-terre je n'ai pas eu la présence d'esprit ni le vocabulaire assez affuté pour poser la question)

PS : Je me refuse avec la dernière énergie de croire que ce serait parce que les femmes seraient une sorte particulière d' (ou de ? A peine 24 heures dans une autre langue et je perds l'usage de la mienne) handicapés auxquelles il faudrait aussi des places réservées.


Un tourment de quatre-vingt dix ans

Hier soir peu importe où

Pict0003

C'est l'image qui m'a plu. Le petit bonhomme espiègle et le violoncelle plus grand que lui, la mimique expressive du garçon et qui me rappelait Stéphanot au même âge.

Je n'ai même pas regardé le timbre, alors que nous étions pourtant dans un lieu de philatélie et que c'était pour ça que se vendaient vieilles cartes et vieux couriers, non pour leur contenu mais pour la façon dont leur expédition avait été à l'époque acquittée.

J'avais pour ma part sur moi de quoi payer le prix requis, je ne me suis posé aucune autre question. Mon homme attendait non loin plus fatigué qu'impatient, je ne souhaitais pas m'attarder.

Ce n'est qu'ensuite au petit bar à bières (locales) pour habitués où nous avions trouvé refuge contre faim et froid, que j'ai pris le temps de regarder mes trouvailles ; cet achat n'avait pas été isolé.

Certains timbres étaient de toute beauté. Je n'ai aucune idée de leur valeur. Il me suffit qu'ils soient admirables ou de lointains spaciaux ou temporels qui peuvent me faire rêver et ouvrir la porte d'histoires qui voudraient en sortir. C'est mon boulot sur cette planète tant que j'en aurai la santé, écouter les récits cachés, les mettre en mots, parfois en photos, en rêve en films, et permettent qu'ils se transmettent aux autres qui peut-être en sauront l'usage. Je m'en veux chaque jour d'avoir trop tardé à le comprendre.

Au dos de cette photo qui suffisait à mon bonheur, une flamme en Allemand du 30 mars 1917.

Mon coeur se met à battre, je suis l'une des sept descendant(e)s d'un survivant d'alors. Rien de ce qui se rapporte en vieille Europe à ces temps troublés ne me laisse indifférente. Vous comprenez, j'ai failli y rester avant que d'être née.

L'oblitération est allemande mais le texte en français, pimenté de quelques fautes qui me font sourire malgré moi, en 1917 on n'écrivait pas forcément mieux qu'en 2007 contrairement à ce qu'on aime croire.

Je ne souris pas longtemps. Les mots sont brefs, comme de quelqu'un qui n'a pas l'habitude ; quoi que l'écriture soit soignée. Il s'agit d'une dame, sans doute encore jeune et qui adresse à sa "Chère maman" un mot d'inquiétude. Elle est d'elle sans nouvelles depuis un retour et demande "écris-moi un peu".

Je pense aux téléphones à peine inventés, à l'internet pas même imaginé, aux kilomètres rudes à traverser, à la poste seul lien entre les gens loin. Je pense à nos privilèges de gens de maintenant, vous rendez-vous compte, chère Ketty dont je détiens par je ne sais quels étranges transmissions cette part de votre correspondance, pardonnez-moi de m'immiscer, mais voyez-vous votre maman si elle n'a pas répondu, n'avait rien jeté, que j'ai dans ma poche un appareil qui me permet d'appeler du bout du monde qui j'aime, ou si je crains de déranger d'envoyer quelques mots de façon instantanée. Vous rendez-vous compte que je parle ici de votre mot à quelques centaines de personnes qui passeront y lire (ou non) et dont certaines sont au Canada, en Australie, en Nouvelle Zélande ou au Maroc ou en Iran, c'est à dire plutôt loin de la France où je loge normalement ; qu'en ce moment-même je n'y suis d'ailleurs pas mais que pour ce qui est d'ici ça ne change fichtre rien.

