C'était un jour très doux pour commencer l'année.
Je la souhaite d'ailleurs la plus clémente possible aux passants de par ici, même si mes pouvoirs sont assez limités - on a pu le constater -.
Le bonheur était de n'avoir rien de prévu, rien de pressé, de se laisser porter par le repos nécessaire et l'envie (raisonnable, modérée) de bouger.
C'était d'être deux plus tout jeunes pas déjà vieux à être là, vivants - ce sentiments qu'on est beaucoup à avoir en ce début de 2016, qu'en 2015 ça n'est pas passé loin, entre nos santés, la santé mentale défaillante de certains et que d'autres ont armée -, et que les (grands) enfants étaient (semblait-il) tranquillement à la maison.
C'était pour moi de n'avoir mal nul part, pas même de douleur sourde, ni de courbature à cause d'un entraînement, ce qui est assez rare pour mériter d'être savouré.
C'était de n'avoir pas dormi ou très peu dans la journée, alors d'avoir pu lire, écrire, me balader sans avoir à lutter contre le sommeil, négocier avec lui pied à pied de temporaires sursis.
C'était donc une belle balade, en amoureux au froid près (je veux dire celui de la météo qui pousse à marcher d'un bon pas, plus qu'aux confidences et aux effusions), dans la petite ville presque déserte. J'ai compté nous avons croisés 17 personnes en tout et 6 jeunes ou enfants. La plupart des personnes effectuaient une emplette dans un des rares commerces ouverts : une boulangerie pâtisserie et un fleuriste (1), les autres étaient munies de chiens y compris deux des jeunes, deux puis un puis un circulaient à vélo sur l'ancienne voie de chemin de fer que nous avions empruntée à pied.
La plupart des maisons semblaient vides. Malgré une solide grisaille puis la nuit qui s'annonçait peu de lumières allumées. Est-ce que tout le monde regardait dans le noir sa télé ? Pas vu pourtant d'écran bleuté.
Dès lors les passants entrevus ou salués nous permettaient de chasser l'hypothèse fascinante d'une fin du monde à laquelle nous n'aurions pas été conviés.
C'était apprécier le fait de ne pas souffrir du froid, 8°C disait sur le téléphone la météo instantanée et personnalisée, perçus 3°C (le vent était agressif). Presque un an s'est écoulé depuis que ma perception du froid s'est trouvée modifiée et je n'en reviens toujours pas. Je n'imaginais pas combien la vie peut être différente du simple fait d'en souffrir ou pas. Et suis devenue très économe de mon admiration ; avant je prenais tous ceux qui y résistaient bien pour des héros du quotidien et m'en voulais de ma faiblesse, à présent je sais que tout bonnement la plupart des personnes ne ressentent pas de douleur, pas de morsure, pas de glaçons dans leur sang, quand la température est simplement fraîche. Le froid leur fout la paix (et à moi aussi désormais).
C'était se délecter de deux lectures alternées : "Peindre, pêcher & laisser mourir" de Peter Heller traduit par Céline Leroy et le très addictif et régressif, j'y retrouve le bonheur d'enfance que j'avais à dévorer les Agatha Christie de ma maman, "Career of evil" de J.K. Rowling cachée.
C'était échanger des vœux avec la famille, les amis, au fil du jour. Non pas que je croie qu'ils soient d'aucune efficacité, on vient de voir en 2015, ce que ça pouvait donner, mais au moins faire signer, montrer qu'on pensait les uns aux autres et plus encore devant les menaces sérieuses de l'adversité.
C'était manger et boire avec frugalité, ce qui est un plaisir lorsque l'on a le choix.
Et puis le plus grand des petits bonheurs du jour : une douche chaude et longue sous un jet soutenu, luxe peu écologique que je m'accorde rarement, ne serait-ce que par souci de partage, le ballon d'eau chaude de l'appartement étant limité et le jet décevant depuis diverses interventions de successifs plombiers ; et aussi pour gagner du temps. Ça tenait de l'impression de laver le corps de toutes les fatigues que l'âpreté de l'année passée avaient infligées, sortir de là toutes tensions inutiles dénouées, prête à affronter la nouvelle année civile (2) qui promet d'être coriace, inutile de rêver.
Il y aura eu en 2016 au moins un jour doux, celui-là c'est gagné.
(1) Un restaurant était ouvert aussi, sur pas mal d'établissements du genre, ainsi que de cafés. Dont l'un s'excusait.
(2) pour moi : d'aborder le 2ème trimestre de la saison 2015/2016, je ne me suis jamais départie d'un élan de scolarité.
[photo : balade, La Haye du Puits, centre ville, 01/01/16 ; pour la douche, pas de photo (et puis quoi encore ?)]
billet publié dans le cadre des Bonheurs du Jour.
Celui de celle qui a lancé le mouvement.
billet également publié sur Traces et trajets
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