Je lis ou viens de lire trois livres, très différents, mais pour lesquels quelque chose m'a gênée au point de ne pas me laisser m'en faire une opinion très formée.
Aucun des trois n'est mauvais. Aucun des trois n'est exceptionnel. Les trois présentent des qualités et je suis contente d'y avoir eu accès, alors que si je n'avais pas travaillée comme libraire je ne serai pas allée vers ces lectures.
L'un est un thriller, l'autre se rapproche de la Chick Litt en bien écrit, le troisième se veut être de la blanche mais flirte par passages avec une forme de poésie.
Le thriller traite d'un serial killer de jeunes filles, il a un étrange rapport à la chose sexuelle, est obsessionnel, c'est le personnage ça se conçoit. Le hic c'est que tous les autres personnages semblent peu ou prou soumis à l'obsession du sexe, certes en beaucoup plus sain, ça tombe bien, mais aucun point de vue n'y échappe, y compris celui de la courageuse enquêtrice. Je peux croire que pour certaines femmes le sexe a cette importance là. J'ai quand même un peu de mâle mal.
Le livre apparenté chick litt pose les rapports entre hommes et femmes uniquement en terme de guérilla séductionnelle, c'est épuisant. Est-ce réellement comme ça ? Suis-je à ce point à côté de la plaque moi qui n'ai jamais raisonné de cette façon là ? Chaque geste, chaque détail d'apparence semble intentionnel, tout est soumis à une analyse stratégique. OK le genre veut ça.
Le troisième sous un enrobage affectif affectueux traite de tourisme sexuel, à la façon d'un anti-Houellebecq, en tentant de gommer le sordide. Si, si, il y a de l'attachement et de la tristesse quand on se perd, le lien n'est pas lié qu'à l'argent. La femme a du plaisir. Euh, comment dire, je crois que vous vous êtes fait un joli petit film d'occidental vieillissant qui croit encore présenter un attrait autre que de survie financière pour une jeune personne, majeure, ça tombe bien, qui pourrait avoir été votre fille. C'est sympathique ce désir d'illusion. Ok c'est probablement moins pénible avec vous qu'avec d'autres, plus âgés, lourds, visqueux, répugnants, et vous n'avez pas de pratiques dégradantes, c'est déjà ça. Pour autant, êtes-vous dupes à ce point ?
Certains passages sont excellents qui parlent du deuil et de la vie. Il n'empêche que je reste aussi mal à l'aise qu'avec cet ami et plus tard ce collègue, tous les deux sympathiques aussi, et qui parlaient avec des étoiles dans les yeux de leurs vacances détendantes, une sorte de paradis où de jolies petites femmes exauçaient leurs vœux. Et ils espéraient qu'on comprenne. Au fond je pensais, tu serais donc prêt à me payer pour que je vienne dans ton lit ? Mais là-bas c'est différent, justifiaient-ils. Elle pourrait être ma sœur ton "amie", ou ma cousine. Si elle gagnait bien sa vie autrement, irait-elle avec toi ? Mais tu sais, on s'écrit, ça n'est pas juste une relation de clientèle.
Plus tard, oui bon d'accord j'envoie des mandats (1), on est heureux quand on se revoie. Dieu qu'il est doux d'être un homme riche et blanc.
Ces trois livres me laissent à l'écart, même si j'en ai apprécié certains aspects. J'aimerais tant que le sexe ne soit pas le moteur principal de toute activité ou tous rapports humains, qu'il puisse y avoir autre chose.
Et que des relations sexuelles épanouies soient possibles, mais sur un pied d'égalité et sans mensonges ni faux-semblants. Peut-être que c'était ça, mon illusion à moi : qu'une telle chose soit existât, et qu'aucun des deux ne fût la victime de l'autre par des feintes ou de l'argent.
nb. : Je me rends compte que plus ça va plus, à défaut d'une morale classique, je tends à jauger les situations en terme de : aimerais-je ou pas que mon fils ou ma fille, adultes, soit dans cette situation là. La réponse est non pour aucun (sauf un, l'homme équilibré intelligent et courageux et séduisant qui seconde l'enquêtrice du premier roman) des personnages de ces trois romans là. La gêne vient de là. Il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark.
PS : Ne pas croire pour autant que j'apprécie ou recherche les histoires ou les situations à l'eau de rose, ça ne tend que trop souvent vers le gnangnan et l'abêtissement.
(1) Je suppose que l'argument était destiné à prouvé que ce n'était pas juste sexe contre sous, alors qu'en fait il prouve plus que d'autres le caractère vénal de la relation.
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