Seulement ces privilèges n'ont en rien changé l'humain. Qui ne veut ou ne peut plus donner de nouvelles n'en donne pas, décroche, débranche, se déconnecte, ne rappelle pas. Qui est comme moi n'ose souvent pas (r)appeler de peur d'encombrer, ce qui dans certains cas solidifie bêtement un silence qui n'était que négligent ou sur-occupé.

Etant pour deux personnes en ce moment, inquiète sur leur sort comme vous l'étiez pour votre mère, je partage donc vos tourments, la guerre ouverte en moins (c'est beaucoup), et si j'arrive un peu tard, je tiens à vous dire aujourd'hui en 2007 un jour d'automne quand vous écriviez au printemps, combien je vous comprends. 

[photo : la carte, recto]

Lire la suite "Un tourment de quatre-vingt dix ans" »


Ces cafés parfois où je vais seule (exprès)

billet à suivre, quelques soucis de chargement

Pict0013_4 Ce soir, non loin de la BNF

Il est parfois des événements à fêter ou leur non-survenance, qui sont d'un ordre intime et qu'il convient d'honorer seul(e).

Rescapée mais de peu à ma propre existence, étant parvenue une fois de plus à "sauver les meubles" sur un sol qui l'est, j'éprouvais ce soir ce besoin du frais sauvé.

Le choix du café n'était pas anodin. 3 ans plus tôt presque jours pour jours j'y avais passé l'une des plus belles soirées de ma vie. A l'époque je n'imaginais pas qu'elle n'aurait qu'assez peu de suite, j'étais juste heureuse, soulagée de ce qui constituait le premier moment heureux après un deuil compliqué. Il pleuvait ;  Wytejczk m'avait ce soir là présenté quelques amis. L'une des femmes repartait en vélo, un vrai, les vélibs en ce temps-là n'étaient sans doute pas même conçus, elle nous avait fait admirer l'ingéniosité de son capuchon anti-pluie jaune (le capuchon pas la saucée). J'avais partagé un morceau de Météor avec une toute jeune femme, et un homme séduisant qui descendait à Pyramides et se félicitait de ce nom glorieux.

Auparavant nous avions assisté à une table ronde qui nous avait empli d'intelligences. J'ai vraiment cru ce soir-là qu'elle venait aussi de moi.

Etant aujourd'hui dans le même quartier pour une raison semblable et que je ne regrette pas (1), avec sur les bras une victoire à fêter contre les adversités associées, je suis donc entrée.

Je me souvenais de leur Guinness, à moins que ça ne soit un souvenir superposé d'une visite ultérieure. En revanche j'avais oublié que les lieux étaient non-fumeurs, peut-être tout simplement parce qu'à l'époque ils ne l'étaient pas.

J'ai eu droit à un bol de chips pour agrémenter mon breuvage et au privilège inouï qu'à mon choix exprimé on me propose 25 cl ou bien une pinte. Habituée à ce qu'en tant que femme on me pose d'office une 25 en pareil cas, j'ai dû faire répéter la serveuse aimable. Pour un peu, par gratitude j'aurais pris la pinte.

Mais je ne venais pas me pinter, juste marquer le coup. Penser qu'une période enfin stable s'ouvrait peut-être sous mes pas, reprendre en tête mes chantiers d'écriture, les recaler dans le fil des jours prévisibles en fonction de la nouvelle donne. Penser doucement à une retrouvaille de hasard faite non sans bonheur le midi même, espérer que l'existence m'offre la même opportunité avec mon ami coursier et que sa présence envole les énigmes minantes. Songer surtout aux films que je venais de voir, "On ne sait jamais comment sont les gens quand on n'est pas là" a dit Robert Bober, me rendre compte que ce soir je me retrouvais dans l'esprit précis de deux ans plus tôt quand je savourais 3 jours 2/3 de travail en conditions optimales, que peut-être enfin la force, cette force, allait revenir.

Qui sait si elle n'allait pas précéder de peu la capacité d'aimer.

J'ai fini ma demie-pinte d'un trait, ai payé, ai filé : du travail m'attendait et mon niveau d'exigence s'était en quelques heures singulièrement relevé (2).

