Au milieu de la course contre la montre qu'a fini par constituer ma participation aux votes du Prix America Page (deux des romans étaient des pavés quelques peu conséquents et le mois d'août pour moi ne fut pas de tout repos, s'il y eut moins de clients il y eut beaucoup de manuels scolaires), et durant la préparation de la rencontre-dédicace que nous organisons le samedi 24 septembre avec Marie-Hélène Lafon, ce sont glissés deux romans qui m'ont littéralement enchantée.
Ils vont bien ensemble, s'ils sont différents.
Il s'agit de "La magie dans les villes de Frédéric Fiolof (chez Quidam) et de "La salle d'attente" de Tsou Yung-Shan (chez Piranha).
J'ai lu le premier car l'auteur est un ami (et l'éditeur, d'ailleurs mais je l'aurais lu de toutes façons) et le connaissant je m'attendais à quelque chose de chouette. Mais j'ai été fort agréablement surprise qu'il soit à ce point pétant de poésie. Des choses délicates, du quotidien. Vu avec un pas de côté, celui d'un personnage un tantinet déphasé, mais non dépourvu d'une petite famille, qu'il tente de comprendre et qui tente de le comprendre.
Ce décalage du principal personnage est le point commun avec le second roman, lu par opportunité de librairie : je n'en avais pas entendu parler, ou ne m'en souvenais pas (1), ne connais pas l'auteur, ça ne me disais rien, nada. Mais j'ai été celle qui ouvrait le carton de nouveautés dans lequel il est arrivé et j'ai eu ce geste hasardeux de l'ouvrir. J'étais cuite (2). Ce livre a un charme fou. C'est l'histoire d'un Taïwanais, Xu Mingszhang, parti vivre en Allemagne car le travail de son épouse les y menait et qui, une fois quitté (elle était sur une pente de réussite professionnelle ascendante, lui un paisible contemplatif, mal armé pour la frénésie capitaliste), décide d'y rester ou plutôt ne décide pas de repartir. C'est aussi l'histoire de la salle d'attente dans laquelle passent, repassent, poireautent, les immigrés désireux de faire valider leurs permis de séjourner, les employés des services, une jeune artiste chargée d'une exposition temporaire.
Il ne se passe, là aussi, presque rien. Des papiers sont remplis, des démarches vaines, d'autres non. Tout au plus un fait divers - vu comme des spectateurs qui n'en savent guère plus que la confusion du moment, et sa brève violence -, mais ce presque rien en dit très très longs sur nos vie et cette société dans laquelle nous la menons, en Europe, disons.
La traduction du Chinois de Taïwan par Marie Orsini est d'une grande élégance.
Ces deux livres paisibles m'ont fait chaud au cœur.
(1) La saison de présentations successives en mai et juin est si dense qu'il est difficile fors quelques faits marquants de mémoriser tout ce que l'on entend.
(2) "Mon vieux Milou, nous sommes faits"
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