2 - I'm not really good at zippers

Pensées pour Malik Bendjelloul

    FIP passe assez fréquemment des musiques de Sixto Rodriguez, alors nécessairement je pense souvent à lui, celui qui grâce à son film Sugar man était parvenu à le tirer de l'oubli.

Et puis c'est un touite ce soir annonçant l'assassinat de Wayne Lotterie (qui luttait contre la contrebande d'ivoire) qui m'a rappelé qu'au moment de sa mort Malik Bendjelloul travaillait sur ce sujet, du moins la maltraitance de ces grands animaux.

J'ai lu ou relu cet article de Scott Johnson. Et même si je ne connaissais pas le réalisateur j'éprouve toujours autant de peine et d'incrédulité. Je pense que tout le monde peut un jour se suicider, y compris les plus forts, ne serait-ce que par sagesse pour échapper à une fin par maladie inéluctable déclarée, ne pas vouloir finir en boulet pour ses proches, ou par chagrin d'amour lorsque la fin de celui-ci était sans signe avant coureur et qu'on doit faire face à la fois au sevrage et à la stupéfaction. Donc je peux croire que peut-être, d'autant plus que son frère le disait dépressif et que cette maladie peut se révéler ainsi mortelle. Il n'empêche que ce que je ne parviens pas à croire c'est que celui qui s'est montré si attentif aux autres dans son travail choisisse le moyen le plus traumatisant pour un nombre de personnes important : ceux sur le quai du train (du métro ?) et le conducteur de celui-ci. 
Trois ans après je continue à avoir du mal avec ça. 
(mais mon avis n'est pas étayé, je ne le connaissais pas, je ne sais que ce que j'ai pu lire ici ou là)

Je me demande comment ses proches tiennent le coup. S'ils s'en sortent.

Par ici une video d'ITW. 

Le mystère photographique du 1er février (2016)

 

    Le 1er février j'étais chez moi, à un bref rendez-vous d'ordre médical ou assimilé et le soir au cinéma. Je n'ai pas souvenir d'avoir fait quoi que ce soit de très particulier concernant mes photographies, je crois surtout que je rangeais dans l'appartement (et non sur le disque dur). Pour autant la restauration d'images m'a remis plus de 2000 photos à cette date précise dont certaines remonte à des temps reculés. Ainsi celle-ci de mon homme, alors de passage à Paris lorsqu'il faisait son service militaire en tant que VSNE au Burkina Faso. J'habite une chambre de bonne dans le XVIIème arrondissement. Elle date nécessairement d'entre 1986 et 1988. J'ai dû la recharger sur l'ordi que j'avais en 2005 afin d'illustrer un billet du blog Sans nouvelles. Que fait-elle restaurée en date de 11 ans plus tard, alors que trois ordinateurs se sont succédés ?

 

À la même date de sauvegarde je récupère deux autres photos dont je n'ai à ce point souvenir de les avoir prises que je me demande si elles ne proviennent pas d'une autre source - quoi que j'ai beaucoup d'images de skaters j'aime les prendre en suspens, et que justement je reconnais l'endroit - 

. Il y a aussi cette photo de Marie, datant probablement de l'époque de notre rencontre (1999), mais je n'ai aucun souvenir qu'elle eût cette teinte en roux, elle tirait plutôt sur la coloration mèches blondes comme tant de femmes se font,
Tout ça est un peu troublant.

 

Si c'est moi qui ai pris ces images, pourquoi n'en ai-je aucun souvenir, à ce point aucun ?

Si ça n'est pas moi comment se fait-il qu'elles se soient trouvées dans mon répertoire du logiciel iphoto de mon ordinateur, dans lequel je "développe" les photos de mes appareils (1) ? Et ce d'autant plus que par ailleurs j'ai récupéré un ordinateur rechargé pour le reste à l'identique pour tous les fichiers (textes, images, sons) personnels, jusqu'au moindre sous-répertoire. 

Dans les deux cas, pourquoi diable cette date du 1er février 2016 ? (Je n'ai souvenir d'aucun plantage, d'aucune anomalie sur l'ordi), et alors que les autres photos restituées sont en général à une date logique, la vraie ou celle à laquelle j'avais effectué une recherche ou une compilation.