(1) merci Emmanuelle, merci mille fois.

(2) Celle de doute n'ayant pas baissé malgré deux messages formidables reçus aujourd'hui, je vais à nouveau rentrer dans une période difficile. Mais différemment.

Chaque chose en son temps. Calmement. Comme s'il me restait l'infinitaire de temps.

Lire la suite "Ces cafés parfois où je vais seule (exprès)" »


Fameuse

Musée des jardins Albert Kahn, Paris, hier

Pa230186

Une volée de scolaire a filé vers les jardins eux-mêmes ; se fait alors dans le musée un silence soudain.

Un couple se rapproche.

Perdue dans mes pensées, je n'ai pas bougé. J'aurais tellement aimé visiter ces lieux en compagnie de Wytejczk ou bien de Stéphanot.

Mais une fois de plus je suis seule, privilégiée qui peut soudain un jour de semaine libre et sans préméditation pousser la porte d'un musée, s'accorder une pause dans le tourbillon tourmenté de sa vie, privilégiée probablement provisoire et surtout solitaire.

L'homme aux cheveux blancs a cette élégance rare de ceux qui leur vie durant n'auront cessé d'entretenir leur corps qui de ce fait jusqu'aux atteintes d'une maladie mortelle leur rendront de bons et loyaux services. En premier lieu celui d'être resté eux-mêmes sinon de rides du moins de silhouette.

La femme qui l'accompagne est du genre bourgeoise qui craint d'en avoir l'air mais aux cheveux constants : la coupe aura été trouvée en accord avec son visage et restera la même au fil de longues années, la couleur variera un peu selon l'humeur de la coiffeuse (attitrée) mais pas un cheveux n'osera grisonner et l'on va si souvent la voir que jamais la longueur à l'oeil n'aura variée.

Moi qui jongle entre les mois à trop pas de temps et ceux à trop pas d'argent et les plus fréquents à trop pas des deux, je sais repérer et apprécier. Machinalement je passe un soupir de main gauche dans ma tignasse qui aurait bien besoin d'un rafraichessement. Peut-être avant le prochain salon dans ma ville adoptive, allez.

Les photos exposées qui n'en sont d'ailleurs pas vraiment puisqu'issues de divers procédés anciens qui parfois tenaient plus de la radiographie représentent des vues de Tunisie, du Maroc ou d'Alger du début du siècle dernier.

Je suis émue de leur témoignage.

L'homme aussi qui est silencieux. Mais sa compagne doit s'extasier :

- Oh regarde, c'est la place ... la place ... la place mais tu sais bien, la fameuse place, à Marrakech, là.

Il sait peut-être bien mais contemple à peine plus loin et se tait. Alors elle insiste :

- Tu sais bien, à Marrakech. Oh mais tu sais, celle qui est super connue, comme Tien An Men à Moscou.

L'homme persiste dans son silence patient. Masquerait-il un rire qui surgirait s'il ouvrait la bouche ?, comme ce risque d'en faire autant que je pressens en moi et qui même si elle m'adressait directement la question m'empêcherait de répondre Jemaa El Fna (et puis vous savez, en fait, Tien An Men, c'est Pékin, à Moscou c'est la Place Rouge).

Ma solitude soudain me satisfait qui me protège de l'hilarité que la présence d'un complice aurait rendue irrépressible.

Et puis je me souviens que j'ignore comme se prononce Guinée Bissau (1) voire serait peu capable de situer ce pays avec précision sur une carte, je pense que mon ami coursier tout polonais qu'il soit saurait, lui. Et puis je pense à lui tout court, son absence inexpliquée, son silence persistant. L'envie de rire de mon prochain aussitôt disparaît.

Je poursuis tranquillement ma visite du musée. Certaines vues sont d'une beauté fragile à couper le souffle. J'en oublie places et Guinée.

