Le petit ménage du dimanche matin
27 septembre 2005
dimanche 25 septembre 2005, au matin
Le vieux monsieur et la petite fille ont l'allure tranquille de ceux qui vont au marché. C'est dimanche matin et il n'est pas loin.
Ils cheminent tranquillement, elle lui donne la main et à leurs visages tournés l'un vers l'autre et légèrement mobiles, je devine qu'ils se parlent ;
qu'en d'autre temps, et d'autres lieux, il lui aurait expliqué comment obtenir les plus tendres tomates le long d'un mur de ferme en toute précocité (1).
Soudain ils s'arrêtent. Loin derrière eux, mais sur le même trottoir, je me retiens à grand peine d'en faire autant, puis comprends la cause de cette halte soudaine.
Au 7ème étage de l'immeuble devant lequel ils s'apprêtaient à avancer, quelqu'un secoue énergiquement une carpette poussiéreuse ; sans se soucier le moins du monde d'éventuels passants.
Un autre homme garé un peu plus loin et qui s'apprête à monter dans son véhicule assiste à la scène sans être directement concerné et hoche la tête d'un air désapprobateur.
Mais le vieil monsieur, peut-être grand-père et sa petite-fille ne manifestent aucune impatience. Le tapis disparaît à l'intérieur de l'appartement avec les bras qui le tenaient. L'homme et l'enfant reprennent leur chemin.
Je souris en imaginant que Wytejczk, présent, l'aurait fait. Mais c'est dimanche et il ne travaille pas ce jour-là. J'imagine qu'il prend plaisir alors s'il veut sortir à emprunter le métro au lieu du scooter sur lequel il effectue en semaine tous les trajets qu'on lui réclame.
Je résiste à l'envie de lui téléphoner pour lui raconter la scène. J'ai peur de déranger sans savoir dire ce que ses yeux auraient aimé.
A mon tour sous l'immeuble dont pleut la poussière, je lève les miens pour vérification, puis hâte le pas tant que la voie est libre.
Au bout de la rue, le grand-père et la petite ont tourné vers celle qui mène au marché.
Mon trajet n'est pas le leur. Je suis seule désormais.
(1) "L'albero degli zoccoli" d'Ermanno Olmi, le premier film qui m'a fait comprendre que le cinéma c'était pas juste des histoires qu'on raconte, mais infiniment plus. http://www.imdb.com/title/tt0077138/