Lendemain de défaite
13 mai 2006
giovedi 13 maggio 1976
"Inutile de dire quel était le le sujet de discution ce matin . St Etienne a perdu sur coup-franc (que certains contestent) mais a "bien" perdu, et a quand même posé un problème au Bayern avec un jeu offensif (plusieurs tir dont 2 aux poteaux "qui n'étaient pas réglementaires", car ils étaient carré et que "s'ils avaient été ronds on aurait gagné" avec des SI on peut bâtir un monde !). Nous en avons un peu parlé en français (60 secondes) et après la leçon sur "lequel" il nous a rendu nôtre devoir d'orthographe-conjugaison : j'ai eu les meilleures notes 19 et 18. En gym, elle nous a noté en saut : j'ai été éliminée au 1er saut : 90 - 85 cm. En histoire, nous avons fait une fiche en groupe (je suis arrivée en retard avec Marie car elle s'est tordue la cheville). A midi je suis rentrée à la maison. J'ai remporté mon magnéto. (1) car Valérie (T.) a enregistré le match et comme en allemand nous allons le résumer (en allemand) elle a pensé que ça serait utile mais je l'ai trimbalé pour rien car ce n'était pas l'avis de Mr Martinet ("Nous n'avons pas le temps ..."). N'empêche que nous avons quand même résumé le match. En sciences (avant l'allemand), nous avons fait l'exposé. Au cour de la journée, j'ai échangé la moitié de mes doubles de foot. En rentrant j'ai fait mes devoirs pour demain. Jean-Mi m'a refilé Robert Herbin (entraîneur de St Etienne (2)) qu'il a trouvé par terre (3). Il ne m'en manque plus que 6 de l'équipe.
il y a grève à la TV."
(1) il s'agissait d'un petit magnétophone à cassettes ; à l'époque les magnétoscopes n'existaient sans doute qu'à l'état de prototypes et en tout cas ne s'étaient pas démocratisés. D'ailleurs chez mes parents la télé resta en noir et blanc avec chaînes que l'on syntonisait à la main jusqu'en 1980. J'étais bonne en réglage des chaînes (heureusement il n'y en avait que 2 ou 3 à l'époque).
(2) je suppose que je précise à l'attention de moi plus tard si jamais j'y suis encore et que je retrouve le diario, pensant sans doute que je ne me souviendrai plus de détails aussi triviaux (ce en quoi je me trompais) ou si j'allais mourir et que quelqu'un qui ne s'intéressait pas au foot le trouverait.
Ce qui est confondant c'est que je m'étais appliquée à rapporter calmement et avec une pointe d'humour les conversations et les points de vue des autres, alors que la brûlure de la défaite après être passés si près, 30 ans plus tard je m'en souviens encore, et d'avoir ravalé difficilement mes larmes (de rage) aussi.
(3) contrairement aux apparences, il s'agissait d'un beau cadeau, même ramassé par terre, même un lendemain de défaite, une image de Robert Herbin valait cher (pas tant que Rocheteau ou Yvan Curkovic, mais n'empêche) sur le marché de la figurine Panini. Il faut savoir que nous avions fort peu d'argent de poche ; je crois bien que nous étions l'un comme l'autre rationné à un et un seul sachet d'images par semaine. Compléter un album était un travail de longue haleine. C'était comme Pif gadget, on l'attendait vraiment.
Ceci est la copie complète de l'extrait pour le 12 mai 1976 du Diario que je tenais alors scrupuleusement jour après jour afin de résister comme je le pouvais au temps qui filait déjà. Mon intention était clairement celle d'un journal de bord comme sur un bateau.
En mai 1976, j'avais donc 12 ans 1/2, étais en classe de 5ème et monsieur Martinet était alors notre prof d'allemand.
J'ai laissé les ratures et l'orthographe d'époque.
Le "il y a grève à la télé" est inscrit verticalement en marge.
Spéciale dédicace à Laurent et Valérie, que j'ai retrouvés récemment grâce à Copains d'avant, et qui étaient comme moi ou sont encore passionnés de foot.
à Jean-Michel aussi, mon ami d'enfance.
Spéciale dédicace également à monsieur Martinet, alors prof d'allemand du CES n°2 de Taverny et qui se donnait tant de mal pour rendre ses cours intéressants (s'adapter ainsi à ce qui faisait l'actualité pour les potaches, et en tirer matière à enseignement, chapeau) en plus que les veilles de vacances scolaires il nous chantait Frédérik Mey à la guitare.
J'ai eu cette chance dans ma banlieue de croiser bien plus d'une fois des profs formidables ; de ceux pour qui ce métier a un sens ; de ceux qui apportent beaucoup aux gosses nés de peu ou pas au bon endroit.
Je suis persuadée qu'il en existe encore (rien que sur la blogosphère j'en connais au moins deux
et sur terre quelques autres
Anne Godard et sa soeur Gabrielle
Dominique Manotti (l'article date légèrement)
(liste non exhaustive et liens que j'ai pu trouver sans avoir trop le temps d'affiner)
:-) ) et même des proviseurs mais qui ne bloguent pas ou qu'on leur a dit en haut lieu qu'ils ne devaient pas ;-) .
PS : Monsieur Martinet n'a pas tout perdu son temps, 28 ans plus tard j'ai pu lire "Der Steppenwolf" en V.O.
comme quoi ...