Le cycliste sonore
Elevée aux contes de fées

French Breakfast

    
Clichy the Garenne, this very morning
   
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Au coeur de mes difficultés, j'appréhende les réveils, l'instant cuisant de la conscience retrouvée et son accès d'extrême solitude. Je tente de m'en secouer en me levant tôt pour accompagner Stéphanot à l'école bien que ma présence, étant donné son âge, ne soit plus nécessaire. Ce n'est pas une contrainte, plutôt un plaisir. Nous devisons tout au long du trajet. Temps partagé où en m'annonçant ce qu'il en attend (un devoir, à recevoir ou à rendre, une excursion scolaire, une séance de sport ...) il se prépare à sa journée active.
         
En chemin de retour j'achète le pain, parfois un croissant, et surtout les journaux, jours fastes un magazine.
       
Ce matin c'était juste Libé. Depuis juin, c'est souvent Libé. Je n'y prends pas tant des nouvelles du monde que de ceux que j'ai aimé côtoyer en travaillant, une rude saison militante et passée.
      
Un nom me rappelle une étreinte heureuse, un souvenir du grand jour, l'euphorie immense du malheur fini. Je revois soudain Wytejczk, à Répu il était là, prévenu par un collègue, mais sans doute déjà loin. Nous avions peu parlé. La fête ne s'y prêtait pas. A l'époque peu m'en chaulait. Je m'attendais à d'autres retrouvailles, des moments ultérieurs amicaux et calmes d'intimité retrouvée.
      
Ils n'eurent jamais lieu.
   
Je revois des embrassades, le champagne qui circule et que je n'attrape pas, comme un premier flottement ; quelqu'un qui débarque et vers qui l'ami file, un pas de côté, le bonheur qui soudain peine à se partager, un regard détourné. Le film m'en revient en lame, me transperce de part en part. Souvenir réel ou reconstruit ?
      
J'écarte le journal et le passe à Eugène. Il n'en demandait pas tant, l'accueille pourtant d'une flamme de contentement joyeux qu'il prend soin de détourner du papier. C'est un dragon prévenant.
      
Je me prépare un café ristretto par goût et désir de compensation envers l'assoupissement chimique qu'induit mon traitement, ouvre en grand la fenêtre que protègent ces barreaux qui enferment et qui sauvent, mesure l'état du ciel.
      
Il fait enfin printemps.
            
Bizarrement mais peut-être pas tant que ça, c'est ce billet de Yû , "Douche écossaise",
qui bien que d'une tonalité tout à fait différente, m'a conduit vers celui-là.
Et puis aussi que le (vrai) pain était chaud et le croissant très bon.

            

Je ne peux pas en jurer, mais je crois bien que l'accès soudain d'anglais me vient des récentes nouvelles de Dangereuse Trilingue, lues hier soir et qui me sont restées (comme quoi elle mérite bien son pseudo formidable :-) ) :

http://dangereusetrilingue.net/english/148/knock-knock-knock-calling-london

Bon vent et bon courage à elle si elle passe par ici.

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