[photo : in situ]

(1) Je dois à Matoo à qui je dédie ce billet pour cette raison ainsi qu'une autre, la fin toute fraîche de mon ignorance


Aller écouter lire

de jeudi soir à dimanche (qui viennent) partout en France (et même ailleurs)

Lire en fête

Pict0031 Mon programme idéal (c'est-à-dire si par exemple j'avais le don d'ubiquité et celui de me télétransporter - le premier qui dit transplaner je lui fais avaler le tome 7 - en français - :-) ) :

       

PARIS : Jeudi 18 à partir de 19 heures à La Libreria 89 rue du Faubourg Poissonnière IXème (tél : 01 40 22 06 94) vernissage d'une exposition des oeuvres de Gaia

      

PARIS : Jeudi 18 à 20 heures, à l'auditorium de la Place des Fêtes, un débat entre libraires et auteurs du 19° (arrondissement pas siècle) dont Dominique Manotti.

      

PARIS : Vendredi 19 de 20 à 23 heures à la Maison des Auteurs 7 rue Ballu, IXème, "histoire des larmes" de et avec Anne Vincent-Buffault, voir détails sur la photo ci-contre.

    

PARIS : Vendredi 19 à partir de 19 heures au Centre Wallonie Bruxelles 46 rue Quincampoix, IVème, lecture de contes suivie d'une projection autour du «conte africain en République Démocratique du Congo»par Marie Louise Bibisch Mumbu et Yukalyé

    

PARIS : Vendredi 19 à partir de 21 heures au Centre Wallonie Bruxelles 46 rue Quincampoix, IVème, présentation des éditions l'Estuaire (les seuls livres chez moi bien rangés avec les Oliviers) par Didier Platteau (éditeur) et plusieurs de ses auteurs et illustrateurs (Tardi, Tonino Benacquista, Jean-Bernard Pouy, Joe G. Pinelli Marie Desplechin, Eric Lambé, Chris De Backer, Xavier Hanotte, Claude Renard ... ).

   

CLICHY la GARENNE :  Samedi 20 à 15 heures, médiathèque municipale, 98 rue Martre (juste à la sortie du métro Mairie de Clichy) concert l'heure du crime par Annie Papin accompagnée de son accordéoniste Jacky Descamps (et c'est des bons, je les ai déjà entendus et compte bien leur donner la priorité)

   

METZ :  Samedi 20 à partir de 16 heures à la librairie Geronimo rencontre avec Dominique Manotti.

   

CLICHY la GARENNE :  Samedi 20 à 17 heures 30, médiathèque municipale, 98 rue Martre (juste à la sortie du métro Mairie de Clichy) L'oeuvre de Léo Malet par Jacques Baudou membre de l'OULIPOPO et spécialiste de littérature policière.

   

PARIS :  Samedi 20 à partir de 19 h 30 à La Terrasse de Gutemberg, 9 rue Emilio Castelar, XIIème, vernissage de l'exposition Florence Miailhe, et dédicaces du livre-DVD "Chronique d'ici et d'ailleurs" par Florence Miailhe et Marie Desplechin.

   

PARIS :  Dimanche 21 à partir de 10 h - le samedi aussi -) cimetière du Père Lachaise, flâneries littéraires (tél : 06 30 13 89 94) .

   

Plus particulièrement pour les jeunes :

PARIS :  Samedi 20 à partir de 17 h à La Terrasse de Gutemberg, 9 rue Emilio Castelar, XIIème, Marie Desplechin lecture de ses textes par les jeunes lecteurs dans le cadre d'un atelier puis dialogues (et paraît-il goûter)

      

Tout public toutes générations sauf que quand même ça commence à 20 heures :

CHAUMONT : Vendredi 19 octobre de 20 heures à minuit à La Table des Halles (Café- Restaurant) Passage de la Cloche d'Or - rue Georges Clemenceau (Tél : 06 08 47 24 54)
contes, musique, ateliers d'écriture, lecture à haute-voix avec Claire Ubac et Claire Descamps.

      

[liste non exhaustive, je n'ai pas reçu toutes les infos, mais certaines précisions détails sont sur ce lien  ; je n'ai à priori rien contre les suggestions si je parviens à les lire à temps]


Matin d'hiver avant l'heure

ce matin entre 7 et 8

Pa170003

A mes jours sans prison, j'avais pris le pli de me lever au soleil ou du moins à la lumière.

