Désolée de le présenter ainsi mais il se trouve que je n'ai jamais rencontré de femme qui pratiquait, peut-être parce que les femmes ont le défaussement moins universel et trouveront un prétexte ponctuel plutôt qu'éternel (1). Tandis que chez les hommes, je n'en ai encore croisé aucun que je n'aie surpris au moins une fois en flagrant délit.
Au premier contre-exemple rencontré personnellement, je changerai avec ravissement ma formulation.
La base du syndrome est un ou plusieurs empêchements, le plus répandu étant J'ai trop de travail, je n'ai pas le temps et toutes ses variations Je voulais, mais là vraiment je ne peux pas. Non, vois-tu, le soir, je ne peux jamais quitter avant 19h et celle qui fait le plus de mal, alors qu'un rendez-vous est prévu, souvent de longue date puisque monsieur est très occupé, Finalement ça va pas être possible, j'ai trop de travail, je dois rester.
Parfois il concerne des petites névroses : J'ai trop lu, je ne peux plus lire de romans ; des essais oui, mais plus de romans.
Des empêchements climatiques ou alimentaires : Non, là je ne peux pas y aller il fait trop chaud [alternate take : trop froid]. Ah non les poivrons, je suis allergique, ça a l'air très bon mais je ne peux pas y goûter.
Des incapacités : L'amour, je ne peux plus, j'ai sans doute trop donné. Non, vraiment, voyager, j'ai du mal, et puis surtout Paris, c'est trop difficile pour moi, trop de monde, trop d'immeubles, pas assez de ciel. Ah comme j'aimerais assister à un concert de [nom d'un artiste rare]. Et une fois qu'on s'est procuré les places : Ah oui mais les grandes salles, je ne peux pas, la foule me déclenche des crises d'angoisse.
Et le travail qui s'achevait si tard, par hasard un soir tu t'aperçois qu'il peut y avoir des dérogations, les réunions du mercredi soir, si incontournables quand il s'agissait pour une fois d'aller chercher le petit dernier à son cours de karaté pendant que vous alliez chez le médecin pour l'aînée, se révèlent possibiement facultatives, si la blonde écrit, ses romans sont passionnants, quelle profondeur dans ses personnages, la côte d'Azur en août (Le Cap Nord fin décembre) c'est très supportable, ne crois pas ça, Véronique dont le père était italien fait une peperonata qui est à se damner (et à risquer l'œudème de Quinke ?), on le croise épuisé par une nuit d'amour - lui qui avait les larmes aux yeux en nous expliquant que c'était fini, au point qu'on s'était dit, je me débrouillerai pour le sexe, tant pis je reste avec lui -, et Pardon d'avoir été silencieux quelques jours mais je reviens de New-York, quelle ville ! ; ou un surprenant : Je reviens d'écouter Pink Floyd au Forest National (2) avec [nom d'un nouvel amour], ce n'est plus le groupe que c'était mais ça reste quelque chose (par celui qui se disait agoraphobe).
Je crois que c'est organique, qu'on ne peut pas leur en vouloir.
Le tout c'est d'être prévenue et de pouvoir faire face en guerrières aguerries (3) aux chagrins qu'ils infligent, voire s'attendre à la déconvenue, et déjà prévoir autre chose ... ou avec quelqu'un d'autre.
Afin de terminer sur une note optimiste et équilibrée, je tiens à signaler que ce syndrome peut être amusant à observer dès lors que l'on est pas directement impliquée. Exemple récent :
- Les sports de ballons c'est fini à mon âge. Il y a un temps pour tout.
Suivi quinze jours plus tard par :
- On m'a proposé de jouer dans l'équipe de foot de l'entreprise, ça va me faire du bien de m'y remettre.
(1) Pas ce soir, chéri, j'ai la migraine. Ou J'aime bien les poivrons mais aujourd'hui ça ne me dit rien, vraiment.
(2) Une salle de 8000 places voire un peu plus.
(3) L'expression n'est pas de moi mais de mon amie Anna, qui comprend toujours tout bien avant moi.
PS : J'ai un peu changé le nom d'un plat, le nom d'une ville, le choix d'un sport, le prénom d'une dulcinée, mais les exemples sont tous des vrais.
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