Mon fils se méfie
Digne fils de sa mère (j'en conçois quelque effroi)

Heurtée

la semaine passée, un soir, plutôt tard, dans le métro (pour changer)

 

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Il était grand et fort.

Pas moi.

Je suivais par hasard de sortie de rame un homme qui tirait avec peine une semblait-il lourde valise à roulettes. Nous venions de descendre et derrière nous les portes sonnaient déjà leur fermeture.

A la fois l'homme aux roulettes a tourné et un type qui voulait monter a surgi soudain où il se tenait.

Déterminé à monter dans cette rame-là et pas la suivante, il m'a giclée comme l'aurait fait un rugbyman d'un élément de l'équipe adverse, le ballon en moins.

Je n'ai rien vu venir, ni rien ressenti sur l'instant, mais deux secondes après, d'un coup encaissé au passage dans les côtes et au sein  gauches, j'ai failli m'effondrer. Une vraie vue de trente six chandelles, presque décomptées.

Par chance à Satin Lazare où je me trouvais et sur cette ligne (la trois) les bancs sont encore larges, en fait une longue bordure plus ou moins marbrée. Je me suis affalée en silence sur la plus proche, tentant de retrouver mon souffle que le choc et la douleur avaient coupés.

Deux femmes qui avaient vu la scène malgré sa brièveté se portèrent à mon secours. Elles traînaient pourtant d'encombrants bagages. Un homme un peu plus loin esquissa un mouvement similaire mais les voyant laissa faire.

Je mis un temps à leur répondre, mais ce n'était plus la voix qui manquait, juste qu'il me fallait au préalable évacuer une phrase à peine lue et qui résumait trop parfaitement l'instant à moins que ce ne fut l'inverse :

" Tout de même leur amabilité me déroute. Il me semble si souvent [...] être une personne faite pour les coups" (1).

Je me dis que si à présent, non contente de panouiller ici ou là sous diverses silhouettes, il fallait que je vive chaque chose que je lisais, j'allais mourir encore plus fréquemment, que ça deviendrait terriblement fatigant (à la longue).

Je parvins enfin à leur dire que C'est gentil mais que ça va aller, que c'était juste que je ne m'y attendais pas.

Elles repartirent alors vers leur train en commentant entre elles, scandalisées, la brutalité du passager pressé.

J'attendis encore un peu que la tête cesse de me tourner et que le sol se stabilise de préférence vers le bas. Puis je rassemblai mes affaires et repris mon chemin parisien.

Je n'avais pas lâché mes livres mais le sac à main si.

(1) Philippe Besson "Se résoudre aux adieux" ed Julliard en haut à gauche de la page 20 

[photo : la même ligne mais un autre jour et dans un autre sens]

 

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