Nous fermons rarement les volets, les double-rideaux sont cassés, nous vient donc directement la couleur du dehors.

Mais ce matin j'ai traînassé, sans savoir que la pendule tournait : il faisait encore sombre et bleuté. Ce n'est qu'en constatant l'absence totale de bruits dans l'appartement et que donc chacun s'en était allé vers ses lieux de travail respectifs que j'ai pris conscience qu'il était grand temps de regagner le mien, à savoir ma cuisine, ce dernier présentant l'avantage inouï que je peux également y prendre mon petit déjeuner préalable nécessaire à tout effort physique ou non.

Nous étions en automne. Et la lumière dans sa rareté avait franchi un nouveau pallier. J'ai beau être d'un tempéramment matinal, quelque chose d'organique me rend fatiguant de la précéder.

J'aurais dû me hâter pour rattraper le temps perdu. Je n'ai pas su. J'attendais, je crois, le retour de la clarté. Je savourais, "Le Canard" agrémenté d'un croissant et d'un fort café chaud, les lève-tôts de chez moi avaient su me soigner, je profitais du luxe. Quoique l'avenir me réserve, je ressentirais toujours comme tel de n'avoir pas à me soucier de mon premier repas du jour et qu'il existe un journal en papier pour me tenir compagnie.

Je profite sans retenue de ce que notre période plus tard perçue comme transitoire nous permet dés l'aube de lire à la fois les journaux payants même défaillants ou agaçants et des articles éclairants via l'internet, son versant intelligent et (pour l'instant) (encore) libre.

Le  temps qu'ils m'ont occupés j'ai cessé de songer aux absents, ceux qui sont morts, ceux toujours vivants, à la souffrance que crée leur éloignement, au point d'écarter par ricochets quelques mal-comprenants susceptibles.

Le soleil est arrivé, la journée était lancée.

[photo : in situ au même moment]

PS : Je sais que le passage à l'heure d'hiver réduira un temps mon (très léger) tourment de me lever à temps aux jours de liberté.

Lire la suite "Matin d'hiver avant l'heure" »


Le coeur à l'envers

aujourd'hui, au matin puis vers midi

   

Pict0024 

J'avais oublié cette propension que j'ai en période de tracas et surmenages à lâcher les objets qu'un instant plus tôt je tenais entre mes mains, par pur oubli de l'avoir fait.

Je me soupçonne un peu d'aimer tant les livres car d'une chute de ma modeste hauteur le plus souvent ils ne souffrent pas.

Je perds ainsi nombre d'objets silencieux : un gant (noir et long de préférence), un mouchoir, un foulard pas encore noué. Et ce matin une housse-chaussette à téléfonino.

Quelle idée aussi que d'envoyer un texto en courant pour attraper son train car le retard était certain (le mien pas celui du transport en commun) !

J'entrepris donc sur mon temps de pause déjeuner, de retourner sur le lieu où j'achetais tant qu'ils existaient mes carnets Clairefontaine, et où j'avais acquis l'an passé cette sorte de chaussette noire.

Hélas ils n'en faisaient plus que de fantaisie aux couleurs vives, aux effigies de héros de BD ou dessins animés et en noir l'objet existait mais il était gravé de deux coeur enchassés un argenté et un doré.

Ce n'était pas tout à fait ce que je cherchais. Je demandai donc au papetier,

- Il ne vous en resterait pas un en noir tout simple ?

Il me répondit d'un air las mais gentil :

- Non, on n'a plus que des comme ça.

Après un silence durant lequel je songeai à la solution qu'il s'apprêtait à me proposer :

- Remarquez, vous pouvez toujours le retourner.

Se doutait-il quand j'ai payé, à quel point sa proposition reflétait l'état même de mon âme peinée ?

[photo : les accessoires concernés, floutés par mégarde]

Lire la suite "Le coeur à l'envers" »