Elevée aux contes de fées
28 mars 2006
Clichy la Garenne, piscine municipale, vestiaires, un matin à l'aube
Alors que je suis en train de glisser délicatement ma longue chevelure rousse dans un bonnet argenté et ajuster ma plantureuse poitrine dans une tenue de bain aussi échancré que le Pacifique sous le Golden Gate Bridge
Alors que je suis en train de passer péniblement un bonnet de bain bien trop serré pour mes oreilles décollées et ma grosse tête aux cheveux pourtant courts, puis lisser mon maillot de bain nageur style 1930 aussi sexy que l'odeur de chlore n'est pas insistante, sur ma silhouette plantureuse et poilue comme celle d'une Jane Birkin descendante d'un moyen Tarzan (1),
j'entends des voix joyeuses. Ce sont deux jeunes femmes qui viennent s'entraîner et accèdent aux vestiaires avant d'aller nager.
Leurs propos d'abord me sont inaudibles, d'autant que l'extrême concentration requise par mon (dés)habillage sportif m'évite d'y prendre garde, mais soudain j'entends ces mots, accompagnés d'un rire :
- Toi, tu as été élevée aux contes de fées !
Je ne sais ni de qui ni de quoi il s'agit, mais je me dis que ça doit donner une fort peu viable vision du monde mâtinée d'un optimisme à toute épreuve, que les princes à particules ont encore de beaux jours devant eux, les sorcières et les grands méchants loups des pommes sur la planche et des mères-grands dans le lit douillet, les sommeils infinis des baisers de retard, et les poisons des antidotes lointains. Ma tentative du mois passé a laissé des traces précises dans un corps au coeur las.
Je souris néanmoins à leur bonne humeur, tente d'en accepter la communication ; finis d'enfiler mon maillot, attrape mes palmes et mon pull-boy, tire la chevillette, fais cherrer la bobinette, et ouvre la porte de la cabine.
Je suis enfin prête à affronter les flots.
En rentrant cependant, j'en parlerai à Eugène. Un nouveau conte viendra.
(1) As-tu vu tendre Vroumette, comme tes leçons me sont profitables ? (note du 28/03/06 11:14 : en espérant que les liens fonctionnent rapidement à nouveau)