Ma perplexité est d'autant plus grande que les jours suivants portent les photos correspondants à leur bonne date, quelques dizaines par jour, voire beaucoup moins aux jours chargés.

Une chose est certaine, toute photo numérique ou numérisée peut un jour ressurgir, qu'on le veuille ou non. 

Et se retransmettre on ne sait comment.

Cette perplexité me rend d'autant plus admirative du très beau travail accompli par Olivier Hodasava à la mémoire du groupe A3 dans les WC : quand nos propres travaux et souvenirs peuvent nous devenir étrangers, recomposer ceux des autres avec respect, ainsi qu'il l'a fait, est une sorte d'exploit. 

 

 

(1) si je récupère une photo que quelqu'un m'a envoyée elle se retrouve dans le répertoire "Images", normalement. Les captures d'écran, elles, n'ont pas le même suffixe et se retrouvent dans "Bureau" par défaut.

Chagrin rémanent

    Traverser en RER (C) les prétendument Beaux Quartiers me fait me souvenir de cette période déjà balancée tout au loin du travail pour cette chaîne de librairies qui semblait très correcte au début puis, une fois un responsable compétent parti, s'était révélée avoir un mode de fonctionnement entrepreneurial (ce qui est pénible pour quelqu'un qui comme moi supporte mal les hiérarchies artificielles)  et dysfonctionnel (faut-il que le marché de l'emploi soit atone ou que les gens n'aient aucun respect d'eux-mêmes pour rester ; autre possibilité : certains qui acceptent certaines choses sont bien traités, comme je le fus au début sans contrepartie autre que le sérieux et l'efficacité de mon travail, et ce que je trouvais naturel). Sans doute aussi que les jeunes générations ont intégré que dans l'entreprise on devait avoir un comportement stéréotypé, un peu comme si l'on participait à une émission perpétuelle de téléréalité et donc on n'agit pas en étant soi-même mais en faisant ce qu'il faut pour "gagner". Piéger les autres n'est en rien un problème, ça fait partie du jeu. Mentir également. Puisque tout ce qui compte c'est de ouinner. 

Est-ce à cause de ses livres dont je devais supporter la vue ? Est-ce parce que ce fut là que j'ai encaissé les 7 et 8 janvier et traversé ce 9 si particulier - cette alerte qui eut lieu au Troca et dont personne fors quelques touiteurs n'avait parlé, les gens inquiets qui demandaient s'ils pouvaient entrer, et moi sans doute apaisante, parce qu'aussi si durement touchée que plus rien ne pouvait m'atteindre, à moins qu'il ne soit arrivé quelque chose à mes enfants, ou qu'ils ne se trouvent menacés - ? Toujours est-il que cette période reste associé à la rupture d'avec F., si violemment subie alors qu'elle était intervenue à la fin de Livre Sterling. Mais les souvenirs de Livre Sterling sont des souvenirs d'avec lui et heureux - même s'il fit faux-bonds par deux fois pour une dédicace -. Et c'est donc la librairie dans le XVIème arrondissement qui est attachée au chagrin de la perte et du sentiment d'avoir subi une escroquerie affective (en plus de m'être professionnellement laissée exploiter), même si à un moment donné il avait dénié être dans l'amour, puis était revenu, si tendre, si proche, si ressemblant de mots (et de regards) à un homme amoureux, puis reparti puis revenu tout en m'expliquant qu'il m'aimait mais qu'il ne pouvait plus - ce qui rendait enfin son attitude compréhensible -, jusqu'au déni féroce final : il avait trouvé celle qui correspondait à son cahier des charges sexuel (fort peu original d'ailleurs, en gros une crypto-Marilyn, ces genres de femmes trophées avec lesquelles les hommes aiment s'exhiber afin d'exciter la convoitise des autres mâles) et j'étais dûment priée de me mettre à distance, de toutes façons entre nous il n'y avait rien eu et tu m'avais dit que c'était fini, que tu ne pouvais plus (et comme tu étais si souvent malade et vu ton âge, je l'avais cru). 

