Après "Le dernier lapon" c'est un grand plaisir que de retrouver Nina Nansen et Klemet Nango de la police des rennes. Bien sûr le petit bonheur de l'absolue découverte (je ne connaissais pas même l'existence de la police des rennes avant d'avoir lu "Le dernier lapon") est passé. Il laisse place à celui des retrouvailles, de faire plus ample connaissance et que les relations entre les équipiers et d'autres protagonistes se complexifient.
Un éleveur meurt lors d'un passage délicat de la transhumance, le maire de la ville d'Hammerfest subit le même sort non loin et peu après. A mesure que l'enquête avance se pose la question de l'intention ou l'accident. Le fond de l'ambiance étant les luttes d'influence entre éleveurs et compagnies de pétrole et les plongeurs qu'elles emploient. Ceux qui souhaitent que les rennes puissent continuer à migrer selon les pâturages et les saisons. Ceux qui trouvent qu'ils encombrent et empêchent l'économie locale de se développer comme elle devrait. Les positions des uns et des autres se radicalisent lorsqu'il est question de déplacer un rocher sacré qui recueille toujours des offrandes de la part de certains Sami qui même s'ils n'ont plus exactement leurs ancestrales croyances souhaitent respecter certains rituels que leurs aînés leur ont transmis.
Au passage on rencontre des plongeurs, dont Nils Sormi et son binôme Tom Paulsen, de ces hommes qui sont prêts, à force de risques pris en commun et d'avoir leur existence qui souvent dépend des réflexes du collègue, à mourir pour sauver l'autre. On apprend sur l'historique des explorations pétrolifères en mer du Nord et de Barents ; les conditions d'expérimentations des années pionnières et leurs séquelles sur les hommes.
Nina recherchera son père, pour des raisons liées à l'enquête (il fut plongeur en son temps) mais qui la feront grandir - et offrent pour le lecteur les plus belles pages du roman -. Il sera question de l'intransigeance dans laquelle certaines convictions religieuses extrêmes peuvent plonger les gens. D'un orgue magnifique. De photos coquines prises par un vieil oncle (1) et sa compagne chinoise. De cafés qu'on ne peut fréquenter que si on en connaît l'entrée et des dangers des caissons hyperbares planqués dans les flotels.
Et puis surtout il y a la lumière. Qui n'en finit plus - chaque chapitre débute par les heures de lever et coucher de soleil et durées d'ensoleillement avec des 20h44 par exemple - et dont je n'imaginais pas qu'elle puisse être source de mal être (2). Bref on éprouve et on apprend.
Je me suis régalée. Nina et Klemet sont déjà pour moi comme de vieux amis. J'espère que nous sommes à l'orée d'une longue série de romans.
PS : Je pense qu'on peut également savourer la lecture si l'on n'a pas déjà fait leur connaissance. Le roman pour ça est très bien construit et peu donner envie de lire "Le dernier lapon" sans plus tarder.
(1) Nils-Ante, oncle de Klemet, toujours aussi truculent.
(2) L'opus précédent nous plaçait dans la nuit polaire.
[photo personnelle de la couv. que je trouve très belle (la couverture pas ma photo)]
éditions Métailié septembre 2014, avec l'amical secours d'Anne et Béatrice de Pages après pages
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