Tout ça fait qu'au bout du compte j'ai l'impression alors qu'en débutant le travail dans les beaux quartiers je pensais précisément commencer une nouvelle vie et tourner la page, je n'avais fait que plonger plus profond dans le chagrin de la rupture même (1). Et que c'est à présent qu'une nouvelle étape de ma vie, avec un vrai travail dans une vraie librairie (et non pas une chaîne où notre comportement est dicté, ainsi que toutes sortes de contraintes commerciales qui heurtent mon sens du service, mon respect des clients, mon bonheur du métier), va commencer.

Il est plus que temps.

 

(1) À ma décharge le deuil du 7 janvier 2015 et le message inadmissible du 8 n'ont fait qu'aggraver les choses, et grandement.

C'est très étrange trois ans et demi après

Tu ne le connaissais pas personnellement, mais vous vous croisiez. Soirées liées aux livres, de loin en loin. Et puis les gens ont des vies, déménagent, changent de centres d'intérêts, pour ceux qui n'étaient pas à proprement parler des amis, simplement des connaissances sympathiques, avec lesquelles il faisait bon échanger quelques mots à l'occasion d'un rassemblement, de la soirée de fête pour une parution, le temps fait rapidement son œuvre d'éloignement et d'oubli. 

On se dit, tiens, le gars sympa qui était là avec Léo, l'autre fois, comment c'était son nom déjà ?, ça fait un bail qu'il ne vient pas. Parfois tu te le dis et tu poses vraiment la question à quelqu'un de plus proche. Parfois même pas : ta vie est suffisamment intense - même si de l'intensité des difficultés - pour que la pensée reste fugace, c'est lors d'une des soirées où il aurait pu être là, il y a du monde, on te parle, tu es dans une conversation, tu penses à autre chose, tu ne t'attardes pas. Et puis les gens jeunes changent si facilement d'amours et de logements. Peut-être vit-il ailleurs. Peut-être qu'il venait de loin et très exceptionnellement. 

Et puis en parlant d'un camarade commun qui traverse une période terrible, quelqu'un en vient à évoquer celui auquel tu ne songeais plus, dont tu ignorais même le nom de famille, et trois ans et demi après voilà que tu apprends qu'il était mort d'une mort brutale et accidentelle (1), tu apprends même le fin mot de l'histoire et tu sais que désormais tu songeras à lui au moins presque tous les dimanche à l'heure du petit déjeuner. 

 

(1) À la réflexion sans doute que quelqu'un te l'avait dit mais tu n'avais pas fait le lien entre une identité annoncée et le gars que parfois tu croisais. 

La capacité de tes neurones à conserver deux informations concernant en fait le même sujet dans un parallélisme absolu ne cesse de t'étonner. 

May be I look like her

Sur cette photo trouvée en voulant en récupérer une autre afin de répondre au questionnaire de Sacrip'Anne, alors que j'y suis on ne peut plus triste, j'ai l'impression de ressembler à ma grand-mère maternelle. Ou du moins, puisqu'elle est morte en 1944, peu après la libération de la Normandie, et qu'ainsi 19 ans nous ont irrémédiablement séparées, sur une photo entrevue d'elle dans un album que conservait ma tante Marie-Thérèse. Je porte deux pièces d'habillement qui sont des fortunes de rue. Il faisait froid mais j'ai les mains nues. 

Après le 7 janvier le froid m'est devenu indifférent. Je le sens sur ma peau, mais ça ne pénètre plus. Pendant une dizaine de jours le sommeil est resté réduit aux moments où je rentrais dormir.
J'ignore de quelle guerre je suis soudain devenue un soldat. 

Je suis en colère que ces photos prises à notre insu circulent. En même temps elle atteste que je ne suis pas un spectre ni en train de faire un mauvais rêve. Ce moment a eu lieu. J'en fus une figurante. J'ai pleuré.

Où ? Et qui ? Et quand ?

En cherchant tout autre chose je tombe sur cette photo que j'avais prise et que j'avais placée comme bannière pour l'un de mes essais de blogs - j'ai toujours 5 fois plus d'idées que de temps à leur consacrer -. Le truc étrange : il s'agit visiblement de la préparation d'une séance de dédicaces. Je n'en ai plus aucun souvenir. C'est troublant.